LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis et ci-après annexés :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 25 novembre 2014), que la société civile immobilière Îlot Saint-Joseph (SCI), ayant pour gérant M. X..., a confié à la société BLP Architectes la maîtrise d'oeuvre d'une opération de construction immobilière, moyennant une rémunération forfaitaire, fixée pour chacune des trois tranches de travaux ; que la société BLP architectes a assigné en paiement d'honoraires pour des travaux supplémentaires la société Compagnie mobilière de gestion de participations, venue aux droits de la SCI, qui a demandé le remboursement d'une note d'honoraires déjà réglée pour des travaux supplémentaires ;
Attendu que la société BLP Architectes fait grief à l'arrêt de condamner à restituer à la société Compagnie mobilière de gestion de participations la somme de 29 920,55 euros et de rejeter sa demande en paiement d'une somme de 25 777,70 euros ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'article 2.2.2.3 des conditions générales des contrats de maîtrise d'oeuvre énonçait que, en cas de travaux supplémentaires, le maître d'oeuvre, après établissement de devis, préparait et soumettait à l'approbation du maître d'ouvrage un avenant qui pouvait inclure, d'un commun accord entre les parties, une rémunération complémentaire selon la nature et l'importance des travaux, constaté que les devis adressés aux acquéreurs avaient été majorés au titre de la rémunération du maître d'oeuvre, sans le faire apparaître, et retenu qu'aucun élément du dossier n'établissait que le maître d'ouvrage en avait eu connaissance et que l'architecte ne pouvait soutenir que ces prestations supplémentaires avaient été ratifiées par le maître de l'ouvrage, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit qu'à défaut de convention régissant ces honoraires, la demande de paiement de la société BLP Architectes était dénuée de fondement contractuel et qu'elle devait restituer au maître de l'ouvrage la somme déjà perçue ;
D'ou il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société BLP Architectes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société BLP Architectes, la condamne à payer à la société Compagnie mobilière de gestion de participations la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille seize et signé par lui et Mme Berdeaux, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt ;
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la société BLP Architectes
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société BLP ARCHITECTES à restituer à la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS la somme de 29.920,55 € HT ;
AUX MOTIFS QUE l'absence de fondement contractuel de ces prestations étant démontrée, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS de sa demande reconventionnelle en remboursement de la somme de 29.920,55 € HT correspondant aux travaux supplémentaires facturés le 30 novembre 2004 et réglés par elle ; que cette somme correspond en effet à une première note d'honoraires émise par le maître d'oeuvre au titre des prestations réalisées à la demande des acquéreurs que le maître de l'ouvrage indique avoir réglée à tort compte tenu de la difficulté de comprendre les différents décomptes (arrêt, p. 4 et 5) ;
ALORS QUE les juges sont tenus de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, de sorte qu'ils doivent préciser le fondement juridique de leur décision ; qu'en se bornant, pour condamner la Société BLP ARCHITECTES à rembourser à la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS la somme de 29.920,55 € HT, à retenir que l'absence de fondement contractuel des prestations étant démontrée, cette somme n'était pas due dès lors qu'elle correspondait à une première note d'honoraires émise par le maître d'oeuvre au titre des prestations réalisées à la demande des acquéreurs que le maître de l'ouvrage indiquait avoir réglée à tort compte tenu de la difficulté de comprendre les différents décomptes, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la Cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société BLP ARCHITECTES de sa demande en paiement d'une somme de 25.777,70 € TTC ;
AUX MOTIFS QU'en application de l'article 1793 Code civil, lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté ou convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut demander une augmentation de prix, ni sous le prétexte de l'augmentation de la main-d'oeuvre des matériaux, ni sous celui des changements ou d'augmentation faits sur ce plan, si ces changements ou augmentations n'ont pas été autorisés par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire ; que les trois contrats de maîtrise d'oeuvre signés respectivement pour les trois phases de travaux prévoient une rémunération nette globale et forfaitaire, fixe et non révisable ; que la Société BLP ARCHITECTES réclame paiement d'une somme de 25.777,70 € TTC au titre des travaux supplémentaires réalisés pour le compte des acquéreurs en se fondant sur les conclusions du rapport d'expertise qui observent que ces travaux supplémentaires ont donné lieu de la part de l'architecte à un travail effectif et que le protocole mis en place pour la conduite de ces travaux, a certainement reçu l'approbation du maître d'ouvrage ; qu'elle ajoute que ces honoraires ont été recouvrés directement auprès des acquéreurs par le maître de l'ouvrage et que la Cour d'appel de REIMS, en appel de l'ordonnance de référé-expertise, s'est d'ailleurs prononcée sur le caractère distinct de ces travaux par rapport au marché de base ; que, pour s'opposer au paiement, la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS soutient principalement que les travaux réalisés pour le compte des acquéreurs sont de la nature même d'une vente en l'état futur d'achèvement ; qu'à titre subsidiaire, elle fait valoir qu'il s'agit de travaux supplémentaires qui n'ont donné lieu à aucune autorisation du maître de l'ouvrage qui ne les a pas ratifiés davantage ; que, de plus, elle observe que si elle a effectivement facturé ces travaux réalisés pour le compte des acquéreurs, elle ignorait que le maître d'oeuvre avait facturé des honoraires sur ceuxci, le décompte de ceux-ci annexé aux factures ne lui étant pas communiqué ; que si l'expert conclut à la réalité des prestations réalisées par la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS pour le compte des acquéreurs, cette question n'est pas discutée, le débat portant sur le fondement contractuel de ces prestations ; qu'il ne peut être soutenu que les travaux objet du présent litige étaient inclus dans le marché de base ; qu'en effet, il résulte d'une lettre à l'en-tête de la FINANCIERE HAUSSMAN GESTION adressée à Monsieur et Madame Y... le 4 mai 2004 que les travaux modificatifs envisagés par les acquéreurs n'étaient pas inclus dans les prestations de base et qu'ils n'entraient pas dans le cadre du contrat de vente ; que ce courrier précise ainsi que ces travaux feraient l'objet d'une facturation distincte avant la livraison de l'appartement ; que cependant, l'article 2.2.2.3 des conditions générales relatives aux trois contrats de maîtrise d'oeuvre réglemente les travaux modificatifs ou supplémentaires ; qu'ainsi, il stipule que pour les éventuels travaux modificatifs supplémentaires demandés par le maître de l'ouvrage ou recommandés par les exigences de la commercialisation, le maître d'oeuvre établit les plans et les pièces écrites nécessaires ; que le maître d'oeuvre fait établir à la demande du maître d'ouvrage les devis des travaux nécessaires, et prépare l'avenant correspondant et le soumet pour approbation au maître d'ouvrage après avoir apposé son visa ; que selon la nature et le volume de ses travaux, une rémunération complémentaire pourra être convenue d'un commun accord entre les parties ; qu'or, il n'est justifié d'aucun document contractuel ayant pu faire l'objet des facturations en litige ; que de plus, si une note d'honoraires du 15 septembre 2004 pour un montant de 29.920,55 € hors taxes a été réglée, la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS a marqué son désaccord avec celle-ci ; qu'en effet, par courrier du 2 mai 2009, adressé après réception du décompte global définitif, la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS a réclamé à la Société BLP ARCHITECTES la convention régissant les honoraires consécutifs aux travaux supplémentaires demandés par les acquéreurs ; qu'il ne peut donc être soutenu que, bien que n'ayant pas fait l'objet d'un avenant de régularisation, ces travaux aient été ratifiés par le maître de l'ouvrage ; qu'en outre, certains dossiers individuels des acquéreurs ont été examinés par l'expert judiciaire et communiqués aux présents débats ; qu'ainsi, la pièce n° 15 de l'appelant qui concerne le dossier de Monsieur et Madame Y... permet de comprendre que les honoraires facturés par la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS étaient inclus dans le devis adressé aux acquéreurs ; que par exemple, le devis de l'entreprise figurant dans la cote D mentionne un prix unitaire hors taxes de 60,98 € pour une prise référencée 10/16 A+T ; que le prix de cette même fourniture mentionné dans le devis adressé à Monsieur et Madame Y... rangé dans la cote E est de 70,13 € ; qu'en annexe à ce devis adressé aux acquéreurs figure une récapitulation en colonnes du prix de l'entreprise, de celui proposé aux acquéreurs et de la majoration au titre des honoraires du maître d'oeuvre ; qu'ainsi, toujours pour cette même fourniture, la majoration est de 15 %, soit un delta réclamé au titre des honoraires de 9,15 € ; que le dossier individuel de Monsieur et Madame Z... utilise le même procédé ; que par exemple, sur le devis de la Société PENAUD présent dans la cote D, le prix unitaire de la faïence «flirt» est de 65,55 € HT alors que dans le devis proposé aux acquéreurs (cote E), ce prix passe à 75,38 €, le delta mentionné en page annexe étant au total pour cette fourniture de 244,83 € HT ; que la lecture du dossier individuel WALTER montre que ce procédé était également utilisé pour les moins-values et pouvait également aboutir à un delta d'honoraires de maîtrise d'oeuvre négatif ; que ce procédé permet de ne pas laisser apparaître distinctement ces honoraires, que ce soit en moins ou en plus-value, ce qui démontre que le maître d'oeuvre avait conscience qu'ils ne pouvaient être facturés de manière distincte du prix global et forfaitaire prévu par les trois contrats de maîtrise d'oeuvre ; qu'en effet, si les engagements contractuels autorisaient une telle facturation, aucune raison ne pouvait justifier de ne pas laisser apparaître les honoraires correspondants de manière transparente ; que la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS et Monsieur X... font valoir que la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS n'avait pas connaissance de cette annexe précisant le delta facturé sur les prix unitaires au titre des honoraires du maître d'oeuvre et aucun élément du dossier n'établit que cette société en ait eu connaissance ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la Société BLP ARCHITECTES de sa demande en paiement de ces honoraires (arrêt, p. 4 et 5) ;
ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en retenant, pour débouter la Société BLP ARCHITECTES de sa demande en paiement de la somme de 25.777,70 €TTC à titre d'honoraires pour les prestations supplémentaires commandées par des acquéreurs, qu'il n'était justifié d'aucun document contractuel ayant pu faire l'objet des facturations en litige, sans répondre aux conclusions de la Société BLP ARCHITECTES faisant valoir que ces prestations avaient été facturées par la Société COMPAGNIE MOBILIERE DE GESTION DE PARTICIPATIONS aux acquéreurs qui les avaient commandées, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.