LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 330-1 du code de la consommation alors applicable;
Attendu que la situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes exigibles ou à échoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un premier jugement d'un juge de l'exécution l'ayant déclarée recevable en sa demande de traitement de sa situation financière et d'un deuxième jugement ayant fixé la créance de M. X..., une commission de surendettement des particuliers a recommandé le rééchelonnement des dettes de Mme Y... pendant vingt quatre mois afin de lui permettre de vendre ses biens immobiliers ; que M. X... a contesté ces recommandations devant le juge du tribunal d‘instance ;
Attendu que, pour déclarer recevable Mme Y... en sa demande de traitement de sa situation financière, le jugement relève, par motifs adoptés, que celle-ci n'est manifestement pas en mesure de faire face à son passif exigible, au vu de ses revenus et de son actif immédiatement mobilisable ;
Qu'en se bornant à apprécier la situation de la débitrice au vu du seul actif immédiatement mobilisable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier septembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui avait déclaré Mme Y... recevable à la procédure de traitement du surendettement des particuliers ;
AUX MOTIFS propres QUE « les parties reprennent les moyens déjà développés devant le premier juge qui y a pertinemment répondu par des motifs très complets, exacts en fait et pertinents en droit que la cour adopte ; qu 'en effet, le premier juge a parfaitement apprécié d'une part, les conditions de recevabilité de la demande, Mme Y... étant, de par sa qualité de conjoint de chef d'exploitation, éligible à la procédure de surendettement, et sa bonne foi devant être retenue, d'autre part, l'absence de toute circonstance justifiant d'une déchéance du bénéfice de la procédure, et enfin la situation de surendettement de Mme Y..., que les mesures préconisées au vu des ressources et des charges de Mme Y..., avec un « reste à vivre » de 1.000€, qui lui laissent une capacité mensuelle de remboursement de 150€ doivent donc s'appliquer ; qu 'en conséquence le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions » ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE « aux termes de l'article L. 330-1 du code de la consommation, la situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ; que conformément aux dispositions de l'article L. 332-2 du même code, le juge peut vérifier, même d'office, la validité des créances, des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées et s'assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation définir à l'article L. 331-2 ; que la bonne foi et la situation de surendettement du débiteur s'apprécient au jour où le juge statue ; que Monsieur X... est donc en droit de demander le réexamen de ces points, quand bien même ceux-ci ont déjà fait l'objet d'une précédente décision ; sur l'éligibilité de Madame Y... à la procédure de traitement du surendettement des particuliers, qu 'en application de l'article L. 330-1 du code de la consommation, la situation de surendettement doit être caractérisée au vu des seules dettes non professionnelles du débiteur ; qu 'en l'espèce, Monsieur X... soutient que sa créance a une nature professionnelle ; qu'il fait valoir pour cela que le contrat de location à l'origine de la dette a été établi au nom des deux époux pour l'exploitation commune de terres agricoles ; qu 'il considère que Madame Y... a elle-même reconnu sa participation à l'activité en utilisant dans des courriers adressés à son conseil la premier personne du pluriel «(« nous avons travaillé, notre compte, notre comptabilité ») ; qu 'il souligne également que Madame Y... perçoit des prestations de retraite «salarié et non salarié démontrant, selon lui, qu'elle participait effectivement à l'activité de son époux ; que cependant il n 'est pas contesté que Madame Y... n 'avait pas la qualité de commerçante, ni aucune autre qualité la rendant éligible aux procédures de liquidation ou redressement judiciaire du code de commerce ; que la seule qualité de cosignataire du contrat de bail ne suffit pas à donner à son égard à la dette une nature professionnelle ; que pour que tel soit le cas, il appartient à Monsieur X... de démontrer que Madame Anne-Marie Z... (nom d'usage Y...) participait effectivement et activement à l'activité professionnelle de son époux au moment de la souscription du contrat de location ; qu'or, Monsieur X... n'apporte pas une telle preuve ; qu'en effet, le courrier de Madame Y... dans lequel elle utilise la première personne du pluriel ne constitue pas la preuve nécessaire, ce pronom étant manifestement utilisé pour parler du couple et non de l'activité professionnelle ; qu 'en outre, Madame Y... produit, comme réclamé par Monsieur X..., un relevé de carrière, lequel ne fait apparaître aucune période d'activité en qualité d'exploitant ; que dès lors, la créance de Monsieur Jean-Christophe X... à l'égard de Madame Anne-Marie Z... (nom d'usage Y...) n 'est pas de nature professionnelle ; sur la bonne foi de Madame Y..., que la bonne foi se présume et qu 'il appartient au créancier ou à la commission de surendettement de faire la preuve de la mauvaise foi du débiteur ; que cette mauvaise foi doit être appréciée in concreto et au moment où le juge statue ; qu 'en l'espèce, par jugement du 20 janvier 2011, le juge de l'exécution statuant en matière de surendettement n'a pas retenu la mauvaise foi de Madame Y... ; que Monsieur X... soutient que cette dernière a aggravé son endettement et fait preuve de mauvaise foi en refusant de régler sa dette ; que cependant, il convient de rappeler que la dette envers Monsieur X... a augmenté de façon considérable du fait du seul cours des intérêts et de leur capitalisation ; qu 'ainsi, les époux Y... puis Madame Y... n 'ont pas réalisé d'acte positif augmentant ladite dette ; qu 'au contraire, les débiteurs ont respecté les délais de paiement accordés par la cour d'appel de Poitiers le 3 octobre 2007 ; que la débitrice justifie également avoir proposé à Monsieur X... de régler, au moins partiellement la dette ; que s'il ne peut être reproché à Monsieur X... de ne pas avoir accepté une remise importante de la dette, il ne peut être reproché aux époux Y..., et aujourd'hui à Madame Y..., d'avoir purement et simplement refusé de payer ; qu'en outre, les deux parties se sont engagées dans des procédures judiciaires multiples et longues n 'ayant abouti que plusieurs années plus tard ; que l'exercice des voies de droits ne peut donc être retenu pour établir une éventuelle mauvaise foi, lesdites procédures n'ayant pas été qualifiées d'abusives par les juridictions saisies ; qu 'enfin, l'absence de vente des biens immobiliers durant le temps de la procédure n 'est pas non plus suffisante pour établir la mauvaise foi, lesdites procédures n'ayant pas été qualifiées d'abusives par les juridictions saisies ; qu'enfin, l'absence de vente des biens immobiliers durant le temps de la procédure n 'est pas non plus suffisante pour établir la mauvaise, foi, Madame Y... démontrant avoir mis en vente ses biens ; qu 'au vu de tous ces éléments, il apparaît que la mauvaise foi n 'est pas établie ; sur la situation de surendettement, que cette situation s'apprécie par comparaison entre l'actif et le passif du débiteur ; qu 'en l'espèce, Monsieur X... ne chiffre pas précisément sa créance ; que cependant, il indique qu'au 20 janvier 2011, elle s'élevait à 1.290.347,75 €; que le seul fait qu'il déclare accepter de cantonner sa créance au montant du patrimoine de Madame Y... sous déduction « de la valeur de ses biens mobiliers et des autres dettes déclarées admissibles dans le cadre de la procédure de traitement du surendettement, si bien que de la sorte il reste à la disposition de Madame Y... l'intégralité de ses biens meubles déclarés et de l'assurance-vie déclarée », outre qu 'il s'agit là d'un artifice grossier, ne suffit pas à exclure la situation de surendettement ; qu 'en effet, Madame Y... n 'est manifestement pas en mesure de faire face immédiatement à son passif exigible, au vu de ses revenus et de son actif immédiatement mobilisable ; qu 'il résulte donc de tous les développements précédents que Madame Anne-Marie Z... (nom d'usage Y...) remplit les conditions pour être déclarée recevable à la procédure de traitement du surendettement des particuliers » ;
1°/ ALORS QUE dans ses écritures d'appel M. X... soutenait que sa créance était établie par deux jugements rendus par le tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon, ce dont il résultait que la dette de Mme Y... présentait un caractère commercial ; qu'à défaut de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du CPC ;
2°/ ALORS QUE dans ses écritures d'appel M. X... soutenait, pièces à l'appui, que Mme Y... avait été déclarée entre janvier 1963 et le 31 décembre 1995 comme NSA, non salariée agricole, conjoint de chef d'exploitation et que cela impliquait que le contrat avait été conclu dans le cadre de son activité professionnelle, de sorte qu'elle ne pouvait pas bénéficier du régime du surendettement ; qu'à défaut de répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a de nouveau méconnu les prescriptions de l'article 455 du CPC ;
3°/ ALORS QUE la situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ; que l'actif du débiteur se compose de l'ensemble de ses biens ; qu'en ne tenant compte, pour apprécier l'actif du débiteur, que de son « actif immédiatement mobilisable », la cour d'appel a violé l'article L. 330-1 du code de la consommation :
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui avait rejeté la déchéance du bénéfice de la procédure ;
AUX MOTIFS propres QUE « les parties reprennent les moyens déjà développés devant le premier juge qui y a pertinemment répondu par des motifs très complets, exacts en fait et pertinents en droit que la cour adopte ; qu 'en effet, le premier juge a parfaitement apprécié d'une part, les conditions de recevabilité de la demande, Mme Y... étant, de par sa qualité de conjoint de chef d'exploitation, éligible à la procédure de surendettement, et sa bonne foi devant être retenue, d'autre part, l'absence de toute circonstance justifiant d'une déchéance du bénéfice de la procédure, et enfin la situation de surendettement de Mme Y..., que les mesures préconisées au vu des ressources et des charges de Mme Y..., avec un « reste à vivre » de 1.0006, qui lui laissent une capacité mensuelle de remboursement de 150€ doivent donc s'appliquer ; qu 'en conséquence le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions » ;
ET AUX MOTIFS adoptés QU'« en l'espèce, Monsieur X... reproche à Madame Y... d'avoir dissimulé une partie de son patrimoine ; que cependant, il résulte des éléments du dossier que les époux Y..., au moment du dépôt du dossier, ont bien déclaré l'ensemble de leurs biens immobiliers et mobiliers, y compris l'épargne bancaire ; qu 'il lui reproche également d'avoir vendu sans autorisation un véhicule CITROEN 2 CV; que néanmoins, ce véhicule datant de 1965, même en très bon état, n 'avait qu 'une valeur très réduite, si bien que sa vente sans autorisation n 'est pas suffisante pour justifier la déchéance ; qu 'il lui reproche enfin d'avoir aggravé son endettement en créant de nouvelles dettes durant la procédure ; que néanmoins, si deux dettes se sont effectivement ajoutées à la créance de Monsieur X..., il ne s'agit pas d'emprunts contractés par la débitrice mais de factures d'avocats liées aux diverses procédures judiciaires ayant opposé les parties ; qu'au vu de tous ces éléments, il convient de rejeter la demande de Monsieur X... » ;
ALORS QU'est déchue du bénéfice des dispositions de traitement du surendettement toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aura procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ; qu'en constatant que Mme Y... avait vendu un véhicule sans autorisation sans en déduire la déchéance du bénéfice de ces dispositions, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 333-2 du code de la consommation.