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29/06/2016 | FRANCE | N°15-81435

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 juin 2016, 15-81435


Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'administration des douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 décembre 2014, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Jean-Marie X..., Mme Lucette Y..., épouse X..., Mme Céline X... et la société Domaine des Cyprés des chefs d'infractions à la réglementation sur l'organisation et l'assainissement du marché du vin ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 1er juin 2016 où étaient présents : M. Guérin, pré

sident, Mme Chaubon, conseiller rapporteur, MM. Soulard, Steinmann, Mme de la...

Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'administration des douanes et droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 décembre 2014, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Jean-Marie X..., Mme Lucette Y..., épouse X..., Mme Céline X... et la société Domaine des Cyprés des chefs d'infractions à la réglementation sur l'organisation et l'assainissement du marché du vin ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 1er juin 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, Mme Chaubon, conseiller rapporteur, MM. Soulard, Steinmann, Mme de la Lance, MM. Germain, Sadot, Mme Zerbib, conseillers de la chambre, Mme Chauchis, conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Gauthier ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CHAUBON, les observations de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, de la société civile professionnelle SEVAUX et MATHONNET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur la recevabilité du pourvoi :
Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que le pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt susvisé a été introduit au nom de l'administration des douanes, le 22 décembre 2014, par Mme Z..., " inspectrice des douanes agissant en qualité d'agent poursuivant en résidence à Bordeaux, 1 quai de la Douane, munie d'un pouvoir " ; qu'un pouvoir est annexé à la déclaration de pourvoi qui émane de la direction régionale des douanes et droits indirects de Poitiers, pôle orientation des contrôles, service du contentieux, plus particulièrement de M. Serge A..., directeur régional des douanes, et qui est signé " pour le directeur régional, par l'adjointe au chef du pôle action économique " par Mme Béatrice B...;
Attendu que ce pourvoi, formé par un agent des douanes muni d'un pouvoir spécial émanant d'un agent chargé du contentieux au sein de la direction régionale territorialement compétente, est recevable ; que la question de la régularité de la délégation de signature consentie à l'agent ayant établi le pouvoir spécial échappe au contrôle du juge pénal ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 238 du livre de procédures fiscales, 28 du Règlement CE n° 1493/ 1999 du 17 mai 1999, des articles 41 I a) i), 43 b), 52, 57 et 65-3 du Règlement CE n° 1623/ 2000 du 25 juillet 2000, et 591et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué, infirmant le jugement entrepris, relaxé les prévenus de la fin de la poursuite et rejeté la demande de l'administration ;
" aux motifs qu'il résulte des dispositions de l'article 28. 1° du règlement communautaire 1493/ 1999 du 17 mai 1999, portant organisation commune du marché vitivinicole, que « les vins issus de raisins de variété, figurant dans le classement pour la même unité administrative, simultanément en tant que variétés à raisins de cuve et en tant que variétés destinées à une autre utilisation, qui dépassent les quantités normalement vinifiées et qui ne sont pas exportés pendant la campagne concernée, sont distillés avant une date à déterminer ; que sauf dérogation, ils ne peuvent circuler qu'à destination de la distillerie » ; que de même, il résulte des dispositions de l'article 52 du règlement communauté 1623/ 2000 du 25 juillet 2000 que « les producteurs soumis à l'obligation de distillation prévue à l'article 28 du règlement 1493/ 1999 satisfont à leur obligation en livrant au plus tard le 15 juillet de la campagne en cause, leurs vins à un distillateur agréé » ; qu'à cet égard, et sur la base de ces deux dispositions réglementaires, il apparaît que les prévenus devaient procéder à la distillation obligatoire de 168 hl 22 litres de vins pour la campagne 2006/ 2007 et de 248 hl 52 l de vin pour la campagne 2007/ 2008, ce qu'au demeurant ils ne contestent pas, et devait procéder à cette distillation obligatoire via un distillateur agréé, ce qu'ils contestent ; qu'il résulte des dispositions de l'article 65-3 du règlement communautaire 10623/ 20000, dont l'objet concerne les dispositions communes aux distillations obligatoires et facultatives, que « les producteurs visés au paragraphe 1 du présent article, disposant eux-mêmes d'installations de distillation et ayant l'intention de procéder à la distillation visée au présent chapitre, présentent pour agrément à l'autorité compétente, avant une date à fixer, une déclaration de livraison à la distillation ci-après dénommée la déclaration » ; qu'il apparaît en l'espèce que des déclarations avant travaux ont été présentées pour agrément, aux services des douanes, le 23 novembre 2006 et le 14 novembre 2007, pour la distillation excédentaire des récoltes 2006 et 2007, par les prévenus en leur qualité de bouilleurs de cru ; qu'ainsi un document dit SV 8 bis a bien été établi le 22 juin 2007 pour la récolte 2006 et un autre document de même nature a bien été établi le 20 juin 2008 pour la récolte 2007, et tous les deux ont été transmis à l'administration des douanes par M. Jean-Marie X... ; que, dès lors, il apparaît que les prévenus se sont conformés aux dispositions de l'article 65-3 du règlement communautaire 1623/ 20000 en procédant eux-mêmes, en leur qualité de producteurs disposant d'installations de distillation et ayant l'intention de procéder à la distillation, à la distillation obligatoire de leurs excédents de vins et en présentant à l'administrations des douanes deux déclarations de livraison à la distillation, telles que prévues par ce même article ; qu'à cet égard, il n'est pas démontré par la partie poursuivante que les prévenus n'avaient pas qualité suffisante pour procéder eux-mêmes, en tant que bouilleur de cru, à la distillation obligatoire de leurs excédents de vin ni que les vins ainsi distillés n'étaient pas conformes aux exigences imposées aux vins issus de la distillation obligatoire ; que le délit de détention de sous produit provenant de la vinification de toute autre transformation du raisin, sans les livrer à la distillation obligatoire, n'est donc pas constitué à la charge des prévenus ;
" alors qu'en toute hypothèse, et à titre subsidiaire, le producteur qui entend distiller ses propres excédents de vins doit établir, non seulement qu'il a déposé une demande d'agrément, mais également qu'il a obtenu l'agrément de l'administration ; que faute de rechercher si tel était le cas en l'espèce, les juges du fond ont, en tout état de cause, privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 28 du règlement CE n° 1493/ 1999 du 17 mai 1999 et 65-3 du règlement CE 1623/ 2000 du 25 juillet 2000 ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'article 28 du règlement CE n° 1493/ 1999 du 17 mai 1999 que les vins produits en excédents issus des quantités normalement vinifiées doivent être distillés par une entreprise tierce agréée et de l'article 65-3 du règlement CE n° 1623/ 2000 du 25 juillet 2000 que, par dérogation, les producteurs qui disposent d'installations de distillation peuvent procéder eux-mêmes à la distillation sous réserve de l'agrément de l'autorité compétente ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Jean-Marie X..., Mme Lucette Y..., épouse X..., Mme Céline X... et la société Domaine des Cyprés ont été cités par l'administration des douanes et droits indirects, devant le tribunal correctionnel, sur la base de deux procès-verbaux de notification d'infractions dressés les 29 juillet 2009 et 31 mai 2011, pour avoir omis de livrer à la distillation obligatoire à un distillateur agréé des quantités de vins issus de cépages à double fin produits en excédent de la quantité normalement vinifiée pour les campagnes 2006-2007 et 2007-2008 ; que le tribunal les a déclarés coupables et les a condamnés par un jugement dont ils ont fait appel ainsi que le ministère public ;
Attendu que, pour relaxer les prévenus, l'arrêt retient qu'ils se sont conformés aux dispositions de l'article 65-3 du règlement communautaire 1623/ 2000 en procédant eux-mêmes à la distillation de leurs excédents de vins et en présentant à l'administration des douanes deux déclarations de livraison à la distillation ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'administration des douanes avait donné son agrément à ces opérations de distillation, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens de cassation proposés :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 décembre 2014, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DÉCLARE irrecevable la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf juin deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 15-81435
Date de la décision : 29/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation et désignation de juridiction
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Boissons - Alcool - Distillation - Règlement européen - Distillation par les producteurs des excédents de vins - Obtention de l'agrément de l'autorité compétente - Nécessité

UNION EUROPEENNE - Règlement (CE) n° 1493/1999 du 17 mai 1999 et n° 1623/2000 du 25 juillet 2000 - Impôts et taxes - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Boissons - Alcool - Distillation - Distillation par les producteurs des excédents de vins - Obtention de l'agrément de l'autorité compétente - Nécessité

Il résulte de l'article 28 du règlement (CE) n° 1493/1999 du 17 mai 1999 que les vins produits en excédents issus des quantités normalement vinifiés doivent être distillés par une entreprise tierce agréée et de l'article 65-3 du règlement (CE) n° 1623/2000 du 25 juillet 2000 que, par dérogation, les producteurs qui disposent d'installations de distillation peuvent procéder eux-mêmes à la distillation sous réserve d'avoir reçu l'agrément de l'autorité compétente. Doit être censuré l'arrêt qui relaxe des prévenus ayant procédé eux-mêmes à la distillation de leurs excédents de vins après avoir présenté à l'administration des douanes deux déclarations de livraison à la distillation sans rechercher si ladite administration avait donné son accord à ces opérations


Références :

article 28 du règlement (CE) n° 1493/1999 du 17 mai 1999

article 65-3 du règlement (CE) n° 1623/2000 du 25 juillet 2000

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 16 décembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 jui. 2016, pourvoi n°15-81435, Bull. crim. criminel 2016, n° 208
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2016, n° 208

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Gauthier
Rapporteur ?: Mme Chaubon
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.81435
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