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29/06/2016 | FRANCE | N°15-21939

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 juin 2016, 15-21939


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 19 mars 2015), que, par acte notarié du 16 octobre 2007, la société Banque Scalbert Dupont - CIN,
aux droits de laquelle vient la société Banque CIC Nord-Ouest (la banque), a consenti un prêt immobilier à M. X... (l'emprunteur) ; que celui-ci a assigné la banque, notamment, pour que soit constatée l'extinction de sa créance pour cause de prescription, en application de l'article L. 137-2 du code de la consomm

ation ;

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 19 mars 2015), que, par acte notarié du 16 octobre 2007, la société Banque Scalbert Dupont - CIN,
aux droits de laquelle vient la société Banque CIC Nord-Ouest (la banque), a consenti un prêt immobilier à M. X... (l'emprunteur) ; que celui-ci a assigné la banque, notamment, pour que soit constatée l'extinction de sa créance pour cause de prescription, en application de l'article L. 137-2 du code de la consommation ;

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande ;

Attendu que, s'il est applicable aux crédits immobiliers, l'article L. 137-2 du code de la consommation concerne uniquement l'action des professionnels pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs ; qu'après avoir retenu, par motifs propres et adoptés, que le prêt souscrit s'inscrivait dans le cadre d'une activité professionnelle, consistant pour l'emprunteur, depuis plusieurs années, à acquérir des immeubles destinés à la location, après rénovation par ses entreprises, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, en a déduit à bon droit que celui-ci ne pouvait, nonobstant la mention, dans l'acte notarié, de certaines dispositions du code de la consommation, dénuées d'effet au regard du texte précité, revendiquer la qualité de consommateur, de sorte qu'il ne pouvait invoquer la prescription biennale ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à verser à la société Banque CIC Nord-Ouest la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. X...

M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir constater la prescription de la créance de la banque en application de l'article L. 137-2 du code de la consommation ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE M. Laurent X... conteste les dispositions ayant refusé de faire application dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation, qui prévoit que l'action des professionnels pour les biens ou services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ; il fait valoir que, s'agissant du financement d'une acquisition à titre privé, il est consommateur et ne perd pas cette qualité au motif qu'il s'agit d'un investissement locatif et qu'il a renouvelé à plusieurs reprises cette opération ; que les premiers juges ont exactement relevé qu'à compter de 1997 M. Laurent X... a procédé à l'acquisition de nombreux immeubles situés dans la région de Coutances, biens qu'il a aménagés en appartements destinés à la location ; qu'il résulte de l'attestation établie par Maître Y..., notaire, le 28 septembre 2006, qu'à cette date, M. Laurent X... était propriétaire de 41 appartements, de trois maisons d'habitation et d'un terrain constructible pour une valeur totale de 2 682 000 euros, l'attestation faisant étalement état d'autres biens qualifiés de « professionnels » sans autre précision ; que l'intimé verse aux débats un extrait Kbis dont il résulte que M. Laurent X... a été immatriculé au registre du commerce à compter du 3 novembre 1999 pour activité de « négoce et livraison de matériaux et tout objet annexe pouvant se rapporter à l'activité. Marchand de biens. Loueurs en meublés » ; qu'il a exercé cette même activité à compter du 22 décembre 2006 sous la forme juridique d'une EURL dont il était l'associé unique ; qu'il n'est pas contesté que, dans le cadre de ces deux entreprises successives, il réalisait des travaux de rénovation dans les immeubles acquis « à titre privé » ou « professionnel » avant de les donner en location ; que les diverses activités qui avaient pour finalité l'obtention de revenus locatifs qui constituaient l'essentiel des ressources de M. Laurent X... ; que l'activité de ce dernier consistant à acquérir des immeubles destinés à la location, financée par des prêts, était exercée à titre professionnel, les modalités juridiques choisies étant nécessairement en rapport avec les avantages fiscaux bénéficiant aux acquéreurs particuliers ; que c'est au vu de ces éléments, à juste titre que les premiers juges ont retenu que M. Laurent X... ne pouvait revendiquer la qualité de consommateur prévue par l'article L. 137-2 du code de la consommation, le choix des parties d'appliquer les articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation relatifs au crédit immobilier étant sans incidence à cet égard ; que la prescription biennale prévue par l'article L. 137-2 du code de la consommation n'est donc pas applicable de sorte que M. Laurent X... est infondé à invoquer la prescription de l'action dont dispose la banque pour recouvrer sa créance ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 137-2 du code de la consommation dispose que l'action des professionnels, pour les biens ou services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ; que si cette disposition est applicable aux crédits immobiliers accordés par des organismes professionnels, elle ne peut jouer que si l'emprunteur revêt la qualité de consommateur ; qu'en l'espèce, il convient de prendre en compte les éléments suivants fournis par les parties : l'attestation de Me Y..., notaire à Cerisy-la-Salle, en date du 28 septembre 2006, qui indique que Laurent X... était propriétaire à cette date d'au moins 50 biens immobiliers, répartis entre des biens privés et professionnels, situés sur les communes de Coutances, Carentan, Periers, Roncey, La Haye du Puits, Montpinchon, Saint Sauveur Lendelin, Lingreville, Cerisy-la-Salle et Savigny ; le fait que le demandeur explique dans ses écritures avoir acquis de nombreux biens immobiliers à compter de 1997 dans le but de percevoir des revenus locatifs après éventuels travaux de rénovation ; que le rapport établi par Monsieur Guy Z..., consultant en gestion financière, en date du 30 août 2007, qui indique que Monsieur X... « a une activité très étendue, puisqu'il exerce aussi bien dans le bâtiment que dans l'acquisition de biens immobiliers (avec travaux) destinés à la location […] à 33 ans, Monsieur Laurent X... a déjà fait preuve d'une grande maturité dans le milieu des affaires, et plus précisément dans l'immobilier locatif, qui est son « dada » puisqu'en parallèle, il a créé depuis 1999 sa propre entreprise de bâtiment qui emploie 6 à 8 personnes et qui se charge de la rénovation des biens acquis […] ; Monsieur Laurent X... est confiant, il exerce dans l'immobilier locatif depuis 10 ans, sa gestion est des plus saines, les baux et locations sont gérés par son épouse, titulaire d'une maîtrise en gestion des entrepris et d'un DESS d'intelligence économique ; l'administratif et la comptabilité sont effectués par une employée très compétente » ; que l'acte de prêt notarié en date du 16 octobre 2007 mentionne la qualité de « commerçant » de Laurent X... et indique que le prêt est consenti pour l'acquisition et la rénovation d'un ensemble immobilier, dont il est constant qu'il est destiné à la location ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, Laurent X... ne peut être considéré comme un « consommateur » au sens de la loi ; l'article L. 137-2 du code de la consommation ne peut pas lui être applicable ; qu'en réponse à l'argumentation soulevée par le demandeur, il convient de relever que l'offre de prêt immobilier annexée à l'acte de prêt notarié en date du 16 octobre 2007 fait référence aux « articles L. 312-2 et suivants du code de la consommation » et non à l'article L. 137-2 du même code ; qu'il ne peut être déduit de ces stipulations que les parties ont entendu volontairement se soumettre à toutes les stipulations du code de la consommation, et notamment de l'article L. 137-2;

1./ ALORS QUE si les prêts destinés notamment à financer les besoins d'une activité professionnelle sont exclus du champ d'application des dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier, rien n'interdit aux parties de soumettre volontairement les opérations qu'elles concluent à ces dispositions qui leur sont alors impérativement applicables dans leur intégralité ; que dès lors, en retenant que M. X..., n'ayant pas la qualité de consommateur, ne pouvait dès lors se prévaloir des dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation, après avoir pourtant constaté que les parties avaient entendu se soumettre volontairement aux dispositions des articles L. 312-1 et suivant du code de la consommation, ce dont il résultait qu'elles avaient volontairement conféré à M. X... la qualité de consommateur et qu'il devait, en conséquence, bénéficier de l'ensemble des dispositions dérogatoires du droit commun résultant de cette qualification, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé, ensemble, les articles L. 312-1et L. 137-2 du code de la consommation ;

2./ ALORS, en tout état de cause, QUE le seul fait qu'un emprunteur exerce une activité professionnelle dans le domaine de l'immobilier n'est pas de nature à exclure sa qualité de consommateur lorsqu'il souscrit un emprunt à titre privé pour réaliser l'acquisition d'un bien immobilier dans le cadre d'une opération de gestion de son patrimoine; que dès lors, en retenant, pour considérer que M. X... ne pouvait revendiquer la qualité de consommateur au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation, qu'il avait une activité professionnelle habituelle consistant à acquérir des biens immobiliers et à les aménager en vue de les donner en location afin d'en tirer un revenu et que cette activité lui procurait la majorité de ses revenus, la cour d'appel, qui a exclu la qualité de consommateur du seul fait que M. X... exerçait une profession en rapport avec l'acquisition et la rénovation d'immeubles, sans pour autant constater qu'il avait effectivement acquis à titre professionnel l'immeuble financé grâce à l'emprunt litigieux, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 137-2 du code de la consommation ;

3./ ALORS QUE la mention de la qualité de commerçant sous la rubrique relative à la profession de l'emprunteur n'est pas de nature à indiquer que l'emprunt est souscrit à titre professionnel ; que dès lors en retenant, pour considérer que M. X... ne pouvait revendiquer la qualité de consommateur au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation, que l'acte de prêt notarié mentionnait sa qualité de commerçant, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a violé cet article ;

4./ ALORS, au demeurant, QUE M. X... exposait, dans ses écritures d'appel (p. 6, § 1.4 et 1.5), que la banque avait elle-même reconnu que le prêt lui avait été octroyé en qualité de particulier en lui indiquant, dans ses courriers des 1er mars et 27 novembre 2010, qu'il était soumis aux dispositions de la loi du 31 décembre 1989 relative aux inscriptions pour incident de paiement caractérisé au Fichier national des Incidents de remboursements des Crédits aux Particuliers (F.I.C.P.), fichier ne concernant que les crédits accordés aux personnes physiques pour des besoins non professionnels ; que dès lors, en s'abstenant de répondre a ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5./ ALORS, en outre, QUE M. X... faisait valoir, dans ses dernières conclusions d'appel (p. 5 et 6 § 1.2), que les revenus qu'il tirait de la location des immeubles composant son patrimoine immobilier personnel étaient déclarés à l'administration fiscale comme des revenus fonciers et non comme des BNC ou des BIC et que l'administration n'avait jamais procédé à une quelconque requalification, circonstances de nature à établir que cette activité de location n'avait pas un caractère professionnel ; que dès lors, s'abstenant de répondre a ce moyen opérant, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile;

6./ ALORS, enfin, QUE seuls les acquéreurs non professionnels peuvent bénéficier des avantages fiscaux réservés aux particuliers ; que dès lors, en retenant, pour considérer que M. X... ne pouvait revendiquer la qualité de consommateur au sens de l'article L. 137-2 du code de la consommation, que son activité consistant à acquérir des immeubles destinés à la location et financés par des prêts, qui constituait l'essentiel de ses ressources, était exercée à titre professionnel, tout en constatant que les modalités juridiques choisies étaient en rapport avec les avantages fiscaux bénéficiant aux acquéreurs particuliers, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article L. 137-2 du code de la consommation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-21939
Date de la décision : 29/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 19 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 jui. 2016, pourvoi n°15-21939


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21939
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