LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 novembre 2014), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 28 janvier 2014, n° 13-10. 172), que M. X..., engagé à compter du 1er janvier 1987 en qualité d'ajusteur par la société Sermo, devenue ARRK Tooling Sermo France, aux droits de laquelle vient la société Shaper-France, a été licencié pour motif économique le 27 avril 2009 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de rejeter sa demande de dommages-intérêts à ce titre, alors, selon le moyen, que la réorganisation d'une entreprise appartenant à un groupe ne constitue un motif de licenciement que si elle est effectuée afin de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, ce qui implique l'existence d'une menace réelle et sérieuse pesant sur la compétitivité ; qu'en se bornant, pour juger que le licenciement du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse, à énoncer que l'employeur, après avoir été largement bénéficiaire en 2008, avait enregistré des résultats déficitaires en 2009 et 2010, que les résultats de la filiale polonaise avaient connu une chute au deuxième trimestre 2009, que la filiale indienne rencontrait des problèmes à raison d'un marché local difficile, que des interrogations se posaient sur l'avenir des filiales brésilienne et chinoise, que le « rapport du président » faisait état de la fragilité du groupe à l'examen des comptes consolidés 2008 ce que confirmait le rapport des commissaires aux comptes sur l'exercice comptable clos le 31 décembre 2009, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'une menace réelle et sérieuse pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Arrk auquel la société Arrk Tooling France appartenait et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a constaté qu'en raison du contexte de crise mondiale affectant le secteur de l'équipement automobile, l'entreprise avait enregistré au cours du premier trimestre 2009 des pertes de plus de 500 000 euros, que sa situation s'était encore dégradée par la suite pour atteindre 847 613 euros courant 2010, que le rapport de l'expert, mandaté par le comité d'entreprise pour procéder à l'audit des comptes annuels pour 2008 et des comptes prévisionnels pour 2009, avait confirmé ces difficultés financières ainsi que celles des filiales étrangères du groupe ; que ces inquiétudes ainsi que la fragilité du groupe dans son ensemble étaient confirmées dans le rapport du président du groupe présenté à l'assemblée générale de juin 2009 et par le rapport des commissaires aux comptes sur l'exercice comptable clos au 31 décembre 2009 ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider que la menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel l'entreprise appartient rendait nécessaire sa réorganisation pour en sauvegarder sa compétitivité ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la seconde branche du moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande tendant à voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement du 27 avril 2009, qui fixe les limites du débat judiciaire, est motivée par un motif économique tiré de la nécessité d'anticiper les conséquences du contexte de crise dans le secteur d'activité de l'entreprise, qui est celui de l'équipement automobile, afin de sauvegarder la compétitivité de celle-ci ; que le licenciement du salarié s'inscrit dans le cadre d'une réduction des effectifs qui concerne sept salariés, afin de réaliser des économies de charges de personnel ; qu'il est constant que la société employeur est membre d'un groupe de dimension internationale ; que la nécessité de la mesure de réduction des effectifs pour la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité doit être appréciée au niveau de ce groupe et pas seulement à celui de l'entreprise française qui employait le salarié ; que si les résultats de cette dernière entreprise avaient enregistré une progression en 2008 avec un résultat net devenu bénéficiaire pour 79. 000 euros, ses pertes dépassaient 500. 000 euros sur les trois premiers mois de l'année 2009 à raison du contexte de crise qui a profondément affecté l'économie mondiale, et particulièrement le secteur automobile, à partir de fin 2008 ; que la situation a continué de se dégrader par la suite avec des pertes atteignant 847. 613 euros en 2010 ; que le rapport du cabinet Syndex mandaté par le comité d'entreprise pour procéder à l'audit des comptes annuels de l'année 2008 et le prévisionnel de l'année 2009 vient confirmer les difficultés financières y compris au niveau des filiales étrangères du groupe puisqu'il est fait état :- d'une chute des résultats de la filiale polonaise au 2ème trimestre 2009, avec un déficit de 500. 000 euros, celle-ci se trouvant confrontée à un concours d'éléments défavorables (dévaluation du Zloty, activité modérée, problèmes de qualité),- des problèmes rencontrés par la filiale indienne à raison d'un marché local difficile,- d'interrogations sur l'avenir des filiales brésilienne et chinoise ; que le « rapport du président » présenté à l'assemblée générale annuelle du 30 juin 2009 fait état de la fragilité du groupe à l'examen des comptes consolidés 2008 justifiant la mesure de réduction des effectifs au sein de l'entité française employeur de M. X... pour sauvegarder la compétitivité de cette entreprise et, par extension, celle de l'ensemble du groupe ; que le rapport des commissaires aux comptes sur l'exercice comptable clos le 31 décembre 2009 vient confirmer cette fragilité du groupe ; que l'employeur justifie, par la production du registre du personnel, n'avoir procédé à aucune embauche autre que des missions d'intérim ; qu'il s'ensuit que le motif économique qui fonde le licenciement du salarié apparaît établi ; que le salarié reproche à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de reclassement prévue à l'article L. 1233-4 du code du travail ; qu'il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a satisfait à cette obligation qui s'analyse en une obligation de moyen ; que l'employeur s'est adressé à la commission paritaire territoriale de l'emploi de la métallurgie de Vendée afin de recenser les besoins de recrutement auprès des entreprises de la métallurgie du département, laquelle lui a répondu le 14 avril 2009 que ce recensement était en cours ; qu'en interne, l'employeur a interrogé, le 7 avril 2009, les deux autres sociétés françaises appartenant au groupe Arrk Europe, à savoir :- la société LCO Protomoule qui a répondu le 20 avril 2009 en indiquant qu'elle ne recrutait pas,- la société Plast Concept qui n'a pu proposer un reclassement sur un poste correspondant au profil professionnel du salarié, l'activité de cette entreprise étant essentiellement celle de bureau d'étude ; qu'au plan international, l'employeur a également procédé à des recherches aux fins de reclassement du salarié puisqu'il a interrogé ses filiales étrangères susceptibles d'offrir des postes compatibles avec son profil professionnel :- la filiale polonaise Sermo Polska qui a répondu négativement le 21 juillet 2010,- la société anglaise Arrk Limited qui a également répondu négativement en précisant qu'elle devait elle-même procéder à 22 licenciements au cours de l'année 2009,- la société allemande Zimmermann qui, dans une attestation du 30 mai 2012, confirme n'avoir pu donner suite à la demande de l'employeur, se trouvant elle-même dans un contexte de restructuration à l'époque avec un plan social touchant 30 % de son effectif ; que l'employeur a pu ne pas interroger ses filiales chinoise et indienne dès lors que les postes qui y sont proposés aux expatriées correspondent à des fonctions de management et d'encadrement nécessitant une parfaite maîtrise de la langue anglaise, ce qui ne correspond pas au profil professionnel du salarié ; qu'il s'ensuit que le licenciement du salarié repose sur une cause réelle et sérieuse, en sorte que sa demande de dommages-intérêts sera rejetée ;
1°) ALORS QUE la réorganisation d'une entreprise appartenant à un groupe ne constitue un motif de licenciement que si elle est effectuée afin de sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, ce qui implique l'existence d'une menace réelle et sérieuse pesant sur la compétitivité ; qu'en se bornant, pour juger que le licenciement de M. X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse, à énoncer que l'employeur, après avoir été largement bénéficiaire en 2008, avait enregistré des résultats déficitaires en 2009 et 2010, que les résultats de la filiale polonaise avaient connu une chute au 2ème trimestre 2009, que la filiale indienne rencontrait des problèmes à raison d'un marché local difficile, que des interrogations se posaient sur l'avenir des filiales brésilienne et chinoise, que le « rapport du président » faisait état de la fragilité du groupe à l'examen des comptes consolidés 2008 ce que confirmait le rapport des commissaires aux comptes sur l'exercice comptable clos le 31 décembre 2009, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'une menace réelle et sérieuse pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe Arrk auquel la société Arrk Tooling France appartenait et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;
2°) ALORS QUE M. X... soutenait, dans ses écritures d'appel (p. 9), que l'employeur ne lui avait formulé aucune proposition de formation lorsqu'en juin 2009, il avait pourtant repris 28 salariés de la société Ermi en liquidation, dont 4 techniciens d'atelier, afin d'assurer son activité usinage de modifications et de mises au point ; qu'en se bornant, pour juger que le licenciement de M. X... était fondé sur une cause réelle et sérieuse, à énoncer que l'employeur, en interne, avait interrogé les deux autres sociétés françaises appartenant au groupe Arrk Europe, qui avaient répondu négativement, la cour d'appel n'a ainsi pas répondu au moyen précité qui était pourtant de nature à établir que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement et a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.