LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 1er avril 1999, M. X..., a été engagé par la société Motorola semi conductors en qualité de « manager M2 conception logiciel » ; que par accord du 1er octobre 2008, le salarié s'est engagé à rester douze mois au service de l'employeur en contrepartie du versement d'une prime dite « restriction cash award » d'un montant de 90 145 dollars ; que le salarié a été licencié pour motif économique le 9 octobre 2009 ; que le 14 octobre 2009, le salarié a informé son employeur qu'il acceptait un congé de reclassement d'une durée de neuf mois ; que contestant notamment l'assiette de calcul de l'indemnité de congé de reclassement le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la monétisation du compte épargne-temps payée au mois d'août 2009 devait être exclue de l'assiette du salaire de référence du revenu garanti, alors, selon le moyen, que l'indemnité perçue au titre du compte épargne temps constitue un élément du salaire de sorte qu'elle doit être prise en compte dans l'assiette de calcul de l'indemnité du congé de reclassement ; en décidant du contraire la cour d'appel a violé les articles R. 1233-32, L. 5422-9 et L. 3153-3 du code du travail ;
Mais attendu que selon l'article R. 1233-32 du code du travail, pendant la période du congé de reclassement excédant la durée du préavis, le salarié bénéficie d'une rémunération mensuelle à la charge de l'employeur dont le montant est au moins égal à 65 % de sa rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9 au titre des douze derniers mois précédant la notification du licenciement ; que les sommes issues de l'utilisation, par le salarié, des droits affectés sur son compte épargne-temps, ne répondent à aucune périodicité de la prestation de travail ou de sa rémunération, puisque, d'une part, le salarié et l'employeur décident librement de l'alimentation de ce compte et, d'autre part, la liquidation du compte épargne-temps ne dépend que des dispositions légales et conventionnelles applicables ; qu'en excluant les sommes issues de la monétisation du compte épargne-temps de l'assiette de calcul de l'indemnité de congé reclassement, la cour d'appel a fait une exacte application de la loi ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais, sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 5422-9 et R. 1233-32 du code du travail ;
Attendu, selon le dernier de ces textes, que pendant la période du congé de reclassement excédant la durée du préavis, le salarié bénéficie d'une rémunération mensuelle à la charge de l'employeur dont le montant est au moins égal à 65 % de sa rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9 au titre des douze derniers mois précédant la notification du licenciement ;
Attendu que pour dire que les primes « restriction Cash Award » payées aux mois d'avril et de mai 2009, devaient être exclues de l'assiette du salaire de référence du revenu garanti l'arrêt retient que ces primes, non soumises à cotisations sociales, correspondent à un bonus de maintien dans l'entreprise d'un montant de 90 415 dollars en contrepartie duquel le salarié s'engage à demeurer dans l'entreprise pendant douze mois (sauf licenciement pour motif économique), qu'elles constituent des gratifications contractuelles, versées en contrepartie de l'engagement du salarié à demeurer au service de l'entreprise pendant un temps déterminé, en l'espèce douze mois, qu'elles ne rémunèrent cependant, aucun travail particulier accompli par le salarié au cours de cette période et procèdent d'une volonté d'accroître la motivation des collaborateurs de l'entreprise dans le contexte d'une politique dite « d'Equity », laquelle correspond à une politique de rétention de la personne, qu'elles n'ont pas une nature salariale ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que ces primes avaient une nature contractuelle, ce dont il résultait qu'elles avaient une nature salariale, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de vérifier si l'indemnité versée par l'employeur s'élevait effectivement à au moins 65 % de la rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions de chômage, en tenant compte des plafonds éventuellement applicables, au titre des douze derniers mois précédant la notification du licenciement, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le montant des primes « restrictions Cash Award » payées à M. X... aux mois d'avril et mai 2009 doit, non pas être inclu, mais être exclu de l'assiette du salaire de référence du revenu garanti et qu'il déboute M. X... de ses demandes à titre de rappel d'indemnité de congé de reclassement, l'arrêt rendu le 4 avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Freescale semiconducteurs France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Freescale semiconducteurs France et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu d'inclure dans l'assiette du calcul du salaire de référence le montant des primes « restrictions cash award » payées à M. X... aux mois d'avril et mai 2009 et d'AVOIR dit n'y avoir lieu d'inclure dans l'assiette du calcul salaire de référence le montant de la gratification exceptionnelle payée à M. X... au mois d'octobre 2009, et donc, hors période de référence ;
AUX MOTIFS QUE « l'assiette des indemnités spécifiques de rupture : l'article 12.8.1 du PSE détermine comme suit le mode de calcul des indemnités de départ: « Le salaire servant de référence est égal à 1/12 du salaire brut des 12 derniers mois complets précédant la date de rupture du contrat de travail ; seront néanmoins exclus de l'assiette de calcul les remboursements de frais professionnels, les avantages en nature, les sommes issues de la participation ou politiques de versement Equity (RSU et stock options) ou leur équivalent en salaire versées pendant cette période » ; les parties divergent en l'espèce sur l'assiette du salaire de référence, l'employeur estimant que les sommes versées au titre des primes « restriction cash award » font partie de la politique de versement d'Equity et doivent donc être exclues de l'assiette du salaire de référence ; il résulte des pièces versées aux débats, et notamment de l'accord signé entre les parties le 1er octobre 2008 , que les primes dites « restriction cash award » correspondant à un bonus de maintien dans l'entreprise d'un montant de 90 415 dollars hors charges, contributions et autres cotisations de sécurité sociale, en contrepartie duquel le salarié s'engage à demeurer dans l'entreprise pendant douze mois (sauf licenciement pour motif économique) ; en application de cet accord, M. X... a perçu, au cours de la période de référence, 5 302,31 euros en mars 2009 et 30 914,41 euros en avril 2009; ces sommes ne sont pas soumises à cotisations de sécurité sociale ; elles constituent des gratifications contractuelles, versées en contrepartie de l'engagement du salarié à demeurer au service de l'entreprise pendant un temps déterminé, en l'espèce douze mois ; elles ne rémunèrent cependant, aucun travail particulier accompli par le salarié au cours de cette période et procèdent d'une volonté d'accroitre la motivation des collaborateurs de l'entreprise dans le contexte d'une politique dite d'Equity, laquelle correspond à une politique de rétention de la personne, se traduisant, lorsque l'entreprise est cotée en bourse, par l'attribution de stocks options, et dans le cas où l'entreprise n'est pas cotée en bourse, par l'attribution de l'équivalent de stocks options en salaire ; en vertu des dispositions de l'article 12.8.1 du PSE, ces sommes doivent être exclues de l'assiette du salaire de référence des douze derniers mois ayant servi au calcul des indemnités de départ ; il y a lieu en conséquence de réformer sur ce point le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse, et d'exclure de l'assiette du calcul de ce salaire de référence le montant des primes « restriction cash award » payées à M. X... aux mois d'avril et mai 2009 ; concernant la prime exceptionnelle d'un montant de 30914,41 euros perçue par M. X... au mois d'octobre 2009, celle-ci n'a pas lieu d'être prise en considération dans l'assiette du salaire de référence, lequel s'entend du salaire brut des 12 derniers mois précédant la date de notification du licenciement, soit le salaire brut des mois d'octobre 2008 à septembre 2009 ;il y a lieu en conséquence de débouter M. X... de son appel incident » (cf. p.3 in fine – p.4, §7) ;
1°/ ALORS QUE, le plan de sauvegarde de l'emploi engage l'employeur qui est tenu par les dispositions qu'il comporte ; qu'en l'espèce, l'article 12.8.1 du plan de sauvegarde de l'emploi relatif au calcul des indemnités de départ prévoit que sont exclues de l'assiette de calcul du salaire de référence « … les sommes issues de la participation ou politiques de versement Equity (RSU et stock-options) ou leur équivalent en salaire versées pendant cette période » ; qu'en considérant, pour juger que les sommes versées au titre de « restriction cash award » perçues par le salarié au cours de son congé de reclassement ne devaient pas être prises en compte dans le calcul du salaire de référence, que ces sommes seraient issues de la politique dite d'Equity quand la disposition précitée énonçait que de telles sommes étaient exclusivement les « RSU » et les « stock-options » et ne visait donc nullement les« restriction cash award », la cour d'appel a méconnu l'article 12.8.1 du plan de sauvegarde de l'emploi, ensemble l'article L.1233-63 du code du travail ;
2°/ALORS QUE, ne donne pas à sa décision une véritable motivation le juge qui procède par voie de simple affirmation sans donner à ses constatations de fait une précision suffisante ; qu'en affirmant péremptoirement que les sommes de 5.302, 31 € et de 30.914, 41 € « ne rémunèrent aucun travail particulier accompli par le salarié au cours de cette période et procèdent d'une volonté d'accroître la motivation des collaborateurs de l'entreprise dans le contexte d'une politique dite d'Equity, laquelle correspond à une politique de rétention de la personne, se traduisant, lorsque l'entreprise est cotée en bourse, par l'attribution de stockoptions, et dans le cas où l'entreprise n'est pas cotée en bourse, par l'attribution de l'équivalent de stocks options en salaire » (cf. arrêt p.4, §4 in fine), sans préciser les éléments de fait et de preuve desquels elle déduisait ces éléments, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ALORS QUE, en énonçant, pour juger que les sommes de 5.302, 31 € et 30.914,41 € perçues au cours de la période de référence ne constituaient pas des salaires, que celles-ci n'étaient pas soumises à cotisations de sécurité sociale quand il ressortait des bulletins de salaire des mois de mars et avril 2009 versés aux débats que lesdites sommes y étaient soumises, la cour d'appel a dénaturé lesdits bulletins en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ALORS QUE, selon l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ; qu'en considérant que les sommes perçues par le salarié au cours de la période de référence retenue pour le calcul de l'indemnité de départ ne devaient pas être prise en compte dans le calcul du salaire de référence car n'étant pas des rémunérations quand elle constatait pourtant que les dites sommes étaient versées en contrepartie de l'engagement du salarié à demeurer dans l'entreprise pendant douze mois et qu'elles constituaient des gratifications contractuelles ce dont il s'évinçait qu'il s'agissait bien de rémunérations, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article susvisé ;
5°/ALORS QUE, selon l'article 12.8.1 du plan de sauvegarde de l'emploi, l'assiette de calcul du salaire de référence retenu pour calculer le montant de l'indemnité de départ correspond à 1/12 du salaire brut des 12 derniers mois complets précédant la date de la rupture du contrat de travail ; que le salaire brut doit inclure l'ensemble des rémunérations afférentes à la période de référence peu important que celles-ci aient été versées postérieurement à cette période du fait de l'employeur ; qu'aussi, en écartant la somme de 30.914,41 € perçue au mois d'octobre 2009 comme postérieure à la période de référence du mois d'octobre 2008 à septembre 2009, quand elle constatait que cette somme correspondait à la moitié de la « restriction cash award » prévue par l'accord du 7 octobre 2008 et était donc afférente à la période de référence, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article susvisé du plan de sauvegarde de l'emploi.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le montant des primes « restrictions cash award » payées à M. X... aux mois d'avril et mai 2009 et la monétisation de son compte épargne temps payée à M. X... au mois d'août 2009 doivent être exclus de l'assiette du salaire de référence du revenu garanti ;
AUX MOTIFS QUE « aux termes de l'article R. 1233-32 du code du travail, pendant la période du congé de reclassement excédant la durée du préavis, le salarié bénéficie d'une rémunération annuelle à la charge de l'employeur. Le montant de cette rémunération est au moins égale à 65% de sa rémunération mensuelle brute moyenne soumise aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9 au titre des douze derniers mois précédant la notification du licenciement ; ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, les primes « restriction cash award » n'ont pas une nature salariale et doivent être exclues du salaire de référence servant au calcul de l'allocation de congé de reclassement ; les parties divergent également sur la question de l'intégration des sommes versées à X... en août 2009, soit 25 350,45 euros, au titre du rachat de son compte épargne temps, l'employeur estimant qu'elles n'entrent pas dans le calcul du salaire de référence servant de base au calcul des indemnités de reclassement ; le dispositif du compte épargne temps est un moyen permettant au salarié de s'absenter et ne revêt que ponctuellement un caractère monétisé, notamment au départ du salarié de l'entreprise ; l'indemnisation des jours de congés issus du compte épargne temps, qui tient lieu de rémunération des congés qui n'ont pu être pris avant le départ du salarié de l'entreprise, a le caractère d'un salaire et se trouve soumise aux cotisations sociales ; nonobstant son caractère salarial, elle ne constitue pas un élément de rémunération habituelle du salarié ; bien que contrepartie de la rupture, cette somme n'est pas la contrepartie du travail de sorte qu'elle ne doit pas être intégrée au salaire de référence pour le calcul de l'indemnité de congé de reclassement. ; le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse doit, dès lors être également réformé en ce qu'il a inclus dans l'assiette du salaire de référence du revenu garanti le montant des primes « restriction cash award » payées à M. X... aux mois d'avril et mai 2009 et l'indemnisation de son compte épargne temps versée au mois d'août 2009 » (cf. p.4 in fine – p.5, §5) ;
1°/ ALORS QUE, d'une part, selon l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ; qu'en considérant que les sommes perçues par le salarié à titre de « restriction cash award » au cours de la période de référence ne devaient pas être prises en compte dans le salaire de référence servant au calcul de l'allocation de congé de reclassement dès lors qu'elles n'avaient pas une nature salariale quand elle constatait pourtant que les dites sommes étaient versées en contrepartie de l'engagement du salarié à demeurer dans l'entreprise pendant douze mois et qu'elles constituaient des gratifications contractuelles ce dont il s'évinçait qu'il s'agissait bien de rémunérations, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article susvisé ;
2°/ ALORS QUE, d'autre part, l'indemnité perçue au titre du compte épargne temps constitue un élément du salaire de sorte qu'elle doit être prise en compte dans l'assiette de calcul de l'indemnité du congé de reclassement ; en décidant du contraire la cour d'appel a violé les articles R.1233-32, L.5422-9 et L. 3153-3 du code du travail.