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16/06/2016 | FRANCE | N°15-18143

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 16 juin 2016, 15-18143


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier et le deuxième moyens, réunis :
Vu l'article L.12-2, devenu L.222-2, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mars 2015), que le transfert de propriété d'un bien appartenant à M. X..., nécessaire à la réalisation d'un projet déclaré d'utilité publique, est intervenu par voie de cession amiable, au profit de la société Marseille Aménagement, aux droits de laquelle vient la commune de Marseille ; que la

société Marseille Aménagement a saisi le juge de l'expropriation en fixation ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier et le deuxième moyens, réunis :
Vu l'article L.12-2, devenu L.222-2, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mars 2015), que le transfert de propriété d'un bien appartenant à M. X..., nécessaire à la réalisation d'un projet déclaré d'utilité publique, est intervenu par voie de cession amiable, au profit de la société Marseille Aménagement, aux droits de laquelle vient la commune de Marseille ; que la société Marseille Aménagement a saisi le juge de l'expropriation en fixation de l'indemnité d'éviction revenant au locataire de ce bien, la société Amanda ; que la société Texel, est intervenue volontairement, en sa qualité de sous-locataire, afin de solliciter une indemnité d'éviction ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société Texel, l'arrêt retient que les dispositions des articles L. 13-2 et R. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ne sont pas applicables, que le propriétaire qui a consenti une cession amiable n'est pas tenu de dénoncer ses locataires, et que l'expropriant n'a pas à leur notifier la cession, qu'il n'est pas établi que la société Marseille Aménagement avait connaissance, lors de la cession amiable, de l'existence d'un contrat de sous-location consenti par la société Amanda à la société Texel, et que la cession a éteint tous les droits de la société Texel, qui ne peut se prévaloir de l'inobservation de ces formalités ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'extinction des droits réels et personnels existant sur le bien cédé ouvre droit à indemnisation des titulaires de ces droits, la cour d'appel, qui a fait produire des effets à une déchéance prévue par des dispositions qu'elle avait déclarées inapplicables, a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le troisième moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Texel, l'arrêt rendu le 5 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la Ville de Marseille aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la ville de Marseille et de la société Amanda ; condamne la ville de Marseille à payer la somme de 3 000 euros à la société Texel ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Amanda et la société Texel
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de la société Texel en paiement d'une indemnité de dépossession,
AUX MOTIFS QUE la société Texel intervient directement en se prévalant d'un droit direct à l'encontre de l'expropriant au motif d'un contrat de sous-location qui la lie à la SARL Amanda concernée par l'indemnité d'éviction ; que selon l'article L 12-2 du Code de l'expropriation, l'ordonnance d'expropriation éteint par ellemême et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés. Il en est de même des cessions amiables consenties après déclaration d'utilité publique ; que le premier juge s'est fondé sur les articles L 13-2 et R 13-15 du Code de l'expropriation pour débouter la société Texel de ses demandes aux motifs que l'acte de vente ne mentionne pas une sous location à son profit, qu'elle ne démontre pas que Marseille Aménagement a eu connaissance du contrat de sous-location et que la non dénonciation par le propriétaire de ce bail à l'expropriant en 2006 prive la sous locataire de toute indemnité d'éviction ; qu'il résulte des articles précités qu'en vue de la fixation des indemnités, l'expropriant notifie aux propriétaires et usufruitiers soit l'avis d'ouverture de l'enquête, soit l'acte déclarant d'utilité publique soit l'arrêté de cessibilité, soit l'ordonnance d'expropriation ; que le propriétaire et l'usufruitier sont tenus d'appeler et de faire connaitre à l'expropriant, les fermiers, locataires, ceux qui ont des droits d'emphytéose, d'habitation ou d'usage et ceux qui peuvent réclamer des servitudes ; que les autres intéressés seront en demeure de faire valoir leurs droits par publicité collective et tenus de se faire connaître à l'expropriant à défaut de quoi ils seront tenus déchus de tous droits à indemnité ; que cependant il est constant en l'espèce que le litige s'inscrit dans le cadre d'une cession amiable de l'immeuble et non d'une ordonnance d'expropriation ; que Marseille Aménagement est en effet devenue propriétaire par acte notarié du 3 juillet 2006 aux termes duquel Jean-Louis X... lui a vendu l'ensemble immobilier en cause ; que s'agissant d'une cession amiable régulièrement publiée à la conservation des hypothèques de Marseille le 28 juillet 2006, elle produit des effets identiques à ceux de l'ordonnance d'expropriation en éteignant, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les biens cédés ; que toutefois contrairement à ce qui est prescrit en matière d'expropriation, le propriétaire qui a consenti une cession amiable n'est pas tenu de dénoncer à l'administration ses locataires et l'administration n'a pas à leur notifier la cession ; que le premier moyen soulevé par les sociétés appelantes tiré de l'inobservation des formalités imposées par les articles L 13-2 et R 13-49 précités qui ne s'appliquent pas en l'espèce est donc inopérant ; que les SARL Amanda et Texel font en second lieu valoir que l'expropriante avait connaissance de la situation du bien, c'est-à-dire du contrat de location consenti à la société Texel par la société Amanda le 1er janvier 1998 pour une durée de 23 mois et de son renouvellement tacite, quand bien même l'acte de vente du 3 juillet 2006 ne fait aucune mention d'une sous location ; qu'elles se réfèrent à la mention de l'acte notarié selon laquelle l'acquéreur a obtenu dès avant la vente, tous les renseignements sur les conditions d'occupation de l'immeuble et qu'il déclare faire son affaire personnelle des contrats ; que cependant cette seule mention est insuffisante en elle-même à démontrer que l'intimée connaissait l'existence du contrat de sous location alors même qu'il n'est pas contesté que la souslocation ne lui a pas été dénoncée ; qu'il incombe dès lors aux appelantes de rapporter la preuve de leurs allégations ; que pour appuyer leur thèse elles soutiennent qu'il appartenait à Marseille Aménagement de procéder à toutes recherches utiles notamment en vérifiant le registre du commerce et des sociétés ; que toutefois outre qu'aucun texte n'impose de telles vérifications, la ville de Marseille produit un extrait K bis qui précise que le siège social de la société Texel est situé au 12 rue Charles Tellier dans le 4e arrondissement qui constitue l'adresse du principal établissement, indique comme autre établissement celui du 8 rue de la Fare dans le 1er arrondissement mais n'en vise aucun autre et ne fait aucune référence à un local sis au 48 cours Belsunce ; que les appelants reconnaissent en outre que le contrat de sous-location n'a pas fait l'objet d'un enregistrement ; que de plus les activités des deux sociétés étant similaires au regard non seulement des extraits K bis les concernant mais également de l'avenant au bai du 4 juillet 1984 interdisant la sous location pour une activité distincte, l'intimée répond valablement que le fait de visiter les lieux n'a pu lui permettre de découvrir que les locaux qui sont au demeurant à l'enseigne « Alcazar » sans référence à la société Texel étaient exploités par un autre que la société Amanda ; que par ailleurs il n'y a pas eu d'enquête parcellaire puisque le bien a été vendu à l'amiable ; que d'autre part l'acte de vente précise en page 3 qu'en ce qui concerne la totalité des étages à usage d'hôtel meublé, le vendeur déclare la location à la SARL Simar (…) moyennant un loyer actuel et annuel de 16.944 € payable d'avance et mensuelle au cabinet Haute Ville Immobilier, mandataire du vendeur ; que cette formule relative au mandataire n'est pas reprise s'agissant de la location du rez-de-chaussée à la société Amanda ; qu'il se déduit ainsi au mieux des correspondances échangées entre la société Texel et sa compagnie d'assurance SGPA en novembre et décembre 2002 et en janvier 2003 en raison d'une inondation dans le magasin, puis de celle de mars 2003 évoquant la réalisation de travaux de réfection des installations d'évacuation des eaux usées de l'immeuble mentionnés par un courrier du cabinet Haute Ville Immobilier, que M. X... connaissait peut être l'existence de la sous-locataire ; qu'à le supposer il ne s'en évince pas pour autant que Marseille Aménagement, devenue propriétaire seulement en juillet 2006, en a été forcément informée ; qu'enfin le courrier adressé par la société Amanda à la SAS AGC Aubert Gestion qui serait la nouvelle gérante de l'immeuble mandatée par l'intimée, lui demandant de faire le nécessaire de toute urgence pour faire cesser le dégâts des eaux subi par son locataire, est d'une part postérieur de plusieurs mois à l'achat de l'immeuble et d'autre part ne saurait caractériser que Marseille Aménagement avait appris l'existence de la SARL Texel ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'en l'absence de preuve rapportée de la connaissance par Marseille Aménagement de l'existence du contrat de sous-location consenti par la société Amanda à la SARL Texel lors de la cession amiable de l'immeuble du 3 juillet 2006, celle-ci a éteint tous les droits de la société Texel sur l'immeuble vendu ; que le dernier argument des appelantes reposant sur les dispositions protectrices des articles L 145-28 et suivants du Code de commerce doit subséquemment être écarté ;
ALORS QUE lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l'indemnité d'expropriation et à l'application des articles L 13-10, L 13-11, L13-20 et L14-3 le juge règle l'indemnité indépendamment de ces contestations et difficultés sur lesquelles les parties sont renvoyées à se pourvoir devant qui de droit ; qu'en tranchant la contestation relative à la recevabilité de la demande de la société Texel souslocataire de l'immeuble exproprié, quand il lui appartenait de fixer des indemnités alternatives et de renvoyer les parties à faire trancher cette contestation par le juge du fond, la Cour d'appel a violé l'article L 13-8 ancien du Code de l'expropriation.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de la société Texel en paiement d'une indemnité de dépossession,
AUX MOTIFS QUE la société Texel intervient directement en se prévalant d'un droit direct à l'encontre de l'expropriant au motif d'un contrat de sous-location qui la lie à la SARL Amanda concernée par l'indemnité d'éviction ; que selon l'article L 12-2 du Code de l'expropriation, l'ordonnance d'expropriation éteint par ellemême et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés. Il en est de même des cessions amiables consenties après déclaration d'utilité publique ; que le premier juge s'est fondé sur les articles L 13-2 et R 13-15 du Code de l'expropriation pour débouter la société Texel de ses demandes aux motifs que l'acte de vente ne mentionne pas une sous location à son profit, qu'elle ne démontre pas que Marseille Aménagement a eu connaissance du contrat de sous-location et que la non dénonciation par le propriétaire de ce bail à l'expropriant en 2006 prive la sous locataire de toute indemnité d'éviction ; qu'il résulte des articles précités qu'en vue de la fixation des indemnités, l'expropriant notifie aux propriétaires et usufruitiers soit l'avis d'ouverture de l'enquête, soit l'acte déclarant d'utilité publique soit l'arrêté de cessibilité, soit l'ordonnance d'expropriation ; que le propriétaire et l'usufruitier sont tenus d'appeler et de faire connaitre à l'expropriant, les fermiers, locataires, ceux qui ont des droits d'emphytéose, d'habitation ou d'usage et ceux qui peuvent réclamer des servitudes ; que les autres intéressés seront en demeure de faire valoir leurs droits par publicité collective et tenus de se faire connaitre à l'expropriant à défaut de quoi ils seront tenus déchus de tous droits à indemnité ; que cependant il est constant en l'espèce que le litige s'inscrit dans le cadre d'une cession amiable de l'immeuble et non d'une ordonnance d'expropriation ; que Marseille Aménagement est en effet devenue propriétaire par acte notarié du 3 juillet 2006 aux termes duquel Jean-Louis X... lui a vendu l'ensemble immobilier en cause ; que s'agissant d'une cession amiable régulièrement publiée à la conservation des hypothèques de Marseille le 28 juillet 2006, elle produit des effets identiques à ceux de l'ordonnance d'expropriation en éteignant, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les biens cédés ; que toutefois contrairement à ce qui est prescrit en matière d'expropriation, le propriétaire qui a consenti une cession amiable n'est pas tenu de dénoncer à l'administration ses locataires et l'administration n'a pas à leur notifier la cession ; que le premier moyen soulevé par les sociétés appelantes tiré de l'inobservation des formalités imposées par les articles L 13-2 et R 13-49 précités qui ne s'appliquent pas en l'espèce est donc inopérant ; que les SARL Amanda et Texel font en second lieu valoir que l'expropriante avait connaissance de la situation du bien, c'est-à-dire du contrat de location consenti à la société Texel par la société Amanda le 1er janvier 1998 pour une durée de 23 mois et de son renouvellement tacite, quand bien même l'acte de vente du 3 juillet 2006 ne fait aucune mention d'une sous location ; qu'elles se réfèrent à la mention de l'acte notarié selon laquelle l'acquéreur a obtenu dès avant la vente, tous les renseignements sur les conditions d'occupation de l'immeuble et qu'il déclare faire son affaire personnelle des contrats ; que cependant cette seule mention est insuffisante en elle-même à démontrer que l'intimée connaissait l'existence du contrat de sous location alors même qu'il n'est pas contesté que la souslocation ne lui a pas été dénoncée ; qu'il incombe dès lors aux appelantes de rapporter la preuve de leurs allégations ; que pour appuyer leur thèse elles soutiennent qu'il appartenait à Marseille Aménagement de procéder à toutes recherches utiles notamment en vérifiant le registre du commerce et des sociétés ; que toutefois outre qu'aucun texte n'impose de telles vérifications, la ville de Marseille produit un extrait K bis qui précise que le siège social de la société Texel est situé au 12 rue Charles Tellier dans le 4e arrondissement qui constitue l'adresse du principal établissement, indique comme autre établissement celui du 8 rue de la Fare dans le 1er arrondissement mais n'en vise aucun autre et ne fait aucune référence à un local sis au 48 cours Belsunce ; que les appelants reconnaissent en outre que le contrat de sous-location n'a pas fait l'objet d'un enregistrement ; que de plus les activités des deux sociétés étant similaires au regard non seulement des extraits K bis les concernant mais également de l'avenant au bai du 4 juillet 1984 interdisant la sous location pour une activité distincte, l'intimée répond valablement que le fait de visiter les lieux n'a pu lui permettre de découvrir que les locaux qui sont au demeurant à l'enseigne « Alcazar » sans référence à la société Texel étaient exploités par un autre que la société Amanda ; que par ailleurs il n'y a pas eu d'enquête parcellaire puisque le bien a été vendu à l'amiable ; que d'autre part l'acte de vente précise en page 3 qu'en ce qui concerne la totalité des étages à usage d'hôtel meublé, le vendeur déclare la location à la SARL Simar (…) moyennant un loyer actuel et annuel de 16.944 € payable d'avance et mensuelle au cabinet Haute Ville Immobilier, mandataire du vendeur ; que cette formule relative au mandataire n'est pas reprise s'agissant de la location du rez-de-chaussée à la société Amanda ; qu'il se déduit ainsi au mieux des correspondances échangées entre la société Texel et sa compagnie d'assurance SGPA en novembre et décembre 2002 et en janvier 2003 en raison d'une inondation dans le magasin, puis de celle de mars 2003 évoquant la réalisation de travaux de réfection des installations d'évacuation des eaux usées de l'immeuble mentionnés par un courrier du cabinet Haute Ville Immobilier, que M. X... connaissait peut être l'existence de la sous-locataire ; qu'à le supposer il ne s'en évince pas pour autant que Marseille Aménagement, devenue propriétaire seulement en juillet 2006, en a été forcément informée ; qu'enfin le courrier adressé par la société Amanda à la SAS AGC Aubert Gestion qui serait la nouvelle gérante de l'immeuble mandatée par l'intimée, lui demandant de faire le nécessaire de toute urgence pour faire cesser le dégâts des eaux subi par son locataire, est d'une part postérieur de plusieurs mois à l'achat de l'immeuble et d'autre part ne saurait caractériser que Marseille Aménagement avait appris l'existence de la SARL Texel ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'en l'absence de preuve rapportée de la connaissance par Marseille Aménagement de l'existence du contrat de souslocation consenti par la société Amanda à la SARL Texel lors de la cession amiable de l'immeuble du 3 juillet 2006, celle-ci a éteint tous les droits de la société Texel sur l'immeuble vendu ; que le dernier argument des appelantes reposant sur les dispositions protectrices des articles L 145-28 et suivants du Code de commerce doit subséquemment être écarté ;
1°) ALORS QUE si la cession amiable consentie après la déclaration d'utilité publique éteint par elle-même et à sa date tous droits réels ou personnels existant sur l'immeuble en cause, elle confère néanmoins aux titulaires de ces droits, un droit de créance sur l'expropriant ; qu'en se fondant pour exclure toute indemnisation de la société Texel sous-locataire, sur l'extinction de ses droits par l'effet de la cession amiable, la Cour d'appel a violé l'article L 12-2 ancien du Code de l'expropriation, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°) ALORS QUE la déchéance du droit à indemnisation des titulaires de droits réels ou personnel sur le bien exproprié est la conséquence du manquement du propriétaire à son obligation de dénoncer l'existence de ces titulaires de droits à l'expropriant ou encore la conséquence de la mise en demeure qui résulte de la publicité collective mise en oeuvre dans le cadre de l'expropriation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que contrairement à ce qui est prescrit en matière d'expropriation, le propriétaire qui a consenti une cession amiable n'est pas tenu de dénoncer à l'administration ses locataires et que les formalités imposées par les articles L 13-2 et R 13-49 précités ne s'appliquent pas en l'espèce en l'absence d'expropriation, ce dont il résulte que la société sous-locataire ne pouvait être déchue de son droit à indemnité pour n'avoir prétendument pas été dénoncée par le propriétaire, la Cour d'appel a violé les articles L 12-2 et L 13-2 anciens du Code de l'expropriation, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme ;
3°) ALORS QUE selon l'acte de cession amiable du 3 juillet 2006 « l'acquéreur déclare avoir obtenu du vendeur tous renseignements sur les conditions d'occupation de l'immeuble, notamment par la remise des baux et d'un état locatif dès avant les présentes » et « déclare faire son affaire personnelle de la continuation ou de la résiliation de cette location sans recours contre le vendeur » ; qu'il résulte clairement de cet acte que la société Marseille Aménagement informée des conditions d'occupation des locaux et à laquelle ont été remis « des baux » au pluriel, a été ainsi dûment informée de la présence d'un sous-locataire occupant les locaux et du contrat de sous-location ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L12-2 ancien du Code de l'expropriation et 1134 du Code civil, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à la somme de 218.850 € seulement l'indemnité d'éviction due par la société Marseille Aménagement à la SARL Amanda et d'avoit dit que la SARL Amanda sera tenue d'une obligation de non réinstallation,
AUX MOTIFS QU'il est constant que l'immeuble d'une superficie totale de 769 m² et d'une superficie utile pondérée de 585 m² et non 1.000 m² comme allégué à tort par la SARL Amanda, bénéficie d'une façade sur rue de 8 mètres environ, avec vitrine triple, en assez bon état ; que si l'intérieur est passable et médiocre avec des aménagements sommaires, en revanche le local situé dans un quartier commerçant rénové, très fréquenté et desservi par le tramway, bénéficie d'une situation commerciale favorable ; que l'appelante soutient qu'en 1992 et 1993 quand le quartier était en pleine sinistrose, elle a acheté le fonds de commerce le double de la valeur proposée aujourd'hui de sorte que la valeur intrinsèque du fonds ne peut être inférieure à la valeur du droit au bail de l'époque ; qu'elle ajoute que les fonds de commerce dont la destination autorise la vente de produits textiles ont subi une nette plus-value depuis la rénovation du quartier devenu très attractif ; qu'elle précise que son chiffre d'affaires de 120.000 € HT en moyenne est composé exclusivement des loyers versés par la société Texel et estime qu'il faut également se baser sur les chiffres de la sous-locataire qui sont plus révélateurs de la valeur actuelle du fonds de commerce dès lors qu'elle devra indemniser la société Texel ; qu'elle met ainsi en avant le chiffre moyen de celle-ci provenant aussi de l'emplacement et de la surface exceptionnels en centre-ville, qui démontre que les deux sociétés ne pourraient pas se réinstaller dans des conditions équivalentes ; qu'elle ajoute que le commissaire du gouvernement se trompe sur la nature de son chiffre d'affaires qui ne correspond pas à un commerce de tissus mais de loyer versé par sa souslocataire et qu'ainsi l'application d'un pourcentage de 30 à 65 % est impossible ; qu'elle soutient également qu'il n'est pas admissible de calculer un abattement sur la valeur libre de l'immeuble dès lors que la valeur d'un droit au bail est totalement indépendante de celle-ci ; qu'elle met en exergue des évaluations réalisées par un évaluateur foncier, expert auprès de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, qui a utilisé la méthode de l'actualisation par rapport à la valeur de 1992 et celle par l'économie de loyer qui donnent une moyenne de 1.650.000 € ; qu'elle fait également état de la méthode de capitalisation consistant à capitaliser la rentabilité avec un taux de 8%, utilisée par l'expert-comptable commissaire aux comptes qui a retenu une indemnité de 1.334.000 € ; qu'elle en déduit que ses réclamations d'une indemnité principale de 1.413.100 € et de remploi de 140.160 € doivent être validées ; que la ville de Marseille et le commissaire du gouvernement concluent à la confirmation du jugement ayant fixé l'indemnité principale la somme de 200.000 € ; que selon l'article L 13-13 du Code de l'expropriation, l'indemnité de dépossession doit couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation ; que dès lors l'expropriante répond valablement que les spéculations de la société Amanda sur les loyers éventuels qu'elle pourrait percevoir si elle ne louait pas dans un cadre familial sont hors de propos ; que de plus le seul préjudice direct que l'appelante subit est la perte de son propre chiffre d'affaires exclusivement composé de loyers, quand bien même ceux-ci sont versés par la société Texel ; que même si elle ne produit toujours pas aux débats ses bilans ni ses comptes de résultat le chiffre d'affaires moyen de 141.310 € retenu par le premier juge n'est pas discuté ; que d'autre part la surface des locaux à retenir n'est pas de 1.000 m² comme le prétend la société Amanda mais d'une superficie totale de 769 m² et d'une superficie utile pondérée de 585 m² ; que l'absence de production des documents comptables de la société empêche l'application de la méthode de rentabilité ; que pour déterminer la valeur actuelle du droit au bail des locaux qui semblent représenter l'élément essentiel de la valeur du fonds, le premier juge s'est donc justement fondé sur l'ensemble des termes de comparaison communiqués par le commissaire du gouvernement ; que contrairement à la thèse de l'appelante, ceux-ci s'approchent en effet beaucoup plus de sa situation puisqu'ils portent sur des surfaces à peu près correspondantes et situés dans des lieux tout aussi attractifs sur le plan commerçant même s'ils ne sont pas dans la même rue ; qu'en outre certains d'entre eux font bien état du loyer versé ; que la méthode des termes de comparaison aboutit ainsi à une moyenne des mutations de fonds de commerce de vente de textile/habillement au détail en 2005, 2006 et 2007 cours Belsunce, rue d'Aix, rue Nationale, rue du Tapis Vert et rue de Rome qui s'élève à 100.800 € ; que la valeur du fonds a aussi été calculée à partir de l'abattement pour occupation commerciale des locaux qui en constituent sa valeur théorique maximale ; qu'en dépit de la critique de la société Amanda elle peut très bien être proposée dans un but de comparaison ; qu'au regard du prix d'acquisition de 330.000 € à titre d'indemnité principale, la valeur théorique des locaux « libres d'occupation » est de 550.000 € (330.000 /60%) ; que l'abattement pour occupation s'élève donc à la différence des deux termes soit 220.000 € ; que la méthode relative au chiffre d'affaires, en vertu de laquelle il convient de retenir une fourchette de 35 à 65% du chiffre d'affaires TTC des trois dernières années selon la qualité des agencements et de 30 à 65% pour les fonds de vente de textile, donne une évaluation de 65% x 141.310 € = 91.851,50 € ; qu'en faisant abstraction de l'abattement au motif que le chiffre d'affaires est exclusivement composé des loyers de la société Texel la somme à retenir serait de 141.310 € ; que le recoupement des résultats des diverses méthodes d'évaluation précitées met en évidence que l'offre de 200.000 € de Marseille Aménagement n'est nullement sous-évaluée ; que le juge de première instance a par conséquent fait une exacte appréciation des faits de la cause en fixant l'indemnité principale à 200.000 € et en interdisant à la locataire de se réinstaller ; que l'indemnité de remploi a par ailleurs été valablement évaluée à 18.850 € calculée à 17.700 € ;
1°) ALORS QU'en se bornant à affirmer que la surface des locaux à retenir n'est pas de 1.000 m² comme le prétend la société Amanda mais d'une superficie totale de 769 m² et d'une superficie utile pondérée de 585 m², sans analyser même de façon sommaire, les éléments de preuve produits sur lesquels elle se fondait pour retenir ces chiffres, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société Amanda se prévalait du rapport d'un évaluateur foncier, M. Y... expert auprès de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, évaluant l'indemnité de dépossession à une somme de 1.650.000 € résultant d'une moyenne entre la méthode de l'actualisation par rapport à la valeur de 1992 et celle de l'économie de loyer ; qu'elle invoquait en outre un rapport du cabinet Syrec expert-comptable commissaire aux comptes en date du 17 décembre 2009 faisant application de la méthode de capitalisation et retenant une indemnité de 1.334.000 € ; qu'en se bornant à entériner les chiffres invoqués par l'expropriant et le commissaire du gouvernement, sans examiner ces éléments de preuve versés aux débats par la société Amanda, la Cour d'appel a encore violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-18143
Date de la décision : 16/06/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Transfert de propriété - Ordonnance d'expropriation - Effets - Extinction des droits existant sur l'immeuble exproprié - Indemnisation des titulaires des droits réels et personnels

L'extinction des droits réels et personnels existant sur un bien cédé ouvre droit à indemnisation des titulaires de ces droits. Une cour d'appel ne peut faire produire des effets à une déchéance prévue par des dispositions qu'elle a déclarées inapplicables


Références :

article L. 12-2, devenu L. 222-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 16 jui. 2016, pourvoi n°15-18143, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Jardel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Charpenel (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Vérité
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
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