La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2016 | FRANCE | N°15-12803

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 juin 2016, 15-12803


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 mars 2014), que M. et Mme X..., qui avaient accepté, le 24 octobre 2000, une offre de prêt immobilier consentie par la caisse régionale de Crédit agricole du Midi, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque), estimant que le taux effectif global (TEG) figurant dans cette offre était erroné, ont, le 18 novembre 2010, assigné la banque en déchéance du

droit aux intérêts conventionnels ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 mars 2014), que M. et Mme X..., qui avaient accepté, le 24 octobre 2000, une offre de prêt immobilier consentie par la caisse régionale de Crédit agricole du Midi, aux droits de laquelle vient la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque), estimant que le taux effectif global (TEG) figurant dans cette offre était erroné, ont, le 18 novembre 2010, assigné la banque en déchéance du droit aux intérêts conventionnels ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire prescrite l'action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels ;

Attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que l'offre de prêt mentionnait un coût total du crédit correspondant à l'addition des sommes afférentes aux frais de dossier, aux intérêts et à l'assurance obligatoire, soit un TEG de 6, 22 %, et que ce coût n'incluait pas le montant des parts de la caisse locale, chiffré à 350 F, qui figurait dans une autre colonne et était donc manifestement exclu du calcul du TEG, la cour d'appel a souverainement estimé que les emprunteurs pouvaient constater l'erreur affectant ce taux dès l'examen de la teneur de l'offre, de sorte qu'était prescrite l'action en déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels, dont la prescription décennale avait couru, en application des dispositions des articles L. 110-4 du code de commerce, L. 312-8, L. 313-1 et L. 312-33 du code de la consommation, à compter de l'acceptation de l'offre, et non de la conclusion de l'acte de prêt, les emprunteurs ne sollicitant pas l'annulation de la stipulation d'intérêts, elle-même soumise à la prescription quinquennale édictée par l'article 1305 du code civil ; qu'elle a, ainsi, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que l'action des époux X... à l'encontre de la C. R. C. A. M était prescrite, et de les avoir en conséquence déboutés de leurs demandes tendant à la déchéance du droit aux intérêts du prêteur en raison d'une erreur affectant le taux effectif global ;

AUX MOTIFS QUE « il ressort des pièces du dossier et notamment de l'acte de prêt que la souscription des parts sociales pour un montant de 350F n'était pas prise en compte pour le calcul du TEG. Les emprunteurs pouvaient dès cette date se rendre compte du caractère erroné du TEG mentionné. Par suite à la date de l'assignation la prescription était acquise. »

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « l'article 12 du Code de procédure civile dispose que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. L'article 1304 du Code civil dispose que, dans tous les cas où l'action en nullité d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans. L'article L. 110-4 du Code de commerce, dans sa version en vigueur du 21 septembre 2000 au 19 juin 2008, dispose que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes. L'article L. 312-8 3° du Code de la consommation, dans sa version en vigueur du 13 avril 1996 au 5 janvier 2008, dispose que l'offre de prêt indique le taux du crédit défini conformément à l'article L. 313-1. L'article L/ 313-1 du même code, dans sa version en vigueur du 27 juillet 1993 au 24 mars 2006, dispose que pour la détermination du taux effectif global du prêt, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels. L'article L. 312-33 du même code, dans sa version en vigueur du 1er mars 1994 au 1er janvier 2002, dispose que le préteur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues à l'article L. 312-8 pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. Il est de jurisprudence constante que viole les articles L. 110-4 du Code de commerce et les articles L. 312-8, L. 313-1 et L. 312-33 du Code de la consommation la cour d'appel qui, pour déclarer les emprunteurs irrecevables en leur action en déchéance du droit aux intérêt, relève que l'action en nullité de la clause relative aux intérêts était prescrite en application de l'article 1304 du Code civil alors que les emprunteurs n'ont pas entendu poursuivre l'annulation de la stipulation d'intérêts, mais se prévaloir de l'inexactitude du taux effectif global pour demander l'application de l'article L. 313-33 du Code de la consommation. Il est également de jurisprudence constante que le point de départ de la prescription est à la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur ou, lorsque tel n'est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l'emprunteur. La banque fait valoir que l'action est prescrite en application de l'article 1304 du code civil. Force est, toutefois, de constater que cet article n'est pas applicable en l'espèce. Monsieur et Madame X... ne sollicitent pas, en effet l'annulation de la stipulation d'intérêts, mais la déchéance du droit aux intérêts. Il ne paraît, en revanche, pas contestable que le prêt litigieux constitue une obligation née à l'occasion de son commerce entre commerçant, à savoir la banque, et non-commerçants, à savoir Monsieur et Madame X.... Leur action se prescrit, des lors, par dix ans. L'offre de prêt indique les éléments suivants :

Parts de Caisse LOCALE 350, 00F

FRAIS DE DOSSIER 2. 450, 00F

INTERETS 162. 073, 27F

ASSURANCE OBLIGATOIRE 22. 913, 55F

COUT TOTAL DU CREDIT 187. 436, 82F

TAUX EFFECTIF GLOBAL : 6, 22 %

Il ressort de ces éléments que l'examen de la teneur de cette offre permet de constater l'erreur. Le cout total du crédit correspond, en effet, à l'addition des sommes afférentes aux frais de dossier, aux intérêts et à l'assurance obligatoire. Ce cout n'inclut, dès lors, pas le montant des parts de caisse locale. Cette dernière rubrique ne se trouve, d'ailleurs, pas dans la même colonne que les autres. Son exclusion est, donc, manifeste. Il en résulte que le point de départ de la prescription est la date de la convention. L'offre a été acceptée le 24 octobre 2000. L'assignation est du 18 novembre 2010. Le délai de 10 ans apparait, dès lors, écoulé. Il convient, par conséquent, de dire prescrite l'action de Monsieur et Madame X... ».

1°/ ALORS QUE, en cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non professionnel, la prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts du prêteur en raison d'une erreur affectant le taux effectif global ne court qu'à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû découvrir cette erreur ; que le point de départ de la prescription n'est donc la date de la convention que lorsque l'examen de sa teneur permet, même à un non professionnel, de constater l'erreur ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer, pour fixer le point de départ de la prescription au 24 octobre 2000, date de l'acceptation de l'offre de prêt, que l'acte de prêt indiquait dans une colonne décalée l'élément omis à tort dans le calcul du TEG, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si indépendamment de l'existence de cette colonne décalée, les époux X..., quoique non professionnels, avaient néanmoins les compétences financières leur permettant de déceler, à la lecture de l'acte de prêt, les erreurs affectant le calcul du taux effectif global, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 110-4 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008.

2/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE, à supposer même que la date de la convention puisse constituer le point de départ de la prescription décennale, celle-ci n'avait pu courir contre l'emprunteur qu'à compter de la date de passation de l'acte authentique de prêt ; d'où il suit qu'en retenant, pour juger prescrite l'action initiée le 18 novembre 2000 par les époux X... contre la banque, que l'action se prescrivait par dix ans à compter du 24 octobre 2000, date de l'acceptation de l'offre de prêt, sans s'attacher à la date de passation de l'acte authentique de prêt du 20 novembre 2000, la cour d'appel a violé l'article 110-4 du Code de commerce dans sa version antérieure à la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2233 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-12803
Date de la décision : 15/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 05 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 jui. 2016, pourvoi n°15-12803


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.12803
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award