LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme Annie
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, veuve Y... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme Z..., épouse X..., Mme Odyle
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, épouse A..., M. B..., le Groupement foncier agricole du Diffault, la SCP F...- G... et le Groupement foncier agricole de Trohelleuc ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que Mme Annie
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, veuve Y... était associée avec sa soeur, Mme Odyle
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, et son frère, M. Alain
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, du Groupement foncier agricole de Trohelleuc (le GFA) dont celui-ci était le gérant ; que le 6 décembre 2006, Mme Annie
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a donné mandat à M. Alain
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de vendre les parcelles appartenant au GFA ; que le même jour ont été conclus trois compromis de vente portant à la fois sur des parcelles appartenant au GFA et sur des biens appartenant à M. et Mme Alain
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; que ces compromis, qui ont donné lieu à des décisions consignées dans un procès-verbal d'assemblée générale du GFA du 30 janvier 2007, ont été réitérés devant notaire ; que contestant la validité de la délibération de l'assemblée générale ainsi que des ventes consenties au profit respectivement du GFA du Diffault et de M. B..., Mme Annie
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a demandé leur annulation ainsi que la condamnation de M. Alain
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au paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée contre M. Alain
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, l'arrêt, après avoir constaté qu'il résultait de l'expertise diligentée à la demande de Mme Annie
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qu'il existait, entre le prix de vente des parcelles du GFA et celui des parcelles de M. et Mme Alain
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, un écart qui n'était pas explicable par une différence de qualité des parcelles, relève que Mme Annie
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avait cependant été informée des conditions et du prix de vente des parcelles du GFA lorsqu'elle avait donné son accord pour qu'il soit procédé à la vente ; qu'il en déduit que cette expertise ne suffit pas à démontrer l'existence de manoeuvres dolosives de la part de M. Alain
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;
Qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur la dissimulation, par M. Alain
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, de la vente, concomitante avec les parcelles du GFA, de parcelles appartenant à M. et Mme Alain
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, pour un prix nettement supérieur à l'hectare, et sur cette différence de prix entre les parcelles du GFA et celles de M. et Mme Alain
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, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts formée par Mme Annie
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contre M. Alain
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, l'arrêt rendu le 4 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne M. Alain
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aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Annie
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, veuve Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour Mme Annie
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, veuve Y...
En ce que l'arrêt attaqué déboute Mme Annie
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veuve Y... de sa demande de dommages et intérêts,
Aux motifs que Sur le dol Aux termes de l'article 116 du code civil : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre parties n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ». Il résulte de la chronologie des faits que : M. Y... est décédé le 24 août 2006 et que consécutivement Madame Y... a suivi un traitement anti-anxiolitique, dans un acte daté du 6 décembre 2006, que Mme Y... reconnaît avoir signé, elle a autorisé M.
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à vendre les parcelles appartenant au GFA du DIFFAUT, hormis celles cadastrées Y018 et Y019 moyennant le prix de 123 979, 75 € payable au plus tard le 29 septembre 2007, le même jour, les compromis de vente étaient concrétisés avec le GFA du DIFFAUT, M. B..., M. et Mme D.... En janvier 2007, Mme Y... a signé la deuxième page d'un procès verbal d'assemblée générale du 30 janvier 2007 ainsi rédigée : « L'Assemblée Générale décide de donner tout pouvoir à M. Alain
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, gérant, à l'effet de procéder à ces ventes et en conséquence de signer tout document pour mener à bien ces opérations. Cette résolution est adoptée à l'unanimité. Plus rien n'étant à l'ordre du jour, la séance est levée à 11 heures trente. De tout ce que dessus, il a été dressé le présent procès-verbal qui a été signé par les associés présents ». Le 19 juin 2007, la parcelle ZT13 a été t vendue aux époux D... au prix de 8 189 € soit 0, 45 7 €/ m2. Le 26 juin 2007, les parcelles YO 69 et ZV 4, 6, 47, 51 appartenant au GFA de TROHELLEUC ont été vendues au GFA du DIFFAUT au prix de 114 527, 80 € au prix de 0, 45 7 €/ m2. Le 4 décembre 2007, la parcelle YO 21 appartenant au GFA de TROHELLEUC a été vendue à M. B... au prix de 47 012, 70 €, soit 0, 457 €/ m2. Il ressort de cette chronologie et des pièces qui s'y rapportent que les ventes ont été conclues pour le prix total de 169 729, 50 €, soit 45 749, 75 € de plus que le prix mentionné sur la procuration du 6 décembre 2006, ce qui correspond aux explications de Me Le Verre et de Me F..., sur l'erreur matérielle comprise dans cette procuration et le prix de vente réellement convenu. En tout état de cause, cette erreur ne préjudicie pas à Mme Y... puisque le prix de vente est supérieur à celui mentionné sur le pouvoir et que l'appelante ne démontre aucune corrélation entre son état de santé et son accord donné sur l'acte du 6 décembre 2006. En outre les ventes réalisées sont conformes à ce pouvoir et la circonstance qu'il n'y soit pas fait de mention de la résiliation des baux consentis à M.
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et son épouse est sans influence sur l'accord donné à la vente des parcelles de sorte que ce pouvoir est valide. A supposer que Mme Y... n'ait pas pris connaissance de la première page du procès verbal du 30 janvier 2007, cette page n'apporte aucune information sur la vente des parcelles du GFA qui soit contraire à l'accord qu'elle avait donné en 2006 et le défaut éventuel d'information sur la résiliation des baux ne constitue pas une manoeuvre relative aux ventes, qui en sont une opération distincte, et dont Mme Y... était informée des conditions. Enfin, pour démontrer l'existence d'un dol, Mme Y... se prévaut d'une expertise qu'elle a fait effectuer par M. E... pour soutenir que les parcelles du GFA ont été sous-évaluées au profit de celles des époux
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. M. E... expose dans son rapport qu'il existe un écart de prix de vente qui n'est pas explicable par une différence de qualité des parcelles. Cette constatation ne suffit pas à démontrer l'existence d'une manoeuvre dès lors que Mme Y... était informée du prix de vente des parcelles du GFA. De plus, Mme Y... ne démontre aucunement l'existence d'une collusion frauduleuse entre les acquéreurs des parcelles et les autres membres du GFA de TROHELLEUC. Ainsi, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise judiciaire, Mme Y... qui était informée des parcelles vendues et du prix de vente lorsqu'elle y a donné son accord, ne rapporte pas la preuve de manoeuvres dolosives destinées à emporter son consentement. (…) Sur la demande de dommages et intérêts Mme Y..., qui ne démontre pas l'existence d'un comportement frauduleux, n'établit pas davantage que l'irrégularité formelle de la délibération du 30 janvier 2007 lui a causé un préjudice moral.
1°/ Alors que Mme Annie
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veuve Y... a fait valoir qu'elle n'avait pas pu consulter les compromis de vente signés le 6 décembre 2006, qu'elle avait reçu, à la suite de la sommation interpellative délivrée à M. Alain
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, la copie d'actes notariés contenant cession simultanée de biens dépendant du GFA et de biens immobiliers appartenant en propre à M. et Mme
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, qu'à chaque fois était mentionné un prix de vente unique, ventilé ensuite entre M. et Mme
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d'une part, le GFA d'autre part, que curieusement, sur les copies transmises, le prix de vente global ainsi que les sommes revenant à M. et Mme
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avaient été soigneusement biffés, de sorte qu'elle ne pouvait comparer le prix perçu par son frère, par rapport aux valeurs retenues pour les biens du GFA, et avait été contrainte de solliciter auprès de la conservation des hypothèques la copie des actes publiés, que le pouvoir ne contenait aucune ventilation des prix en fonction des immeubles vendus, qu'elle a invoqué le rapport de M. E... du 20 mai 2008, estimant que mis à part la vente D..., correspondant selon lui au prix du marché, les autres transactions sont intervenues sur la base d'un prix à l'hectare sans qu'il soit tenu compte de la qualité des parcelles tandis que selon l'expert, les prix retenus pour les biens appartenant en propre à M. et Mme
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" atteignent des plafonds difficilement explicables ", pour des parcelles situées à proximité immédiate de celles du GFA ; que la cour d'appel, pour rejeter la demande d'indemnité de Mme Annie
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veuve Y..., s'est fondée sur la connaissance qu'elle avait du prix de vente des parcelles du GFA et la conformité des ventes à l'accord donné le 6 décembre 2006 par Mme
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veuve Y..., et a retenu qu'elle ne démontrait pas l'existence d'un comportement frauduleux ni que l'irrégularité formelle de la délibération du 30 janvier 2007 lui aurait causé un préjudice moral ; qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur la dissimulation par son frère, de la vente concomitante avec les parcelles du GFA, de parcelles appartenant aux époux
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, pour un prix largement supérieur à l'hectare, et sur cette différence de prix non justifiée entre les parcelles du GFA et celles des époux
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, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ Alors que commet une faute le dirigeant d'un groupement foncier agricole qui recueille l'accord de ses associés pour la vente des biens du GFA, sans les informer du projet de vente concomitante, par les mêmes actes, de ses propres biens, aux mêmes acquéreurs, pour un prix à l'hectare lui revenant bien supérieur ; que la cour d'appel, pour rejeter la demande d'indemnité de Mme Annie
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veuve Y..., s'est fondée sur la connaissance qu'elle avait du prix de vente des parcelles du GFA et la conformité des ventes à l'accord donné le 6 décembre 2006 par Mme
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veuve Y... et a retenu qu'elle ne démontrait pas l'existence d'un comportement frauduleux ni que l'irrégularité formelle de la délibération du 30 janvier 2007 lui aurait causé un préjudice moral ; qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la dissimulation par son frère, de la vente concomitante de parcelles appartenant aux époux
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, pour un prix largement supérieur à l'hectare, et sur cette différence de prix non justifiée entre les parcelles du GFA et celles des époux
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, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil.