La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2016 | FRANCE | N°14-28244

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 2016, 14-28244


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Reims, 8 octobre 2014), que M. X..., engagé à compter du 27 juillet 2009 en qualité d'assistant de vente automobile par la société E-Motors, exerçant en dernier lieu les fonctions de gestionnaire d'atelier, catégorie agent de maîtrise, a été licencié pour faute grave par lettre du 23 juin 2011 après mise à pied à titre conservatoire ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de

la condamner en conséquence au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Reims, 8 octobre 2014), que M. X..., engagé à compter du 27 juillet 2009 en qualité d'assistant de vente automobile par la société E-Motors, exerçant en dernier lieu les fonctions de gestionnaire d'atelier, catégorie agent de maîtrise, a été licencié pour faute grave par lettre du 23 juin 2011 après mise à pied à titre conservatoire ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la condamner en conséquence au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave est celle qui, même non intentionnelle, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que tout en constatant que le salarié avait commis des manquements caractérisés par des non-conformités d'ordres de réparation, la cour d'appel a cependant écarté la qualification de faute grave en l'absence de caractère intentionnel et volontaire dudit manquement ; qu'en subordonnant ainsi la faute grave au caractère intentionnel dudit manquement imputable au salarié concerné, la cour d'appel qui a ainsi ajouté une condition non prévue, a violé L. 1234-1 du code du travail ;
2°/ que lorsque les juges du fond écartent la qualification de faute grave, ils sont tenus de rechercher même d'office si les griefs reprochés au salarié ne sont cependant pas constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en s'abstenant de rechercher, même d'office, si le manquement avéré, caractérisé par des non-conformités d'ordres de réparation, même non constitutif d'une faute grave, ne caractérisait cependant pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'en énonçant que la société ne démontrait pas une insubordination délibérée du salarié, la cour d'appel n'a fait que répondre à l'argumentation de l'employeur qui reprochait à ce salarié dans la lettre de licenciement une attitude volontaire d'opposition ;
Et attendu qu'en retenant par motifs propres et adoptés que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société E-Motors aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société E-Motors à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la société E-Motors
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement pour faute grave de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné son employeur, la société E-Motors, à lui payer diverses sommes à titre d'indemnités subséquentes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE comme le retient à juste titre le jugement déféré, la lettre de licenciement fait état de griefs généraux et trop vagues pour répondre aux exigences de l'article L. 1232-6 du code du travail, en ne précisant pas quels ordres de réparation seraient incorrectement remplis ni quels rapport d'activité seraient manquants et en n'illustrant pas l'absence d'organisation du travail des ouvriers reprochée ; qu'en outre, il convient d'ajouter aux motifs du jugement déféré les éléments suivants : la preuve de la matérialité de certains de ces reproches n'est pas rapportée ; qu'en effet, de concert avec l'intimé, il est à observer que le contrat de travail et les avenants ne prévoient nullement l'obligation de fournir des comptes rendus quotidiennement ; qu'en outre, au vu de la liste des comptes rendus que l'employeur reconnaît avoir reçus et des dates de congés payés et d'arrêt maladie du salarié qui figurent sur ses bulletins de paie, il apparaît que celui-ci a fait rapport très régulièrement de son activité et que l'allégation contraire de l'employeur n'est pas étayée ; que, s'agissant du mécontentement de clients ne pouvant joindre le salarié, l'employeur qui produit divers courriels de plaintes ne démontre pas suffisamment que ces reproches sont à imputer à M. X... ; que, quant au manque d'organisation du travail de l'atelier, ce grief n'est pas suffisamment étayé par les attestations qui sont contredites par celles produites par le salarié ; qu'il reste toutefois que la société E-Motors démontre en produisant les pièces 43, 44 et 47 la non-conformité de ces ordres de réparation que le salarié ne peut expliquer par une surcharge de travail démentie par les statistiques de l'atelier produites par l'employeur ; que ce grief témoigne certes d'un manque de rigueur de l'intéressé mais la société E-Motors ne démontre en rien que cette carence ait été volontaire et caractéristique d'une insubordination délibérée comme l'allègue l'employeur qui s'est fondé sur ce terrain pour justifier le licenciement immédiat du salarié ; qu'à cet égard, la thèse selon laquelle le salarié cherchait à quitter l'entreprise pour créer sa propre entreprise et pour cela n'exécutait plus ses obligations professionnelles n'est pas suffisamment étayée ; que contrairement à ce qu'indique l'employeur, M. X... a suivi une formation sur les futurs créateurs non pas pendant son arrêt maladie du 8 mars 2011 mais pendant son congé payé du 8 mars 2011 comme cela résulte du certificat médical et du bulletin de paie de mars 2011 ; que cette formation ne suffit pas à établir l'insubordination de M. X... qui, dans ses réponses aux avertissements notifiés rappelle son attachement à l'entreprise de sorte que la société E-Motors ne démontre pas l'insubordination disciplinaire de son salarié ; que par suite et par confirmation du jugement, il ressort de l'ensemble de ces éléments que le licenciement de M. X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté la faute grave ;
et AUX MOTIFS ADOPTES QUE la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il convient de s'y référer ; que le motif du licenciement énoncé dans le courrier est l'insubordination du salarié ; que les faits énoncés dans la lettre de licenciement pour caractériser cette insubordination sont les suivants : absence de rapports d'activités, ordres de réparation incorrectement remplis, absence d'organisation du travail des ouvriers ; qu'il est également fait état d'une hostilité et de menaces envers la direction ; qu'en application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; que le défaut d'énonciation d'un motif précis équivaut à une absence de motif et que cette absence emporte l'illégitimité du licenciement ; que les motifs doivent être suffisamment précis, c'est-à-dire matériellement vérifiables pour permettre au juge d'en apprécier le caractère réel et sérieux ; qu'or, le conseil constatera que la lettre de licenciement ne détaille ni les dates, ni le nombre de rapports d'activité manquants ou d'ordres de réparation incorrectement remplis ; que le défaut d'organisation du travail des ouvriers n'est pas davantage étayé ; que quant à l'hostilité et les menaces reprochées au salarié, elles ne sont pas davantage explicitées ; qu'en conséquence, le conseil requalifiera donc le licenciement pour faute grave de M. X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la faute grave est celle qui, même non intentionnelle, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que tout en constatant que M. X... avait commis des manquements caractérisés par des non-conformités d'ordres de réparation, la cour d'appel a cependant écarté la qualification de faute grave en l'absence de caractère intentionnel et volontaire dudit manquement ; qu'en subordonnant ainsi la faute grave au caractère intentionnel dudit manquement imputable au salarié concerné, la cour d'appel qui a ainsi ajouté une condition non prévue, a violé L. 1234-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsque les juges du fond écartent la qualification de faute grave, ils sont tenus de rechercher même d'office si les griefs reprochés au salarié ne sont cependant pas constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en s'abstenant de rechercher, même d'office, si le manquement avéré, caractérisé par des non-conformités d'ordres de réparation, même non constitutif d'une faute grave, ne caractérisait cependant pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L.1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-28244
Date de la décision : 19/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 08 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mai. 2016, pourvoi n°14-28244


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.28244
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award