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19/05/2016 | FRANCE | N°14-24500

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mai 2016, 14-24500


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 8 juillet 2014), que M. X..., engagé le 1er avril 2004 par la société Joke France en qualité de directeur technico-commercial, a été licencié le 30 avril 2007 pour faute grave et a saisi la juridiction prud'homale en paiement d'indemnités de rupture ; que par jugement du 4 mai 2010, la liquidation judiciaire de la société a été ouverte et M. Y... a été désigné en qualité de mandataire liquidateur ;
Attendu que le salarié fait grie

f à l'arrêt de dire le licenciement justifié par une faute grave et de le débouter ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 8 juillet 2014), que M. X..., engagé le 1er avril 2004 par la société Joke France en qualité de directeur technico-commercial, a été licencié le 30 avril 2007 pour faute grave et a saisi la juridiction prud'homale en paiement d'indemnités de rupture ; que par jugement du 4 mai 2010, la liquidation judiciaire de la société a été ouverte et M. Y... a été désigné en qualité de mandataire liquidateur ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de sa demande d'indemnisation alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que lorsque la faute grave reprochée par la lettre de licenciement est constituée par un ensemble de griefs cumulatifs, le juge ne peut retenir la qualification de faute grave s'il constate que certains d'entre eux n'ont pas été établis ; qu'en retenant la qualification de faute grave, tout constatant que les griefs tenant au refus des instructions relatives au lieu d'entreposage du matériel et au traitement des stocks, à la faiblesse du nombre de clients prospectés, à l'impossibilité pour la société Strack de participer financièrement au salon GO PLAST et au développement d'un boîtier de protection et une table à souder, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ que s'agissant du grief de manquement à l'obligation de remettre des comptes-rendus de visite, l'employeur avait fait valoir dans le débat contradictoire que la lettre du 7 février 2007 constituait un avertissement ; qu'en estimant pour écarter toute discussion sur le moyen du non-cumul des sanctions disciplinaires, que la lettre du 7 février 2007 ne caractérise pas une réelle volonté de sanctionner un agissement fautif et correspond à un simple rappel à l'ordre écartant ainsi la qualification de sanction disciplinaire, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que les fonctions attribuées au salarié et partant des obligations qui peuvent lui être imposées relèvent d'une recherche concrète des tâches accomplies dans l'entreprise ; qu'en justifiant que l'obligation du salarié de remettre des comptes-rendus de visite en complément des rapports hebdomadaires pouvait lui être imposée au regard des obligations générales énoncées au contrat de travail sans s'expliquer concrètement sur l'incompatibilité de cette obligation avec les fonctions de directeur commercial assumant la responsabilité commerciale de l'ensemble de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, ensemble des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
4°/ qu'en n'expliquant pas en quoi ce manquement était d'une gravité telle qu'elle ne permettait pas le maintien du salarié dans l'entreprise durant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
5°/ que les griefs reprochés par l'employeur doivent être objectifs, précis et matériellement vérifiables ; qu'en se contentant de retenir que Mmes Z... et A..., assistante commerciale et secrétaire commerciale, ont relaté de manière générale les appels téléphoniques de clients mécontents du fait que M. X... ne donnait pas suite à leurs demandes, pour dire que la faute grave était établie sans caractériser précisément et concrètement le manquement reproché au salarié, son importance, son imputabilité et son impact préjudiciable pour l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
6°/ que la faute grave est constituée par un manquement du salarié à ses obligations contractuelles qui rend immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en retenant la faute grave au motif que le défaut d'exploitation du fichier clients remis par la société Strack et la carence à l'origine de la mévente de la machine Babyplast étaient établis, sans rechercher l'importance de ces deux manquements au regard de l'ensemble des prestations de travail du salarié et de l'impact préjudiciable pour l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a retenu que le salarié avait réitéré, postérieurement à la lettre du 7 février 2007, son refus d'exécution des instructions visant à l'établissement de rapports de visite de la clientèle, et avait fait preuve d'inertie fautive dans son activité commerciale, a pu déduire de ces seuls motifs que ce comportement fautif, dans une société de taille modeste, ne permettant pas à l'employeur d'appréhender la réalité du travail fourni, rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... justifié par une faute grave et de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Joke France au titre du salaire pendant la mise à pied, de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE sur la cause réelle et sérieuse du licenciement, que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que l'employeur supporte la charge de la preuve de la faute grave et de son imputation certaine au salarié ; qu'il résulte de la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige que la société Joke France a entendu mettre fin à la relation contractuelle qui l'unissait à Monsieur Thomas X... au regard d'un double grief prétendument constitutif d'une faute grave, à savoir un refus d'exécution des instructions de l'employeur ainsi qu'une exécution défectueuse de la prestation de travail ayant pour origine une inertie fautive du salarié ; QUE sur le refus d'exécution des instructions, la société Joke France indique, en premier lieu, que les plannings d'activité de Monsieur Thomas X... pour la période allant du 26 février 2007 au 6 avril 2007 font état de 19 visites mais qu'aucun rapport de visite ne lui a été remis alors même que le salarié avait eu instructions d'en établir et avait fait l'objet d'un avertissement sur ce point le 7 février 2007 ; que Monsieur Thomas X... invoque, tout à la fois, le caractère fictif de la sanction disciplinaire en cause et du grief lui-même, incompatible avec sa qualification professionnelle, ainsi que le principe de non-cumul des sanctions disciplinaires, lequel interdisait le prononcé d'un licenciement pour des faits déjà sanctionnés ; que la société Joke France produit aux débats une lettre datée du 7 février 2007, établie par Monsieur C..., gérant de la société, à l'attention de Monsieur Thomas X..., lui signifiant une « mise demeure » concernant de manière générale sa méthode de travail avec des exemples concrets relatifs, notamment, aux rapports de visite ; que ladite lettre comprend la mention suivante : « je ne peux pas te soutirer les rapports de visite. Tu m'as maintes fois fait savoir : tu les auras demain sur ton ordinateur ». Rien ne se fait... j'espère que tu peux comprendre notre point de vue et le mettre en pratique » ; que l'employeur verse également aux débats un courrier adressé par le salarié, le 12 février 2007, à Monsieur C... dont l'objet est ainsi libellé : « Réponse à courrier du 07-02-2007 » et comprenant la mention suivante : « tu trouveras en annexe ma lettre avec prise de position et rapport hebdomadaire » ; que ledit courriel mentionne également un dossier joint « rapport semaine calendaire 5 » et un dossier « réponse à rappel à l'ordre » ; que si la réalité de la lettre du 7 février 2007 est ainsi démontrée, sa teneur ne caractérise pas une réelle volonté de l'employeur de sanctionner un agissement fautif et correspond à un rappel à l'ordre, ce qu'évoque la lettre de licenciement, ce qui rend sans objet l'argument tiré du non-cumul des sanctions disciplinaires ; que Monsieur Thomas X... soutient que le grief lié aux rapports de visite est totalement incompatible avec ses fonctions de directeur technico-commercial et que l'employeur, qui n'a jamais exigé de tels documents, a construit de toute pièce ledit grief ; qu'il convient de relever que si Monsieur Thomas X... a bien été engagé le 1er avril 2004 en qualité de directeur technico-commercial, au coefficient hiérarchique VIII. 3 selon la convention collective « commerce de gros », l'article 4 du contrat de travail prévoit ce qui suit : « Ses attributions sont notamment les suivantes : il lui appartiendra de déterminer les possibilités du marché et le suivi en permanente évolution de celui-ci, il définira avec la direction ou avec toute personne désignée par la gérance, la politique commerciale de l'entreprise, il démarchera l'ensemble de la clientèle de l'entreprise, assurera le suivi des offres jusqu'à la livraison et s'inquiétera en permanence de l'état du portefeuille clients, il cherchera des nouveaux clients et des marchés pour les produits de la société Joke France Sarl en accord avec la gérance, Monsieur Thomas X... sera compétent pour le choix et l'embauche du personnel. » ; que le contrat de travail met ainsi à la charge de Monsieur Thomas X... une activité commerciale de prospection de la clientèle, étant observé que ses responsabilités de directeur technico-commercial sont encadrées par le pouvoir de la direction de l'entreprise qu'il s'agisse de la définition de la politique commerciale de l'entreprise ou de l'embauche de collaborateurs ; que parmi les pièces produites aux débats par l'employeur figure une note de service n° 001/ 2004, signée par Monsieur Thomas X..., déterminant les règles à suivre pour compléter le « stock de démonstration » à sa disposition et pour remettre un échantillon à un client, la note s'achevant par une invitation expresse à « développer plus intensément le chiffre d'affaires » de la société ; que l'appelante a souligné, sans être contredite par le salarié, que l'entreprise ne comptait que 10 salariés ; que l'article 5 du contrat de travail, intitulé « obligations professionnelles », est ainsi libellé : telles qu'elles figurent dans le règlement intérieur de l'entreprise qui sera communiqué à Monsieur Thomas X.... Les fonctions de Monsieur Thomas X..., telles qu'exposées à l'article 4, nécessitent qu'il consacre toute sa force de travail au développement de la société. Monsieur Thomas X... s'engage à consacrer toute son activité à la société Joke France Sarl et s'interdit de représenter toute autre maison concurrente ou non de la société Joke France Sarl. Monsieur Thomas X... s'engage à ne pas exercer d'activité professionnelle complémentaire de quelque nature que ce soit sans autorisation expresse de l'entreprise. Monsieur Thomas X... s'engage à se conformer strictement à toutes les instructions émanant de la direction ou de son représentant. Il devra notamment effectuer tous les déplacements et visites de clients qui seraient prescrits par la société Joke France Sarl et ce, dans les conditions et délais qui lui seront indiqués. Sous cette réserve, il aura toute liberté pour l'organisation de ses tournées, la fréquence des visites à effectuer et l'opportunité de celles-ci. Monsieur Thomas X... devra se conformer rigoureusement aux tarifs et conditions de vente de la société. Dans le cas où un client n'effectuerait pas les versements auxquels il s'est engagé dans les limites et conditions prévues, Monsieur Thomas X... devra, si la société le lui demande, intervenir auprès de ce client pour obtenir l'exécution intégrale de ses engagements. » ; que l'article 5 du contrat de travail ne révèle pas un statut de salarié bénéficiant d'une large autonomie ; que s'il y est mentionné une relative liberté organisationnelle de Monsieur Thomas X... dans l'exercice de son activité, c'est « sous réserve » des instructions pouvant lui être données par la direction concernant les déplacements et visites de clients, « dans les conditions et délais » indiqués par celle-ci ; que dans la lettre de recadrage du 7 février 2007 portant, notamment, sur l'absence de transmission de rapports de visite de la clientèle, il est indiqué ce qui suit : « toutes les requêtes et exhortations à ton égard, qu'elles soient orales ou écrites, ne semblent avoir aucune influence sur les taches et les modes d'action que nous souhaitons » ; qu'à cet égard, la société Joke France verse aux débats une note de service destinée à Monsieur Thomas X... datée du 15 mars 2006 et signée par la gérante de la société, Madame D..., contenant le paragraphe suivant : « Il est absolument indispensable que Claudine soit au courant de tes déplacements. A compter de ce jour, je te demande de lui remettre chaque semaine ton emploi du temps avec les noms et lieux des clients. De cette façon elle pourra te prévenir si un client du secteur où tu te trouves avait besoin d'un renseignement ou d'une visite urgente. Comme chaque commercial tu voudras bien à partir de dorénavant établir chaque semaine un rapport de visite avec nom des clients visités, nom de la personne vue chez le client et objet de la visite. Ceci afin d'avoir un suivi de la clientèle en cas d'absence prolongée de ta part » ; que la société Joke France évoque et produit une autre note destinée à Monsieur Thomas X..., datée du 15 aout 2008 (2006), mais rédigée en allemand, sans que cette pièce ne soit accompagné d'une traduction en français en permettant sa compréhension ; qu'il importe de souligner que dans son courriel du 12 février 2007 portant réponse à la lettre de recadrage du 7 février 2007, Monsieur Thomas X... lui-même mentionne et joint à son message un dossier correspondant à un « rapport hebdomadaire » en l'occurrence le « rapport semaine calendaire 5 » ; que le salarié, auteur du courriel précité, ne fournit aucun élément concret concernant les pièces jointes au message, de nature à démontrer que le rapport hebdomadaire transmis ne correspondait pas à un rapport de visite de la clientèle ; que Monsieur Thomas X... n'a pas davantage présenté d'observations concernant ses plannings hebdomadaires pour la période allant du 26 février 2007 au 6 avril 2007, produits par l'employeur, mentionnant les noms d'entreprises, sans autres précisions ni rapports de visite complémentaires demandés par l'entreprise ; que l'argumentation du salarié repose uniquement sur le caractère « fictif » du grief en raison de son incompatibilité radicale avec la nature des fonctions exercées au sein de la société Joke France, argumentation dépourvue de fondement ainsi qu'il a été exposé ci-dessus ; qu'il apparait ainsi que le grief tiré du défaut de respect des instructions visant à l'établissement de rapports de visite de la clientèle, excepté pour la « semaine calendaire 5 » mentionnée dans le courriel du salarié du 12 février 2007, en dépit du rappel de février 2007, est établi à suffisance de droit par l'employeur ; QUE la société Joke France invoque, en second lieu, un refus des instructions relatives au lieu d'entreposage du matériel et au traitement des stocks ; qu'il résulte de la lettre de licenciement que la société Joke France reproche à Monsieur Thomas X... d'avoir tardé à ramener dans des locaux de l'entreprise du matériel professionnel utilisé dans le cadre de son activité et le fait que l'inventaire, effectué une fois le matériel rapporté par le salarié, a révélé une différence de l'ordre d'environ 20. 000, 00 € entre le stock théorique et le stock réel de la société, ce que conteste le salarié ; que la société Joke France produit aux débats deux courriels des 8 et 31 janvier 2007 ainsi qu'une note de service du 28 mars 2007 invitant le salarié à communiquer à l'entreprise l'état du matériel en sa possession aux fins de réalisation de l'inventaire de l'année 2006 et non à ramener ledit dans les locaux de l'entreprise, documents insusceptibles d'étayer le grief susmentionné ; que l'employeur fournit également une lettre comminatoire de restitution du matériel du 11 avril 2007, mais reconnait que le salarié a satisfait à cette injonction dès le 13 avril 2007, ainsi qu'une attestation de l'expert-comptable certifiant que la valeur du stocks de marchandises comptabilisées dans les états annuels au 31. 12. 2006 a été réduite de 23. 292, 07 euros « correspondant aux pièces manquantes du stock de Monsieur Thomas X... » ; qu'au regard de l'imprécision de la conclusion susvisée et en l'absence d'indications sur les conditions dans lesquelles l'expert-comptable est parvenu à cette conclusion d'imputation certaine au salarié de la dépréciation du stock, le grief ne peut être retenu, étant observé que la lettre de licenciement évoque une différence entre le stock théorique « basé sur les bons de mise à disposition de matériel » et le stock réel et que l'employeur ne produit pas lesdits bons mais un listing non contradictoire du matériel prétendument manquant en prenant en compte « la liste de démo » du salarié ; QUE sur l'exécution défectueuse de la prestation de travail, la société Joke France reproche à Monsieur Thomas X... une exécution défectueuse de la prestation de travail ayant pour origine une inertie fautive, ce que conteste le salarié en arguant d'un défaut de preuve par l'employeur de l'inertie alléguée ; que la société Joke France soutient, en premier lieu, que la faiblesse du nombre de clients prospectés se retrouve dans le chiffre d'affaires réalisé en 2006 par Monsieur Thomas X..., en charge de deux secteurs, chiffre inférieur à celui de son collègue en charge d'un seul secteur ; que l'employeur opère une comparaison de chiffre d'affaires entre deux salariés dont Monsieur Thomas X... sans même que le ou les secteurs géographiques de ce dernier ne soient précisés ni a fortiori justifiés ; que la corrélation avancée par l'employeur ne présente, en tout état de cause, aucun caractère d'automaticité, la qualité et/ ou le prix des produits pouvant être à l'origine de moindre commandes de la part d'une clientèle pourtant régulièrement visitée ; que les deux observations susvisées s'appliquent à l'imputation de la baisse spécifique du chiffre d'affaires au Luxembourg à Monsieur Thomas X... ; QUE la société Joke France invoque, en deuxième lieu, une carence de Monsieur Thomas X... dans le traitement des demandes de clients existants ou potentiels ; que si la société Joke France produit plusieurs documents attestant de l'intérêt exprimé par diverses entreprises ou par une université pour des produits commercialisés par elle, le reproche selon lequel ces manifestations d'intérêts n'auraient reçu aucune suite du fait de l'inertie de Monsieur Thomas X... correspond à une simple allégation de l'employeur, lequel ne fait état d'aucun élément concret de nature à démontrer que les entreprises ou université visées dans les documents n'ont pas été contactées ou reçues satisfaction et qu'une telle situation serait imputable à Monsieur Thomas X... ; que l'appelante verse cependant aux débats les attestations de Mesdames Z... et A..., assistance commerciale et secrétaire commerciale, qui relatent, de manière générale, les appels téléphoniques de clients mécontents du fait que Monsieur Thomas X... ne donnaient pas suite à leurs demandes ; qu'il convient de relever également que la société Joke France reproche plus spécifiquement à Monsieur Thomas X... un défaut d'exploitation du fichier clients remis par la société Strack, après le transfert des activités de distribution à Joke France ; que le rapport de réunion du 24 février 2006 révèle la responsabilité particulière de Monsieur Thomas X... dans la reprise de la clientèle de la société Strack et la mise en place d'une action de « phoning » à destination de ces derniers ; que le rapport de la réunion qui s'est tenue le 7 juillet 2006 mentionne que Monsieur Thomas X... « signale qu'il va mettre en place une action de phoning afin d'exploiter la clientèle de Strack au profit de Joke et relancer les anciens clients Strack », ce qui révèle que l'action prévue en février 2006 n'avait pas été mise en oeuvre ; qu'il résulte de l'attestation du 14 décembre 2007 de Monsieur E..., technico-commercial, que Monsieur Thomas X... n'a pas fait de suivi de la clientèle de Strack et n'a même « jamais entrepris d'actions commerciales sur les produits de cette marque » ; que le salarié ne fournit aucun élément concret de nature à contredire les observations susmentionnées et se borne, pour l'essentiel, à se retrancher derrière sa qualité de directeur technico-commercial ; que Monsieur Thomas X... a encore communiqué la traduction d'un courriel de la société Strack adressée à la société Joke France indiquant « nous vous confirmons un recul du chiffre d'affaires en France après le transfert des activités de distribution à Joke France fin novembre 2005 » ; que ce même document, qui fait état de l'impossibilité pour la société Strack de participer financièrement au salon GO PLAST en raison du fait qu'elle n'a pas été informée en temps voulu de la participation audit salon de la société Joke France, est, toutefois, insuffisant pour établir une responsabilité personnelle exclusive de Monsieur Thomas X... de cette situation et de la prise en charge du coût total de cette manifestation, soit 6. 700, 00 €, par l'appelante ; que la société Joke France formule, en troisième lieu, un reproche spécifique à l'égard de Monsieur Thomas X..., à savoir une carence fautive à l'origine de la mévente de la machine Babyplast, alors même que de nombreux contacts avec des clients potentiellement intéressés avaient été noués dans une foire en juin 2006 et que le salarié s'était engagé, après étude du produit et du marché, à promouvoir et à vendre de 20 à 30 machines par an ; que Monsieur Thomas X... conteste ce reproche en faisant valoir que la décision de commercialisation de la machine en cause incombait au responsable de la société mère allemande, lequel ne s'était jamais résolu à le faire, et excipe, à cet égard, d'une lettre du 19 juin 2006 de la gérante de la société Joke France ; que dans cette lettre, la gérante évoque effectivement une décision à venir, avant mi-juillet, de Monsieur F...sur la commercialisation de la machine Babyplast ; que la société Joke France produit un rapport de réunion du 7 juillet 2006, postérieure à ladite lettre, confirmant l'engagement de Monsieur Thomas X... quant à la commercialisation de la machine Babyplast et comprenant la mention suivante : « Accord est donné à Thomas X... pour développer la vente de ce produit, la réalisation d'un prospectus en français et toute forme d'action pour vendre ce produit » ; que le rapport mentionne également l'achat de la machine Expo demandé par Monsieur Thomas X... ; q ue l'appelante justifie de l'acquisition de ladite machine par la production de la facture émise par la société fabricante après une commande par courriel du 18 juillet 2006 ; que la teneur du rapport susmentionné est confirmée par l'attestation de Madame G..., assistante de direction au sein de la société Joke France ; qu'il résulte de l'attestation du 14 décembre 2007 de Monsieur E..., technico-commercial, que Monsieur Thomas X... n'a pas réalisé le travail lui incombant de préparation d'un prospectus en français et que la société Joke France a perdu le marché de la distribution de ce produit ; que la perte dudit marché est confirmée par un courriel de la société fabricante du 26 juin 2007, laquelle invoque les faibles chiffres de vente du produit en cause ; que les éléments mentionnés ci-dessus révèlent une carence fautive de Monsieur Thomas X... dans la commercialisation de la machine Babyplast, pour laquelle il s'était engagé de manière chiffrée auprès de son employeur, indépendamment de la perte du marché non visé dans la lettre de licenciement ; qu'il est reproché, en quatrième lieu, à Monsieur Thomas X... d'avoir fait confectionner aux frais de la société un boitier de protection et une table à souder, pour un cout total de 11. 441 euros, n'ayant, par la suite, fait l'objet d'aucune vente ; qu'il est constant que les projets de développements ont été soumis à la direction de la société Joke France et avalisés par celle-ci ; que l'échec commercial des produits concernés n'est pas, à elle seule, suffisante pour conclure à une exécution défectueuse de la prestation de travail ayant pour origine une négligence fautive, une abstention volontaire ou une mauvaise volonté délibérée du salarié ; QU'il s'évince des motifs qui précèdent que la réalité d'un comportement fautif du salarié est établie à suffisance de droit par l'employeur ; que ce comportement fautif rendait impossible son maintien dans l'entreprise, l'inertie fautive du salarié dans son activité commerciale, prévue par le contrat de travail, dans le cadre d'une entreprise de taille modeste, combinée à un refus réitéré d'exécution des instructions visant à l'établissement de rapports de visite de la clientèle devant permettre à l'employeur d'appréhender la réalité du travail fourni empêchant toute poursuite du contrat de travail ; que le jugement du Conseil de Prud'hommes de METZ ayant considéré que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse doit être infirmé ; que Monsieur Thomas X... sera, en conséquence, débouté de l'ensemble de ses prétentions liées à la rupture du contrat ;
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que lorsque la faute grave reprochée par la lettre de licenciement est constituée par un ensemble de griefs cumulatifs, le juge ne peut retenir la qualification de faute grave s'il constate que certains d'entre eux n'ont pas été établis ; qu'en retenant la qualification de faute grave, tout constatant que les griefs tenant au refus des instructions relatives au lieu d'entreposage du matériel et au traitement des stocks, à la faiblesse du nombre de clients prospectés, à l'impossibilité pour la société Strack de participer financièrement au salon GO PLAST et au développement d'un boitier de protection et une table à souder, la cour d'appel a violé l'article L 1232-6 du code du travail ;
ALORS QUE s'agissant du grief de manquement à l'obligation de remettre des comptes-rendus de visite, l'employeur avait fait valoir dans le débat contradictoire que la lettre du 7 février 2007 constituait un avertissement ; qu'en estimant pour écarter toute discussion sur le moyen du non-cumul des sanctions disciplinaires, que la lettre du 7 février 2007 ne caractérise pas une réelle volonté de sanctionner un agissement fautif et correspond à un simple rappel à l'ordre écartant ainsi la qualification de sanction disciplinaire, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé l'article 1134 du Code civil
ALORS encore QUE les fonctions attribuées au salarié et partant des obligations qui peuvent lui être imposées relèvent d'une recherche concrète des tâches accomplies dans l'entreprise ; qu'en justifiant que l'obligation du salarié de remettre des comptes-rendus de visite en complément des rapports hebdomadaires pouvait lui être imposée au regard des obligations générales énoncées au contrat de travail sans s'expliquer concrètement sur l'incompatibilité de cette obligation avec les fonctions de directeur commercial assumant la responsabilité commerciale de l'ensemble de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1221-1 du code du travail, ensemble des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail ;
ALORS en tout état de cause QU'en n'expliquant pas en quoi ce manquement était d'une gravité telle qu'elle ne permettait pas le maintien du salarié dans l'entreprise durant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail ;
ALORS ensuite QUE les griefs reprochés par l'employeur doivent être objectifs, précis et matériellement vérifiables ; qu'en se contentant de retenir que Mesdames Z... et A..., assistante commerciale et secrétaire commerciale, ont relaté de manière générale les appels téléphoniques de clients mécontents du fait que Monsieur X... ne donnait pas suite à leurs demandes, pour dire que la faute grave était établie sans caractériser précisément et concrètement le manquement reproché au salarié, son importance, son imputabilité et son impact préjudiciable pour l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail ;
ALORS enfin QUE la faute grave est constituée par un manquement du salarié à ses obligations contractuelles qui rend immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en retenant la faute grave au motif que le défaut d'exploitation du fichier clients remis par la société Starck et la carence à l'origine de la mévente de la machine Babyplast étaient établis, sans rechercher l'importance de ces deux manquements au regard de l'ensemble des prestations de travail du salarié et de l'impact préjudiciable pour l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard des articles L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-24500
Date de la décision : 19/05/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 08 juillet 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mai. 2016, pourvoi n°14-24500


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.24500
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