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17/05/2016 | FRANCE | N°14-21948

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mai 2016, 14-21948


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 27 juin 2006 par la société Lippi la Clôture (la société) en qualité d'opérateur de fabrication ; qu'il a été reconnu, les 15 juin 2010 et 14 mars 2011, atteint de maladies professionnelles ; que déclaré, à l'issue de deux examens médicaux des 15 mai et 1er juin 2012, inapte à tout poste, il a été licencié le 3 juillet 2012 ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 4121-1 et L. 1226-6 du code du travail ;
Attendu que pou

r débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 27 juin 2006 par la société Lippi la Clôture (la société) en qualité d'opérateur de fabrication ; qu'il a été reconnu, les 15 juin 2010 et 14 mars 2011, atteint de maladies professionnelles ; que déclaré, à l'issue de deux examens médicaux des 15 mai et 1er juin 2012, inapte à tout poste, il a été licencié le 3 juillet 2012 ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 4121-1 et L. 1226-6 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, l'arrêt retient que la caisse primaire d'assurance maladie a reconnu en 2011 que les maladies professionnelles déclarées en 2010 et 2011 par ce salarié n'étaient pas imputables à la société et qu'à ce titre elles ont été imputées non au compte de la société mais au compte spécial, et qu'en l'absence d'élément autre que la référence aux maladies professionnelles dans l'argumentation de l'intéressé, sur lequel pèse la charge de la preuve, il ne peut être fait droit à la demande ;
Qu'en statuant ainsi, alors que ni l'application des règles protectrices aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ni l'appréciation de l'existence de manquements à l'obligation de sécurité de résultat, ne dépendent des décisions d'imputation des dépenses occasionnées par cette maladie professionnelle au compte spécial prévu par l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'employeur avait commis un manquement à son obligation de sécurité de résultat, a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 1226-10 du code du travail ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur a consulté le 4 juin 2012 les différentes structures du groupe Lippi par un courriel mentionnant la nature de l'inaptitude du salarié ainsi que son ancienneté et leur précisant, d'une part qu'en cas de doute, il pouvait interroger le médecin du travail, d'autre part que si une formation pour l'adaptation à un poste était nécessaire, il pourrait faire appel à un organisme de formation, que cette recherche est suffisamment personnalisée et ciblée pour permettre aux entreprises de répondre en connaissance de cause, que l'employeur produit les réponses négatives qui lui ont été adressées et qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir réitéré une recherche de reclassement après la lettre du médecin du travail du 11 juin 2012 précisant que la contre-indication portait sur les postes en production ;
Qu'en se déterminant ainsi, au regard des seules recherches effectuées dans le groupe auquel appartient l'entreprise, sans caractériser les recherches effectuées par l'employeur en vue de reclasser le salarié dans l'entreprise elle-même, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et attendu que la cassation prononcée du chef du dispositif disant le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse entraîne par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif condamnant l'employeur à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour défaut de notification écrite au salarié des motifs s'opposant à son reclassement ;
PAR CES MOTIFS, vu l'article 624 du code de procédure civile :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute la société Lippi la Clôture de ses demandes reconventionnelles en remboursement de l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement prévues à l'article L. 1226-14 du code du travail, l'arrêt rendu le 28 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Lippi la Clôture aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne cette société à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il avait dit que les maladies professionnelles de M. X... ont été contractées au sein de la SARL Lippi la Clôture et dit que la SARL Lippi la Clôture n'apporte pas la preuve d'une imputabilité de la maladie professionnelle de M. X... à un précédent employeur, et d'avoir débouté M. X... de la demande de dommages-intérêts qu'il présentait au titre de la méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat,
AUX MOTIFS QU'il ressort de l'analyse des pièces produites par la société Lippi la Clôture que la CPAM a finalement reconnu en 2011 que les maladies professionnelles déclarées en 2010 et 2011 par M. X... ne lui étaient pas imputables, et qu'elles ont à ce titre été imputées non au compte de la société Lippi la clôture mais au compte spécial ; que dans ces conditions, quand bien même M. X... a été licencié pour inaptitude physique médicalement constatée, il ne peut être considéré que ce licenciement pour inaptitude est imputable à son activité salariée au sein de la société Lippi la clôture, étant précisé qu'il n'était salarié de celle-ci que depuis 4 ans lors de son arrêt de travail en 2010 et qu'il avait eu auparavant d'autres activités professionnelles l'exposant à ces maladies ; qu'en conséquence, M. X... ne peut se prévaloir dans ses rapports avec son employeur la société Lippi la clôture des conséquences d'un licenciement pour inaptitude causé par une maladie professionnelle (…) ; que dès lors qu'il est considéré que les maladies professionnelles de M. X... ne sont pas imputables à la société Lippi la Clôture, et en l'absence d'éléments autre que la référence aux maladies professionnelles dans l'argumentation de M. X..., il ne peut être fait droit à cette demande dans laquelle la charge de la preuve pèse sur le salarié ;
1° - ALORS QUE ni l'application des règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ni l'appréciation des responsabilités encourues par l'employeur à qui il est reproché d'avoir manqué à son obligation de sécurité de résultat ne dépendent des décisions prises par la caisse primaire d'assurance maladie à l'égard de l'employeur en ce qui concerne l'imputation des dépenses engagées ; qu'en infirmant le jugement qui avait dit que les maladies professionnelles de M. X... ont été contractées au sein de la SARL Lippi la Clôture et dit que celle-ci n'apporte pas la preuve d'une imputabilité ces maladies à un précédent employeur, et en déboutant le salarié de ses demandes au titre du manquement à l'obligation de sécurité de résultat au seul motif que la caisse primaire d'assurance maladie avait décidé d'imputer ces maladies au compte spécial prévu par l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale et non au compte de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et suivants et L. 4121-1 et suivants du code du travail ;
2° - ALORS au surplus QUE le fait qu'une maladie professionnelle puisse être imputable à divers employeurs chez lesquels le salarié a été exposé au risque n'interdit pas à celui-ci, pour demander une indemnisation complémentaire, de démontrer que le dernier d'entre eux a manqué à son obligation de sécurité de résultat ; qu'en déboutant le salarié de la demande qu'il présentait à ce titre sans constater qu'il n'existait aucun lien entre la maladie qui l'avait rendu inapte et les conditions de travail qui avaient été les siennes au sein de la société Lippi la Clôture, ni constater que l'employeur n'avait commis aucun manquement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-6 et L. 4121-1 et suivants du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement,
AUX MOTIFS QUE M. X... a été déclaré inapte à tout poste par le médecin du travail (…); que les délégués du personnel ont bien été consultés le 13 juin 2012 sur le reclassement de Monsieur X... et ont émis l'avis qu'ils ne voyaient pas de solution de reclassement possible ; que, s'agissant des recherches de reclassement, l'employeur a consulté par mail le 4 juin 2012 les différentes structures du groupe Lippi ; que ce mail faisait référence à la nature de l'inaptitude de M. X..., à son ancienneté et mentionnait : « Nous souhaiterions savoir si vous avez des postes correspondant à ces restrictions ; si vous avez des doutes, nous pourrons interroger le médecin du travail. Si M. X... a besoin d'une formation pour l'adapter au poste, nous pourrons faire appel à un organisme de formation… Nous restons à votre disposition pour tout complément d'info » ; que cette recherche est dès lors suffisamment personnalisée et ciblée pour permettre aux entreprises consultées d'émettre une réponse en connaissance de cause, et la société Lippi la Clôture produit les réponses négatives qui lui ont été adressées ; que de même, au regard de cette formulation ouverte, il ne peut être reproché à la société Lippi la Clôture de ne pas avoir réitéré une recherche de reclassement après le courrier du médecin du travail du 11 juin 2012 indiquant que « la mobilité réduite de son épaule lui M. X... contre indique l'ensemble des postes en production » ; qu'en effet, la société envisageait déjà dans son mail du 4 juin 2012 un recours éventuel à une formation dans l'hypothèse où un reclassement sur des postes de production était impossible ».
ALORS QUE l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher les possibilités de reclassement du salarié au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; qu'en se bornant à constater que l'employeur avait sollicité les autres sociétés du groupe et « envisagé » l'hypothèse d'une formation si celles-ci le souhaitaient, sans caractériser concrètement les recherches effectuées par l'employeur, pourtant dûment informé par le médecin du travail de ce que l'affection du salarié interdisait seulement les postes en production, en vue de reclasser ce dernier sur les postes de l'entreprise elle-même, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de postes de travail ou l'aménagement du temps de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-21948
Date de la décision : 17/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 28 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mai. 2016, pourvoi n°14-21948


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.21948
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