LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° D 15-10. 252 à K 15-10. 258 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 7 novembre 2014), que M. X... et six autres salariés, employés par la société Lafarge granulats Sud, sont soumis pour la plupart à un mode d'organisation cyclique sur quatre semaines qui les conduit à travailler, de manière répétée, soit 3 jours une semaine puis 4 jours la semaine suivante, soit 4, 75 jours une semaine puis 4 jours la semaine suivante, soit 5 jours une semaine et 4 jours la semaine suivante ; que contestant le mode de décompte des congés payés adopté dans l'entreprise, dont ils soutiennent qu'il est effectué en heures, ils ont saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de dire que le calcul par l'employeur des droits à congés payés et la prise de ceux-ci sont effectués en jours conformément aux dispositions légales et de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des articles L. 3141-3 à L. 3141-7 du code du travail que le décompte des congés payés s'effectue en jours ouvrables ou en jours ouvrés et non en heures ; qu'en affirmant que le suivi des congés s'effectuait bien en jours et non en heures, tout en constatant que lorsque les salariés prennent un jour de congés, il leur était soustrait la valeur d'1, 43, 1, 14 ou 1, 11 jour, selon le nombre de jours travaillés dans le cycle, après calcul effectué en fonction de la durée journalière du travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles susvisés ;
2°/ que les salariés avaient fait valoir que pour ceux travaillant au sein du service « Laboratoire » également dans le cadre de cycles, la société appelante effectuait un décompte de congés payés en jours et non en heures, ce dont attestait notamment le bulletin de salaire de M. Y..., occupant l'emploi d'« agent technique Labo », de sorte que le calcul des congés payés effectué pour eux caractérisait une inégalité de traitement fautive ; qu'en omettant d'examiner ce moyen déterminant pour l'issue du litige, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 3141-3 à L. 3141-7 du code du travail, ensemble du principe « à travail égal, salaire égal », de l'article L. 1132-1 du code du travail et de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de lutte contre les discriminations ;
3°/ que les salariés avaient fait valoir qu'il ne bénéficiaient pas du minimum légal de 30 jours ouvrables ou 25 jours ouvrés, comme cela ressortait des indications portées sur les bulletins de salaire, selon lesquelles, lorsque le salarié prenait un jour de congé payé, l'employeur en décomptait davantage (1, 43, 1, 14 ou 1, 11, selon le nombre de jours travaillés dans le cycle) ; que la cour d'appel a affirmé que les salariés avaient bien bénéficié, pour chaque année en cause, de congés correspondant à 25 jours ouvrés entiers, soit 5 semaines calendaires ; qu'en statuant de la sorte, de façon péremptoire, sans préciser sur quels éléments elle s'appuyait pour parvenir à cette conclusion déterminante pour l'issue du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3141-3 à L. 3141-7 du code du travail ;
Mais attendu que le régime des droits à congés appliqué par l'employeur ne doit pas être moins favorable que celui résultant de la loi ou de dispositions conventionnelles plus favorables ;
Et attendu qu'ayant souverainement retenu que le suivi et le décompte des congés payés avait été effectué, non pas en heures, mais en jours, la cour d'appel qui, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ni s'être bornée à de simples affirmations, a constaté que les salariés avaient effectivement disposé de vingt-cinq jours ouvrés de congés payés, a, peu important la méthode de calcul adopté, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen commun aux pourvois n° D 15-10. 252 à K 15-10. 258 produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour MM. X..., Z..., Mme B..., MM. Arezki et Mohamed C... et MM. D...et A...
Le moyen fait grief aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR dit que le calcul des droits à congés payés par la société LAFARGE GRANULATS SUD ainsi que la prise de ceux-ci était bien effectués en jours conformément aux dispositions légales, d'AVOIR en conséquence débouté les salariés de l'ensemble de leurs demandes fondées et ordonné la restitution sous astreinte des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée aux jugements déférés.
AUX MOTIFS QUE, sur les demandes du salarié, en préliminaire, il convient de relever que tant la société Lafarge que le salarié citent à l'appui de leur argumentation respective les mêmes dispositions légales à savoir les articles L. 3141-3 et L. 3141-4 du code du travail ; que l'article L. 3141-3 du code du travail dispose que : " Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur. La durée totale du congé exigible ne peut excéder trente jours ouvrables " ; que selon l'article L. 3141-4 du même code, " Sont assimilées à un mois de travail effectif pour la détermination de la durée du congé les périodes équivalentes à quatre semaines ou vingt-quatre jours de travail " ;
QU'en effet, (s'agissant de MM. Z..., C... Mohamed, C... Arezki et A... l'intimé fait valoir que lorsqu'il pose 1 jour de congé payé, la Société Lafarge en décompte 1, 14 jours, chiffres qui sont ainsi portés sur les bulletins de paie et qui ne sont pas contestés par la société Lafarge ; qu'il déduit de cette écriture comptable qu'il ne bénéficie donc pas des 25 jours ouvrés de congés payés annuels auxquels il est en droit de prétendre ; que cependant, la Cour relève que le salarié a bien bénéficié, pour chaque année en cause, de congés correspondant à 25 jours ouvrés entiers, soit cinq semaines calendaires, c'est-à-dire précisément des droits ouverts par le code du travail dans son article L. 3141-3 ; que (le salarié) travaille, dans le cadre d'un cycle de quatre semaines, (ou d'un cycle de autre semaines, 4, 75 jours la première semaine et 4 jours la suivante, contrairement aux salariés non soumis à un cycle qui acquièrent 2, 08 jours ouvrés de congés dès lors qu'ils ont travaillé vingt jours que le salarié acquiert ainsi 1, 14 fois plus vite de congés qu'un salarié qui travaille cinq jours par semaine (20/ 17, 5 = 1, 14) ; que lorsque (le salarié) pose une journée de congé qui s'impute sur un jour où il aurait normalement dû travailler, il lui est donc soustrait la valeur d'1, 14 jours, ce qui tient compte du seul fait qu'il travaille 4, 75 jours ou 4 jours par semaine et non 5 jours ; que s'il ne lui était pas soustrait la valeur d'1, 14 jours pour chaque jour de congé (le salarié) disposerait, en posant 25 jours ouvrés, de 32 jours ouvrés de congés payés ; qu'en d'autres termes et pour faciliter la compréhension du raisonnement, selon les dispositions légales, tout salarié a droit à 30 jours ouvrables ou 25 jours ouvrés de congés payés, ce qui correspond à cinq semaines calendaires ; que (le salarié) travaillant dans le cadre d'un cycle de 4, 75 jours une semaine et 4 jours la suivante, il en résulte que :- en posant seulement quatre jours ouvrés de congé la semaine où il travaille 4 jours (là où le salarié travaillant sur cinq jours devrait en poser cinq), il disposerait d'une semaine complète de congés payés, soit cinq jours ouvrés ;- en posant 25 jours ouvrés de congés, il comptabiliserait non pas cinq semaines de congés payés mais cinq semaines et 3, 5 jours ouvrés, soit 28, 5 jours ouvrés de congés payés ; que, comme le soulève à bon droit la Société Lafarge, la singularité de l'aménagement du temps de travail sous forme de cycle ne doit ni desservir le salarié en cycle, ni à l'inverse l'avantager de manière injustifiée ; que suivre l'argumentation de (le salarié) reviendrait à lui accorder un nombre de jours de congés plus important, en violation du principe d'égalité de traitement entre les salariés ; que, comme le soutient à juste titre la Société Lafarge, le suivi des congés s'effectue bien en jours et non en heures, l'existence d'une virgule correspondant à la transposition d'un jour de congé d'un salarié travaillant 5 jours par semaine pour un salarié en cycle (1 = 1, 14 dans le cas (du salarié) qui travaille 17, 5 jours dans le cadre d'un cycle de quatre semaines ; qu'il est donc clairement établi que le décompte des congés est bien effectué en jours par la société Lafarge et que l'intimé a bien disposé de 25 jours ouvrés de congés payés, soit cinq semaines de congés payés chaque année, de sorte que, contrairement à ce qu'il soutient, ses droits ne sont nullement compromis ; que, dès lors, aucune faute n'est établie à rencontre de la société Lafarge qui a démontré la régularité du calcul effectué en matière de droits à congés payés du salarié, si bien que ce dernier n'est fondé à réclamer ni un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés, ni des dommages et intérêts pour inobservation des dispositions légales, ni la délivrance d'une quelconque injonction à la société Lafarge ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris et de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes ; que, sur la demande reconventionnelle de la société Lafarge, que la société Lafarge demande que soit ordonnée la restitution de la somme qu'elle a versée au salarié en vertu de la disposition du jugement relative au rappel d'indemnité compensatrice de congés payés assortie de l'exécution provisoire ; que, même si le présent arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution de la somme versée en exécution du jugement et constitue le titre exécutoire ouvrant droit à cette restitution, il convient, toutefois, pour clarifier les effets de la décision, d'ordonner expressément la restitution par le salarié de ladite somme à la société Lafarge, sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte ; qu'il convient, en outre, de rappeler que la somme devant être restituée portera intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, du présent arrêt ouvrant droit à restitution.
AUX MOTIFS identiques concernant M. X..., sous réserve qu'il travaille en cycle de quatre semaines, trois jours la première semaine et quatre jours la suivante, et acquiert ainsi 1. 43 fois plus vite des congés qu'un salarié travaillant cinq jours par semaine (20/ 14 = 1, 43), et M. D..., sous réserve qu'il travaille dans le cadre d'un cycle de cinq jours une semaine et quatre jours la suivante, et acquiert ainsi 1, 11 fois plus vite des congés qu'un salarié qui travaille cinq jours par semaine (20/ 18 = 1, 11).
ET AUX MOTIFS, s'agissant de Mme B... QUE la Cour relève qu'il résulte de l'examen des bulletins de paie versés aux débats que la salariée a bien bénéficié, pour chaque année en cause, de congés correspondant à 25 jours ouvrés entiers, soit cinq semaines calendaires, c'est-à-dire précisément des droits ouverts par le code du travail dans son article L. 3141-3 ; Que, ainsi que le soutient ajuste titre la Société Lafarge, le suivi des congés s'effectue bien en jours et non en heures ; Que chaque mois, conformément aux dispositions légales, Madame Maria B... acquiert 2, 08 jours ouvrés de congés, ce qui en soit aboutit mathématiquement à réaliser un suivi des congés avec une virgule, sans pour autant que l'on considère que les congés sont décomptés en heures. Qu'il est donc clairement établi que le décompte des congés est bien effectué en jours par la société Lafarge et que l'intimée a bien disposé de 25 jours ouvrés de congés payés, soit cinq semaines de congés payés chaque année, de sorte que, contrairement à ce qu'elle prétend, ses droits ne sont pas compromis, dès lors qu'aucune faute n'est établie à rencontre de la société Lafarge qui a démontré la régularité du calcul effectué en matière de droits à congés payés de la salariée, si bien que cette dernière n'est fondée à réclamer ni un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés, ni des dommages et intérêts pour inobservation des dispositions légales, ni la délivrance d'une quelconque injonction à la société Lafarge ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris et de débouter Maria B... de l'ensemble de ses demandes ;
ALORS, sur le calcul des droits à congés payés, QU'il résulte des articles L. 3141-3 à L. 3141-7 du Code du travail que le décompte des congés payés s'effectue en jours ouvrables ou en jours ouvrés et non en heures ; qu'en affirmant que le suivi des congés s'effectuait bien en jours et non en heures, tout en constatant que lorsque les salariés prennent un jour de congés, il leur était soustrait la valeur d'1, 43, 1, 14 ou 1, 11 jours, selon le nombre de jours travaillés dans le cycle, après calcul effectué en fonction de la durée journalière du travail, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé les articles susvisés.
ALORS encore à cet égard QUE les salariés avaient fait valoir que pour ceux travaillant au sein du service « LABORATOIRE » également dans le cadre de cycles, la société appelante effectuait un décompte de congés payés en jours et non en heures, ce dont attestait notamment le bulletin de salaire de Monsieur Y..., occupant l'emploi d'« agent technique Labo », de sorte que le calcul des congés payés effectué pour eux caractérisait une inégalité de traitement fautive ; qu'en omettant d'examiner ce moyen déterminant pour l'issue du litige, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 3141-3 à L. 3141-7 du Code du travail, ensemble du principe « à travail égal, salaire égal », de l'article L. 1132-1 du Code du travail et de l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de lutte contre les discriminations.
ALORS, sur la prise des congés payés, QUE les salariés exposants avaient fait valoir qu'il ne bénéficiaient pas du minimum légal de 30 jours ouvrables ou 25 jours ouvrés, comme cela ressortait des indications portées sur les bulletins de salaire, selon lesquelles lorsque le salarié prenait un jour de congé payé, l'employeur en décomptait davantage (1, 43, 1, 14 ou 1, 11, selon le nombre de jours travaillés dans le cycle) ; que la Cour d'appel a affirmé que les salariés avaient bien bénéficié, pour chaque année en cause, de congés correspondant à 25 jours ouvrés entiers, soit 5 semaines calendaires ; qu'en statuant de la sorte, de façon péremptoire, sans préciser sur quels éléments elle s'appuyait pour parvenir à cette conclusion déterminante pour l'issue du litige, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3141-3 à L. 3141-7 du Code du travail.