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03/05/2016 | FRANCE | N°14-29297

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mai 2016, 14-29297


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 30 avril 1996 en qualité de directeur par la société Milabia qui gère un centre Leclerc a été licencié pour faute grave le 2 septembre 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester le bien-fondé de la rupture ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que caractérise une faute grave le fait pour un directeur

de magasin d'adopter un comportement agressif et violent envers plusieurs collaborate...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... engagé le 30 avril 1996 en qualité de directeur par la société Milabia qui gère un centre Leclerc a été licencié pour faute grave le 2 septembre 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour contester le bien-fondé de la rupture ;

Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que caractérise une faute grave le fait pour un directeur de magasin d'adopter un comportement agressif et violent envers plusieurs collaborateurs ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la cour d'appel que Mme Y..., salariée, avait attesté que « vers fin juillet » (2009) « à 15h30/ 16H », M. X... « me jette un carton d'appareils photos et cartes mémoire », que Mme Z..., salariée, avait également témoigné qu'« il y a trois semaines (…) il est arrivé vers 15h30- 16h000 avec sa valise à roulettes de monnaie. Il a poussé la valise d'un coup de pied vers moi, j'ai fait un écart pour qu'elle ne tape pas dans mes tibias » et que Mme A..., salariée, avait écrit qu'un « après-midi de début juillet » (2009) M. X... l'avait bousculée et « a saisi violemment son tee-shirt au niveau du cou » ; qu'en considérant cependant que le licenciement de M. X... serait dénué de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°/ que le juge ne peut dénaturer les pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, les attestations de Mmes Y..., Z... et A... telles que citées par la cour d'appel faisaient état de faits précis, circonstanciés et datés concernant M. X... ; qu'en considérant cependant, pour dire le licenciement de ce dernier dénué de cause réelle et sérieuse, que ces témoignages n'énonceraient « aucun fait précis », ni « aucune date », dans des termes « vagues », et qu'ils seraient dès lors insuffisamment circonstanciés pour apporter la preuve de griefs susceptibles de justifier le licenciement de M. X..., la cour d'appel a dénaturé lesdites attestations en violation du principe susvisé et de l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ qu'une discussion tendue entre un directeur et sa subordonnée ne saurait excuser l'exercice par celui-ci d'une contrainte physique ; qu'en jugeant, pour dire que le licenciement de M. X... aurait été sans cause réelle et sérieuse, que le geste de ce dernier qui avait saisi une salariée par le col de son tee-shirt, qualifié par la cour d'appel de « fautif » devait cependant être remis dans son contexte d'énervement mutuel, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-2, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et retenant hors toute dénaturation, que les faits reprochés au salarié résultaient d'attestations insuffisamment circonstanciées et insusceptibles de justifier le licenciement, a pu décider que l'unique fait avéré ne constituait pas une faute grave eu égard à l'ancienneté du salarié ; qu'exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a estimé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu que pour condamner la société à payer au salarié une somme à titre de gratification bénévole, l'arrêt retient que le salarié justifie par la production de ses bulletins de paie qu'il percevait tous les ans en décembre une somme intitulée, en dernier lieu, « gratification bénévole », d'un montant de 10 000 euros en décembre 2008 et décembre 2007 de 9 600 euros en décembre 2006 et qu'il établit ainsi suffisamment l'usage qui lui permet d'étayer sa demande ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher la présence d'éléments caractérisant la constance, la généralité et la fixité de la prime, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Milabia à payer à M. X... la somme de 10 000 euros au titre de la gratification bénévole pour l'année 2009, l'arrêt rendu le 30 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Milabia.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur X... sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR en conséquence condamné la société MILABIA à lui verser les sommes de 23. 331, 33 € à titre d'indemnité de licenciement, 13. 290 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1. 329 € de congés payés y afférents, 1. 818, 28 € au titre de la mise à pied conservatoire, outre 181, 82 € de congés payés y afférents, 68. 665 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société MILABIA à rembourser les indemnités versées par Pôle Emploi à Monsieur X..., à concurrence de six mois ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le licenciement : M. X... a été licencié pour faute grave, et il conteste ce licenciement ; qu'aux termes de l'article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse ; que la faute grave dont la preuve appartient à l'employeur se définit comme un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que pour qualifier la faute grave il incombe donc au juge de relever le ou les faits constituant pour le salarié licencié une violation des obligations découlant de son contrat de travail ou des relations de travail susceptible d'être retenue, puis d'apprécier si ledit fait était de nature à exiger le départ immédiat du salarié ; que la lettre de licenciement sert de cadre strict au contrôle du juge qui forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 2 septembre 2009 énonce des motifs ainsi rédigés : « Durant le mois d'août, plusieurs salariées de la SAS M1LABIA (notamment Mesdames C..., B..., A..., Y..., G... et Z...) se sont plaintes non seulement de votre attitude générale, mais aussi du comportement agressif que vous tenez à leur égard (exemple : vous avez empoigné Madame A... par le tee-shirt). De même, il apparaît que vous avez tenu des propos injurieux et/ ou désobligeants, voire humiliants à l'égard des salariés. De même, les salariées précitées ont toutes manifesté leur mal être et leur appréhension quant à votre comportement lorsqu'elles prennent leur poste et certaines ont manifesté leur souhait de quitter la société. L'ensemble de ces faits, délibérés et volontaires de votre part sont graves, mais également ils sont susceptibles de provoquer des poursuites civiles et pénales à l'encontre de la Société, mais aussi de porter atteinte à son image. De plus, de tels agissements, au surplus parfois accomplis au vu et au su des autres salariés et des clients, d'une part ; sont contraires aux règles de management des équipes dont vous avez la charge et que vous devez appliquer, mais aussi d'autre part, aux obligations de loyauté et de bonne foi auxquelles vous êtes tenu en votre qualité de directeur de magasin... » ; que la société Milabia, sur laquelle repose la charge de la preuve, soutient que la réalité des faits reprochés est démontrée par les attestations qu'elle produit : Mme C..., salariée (pièce n° 10 de l'employeur), écrit notamment « De temps en temps, il nous envoyait une méchanceté pour nous provoquer. (...) J'ai vu plusieurs fois traiter ma chef de caisse comme une moins que rien devant les clients. (...) Bien entendu tout ceci finissait par des crises de larmes à l'accueil. (...) Parfois, il criait si fort de son bureau après les responsables que les clients étaient choqués de son comportement. (.) Depuis le début de l'été son comportement avait beaucoup changé, nous pouvions plus lui adresser la parole, il nous faisait peur. » ; que M. D..., salarié, écrit (pièce n° 11) : « En effet, depuis quelques mois son caractère est devenu exécrable, " il pète les plombs " pour un rien. (..) Les réprimandes deviennent quotidiennes (..) il m'est arrivé de trouver certaines de mes collègues en pleurs dans les vestiaires » ; que Mme Y..., salariée, écrit (pièce n° 12) : « Vers fin juillet, je me trouvais accroupie à l'accueil à faire du rangement, lorsque M. X... arrive à 15 h 30/ 16 h, me regarde méchamment et me jette un carton d'appareils photos et cartes mémoire qu'il ramène d'Anglet (..). Lorsque nous demandons un renseignement à M. X..., la réponse est « Vous vous démerdez, ça me fait chier », etc... plusieurs fois j'ai trouvé ma responsable en pleurs à l'accueil » ; que Madame Z..., salariée, écrit (pièce n° 13) : « Quand on embauche on a la boule au ventre (...) souvent il tend la main pour dire bonjour sans même prononcer le mot bonjour ». : « Il y a trois semaines, j'étais avec MW, au téléphone pour faire des recherches de chèques. Il est arrivé vers 15 h 30-16 h 00 avec sa valise à roulettes de monnaie. Il a poussé la valise d'un coup de pied vers moi, j'ai fait un écart pour qu'elle ne tape pas dans mes tibias. » ; que Madame A..., salariée, écrit (pièce n° 14) : « Dans un premier temps, il usait d'agressivité verbale dévalorisant l'équipe entière avec pour exemple cette phrase « Je travaille qu'avec des mongoles », puis à titre personnel, me dévalorisant auprès d'un membre de mon équipe lui disant « Ta chef fait n'importe quoi », il faisait aussi régulièrement des remarques désobligeantes sur leur vie privée (...) il usait également d'un ton agressif devant la clientèle (...) A l'agressivité verbale s'est ajoutée l'agressivité physique. Pour exemple, je citerais les fois où étant dans mon bureau, il m'apportait les bons de livraisons ou me les jetait du seuil de la porte (…) Mais la limite a été franchie cet aprèsmidi de début juillet où je me suis rendue à son bureau à sa demande pour lui donner un renseignement qu'il me demandait, la discussion est devenue tendue et il m'a claqué la porte au nez, par réflexe j'ai rouvert la porte, là M X... est sorti de son bureau et me bousculant, a saisi violemment mon teeshirt au niveau du cou. Un geste de trop. » ; que Madame G..., salariée, écrit (pièce n° 1 5) : « De jour en jour, il est de plus en plus difficile de venir travailler avec M. X.... Dès son arrivée le matin, l'ambiance devient plus lourde, (...) Il ne respecte personne, même les clients ouvrent des yeux ronds aux caisses lorsqu'il hurle depuis son bureau. Il est impossible de discuter avec lui, venir travailler tous les jours devient un calvaire, je suis toujours tendue et pleure souvent. » ; que Madame E..., qui se présente comme une cliente, écrit (pièce n° 16) : « J'ai pu constater à maintes reprises la façon irrespectueuse dont le directeur traitait son personnel et ce même devant les clients avec lesquels il n'était guère plus aimable. Il exerçait visiblement du harcèlement moral. » ; que les attestations de salariés, si elles paraissent se faire l'écho d'un contexte tendu, n'énoncent sauf rare exception aucun fait précis, ni aucune date, et sont souvent exprimées par des clichés en termes qui, s'ils relèvent d'un langage courant relâché, restent vagues (« une méchanceté », « traiter comme une moins que rien », « péter les plombs », « me regarde méchamment », « la boule au ventre »,...) ou ne décrivent que des situations anodines (scène de la valise à roulettes ; serrer la main sans prononcer le mot « bonjour »). Ces témoignages sont insuffisamment circonstanciés pour apporter la preuve de griefs susceptibles de justifier le licenciement de M. X... ; que la seule cliente ayant versé un écrit, d'ailleurs non conforme aux règles prévues par le code de procédure civile pour les attestions, n'explique pas comment, même en tant que « cliente assidue », elle aurait été en mesure de constater qu'il existait au sein du magasin un « harcèlement moral » qui n'est reproché à M. X... ni par les salariés placés sous ses ordres, ni par son employeur : que seul le grief relatif au fait d'avoir saisi une salariée, Mme F..., par le col de son t-shirt, circonstancié et précis, apparaît réel. Le fait de saisir une salariée par le col de son vêtement dénote pour un directeur de magasin un manque de maîtrise qui revêt un caractère fautif. Toutefois, ce geste doit être remis dans son contexte d'énervement mutuel, alors que la salariée elle-même reconnaît qu'elle venait de rouvrir brusquement la porte du bureau de M. X... après une première scène vive. Ce fait fautif unique n'est pas susceptible, particulièrement au regard de l'ancienneté de M. X..., de constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, encore moins de licenciement pour faute grave au sens de la définition ci-dessus rappelée ; que si des difficultés causées par le comportement de M. X... ou par sa façon de gérer le personnel placé sous son autorité étaient apparues, il appartenait à la société Milabia de vérifier préalablement les faits et de les caractériser pour pouvoir engager une procédure disciplinaire ; que c'est donc à juste titre que M. X... conteste son licenciement, qui sera déclaré être intervenu sans cause réelle et sérieuse ; Sur les conséquences financières du licenciement : Licencié pour faute grave, M. X... n'a pas perçu d'indemnité de licenciement et n'a pas bénéficié d'un préavis payé ou d'une indemnité compensatrice ; que son licenciement étant jugé sans cause réelle et sérieuse, il a vocation à se voir allouer les sommes correspondantes ; qu'il demande au titre de l'indemnité de licenciement une somme de 23. 331, 33 € en faisant état d'un calcul fondé sur une ancienneté de 15 ans et demi en raison de la reprise de son ancienneté, au 14 mars 1994 ; que la société Milabia, qui se limite à soutenir la faute grave, ne conteste ni l'ancienneté ni le montant sollicité ; qu'il sera en conséquence alloué à M. X... la somme de 23. 331, 33 € à titre d'indemnité de licenciement ; que de même, la société Milabia ne conteste pas le montant de 13. 290 € demandé par M. X... au titre de l'indemnité de préavis, pour un salaire brut de 4. 430 € ; que cette somme sera en conséquence allouée à M. X... au litre d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi que celle de 1. 329 € au titre des congés payés afférents, en application de l'article L. 1234-1 du code du travail ; qu'il demande également une somme de 1. 818, 28 € correspondant à la somme déduite de son salaire de septembre 2009 en raison de la mise à pied conservatoire prononcée par l'employeur, outre congés payés afférents, et il doit être fait droit à cette demande ; que M. X... demande des dommages-intérêts ; qu'aux termes de l'article L 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires bruts des six derniers mois ; que compte tenu de l'ancienneté de M. X... au moment de son licenciement (15 ans et 6 mois), de son âge, des salaires perçus au cours des six mois précédant la rupture des relations contractuelles, de sa situation après le licenciement, et des justificatifs produits aux débats, notamment les bulletins de salaire, il convient de fixer à la somme de 68 665 € le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de ce texte ; que par ailleurs il résulte des termes de l'article L. 1235-4 du code du travail que, dans les cas où le licenciement survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé, et que ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées ; qu'il est constant que le licenciement de M. X... est jugé sans cause réelle et sérieuse au sens de l'article L. 1235-3, et que, en conformité avec les dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail, il avait plus de deux an d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés ; qu'il convient donc, en application de l'article L. 1234-4 du code du travail, et bien que cet organisme ne soit pas dans la présente cause, de condamner l'employeur à rembourser les indemnités versées par Pôle Emploi à M. X..., à concurrence de six mois ; que partie tenue aux dépens de première instance et d'appel, la société Milabia paiera à M. X... la somme de 2. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en compensation de ses frais irrépétibles » ;

ALORS, DE PREMIERE PART, QUE caractérise une faute grave le fait pour un directeur de magasin d'adopter un comportement agressif et violent envers plusieurs collaborateurs ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de la cour d'appel que Madame Y..., salariée, avait attesté que « vers fin juillet » (2009) « à 15h30/ 16H », Monsieur X... « me jette un carton d'appareils photos et cartes mémoire », que Madame Z..., salariée, avait également témoigné qu'« il y a trois semaines (…) il est arrivé vers 15h30- 16h000 avec sa valise à roulettes de monnaie. Il a poussé la valise d'un coup de pied vers mois, j'ai fait un écart pour qu'elle ne tape pas dans mes tibias » et que Madame A..., salariée, avait écrit qu'un « après-midi de début juillet » (2009) Monsieur X... l'avait bousculée et « a saisi violemment (son) tee-shirt au niveau du cou » ; qu'en considérant cependant que le licenciement de Monsieur X... serait dénué de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE le juge ne peut dénaturer les pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, les attestations de Mesdames Y..., Z... et A... telles que citées par la cour d'appel faisaient état de faits précis, circonstanciés et datés concernant Monsieur X... ; qu'en considérant cependant, pour dire le licenciement de ce dernier dénué de cause réelle et sérieuse, que ces témoignages n'énonceraient « aucun fait précis », ni « aucune date », dans des termes « vagues », et qu'ils seraient dès lors insuffisamment circonstanciés pour apporter la preuve de griefs susceptibles de justifier le licenciement de Monsieur X..., la cour d'appel a dénaturé lesdites attestations en violation du principe susvisé et de l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'une discussion tendue entre un directeur et sa subordonnée ne saurait excuser l'exercice par celui-ci d'une contrainte physique ; qu'en jugeant, pour dire que le licenciement de Monsieur X... aurait été sans cause réelle et sérieuse, que le geste de ce dernier qui avait saisi une salariée par le col de son tee-shirt, qualifié par la cour d'appel de « fautif » devait cependant être remis dans son contexte d'énervement mutuel, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-2, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société MILABIA à verser à Monsieur X... la somme de 10. 000 € au titre de la gratification bénévole annuelle pour 2009 ;
AUX MOTIFS QU'« exposant qu'il aurait dû recevoir la « gratification contractuelle » versée annuellement pour un montant de 10. 000 €, M. X... réclame la somme de 20. 000 € au titre des années 2008 et 2009 ; que la société Milabia objecte que M. X... a déjà perçu une prime au cours de l'année 2007 et 2008, mais ne justifie de ses affirmations que par un bulletin de paie de décembre 2005 (sa pièce n° 29) et un document listant de façon manuscrite des noms de salariés suivis d'un montant de gratification, en l'espèce 7. 500 € pour M. X..., assorti de la mention manuscrite « débité le 8/ 09/ 08 » (sa pièce n° 31) ; que ces pièces sont insuffisantes pour établir que M. X... aurait perçu les sommes qu'il demande ; qu'or, celui-ci justifie par la production de ses bulletins de paie qu'il percevait tous les ans en décembre une somme intitulée, en dernier lieu, « gratification bénévole », d'un montant de 10. 000 € en décembre 2008 et décembre 2007 de 9. 600 € en décembre 2006 ; qu'il établit ainsi suffisamment l'usage qui lui permet d'étayer sa demande, quoiqu'il apparaisse qu'il a été rempli de ses droits en décembre 2008 ; que la société Milabia soutient alors que M. X... ayant été licencié antérieurement au versement de la gratification, il ne peut prétendre à aucun droit d'une quelconque prime au titre de l'année 2009 ; que pour autant, si le licenciement de M. X... pour faute n'était pas intervenu au mois de septembre, il aurait pour le moins effectué un préavis de 4 mois, de sorte qu'il aurait bien été présent dans l'entreprise en décembre 2009 ; qu'il a donc vocation à percevoir la gratification annuelle pour l'année 2009, et la société Milabia sera condamnée à lui verser la somme de 10 000 € à ce titre » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le premier moyen des chefs de dispositifs ayant dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et ayant condamné la société MILABIA au paiement de diverses indemnités et rappels de salaire à ce titre entraînera, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositifs ayant condamné la société MILABIA à verser au salarié la somme de 10. 000 € au titre de la gratification 2009, la cour d'appel ayant elle-même fait ressortir le lien de dépendance nécessaire entre les deux chefs de dispositif ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'une gratification ne constitue pas un élément de salaire mais une libéralité lorsque son montant, fixé discrétionnairement par l'employeur, varie d'une année à l'autre ou d'un salarié à l'autre sans que cette variation découle de l'application d'une règle préétablie ou d'un critère fixe et précis ; qu'en l'espèce, la société MILABIA avait versé aux débats un tableau établissant que le montant des acomptes de gratification variait d'un salarié à l'autre (entre 150 € et 7. 500 €) ; que Monsieur X... reconnaissait lui-même que le montant de sa prime avait varié entre 2002 et 2008 ; qu'en retenant cependant l'existence d'un usage pour condamner la société MILABIA à payer à Monsieur X... la somme de 10. 000 € au titre de la gratification bénévole de 2009, sans caractériser l'application d'une règle préétablie ou d'un critère fixe et précis pour la détermination du montant de la prime, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-29297
Date de la décision : 03/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 30 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mai. 2016, pourvoi n°14-29297


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.29297
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