LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu qu'à l'occasion du pourvoi formé contre l'arrêt ayant fixé le montant des indemnités lui revenant au titre de l'expropriation, au profit de la commune de Biviers, de parcelles lui appartenant, la fondation OVE a, par mémoire distinct du 20 janvier 2016, présenté deux questions prioritaires de constitutionnalité ainsi rédigées :
« L'article L. 13-15 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, applicable à la cause, est-il entaché d'incompétence négative, au regard de l'article 34 de la Constitution et des articles 4, 5, 6, 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en ce qu'en ne donnant aucune définition à la notion d'intention dolosive et en laissant ainsi une trop large marge d'appréciation à l'autorité judiciaire, le législateur n'a pas apporté les garanties nécessaires à la protection du droit de propriété ?
L'article L. 13-15, II, 2° et 4° du code de l'expropriation, applicable à la cause, est-il conforme au principe d'égalité devant les charges publiques garanti par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce qu'il distingue les terrains réservés, que le juge doit évaluer sans tenir compte de cette affectation, et les terrains soumis à d'autres contraintes d'urbanisme, que le juge doit, au contraire, évaluer en considération de l'existence de ces servitudes ? » ;
Attendu que ces dispositions sont applicables au litige et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Que les questions, ne portant pas sur l'interprétation de dispositions constitutionnelles dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, ne sont pas nouvelles ;
Et attendu que la première question ne présente pas un caractère sérieux en ce que, d'une part, l'élaboration des documents d'urbanisme est soumise au contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'autre part, constitue une garantie l'intervention de l'autorité judiciaire qui, conformément à son office, apprécie souverainement l'intention dolosive de l'expropriant pour écarter, au visa de l'article L. 13-15, I, alinéa 1er ou L. 13-15-II, 2° du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, les servitudes et restrictions administratives affectant l'utilisation des biens ;
Attendu que la seconde question ne présente pas davantage un caractère sérieux dès lors que, l'inconstructibilité temporaire d'un terrain compris dans un emplacement réservé en vertu de l'article L. 123-1, 8° du code de l'urbanisme ayant pour objet de préserver, en vue de sa vocation future, un terrain destiné à la réalisation des projets de la collectivité publique et les possibilités légales et effectives de construction d'un terrain à bâtir pouvant être écartées lorsqu'elles révèlent l'intention dolosive de l'expropriant, le principe d'égalité, qui ne fait pas obstacle à ce qu'à des situations différentes soient appliquées des règles différentes, ne s'oppose pas à ce qu'en application des dispositions de l'article L. 13-15, II, 4° et dans l'intérêt de l'exproprié, les limitations spéciales au droit de construire imposées au bien compris dans un emplacement réservé soient écartées en vue de son évaluation à laquelle il est procédé en tenant compte des possibilités légales et effectives de construction, selon les modalités de l'article L. 13-15, II, 2° lorsqu'il s'agit d'un terrain à bâtir ;
D'où il suit qu'il n'y pas lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS :
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.