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14/04/2016 | FRANCE | N°15-14742

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 avril 2016, 15-14742


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 14 janvier 2015), que M. X...a été victime d'un accident de la circulation le 11 février 1993 dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y... et assuré auprès de la société Thelem assurances ; que par ordonnances du 19 juillet 1994 et du 8 décembre 1999, le juge des référés les a condamnées in solidum à payer à M. X... des provisions à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ; que la consolidation de ses b

lessures a été fixée au 6 avril 1996, et que M. X... a assigné, le 14 octobre 2011...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 14 janvier 2015), que M. X...a été victime d'un accident de la circulation le 11 février 1993 dans lequel était impliqué le véhicule conduit par Mme Y... et assuré auprès de la société Thelem assurances ; que par ordonnances du 19 juillet 1994 et du 8 décembre 1999, le juge des référés les a condamnées in solidum à payer à M. X... des provisions à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ; que la consolidation de ses blessures a été fixée au 6 avril 1996, et que M. X... a assigné, le 14 octobre 2011, Mme Y... et la société Thelem assurances en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde en indemnisation de ses préjudices ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable pour cause de prescription son action à l'encontre de Mme Y... et de la société Thelem assurances, alors selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une instance a été introduite après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions de cette loi s'appliquent ; que lorsque les dispositions de cette loi fixent une durée de prescription identique à celle de la loi ancienne et lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur, le nouveau délai court à compter de cette date ; que M. X... a fait assigner Mme Y... et la société Assurances mutuelles de l'Indre par des actes du 14 octobre 2011 ; qu'en jugeant que cette action était prescrite car le délai de prescription de dix ans de l'ancien article 2270-1 du code civil applicable au jour de la survenance de l'accident de M. X... était écoulé au cours du mois de décembre 2009, cependant qu'un délai de dix ans visé par l'article 2226 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, avait commencé à courir à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, la cour d'appel a violé l'article 2226 nouveau du code civil ;
2°/ qu'une reconnaissance de responsabilité substitue au délai de prescription de l'article 2270-1 ancien du code civil, le délai de prescription trentenaire de droit commun ; qu'en en décidant autrement au cas d'espèce, la cour d'appel a violé l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;
3°/ qu'en jugeant que M. X... ne « démontr ait en aucune façon l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure » par les considérations que « la méconnaissance alléguée de son préjudice économique était dépourvue de tout fondement et de tout justificatif » et que « le dépôt d'un rapport d'expertise comptable non contradictoire sollicité par M. X... en 2006 n'avait en aucun cas, fait courir en sa faveur un nouveau délai de prescription », sans rechercher si ce rapport n'avait pas permis à M. X... de déterminer l'existence ou l'étendue de son préjudice économique, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que les dispositions transitoires prévues à l'article 26 de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ne prévoient pas que lorsque les délais de prescription n'ont pas été modifiés, un nouveau délai de prescription de durée identique court à compter de son entrée en vigueur ;
Que l'arrêt retient que l'article 2270-1 du code civil, applicable au jour de la survenance de l'accident prévoyait un délai de prescription de dix ans identique à celui de l'article 2226 du même code dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ; que M. X... ne peut se prévaloir de la théorie de l'interversion des prescriptions dans la mesure où le délai qu'il avait pour agir n'était pas un court délai de prescription ; qu'il ne démontre pas l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure, la méconnaissance alléguée de son préjudice économique étant dépourvue de tout justificatif ; qu'aucun acte interruptif de la prescription n'est intervenu depuis l'ordonnance de référé du 8 décembre 1999 ;
Que de ces constatations et énonciations, découlant de son appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son examen, la cour d'appel, qui a motivé sa décision, a exactement déduit que l'action de M. X... était prescrite, pour ne pas avoir été introduite dans le délai de dix ans à compter de l'ordonnance de référé du 8 décembre 1999 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à Mme Y... et la société Thelem assurances la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable pour cause de prescription l'action de monsieur X... à l'encontre de madame Y... et de la société Thelem assurances ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les règles en matière de prescription issues de la loi du 17 juin 2008 sont applicables à l'instance engagée postérieurement à cette date, la loi prévoit des dispositions particulières lorsque le fait générateur de responsabilité de l'auteur du dommage et de la créance indemnitaire de la victime est antérieur à son entrée en vigueur ; qu'en application de l'article 2226 du code civil : « L'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé » ; que les causes de report ou de suspension du délai de prescription sont celles énoncées à l'article 2233 du code civil (ancien article 2257) ; que la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure en application de l'article 2234 du code civil ; que la prescription est interrompue par la reconnaissance du débiteur en application des dispositions de l'article 2240 du code civil qui édicte : « la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription » ; que la prescription est interrompue par la demande en justice de la victime même si elle est faite en référé, ou portée devant une juridiction incompétente, ou que l'assignation est annulée pour un vice de procédure ; que la suspension arrête temporairement le cours de la prescription sans effacer le délai déjà couru ; que l'interruption, efface le délai de prescription acquis et fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien ; que la modification du délai de prescription n'a pas d'effet sur une prescription définitivement acquise ; qu'en l'espèce, les parties s'accordent sur le fait que les moyens soulevés sont des causes interruptives de prescription qui ont donc pour effet de faire courir à nouveau le délai de prescription, une fois qu'elles sont purgées ; que, contrairement à ce que soutient monsieur X..., les dispositions de l'article 2226 du code civil sont applicables à l'instance en cours ; que c'est de façon inopérante qu'il indique n'avoir pas engagé une action en responsabilité contre la responsable de l'accident et son assureur mais une simple action indemnitaire ; qu'en effet, le fait que les intimées n'aient jamais contesté leur responsabilité, n'enlève pas la cause de la demande indemnitaire laquelle résulte d'un dommage corporel subi des suites de l'accident du 11 février 1993 ; que monsieur X... ne saurait se prévaloir de la théorie de l'inversion des prescriptions dans la mesure où le délai qu'il avait pour agir n'est pas un court délai de prescription qui ferait courir un nouveau délai « de droit commun » et non plus une prescription analogue au délai initial ; qu'en effet, le délai de prescription prévu par l'article 2270-1 du code civil, applicable au jour de la survenance de l'accident constituant le fait générateur du préjudice et le fondement de son action, prévoyait déjà un délai de prescription de 10 ans ; qu'à la suite des instances en référé qui ont effectivement interrompu ce délai, il incombait à monsieur X..., s'il n'était pas satisfait des sommes allouées à titre provisionnel par le juge des référés, de saisir la juridiction du fond pour obtenir la liquidation définitive et totale de son préjudice, et ce dans un délai de 10 ans à compter de la date où a été rendue la dernière ordonnance de référé, interruptive de la prescription, soit le 8 décembre 1999 ; que c'est à juste titre que les intimées soutiennent qu'il ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 2234 du code civil ; qu'en effet, il ne démontre en aucune façon l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ; qu'à cet égard la méconnaissance alléguée de son préjudice économique est dépourvue de tout fondement et de tout justificatif. ; qu'en outre, le dépôt d'un rapport d'expertise comptable non contradictoire sollicité par lui en 2006 n'a, en aucun cas, fait courir en sa faveur un nouveau délai de prescription ; qu'il convient de constater dès lors qu'aucun acte interruptif de la prescription n'est intervenu depuis l'ordonnance de référé du 8 décembre 1999 ; que ce n'est que par assignations délivrées le 14 octobre 2011 que monsieur Christophe X... a saisi la juridiction du fond afin de contester la liquidation de son préjudice résultant de l'accident survenu le 11 février 1993 ; qu'ainsi, l'action de monsieur Christophe X... a été introduite 11 ans, 10 mois et 5 jours après le dernier acte interruptif de la prescription, soit l'ordonnance de référé du 8 décembre 1999 ; qu'il en résulte que l'action de monsieur Christophe X... est prescrite, en application des articles 2226, 2241 et 2242 du code civil ; que la décision déférée sera confirmée dans toutes ses dispositions, sans qu'il soit nécessaire d'examiner ses demandes indemnitaires qui dès lors sont irrecevables ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE les défenderesses ont soulevé in limine litis et à titre principal la fin de non-recevoir de l'action de monsieur Christophe X... tirée de la prescription ; qu'aux termes de l'article 2226 du code civil entré en vigueur le 17 juin 2008, l'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent se prescrit par 10 ans à compter de la date de consolidation, étant rappelé qu'aux termes de l'article 2270-1 du code civil ancien, les actions en responsabilité civile extra contractuelle se prescrivaient par 10 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; que l'instance ayant été introduite après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, ce sont, en application de l'article 26 de la loi précitée, les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui s'appliquent ; que le docteur Z..., expert judiciaire commis pour procéder à l'examen médical de monsieur X..., décrire ses lésions et permettre l'évaluation de son préjudice, a fixé la date de consolidation médico-légale au 6 avril 1996 ; que compte tenu du délai de prescription ci-dessus rappelé, monsieur X... devait introduire son action au plus tard le 6 avril 2006 ; qu'il convient néanmoins de rechercher si le délai de prescription a pu être interrompu ; que, sur ce point, monsieur X... soutient que le délai de prescription a été interrompu par la reconnaissance par le débiteur du droit contre lequel il prescrivait en application de l'article 2240 du code civil, qu'il est exact que la prescription a été interrompue par les deux ordonnances de référé des 19 juillet 1994 et 8 décembre 1999 dans lesquelles madame Y... et son assureur n'ont pas contesté la responsabilité de madame Y... ; qu'ainsi un nouveau délai de dix ans a commencé à courir à partir du 8 décembre 1999, aussi bien en application de l'article 2240 du code civil qu'en application de l'article 2241 du même code ; que, cependant, l'action aurait dû être introduite le 8 décembre 2009 au plus tard ; que l'action ayant été introduite le 14 octobre 2013, elle apparaît irrecevable pour cause de prescription en application de l'article 122 du code de procédure civile ; qu'il y a lieu de déclarer le présent jugement opposable à la Caisse primaire d'assurance maladie de Gironde ;
1°) ALORS QUE lorsqu'une instance a été introduite après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile, les dispositions de cette loi s'appliquent ; que lorsque les dispositions de cette loi fixe une durée de prescription identique à celle de la loi ancienne et lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur, le nouveau délai court à compter de cette date ; que monsieur X... a fait assigner madame Y... et la société Assurances mutuelles de l'Indre par des actes du 14 octobre 2011 ; qu'en jugeant que cette action était prescrite car le délai de prescription de dix ans de l'ancien article 2270-1 du code civil applicable au jour de la survenance de l'accident de monsieur X... était écoulé au cours du mois de décembre 2009, cependant qu'un délai de dix ans visé par l'article 2226 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, avait commencé à courir à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, la cour d'appel a violé l'article 2226 nouveau du code civil ;
2°) ALORS QU'une reconnaissance de responsabilité substitue au délai de prescription de l'article 2270-1 ancien du code civil, le délai de prescription trentenaire de droit commun ; qu'en en décidant autrement au cas d'espèce, la cour d'appel a violé l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;
3°) ALORS QU'en jugeant que monsieur X... ne « démontr ait en aucune façon l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure » par les considérations que « la méconnaissance alléguée de son préjudice économique étai t dépourvue de tout fondement et de tout justificatif » et que « le dépôt d'un rapport d'expertise comptable non contradictoire sollicité par monsieur X... en 2006 n'avait en aucun cas, fait courir en sa faveur un nouveau délai de prescription », sans rechercher si ce rapport n'avait pas permis à monsieur X... de déterminer l'existence ou l'étendue de son préjudice économique, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision et a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 15-14742
Date de la décision : 14/04/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 14 janvier 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 avr. 2016, pourvoi n°15-14742


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.14742
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