LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement du 6 mars 2002 a déclaré exécutoire en France la décision du tribunal des mineurs de Brescia (Italie) faisant obligation à M. X... de verser à Mme Y... une pension alimentaire mensuelle de 400 euros pour l'entretien de leur fils, Olivier, outre 50 % des " frais extraordinaires comprenant la baby-sitter " ; que M. X... a interjeté appel du jugement qui a autorisé la saisie de ses rémunérations ;
Attendu qu'après avoir énoncé, dans ses motifs, que Mme Y... ne rapportait pas la preuve des débours qu'elle aurait supportés pour faire garder son fils par des tiers, estimés à 27 989, 50 euros pour la période de juillet 2009 à août 2013, l'arrêt autorise la saisie des rémunérations de M. X..., à concurrence de la somme de 24 307, 05 euros, incluant celle de 13 994, 50 euros correspondant à la quote-part du père de l'enfant dans lesdits frais ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir porté à la somme de 24. 307, 05 euros le montant de la créance pour le recouvrement de laquelle Caroline Y... a été autorisée à procéder à la saisie des rémunérations d'Estève X... ;
AUX MOTIFS QU'« Estève X... a interjeté appel d'un jugement du juge du tribunal d'instance de Calais du 12 décembre 2013 qui a autorisé Caroline Y..., son ex-concubine, à faire procéder à la saisie, entre les mains de la Base Aérienne de Creil, l'employeur d'Estèphe X..., des rémunérations dues à ce dernier, pour avoir paiement d'une somme de 24. 253, 49 euros représentant la part de « 50 % des frais médicaux certifiés et de 50 % des frais extraordinaires comprenant la baby-sitter » à laquelle il est tenu envers elle, au titre de leur enfant commun, Olivier X..., atteint d'autisme, en vertu d'un jugement du tribunal des mineurs de Brescia (Italie) rendu exécutoire en France par une ordonnance du Président du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer du 6 mars 2012. L'ordonnance de clôture du 4 septembre 2014 a été révoqué à l'audience du 25 septembre 2014 conformément à l'accord des parties, et l'instruction de la cause de nouveau clôturée à cette dernière date, avant l'ouverture des débats, afin d'insérer au dossier les derniers développements de la procédure. Au soutien de son appel Estèphe X... conteste, comme non justifiés, les frais de baby-sitter chiffrés par le premier juge à la somme de 27. 989, 50 € dont la moitié de 13. 994, 75 €, serait à la charge du père. Il conclut pour le surplus à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de Caroline Y... à lui verser une somme de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Caroline Y..., formant appel incident, reproche au premier juge d'avoir écarté de sa créance les frais médicaux, les frais de participation aux séances thérapeutiques de son fils et les frais de trajet s'y rapportant, dont la fraction imputable à Estève X... s'élevait au 31 août 2013 à la somme globale de 11. 013, 50 €. Elle demande en conséquence à la Cour d'ordonner la saisie des rémunérations de celui-ci à hauteur d'une somme totale de 35. 267 €. Elle sollicite l'allocation, à la charge d'Estève X..., d'une somme de 2. 000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile. Le premier juge a rejeté la demande de Caroline Y... tendant au remboursement de la part des frais médicaux engagés pour son fils qui n'avait pas été prise en charge par le système sanitaire italien, au motif qu'elle ne pouvait prétendre « que les assurances privées de santé, quelle que soit leur forme, n'existait pas en Italie ». Cependant rien ne permet de supposer que les sociétés d'assurances italiennes proposent leur garantie pour la couverture de risques qui, n'étant pas liés à la survenance d'un accident éventuel, seraient dans leur réalisation dépourvus d'aléa. La somme de 53, 56 € réclamé par Caroline Y... au titre des frais non couverts par la protection sociale doit donc figurer parmi les postes de sa créance. Le tribunal a retenu que Caroline Y... avait, pour les dépenses de baby-sitter, exposé une somme globale de 27. 989, 50 € de juillet 2009 à août 2013 de sorte qu'Estève X... lui était redevable à ce titre d'une somme de 13. 994, 50 €. Toutefois Caroline Y... fonde sa réclamation sur de simples attestations dactylographiées dont trois d'entre elles, signées de Chiara A..., Silvana Z... et Patrizia B..., ont été rédigées les 8 et 9 février 2013 dans les termes identiques sans que les horaires de garde de l'enfant et le coût du forfait horaire ou journalier y connaissent une quelconque évolution sur une durée de quatre années. La dernière attestation signée de Maricela De Lopez le 2 septembre 2013 n'apporte pas de précision sur le taux de rémunération à l'heure ou à la journée appliqué à l'intéresse. De surcroît Silvana Z... qui assure avoir prêté ses services à Caroline Y... et avoir été rémunérée par elle en 2009, 2010 et 2011, n'est d'autre que la soeur de cette dernière à laquelle l'unissent les liens d'une communauté d'intérêt familial. Caroline Y..., si elle verse aux débats des « quittances/ reçus » souscrites par Chiara A..., ne produit aucune pièce comptable ou bancaire établissant la réalité des paiements effectués entre les mains des personnes préposées à la garde de l'enfant. Elle allègue à cet égard que la rétribution des différentes baby-sitters, quand bien même le coût de leurs prestations atteignait pour certains mois la somme substantielle de 800 € ou 900 €, leur avait toujours été réglée en espèces. Caroline Y... ne rapporte par conséquent pas la preuve des débours qu'elle aurait supportés pour faire garder son fils par des tiers. Sur le coût des absences au travail non rémunérées de Caroline Y... pour sa participation aux séances thérapeutiques de son fils, prétendument génératrices pour elle d'un manque à gagner de 15. 818, 59 € pendant la période de juin 2010 à août 2013, que l'intéressée fournit deux écrits de son employeur, la société Persico SPA à Nembro, datés du 19 février 2010 et 5 juin 2014, qui sont de simples certificats, exempts de formes auxquelles l'article 202 du code de procédure civile assujettit les attestations établies en vue d'être produites en justice. Elle y joint des tableaux dans lesquels, pour les années 2009 à 2013, elle dresse la nomenclature des séances de soins fixées le lundi ou le vendredi à l'Espace Autisme ONIUS de Bergame et le mardi et le jeudi à l'Unité de neuropsychiatrie pour enfants UONPIA à Gazzaniga. Les certificats de l'UONPIA des 9 décembre 2009 et 9 mai 2012 ne précisent cependant ni les jours de la semaine concernés par les séances thérapeutiques, ni les horaires de celles-ci. Seul un certificat de l'Espace Autisme ONIUS du 15 février 2013 fait état de séances suivies par l'enfant en indiquant le moment où elles se tiennent, le vendredi de chaque semaine entre 9h 15 et 11 heures, et en relavant à leur propos qu'« est souhaitable la présence de la mère Mme Caroline Y... » pour accompagner le jeune patient. Les certificats émanés de la société Persico SPA et les tableaux dressés par Caroline Y... présentent d'autant moins de force probante que l'écrit de l'employeur du 19 février 2010 cite parmi les jours où Caroline Y... a été autorisée à s'absenter de son poste de travail « pour accompagner/ participer aux séances thérapeutiques de son fils à compter de septembre 2009 » le mercredi de 8 heures à 10 heures 30 quand ce jour de la semaine ne figure sur aucune des nomenclatures de traitements périodiques établies par la susnommée. En outre, si la société Persico SPA, dans son certificat du 5 juin 2014 vient affirmer qu'elle aurait consenti à son employée entre 2010 et 2013, un total de 877, 50 heures de congés non rétribués représentant une diminution de salaire globale de 15. 818, 59 €, cette simple assertion, recueillie par Caroline Y... pour les besoins de la cause, n'est assortie de la production d'aucun bulletin de paie dont les énonciations contiendraient le décompte mensuel des heures d'absence non rémunérées et leur incidence sur le montant du salaire réglé à l'employée. La demande de Caroline Y..., relative aux frais de déplacement, écartée par le premier juge en raison de l'absence de pièces justificatives autres que des attestations rédigées par celle-ci à son propre usage, ne saurait davantage prospérer devant la Cour. Cette prétention fondée sur les éléments qui viennent d'être précédemment examinés sous le rapport du manque à gagner de l'intéressée, auxquels elle joint une estimation des « frais kilométriques » par trajet, dont elle est l'auteur, encourt les mêmes critiques que celle précédemment exposées au sujet des pertes de salaires alléguées. Par suite, la saisie des rémunérations d'Estève X... doit être autorisée pour 24. 307, 05 € » (arrêt pages 2 à 4) ;
ALORS QUE tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut au défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a, dans ses motifs, décidé au titre des frais de baby-sitter que « Mme Y... ne rapporte pas la preuve des débours qu'elle aurait supportés pour faire garder son fils par des tiers » (arrêt page 3, § 2) ; que la Cour d'appel a en outre écarté les demandes de Mme Y... tendant au versement d'une somme au titre d'un manque à gagner suite aux absences de travail aux motifs qu'elle fournit des écrits « qui sont de simples certificats, exempts des formes auxquelles l'article 202 du code de procédure civile assujettit les attestations établies en vue d'être produites en justice » et qui ne précisent « ni les jours de la semaine concernés … ni les horaires … » (arrêt page 3, § 3) et qu'elle ne verse aux débats aucun bulletin de paie (arrêt page 4, § 1) ; que les juges d'appel ont enfin au titre des frais de déplacement décidé que « cette prétention … encourt les mêmes critiques que celle précédemment exposés au sujet des pertes de salaires alléguées » (arrêt page 4, § 2) ; qu'en fixant néanmoins, dans son dispositif, le montant de la créance de Mme Y... à la somme de 24. 307, 05 € et en condamnant ainsi l'exposant au versement des sommes correspondant aux postes de baby-sitter, d'un manque à gagner et des frais de déplacement, la cour d'appel a statué par une contradiction entre les motifs et le dispositif de l'arrêt, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.