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12/04/2016 | FRANCE | N°14-28396

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 avril 2016, 14-28396


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu les articles 1304 du code civil et 73 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la commune d'Audenge (la commune) exploite un centre d'enfouissement technique ; que l'administration des douanes et droits indirects lui a notifié le 6 mai 2004 un procès-verbal d'infraction pour avoir, de 2001 à 2003, omis de soumettre à la taxe générale sur les activités polluantes des déchets verts, boues de sta

tion d'épuration, mâchefers et pneus usagés, ainsi que minoré une certaine ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu les articles 1304 du code civil et 73 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la commune d'Audenge (la commune) exploite un centre d'enfouissement technique ; que l'administration des douanes et droits indirects lui a notifié le 6 mai 2004 un procès-verbal d'infraction pour avoir, de 2001 à 2003, omis de soumettre à la taxe générale sur les activités polluantes des déchets verts, boues de station d'épuration, mâchefers et pneus usagés, ainsi que minoré une certaine quantité de déchets ménagers et assimilés ; qu'un avis de mise en recouvrement (AMR) a été émis le 27 mai 2004 ; qu'après rejet de sa contestation, la commune a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annulation de cet AMR ;
Attendu que pour déclarer irrecevable le moyen tiré de la nullité de la procédure douanière pour défaut de respect des droits de la défense, l'arrêt retient qu'il constitue une exception de procédure, irrecevable pour n'avoir pas été soulevée avant toute demande au fond en application de l'article 74 du code de procédure civile ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le moyen d'annulation de l'AMR pour violation des droits de la défense constituait une demande au fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne le directeur général des douanes et droits indirects et le ministre des finances et des comptes publics aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la commune d'Audenge la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la commune d'Audenge
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable le moyen de nullité soulevé par la Mairie d'AUDENGE ;
AUX MOTIFS QU'il résulte de la lecture du jugement déféré qu'aucun moyen d'annulation de l'avis de mise en recouvrement tiré de l'irrégularité de la procédure diligentée par l'administration des douanes ayant conduit à l'émission de cet avis n'était invoqué par la Commune d'AUDENGE en première instance ; que dès lors le moyen de nullité, pris du motif de respect des droits de la défense, désormais invoqué par la Commune d'AUDENGE, qui constitue une exception de procédure, est irrecevable en application de l'article 74 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE la Mairie d'AUDENGE avait dans le dispositif de ses écritures de première instance conclu : « Dire que l'AMR du 27 mai 2004 ne répond pas aux exigences de l'article 345 du Code des douanes et doit donc être annulé » ; que les exigences de l'article 345 du Code des douanes incluent les conditions procédurales de régularité de la notification de l'avis de mise en recouvrement, en particulier le respect, avant cette notification, d'une phase contradictoire instaurant une véritable discussion amiable entre les parties, impliquant que le redevable ait pu faire valoir son point de vue sur les griefs que l'administration entend invoquer, et que celle-ci ait entendu et tenu compte des observations qui lui ont été faites avant de notifier les infractions ; qu'ainsi le moyen tiré de la nullité de la procédure de notification de l'avis de mise en recouvrement était dans le débat en première instance et était recevable à être développé en appel, si bien qu'en refusant d'examiner au fond ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 74 du Code de procédure civile ;
ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE le non-respect par l'administration des douanes de la phase préalable contradictoire de discussions amiables permettant de manière effective une proposition de rectification, qui tient au respect des droits de la défense et institue une phase transactionnelle préalable, constitue une nullité de fond qui peut être invoquée en tout état de cause par fin de non recevoir, si bien que la Cour d'appel a violé les articles 117 et 118 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR le jugement en ce qu'il avait validé l'avis de mise en recouvrement du 27 mai 2004 modifié par le procès-verbal du 7 octobre 2004, à hauteur de la somme de 708 339,91 euros ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant des mâchefers, la Mairie d'AUDENGE se contente d'affirmer qu'ils constituent des déchets inertes, comme tels non assujettis à la TGAP pour les années 2002 et 2003, et qui, pour l'année 2003, doivent bénéficier de l'exonération de 20 % de la TGAP instituée par la loi du 31 décembre 2002, modifiant l'article 266 sexies du Code des douanes, prévue pour ce type de déchets réceptionnés dans les installations de déchets ; mais que sont définis comme des déchets inertes par la directive 1993/31 ceux « qui ne se décomposent pas, ne brûlent pas et ne produisent aucune réaction physique ou chimique, ne sont pas biodégradables et ne détériorent pas d'autres matières avec lesquels ils rentrent en contact d'une manière susceptible d'entraîner une pollution de l'environnement ou de nuire à la santé humaine », définition reprise au § III de l'article 266 sexies du Code des douanes, ajoutés par la loi du 31 décembre 2002 ; que dans la mesure où les mâchefers sont susceptibles de contenir des matériaux lourds pouvant entraîner une pollution des sols et des eaux souterraines, ils ne peuvent entrer dans la définition des déchets inertes et sont éligibles à la TGAP ;
ET QUE la Commune d'AUDENGE n'apporte aucun élément susceptible de contredire la démonstration de l'administration relative à la classification des déchets d'amiante « liée » (amiante ciment) en déchets dangereux, compris dans la catégorie E des déchets admissibles dans les décharges de déchets ménagers et assimilés ; que cette catégorie E est composée de déchets dont le comportement en cas de stockage est peu évolutif, dont la capacité de dégradation biologique est faible, et qui présentent un caractère polluant modéré ; qu'ils ne peuvent donc être qualifiés de déchets inertes au sens de l'article 266 sexies III du Code des douanes ;
ALORS QUE, D'UNE PART, dans le cadre de l'interprétation du droit applicable pour les années en cause 2001, 2002 et 2003, il résultait de l'application par l'administration des recommandations de la circulaire n° 94-IV-1 du 9 mai 1994 relative à l'élimination des mâchefers d'incinération des résidus urbains que les mâchefers étaient définis comme des déchets inertes exclus tant de la taxe sur le stockage des déchets que de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), en ce qu'ils constituaient des résidus non dangereux provenant des fours d'incinération et pouvant être valorisés, ce qui confirmait la circulaire du Ministère de l'Environnement du 3 mai 1993 et ce qui entrait dans la définition des déchets inertes retenue par la directive européenne 99/31 du 26 avril 1999 ; qu'ainsi la Cour d'appel qui, sans s'expliquer sur l'interprétation du droit affichée et appliquée par l'administration des douanes, et admise par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) à l'époque des faits litigieux, soit les années 2001, 2002 et 2003, et sur les espérances légitimes du redevable à cet égard, s'est bornée à énoncer que les mâchefers, parce qu'ils étaient susceptibles de contenir des matériaux lourds pouvant entraîner une pollution des sols et des eaux souterraines, ne pouvaient entrer dans la définition des déchets inertes, n'a pas justifié légalement sa décision au regard des principes de sécurité juridique et de confiance légitime ;
ET ALORS D'AUTRE PART QUE la décision de la Cour d'appel encourt le même grief en ce qui concerne les déchets d'amiante liée (amiante ciment), en l'état de l'interprétation du droit applicable retenue à l'époque des faits litigieux par l'administration des douanes et l'ADEME , assimilant les déchets d'amiante liés à des matériaux inertes, position que l'administration a d'ailleurs confirmée par une circulaire des douanes du 10 avril 2014 exonérant de la TGAP les déchets d'amiante liés à des matériaux inertes ayant conservé leur intégrité, si bien que l'arrêt attaqué est privé de toute base légale au regard des principes de sécurité juridique et de confiance légitime.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-28396
Date de la décision : 12/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 avr. 2016, pourvoi n°14-28396


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.28396
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