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07/04/2016 | FRANCE | N°14-27988

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 avril 2016, 14-27988


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué, qu'engagée le 15 octobre 2007 par la société Les Billards Bretons en qualité d'assistante commerciale, Mme X... s'est vue proposer le 30 mai 2012 une modification de son contrat de travail en raison de difficultés économiques consistant dans un passage d'un emploi à temps plein à un emploi à temps partiel ; qu'à la suite des refus de cette proposition et du poste d'assistante commerciale à mi-temps pr

oposé dans le cadre de l'obligation de reclassement préalable, elle a été...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué, qu'engagée le 15 octobre 2007 par la société Les Billards Bretons en qualité d'assistante commerciale, Mme X... s'est vue proposer le 30 mai 2012 une modification de son contrat de travail en raison de difficultés économiques consistant dans un passage d'un emploi à temps plein à un emploi à temps partiel ; qu'à la suite des refus de cette proposition et du poste d'assistante commerciale à mi-temps proposé dans le cadre de l'obligation de reclassement préalable, elle a été licenciée pour motif économique le 27 juillet 2012 après acceptation d'un contrat de sécurisation professionnelle ;
Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la proposition de reclassement au poste d'assistante commerciale à mi-temps correspondant à la proposition de modification de son contrat de travail précédemment refusée n'est pas loyale et sérieuse et que la société ne justifie pas qu'elle a recherché toutes les possibilités de reclassement dans l'entreprise dès lors qu'elle n'a produit aux débats que deux lettres datées du 4 juillet 2012 adressées à Pôle emploi et à une société externe sans que soit dressé un inventaire des postes existants dans l'entreprise, qu'elle ne justifie pas des efforts de formation et d'adaptation réalisés pour reclasser la salariée et qu'elle s'est abstenue de lui proposer un poste commercial pour lequel elle avait recruté peu de temps avant de procéder au licenciement économique alors qu'elle avait tenu des fonctions de nature commerciale et sans lui offrir de suivre une formation d'adaptation nécessaire à ce profil de poste ;

Attendu cependant qu'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible, à l'époque du licenciement, dans l'entreprise, ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants tirés de la disponibilité d'un poste de commercial en novembre 2011, soit plus de cinq mois avant la proposition de modification du contrat de travail pour motif économique et sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence de poste disponible au moment où le licenciement était envisagé en mai 2012, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Billards Bretons à payer à Mme X... la somme de 20 000 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à la salariée à hauteur de deux mois, l'arrêt rendu le 8 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Billards Bretons.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Les Billards Bretons à verser à Mme X... une somme de 20.000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir ordonné à la société Les Billards Bretons de rembourser aux organismes concernés les indemnités d'assurance-chômage versées à Mme X... à concurrence de deux mois ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le bien fondé du licenciement : Pour justifier le licenciement de Mary-Pierre X..., la société LES BILLARDS BRETONS mentionne, dans la lettre qu'elle lui a adressée le 27 juillet 2012 et dont les termes fixent les limites du litige, des difficultés économiques caractérisées par une baisse constante du chiffre d'affaires net et du résultat entre 2008 et 2011. En application de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique celui effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise ou à une cessation d'activité. Au terme de l'article L. 1232-6 du même code, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement. S'agissant d'un licenciement pour motif économique, il doit en conséquence énoncer la cause économique du licenciement et ses conséquences sur l'emploi du salarié concerné. Pour que la réorganisation d'une entreprise soit une cause légitime de licenciement économique, elle doit être justifiée, soit par des difficultés économiques ou des mutations technologiques, soit par la nécessité de sauvegarder sa compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel, éventuellement, elle appartient. Force est de constater que dans son appel incident, Mary-Pierre X... ne critique pas vraiment, à titre principal, le bien fondé des difficultés économiques invoquées par la société LES BILLARDS BRETONS mais l'absence de réels d'efforts de reclassement déployés par son employeur avant la décision de licenciement, ce que le premier juge a retenu pour dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse. A cet égard, elle estime, justement, ne pas être loyale et sérieuse la proposition de poste de reclassement qui lui a été faite par courrier du 12 juillet 2012, à savoir le poste d'assistante commerciale à mi-temps, correspondant à la proposition de modification de son contrat de travail que l'employeur lui avait adressée par courrier du 30 mai 2012 et qu'elle avait refusé par lettre du 23 juin suivant. Alors que dans la lettre de licenciement, la société LES BILLARDS BRETONS indique avoir "recherché toutes les possibilités de reclassement dans l'entreprise", ne sont produites aux débats que deux lettres du 4 juillet 2012 adressées à Pôle Emploi et à la société IMAGES et TECHNOLOGIES, sans que soit dressé un inventaire des postes existants dans l'entreprise et qu'elle ne justifie des efforts de formation et d'adaptation réalisés pour reclasser Mary-Pierre X..., dont il n'est pas contesté qu'elle s'était vue progressivement retiré ses fonctions commerciales avant la rupture du contrat de travail. Dès lors, les premiers juges ont, à bon droit, dit que le licenciement de Mary-Pierre X... était sans cause réelle et sérieuse. En application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, il convient, en revanche de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 20 000 euros correspondant au préjudice qu'elle a subi, compte tenu de son ancienneté dans la société de presque cinq ans, de son salaire de référence, qui ne souffre aucune contestation, et des éléments relatifs à sa situation actuelle, celle-ci étant demeurée sans emploi malgré les recherches actives dont elle justifie. Le jugement sera donc réformé en ce sens. Sur le remboursement des indemnités de chômage : Selon l'article L. 1235-4 du code du travail : "Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées." En l'espèce, il convient de condamner la société LES BILLARDS BRETONS à rembourser les allocations chômage servies à Mary-Pierre X... à hauteur de deux mois » ;
AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE « la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que le motif évoqué est un motif économique, dont la motivation est la nécessité d'adapter la structure de l'entreprise pour lutter contre la concurrence et maintenir la compétitivité après des exercices déficitaires ; que l'article L. 1233-4 du code du travail détermine que le licenciement économique ne peut avoir lieu que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés ; qu'en l'espèce la société ne propose à Madame X... que le poste qu'elle avait déjà refusé et qui l'obligeait à travailler à temps partiel avec une perte de salaire de plus de 50 % ; que la société n'a pas proposé d'opération de formation à Madame X... pour tenir un poste commercial, sachant qu'elle avait tenu ce poste à mi-temps en plus de ses tâches administratives ; que la société a d'ailleurs recruté ce type de profil peu de temps avant de procéder à ce licenciement économique ; qu'en l'espèce la société SA Les Billards Bretons n'a pas rempli ses obligations telles que définies à l'article L. 1233-4 du code du travail ; que de ceci découle que le licenciement de Madame X... ne peut donc avoir une cause réelle et sérieuse » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il n'y a pas de manquement à l'obligation de reclassement si l'employeur justifie de l'absence de poste disponible, à l'époque du licenciement, dans l'entreprise, ou s'il y a lieu dans le groupe auquel elle appartient ; qu'en l'espèce, la société Les Billards Bretons soutenait que le reclassement de Mme X... s'était avéré impossible, en l'absence de poste disponible dans l'entreprise, qui n'appartenait à aucun groupe, et produisait, pour le justifier, une copie du registre d'entrée et sortie du personnel et un tableau des emplois dans l'entreprise en 2012 ; qu'en retenant que le licenciement de la salariée est dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que la société Les Billards Bretons ne justifiait pas d'efforts de formation et d'adaptation réalisés pour reclasser Mme X..., sans rechercher si, comme il était soutenu, l'employeur ne justifiait pas de l'absence de poste disponible dans l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE pour exposer qu'à la date du licenciement, tous les postes au sein de l'entreprise étaient pourvus (Conclusions p. 7), la société Les Billards Bretons visait et produisait, d'une part, une pièce n° 11 intitulée « registre du personnel » qui était le registre d'entrée et de sortie du personnel de l'entreprise et, d'autre part, une pièce n° 12 intitulée « tableau des effectifs 2012 » qui récapitulait les différents emplois existants dans l'entreprise au moment du licenciement ; qu'en énonçant, pour estimer le licenciement injustifié, que « ne sont produites aux débats que deux lettres du 4 juillet adressées à Pôle Emploi et à la société IMAGES et TECHNOLOGIES, sans que soit dressé un inventaire des postes existants dans l'entreprise », la cour d'appel a dénaturé les écritures d'appel de l'exposante et les pièces n° 11 et n° 12 produites à l'appui de ces écritures, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE lorsqu'une pièce invoquée dans ses conclusions par une partie, dont la production aux débats n'a pas été contestée, ne figure pas au dossier transmis au juge, celui-ci doit rouvrir les débats afin de requérir les explications des parties sur l'absence de la pièce en cause ; qu'au cas présent, pour exposer qu'à la date du licenciement, tous les postes au sein de l'entreprise étaient pourvus (Conclusions p. 7), la société Les Billards Bretons visait et produisait, d'une part, une pièce n° 11 intitulée « registre du personnel » qui était le registre d'entrée et de sortie du personnel de l'entreprise et, d'autre part, une pièce n° 12 intitulée « tableau des effectifs 2012 » qui récapitulait les différents emplois existants dans l'entreprise au moment du licenciement ; que pour dire le licenciement injustifié, la cour d'appel a relevé qu'il n'était pas « dressé un inventaire des postes existants dans l'entreprise » ; qu'en statuant de la sorte, sans rouvrir préalablement les débats afin de solliciter les explications des parties sur l'absence au dossier de pièces déterminantes invoquées par la société Les Billards Bretons et dont la communication n'avait pas été contestée par Mme X..., la Cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE les possibilités de reclassement s'apprécient antérieurement à la date du licenciement, à compter du moment où celui-ci est envisagé ; qu'au cas présent, la société Les Billards Bretons exposait que le recrutement d'un commercial invoqué par Mme X... avait eu lieu le 21 novembre 2011, soit plus de 8 mois avant le licenciement notifié le 26 juillet 2012, à une époque où le licenciement n'était nullement envisagé (Conclusions p. 9) ; qu'en reprochant à la société Les Billards Bretons d'avoir recruté un commercial « peu de temps avant de procéder au licenciement économique », sans caractériser la disponibilité du poste au moment où le licenciement de Mme X... a été envisagé, les premiers juges ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-27988
Date de la décision : 07/04/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 avr. 2016, pourvoi n°14-27988


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.27988
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