LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que l'action civile en recouvrement des cotisations ou majorations de retard se prescrit par cinq ans à compter de l'expiration du délai imparti par la mise en demeure ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle de la société Gravière de Martres établissements Saboulard (la société) pour travail dissimulé, l'URSSAF de Midi-Pyrénées a notifié à celle-ci un redressement, puis une mise en demeure le 26 mai 2005 ; qu'à la suite du rejet de sa réclamation par la commission de recours amiable, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale en invoquant la nullité des opérations de contrôle et la prescription de l'action en recouvrement ;
Attendu que pour rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action, l'arrêt énonce que la lettre d'observations et la mise en demeure ne pouvant être annulées, le moyen tiré de la prescription est sans portée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'action en recouvrement engagée par l'URSSAF n'était pas prescrite, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions relatives à la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action civile en recouvrement des cotisations de retard exercée par l'URSSAF, l'arrêt rendu le 5 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne l'URSSAF de Midi-Pyrénées aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Gravières de Martres établissements Saboulard.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la fin de non recevoir déduite, par la Société Etablissements Saboulard, de la prescription de l'action en recouvrement de l'URSSAF de Midi-Pyrénées et condamné la Société Etablissements Saboulard à régler à l'URSSAF de Midi-Pyrénées la somme de 299 481 ¿ ;
AUX MOTIFS QUE "la lettre d'observations et la mise en demeure ne pouvant être annulées, le moyen tiré de la prescription est sans portée" (arrêt p.8 alinéa 1er) ;
1°) ALORS QUE l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard dues par un employeur ou un travailleur indépendant, intentée indépendamment ou après extinction de l'action publique, se prescrit par cinq ans à compter de l'expiration du délai imparti par les avertissements ou mises en demeure prévus par les articles L.244-2 et L.244-3 ; que ce délai de prescription n'est interrompu que par une contrainte ou une demande en justice émanés de l'organisme de recouvrement ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que la mise en demeure de régler les cotisations contestées a été délivrée à la SA Les Gravières de Martres Tolosane Etablissements Saboulard le 26 mai 2005 ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que "le moyen tiré de la prescription est sans portée" sans rechercher, comme elle y était invitée, si en l'absence de tout acte interruptif antérieur, la demande de validation du redressement formulée par l'URSSAF Midi Pyrénées pour la première fois par conclusions soutenues à l'audience des débats du Tribunal des affaires de sécurité sociale tenue le 5 octobre 2012 n'était pas prescrite, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2241 du Code civil et L.244-11 du Code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS QUE dans ses conclusions du 1er octobre 2014, oralement reprises (arrêt p.2 pénultième alinéa), la Société Etablissements Saboulard, ayant fait valoir à titre principal que la prescription était acquise du fait de la nullité de la mise en demeure, avait également et à titre subsidiaire, soutenu : "La créance de l'URSSAF est prescrite¿à un autre titre : en vertu de l'article L.244-11 précité, l'URSSAF doit, pour interrompre la prescription, engager "l'action civile en recouvrement". Pour ce faire, elle peut saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale, délivrer une contrainte, utiliser la procédure sommaire ou encore se constituer partie civile dans le cadre d'une instance pénale. En l'espèce, elle n'a rien fait dans les cinq années tant de la lettre d'observations que de la mise en demeure (¿). L'URSSAF n'a formulé aucune prétention dans le délai de la prescription. Elle a attendu, pour ce faire, l'audience du Tribunal des affaires de sécurité sociale du 5 octobre 2012, puisque la procédure est orale. Faute d'action engagée dans le délai de prescription, les demandes de l'URSSAF sont prescrites" (conclusions de la Société Etablissements Saboulard p.5 in fine, p.6) ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions pertinentes, dont résultait la prescription de l'action de l'Urssaf indépendamment de la validité de la procédure antérieure la Cour d'appel, qui a privé sa décision de motifs, a violé l'article 455 du Code de procédure civile.