LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 27 octobre 2014), que M. X... a été engagé le 6 octobre 1997 par la société Cogifer en qualité de conducteur de travaux ; que le contrat a été transféré à la société ETF, le salarié devenant chef d'agence ; que licencié le 30 novembre 2011 pour cause réelle et sérieuse, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'après avoir exactement rappelé que l'insertion d'une hiérarchie intermédiaire qui n'existait pas auparavant ne peut s'analyser en une rétrogradation et relevé que le changement d'organisation intervenu ne modifiait ni la rémunération ni la qualification ou encore le périmètre du salarié et que seul l'intitulé du poste devait changer, la cour d'appel a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que cette mesure ne constituait pas une modification du contrat de travail mais s'analysait en un changement des conditions de travail décidé par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de rappel de RTT non prises, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ou conventionnellement ; qu'en retenant cependant, pour débouter M. X... de sa demande au titre des congés conventionnels, qu'il ne rapportait pas la preuve que son employeur l'aurait privé de la possibilité de prendre ses jours RTT, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en méconnaissance de l'article L. 3121-24 du code du travail ;
2°/ que l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat, doit justifier de l'extinction de son obligation ; qu'en retenant cependant, pour débouter M. X... de sa demande au titre des jours RTT, qu'il ne rapportait pas la preuve que son employeur l'aurait privé de la possibilité de prendre ses congés, quand il incombait à l'employeur de justifier qu'il avait mis son salarié en mesure de prendre ses congés, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé ensemble les articles L. 4121-1 du code du travail et 1315 du code civil ;
Mais attendu que l'article 4 paragraphe 2 de l'avenant du 17 septembre 2004 à l'accord d'entreprise ETF sur la réduction et l'aménagement du temps de travail du 18 juin 1999 fixe les conditions dans lesquelles les collaborateurs peuvent prendre leurs jours RTT et prévoit d'une part que l'ensemble des jours de réduction du temps de travail sont pris sur proposition des salariés concernés, compte tenu de l'autonomie et de l'organisation du temps de travail qui leur sont demandés, eu égard à leur niveau de responsabilité, sans toutefois désorganiser le bon fonctionnement de l'entreprise et après accord de la direction et, d'autre part, que les jours de réduction du temps de travail non pris à la date de rupture du contrat de travail ou en fin d'annualisation ne donnent lieu à aucune indemnisation ;
Et attendu qu'ayant constaté que le salarié ne démontrait pas qu'il avait sollicité la prise des jours de réduction du temps de travail et qu'il n'établissait pas n'avoir pu les prendre du fait de l'employeur, la cour d'appel a fait une exacte application de la loi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement du 30 novembre 2011 est bien revêtu d'une cause réelle et sérieuse, D'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de 153.500 ¿ de dommages-intérêts et de celle de 3.500 ¿ pour les frais de l'article 700 du code de procédure civile, D'AVOIR en conséquence dit que la société devra remettre au salarié les bulletins de salaire rectifiés et les documents de fin de contrat, certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiée conformément à cet arrêt dans un délai d'un mois après la notification de l'arrêt sous peine que courir une astreinte de 20 ¿ par jour de retard et par document postérieurement à ce délai, que la cour se réserve de liquider éventuellement et D'AVOIR dit que les dépens seront supportés aux trois quarts par M. X... et pour le quart restant par la société ;
AUX MOTIFS QUE « 2° sur les mérites du licenciement du 30 novembre 2011 La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. Quant à la cause sérieuse, c'est celle d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. En l'espèce, la lettre de licenciement qui comprend plus de trois pages, refait l'historique des relations contractuelles entre les deux parties et évoque le projet de réorganisation de l'agence Île-de-France afin de structurer celle-ci de manière plus équilibrée et de donner à chaque secteur les moyens de son développement. A ce jour, les deux secteurs travaux de l'agence sont en effet très différents : le secteur de Montargis essentiellement centré sur Paris Sud-Est, réalise un chiffre d'affaires annuel compris entre 3 et 5 millions d'euros tandis que le secteur Paris Normandie porte une activité de 14 millions d'euros. La société avait donc décidé de répartir de manière plus harmonieuse les activités et moyens en modifiant la répartition des régions SNCF et en créant un secteur travaux regroupant les régions SNCF Paris Sud-Est Paris-Est Paris-Nord de manière à rééquilibrer les chiffres d'affaires à 9 millions d'euros pour chaque secteur et permettre à chacun de réaliser des projets de 4 à 6 millions en autonomie. Il lui a été expliqué que serait nommé bientôt au poste de chef de secteur de ce nouveau périmètre l'un de ses collègues mais que ce changement d'organisation ne changerait rien à sa rémunération à sa qualification et à son périmètre. Seul l'intitulé du poste changerait. La direction lui expliquait également que si ses activités de suivi administratif et financier étaient parfaitement gérées, il avait encore à développer les dimensions commerciales et d'encadrement de travaux de son poste et que dans ces circonstances il ne serait pas le chef de secteur le mieux positionné pour prendre la responsabilité d'un périmètre élargi. Eu égard à votre refus de cette nouvelle organisation je vous ai immédiatement proposé de nouvelles rencontres et suis venu vous voir suite à votre lettre le 15 novembre et vous m'avez confirmé refuser l'organisation présentée le 8 novembre que vous considériez comme injuste quand bien même vous indiquez que la conduite des travaux n'était pas votre point fort. Au sortir de notre entretien je vous indiquais que j'étais surpris par la rancoeur et l'insatisfaction que vous estimiez alors que je m'étais donc déplacé avec l'objectif de trouver une solution. Face à une situation bloquée et au refus que vous exprimez encore, quoi qu'il arrive d'accepter tout changement, j'ai été amené le jeudi 17 novembre à envisager la rupture de votre contrat de travail et lors de l'entretien préalable on n'a pu que constater une position de repli. Cette situation de blocage engendre une forme de conflit latent préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise. Il est constant que quand une direction veut insérer une hiérarchie intermédiaire qui n'existait pas auparavant, il ne s'agit pas d'une rétrogradation dont est victime le salarié qui voit apparaître un autre corps intermédiaire. La lettre de licenciement a bien souligné que le changement d'organisation ne changerait rien à sa rémunération ni à sa qualification ni à son périmètre. Seul l'intitulé de poste changerait en raison de la présence de ce nouveau chef de secteur. Il est cohérent pour la société d'avoir voulu rééquilibrer les secteurs pour que les chiffres d'affaires avoisinent 9 millions d'euros pour chacun et que des projets de 4 à 6 millions en autonomie puissent être réalisés. Il a bien été précisé à ce cadre, tant dans la lettre de licenciement que lors de la réunion du 8 novembre 2011 que ni son salaire ni sa qualification ne changeraient en sorte qu'il resterait toujours chef de secteur. Le 8 novembre 2011, il avait envoyé un courriel à son supérieur hiérarchique, M. Jacques Y... où il fait valoir que dans la nouvelle organisation, il est déclassé au poste de conducteur de travaux avec perte d'autonomie et de ses fonctions de chef de secteur, ce qui, en clair, équivalait à une sanction disciplinaire et en conclusion il n'acceptait pas cette dernière modification qu'il qualifiait d'injuste et d'injustifiée. Il demandait également à la direction de cesser immédiatement toute forme de harcèlement à son égard. Une note interne du 8 juillet 2011 démontre la nouvelle réorganisation afin de rééquilibrer les secteurs : de nouveaux périmètres commerciaux SNCF sont prévus pour chaque secteur y compris celui de Montargis. Il était désormais rattaché non plus au directeur d'agence mais au chef de secteur intermédiaire. Face à ce refus réitéré, il en est résulté un désaccord profond qui n'a pas manqué d'avoir une incidence sur le bon fonctionnement de l'entreprise, eu égard au blocage instauré. Dans ces conditions, eu égard à sa position de chef de secteur, ce licenciement est bien revêtu d'une cause réelle et sérieuse rendant impossible la poursuite des relations de travail. Sa demande d'une somme de 153 500 ¿, soit 30 mois de salaires à titre de dommages-intérêts sera donc repoussée comme mal fondée.»
1. ALORS QUE l'intitulé du poste du salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord, peu important le maintien de la qualification conventionnelle ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel a jugé que « la lettre de licenciement a bien souligné que le changement d'organisation ne changerait rien à sa rémunération ni à sa qualification ni à son périmètre » tout en constatant que cette lettre indiquait que « Seul l'intitulé de poste changerait en raison de la présence de ce nouveau chef de secteur » ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et a violé ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1235-3 du Code du travail ;
2. ALORS QUE la création d'un échelon hiérarchique intermédiaire accompagnée d'une réduction de l'autonomie et des responsabilités du salarié constitue une modification du contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que la création d'un nouvel échelon hiérarchique entre M. X... et M. Y... n'était pas de nature à modifier le contrat de travail de M. X..., que « la lettre de licenciement a bien souligné que le changement d'organisation ne changerait rien à sa rémunération ni à sa qualification ni à son périmètre » et à relever que l'employeur a indiqué le 8 novembre 2011 que le salarié resterait chef de secteur, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée et peu important les allégations de l'employeur, si dans les faits cette création avait en réalité entraîné une diminution de l'autonomie et des responsabilités de M. X... qui était jusqu'à la nomination de M. Z... le seul chef de secteur dans son périmètre et perdait incontestablement avec cette nomination un pouvoir de décision sur son secteur soumis désormais à l'autorité de M. Z..., nouveau chef de secteur, et si l'employeur avait lui-même reconnu lors de l'entretien préalable du 24 novembre 2011 qu'à cette occasion M. X... allait passer conducteur de travaux ; qu'en omettant d'effectuer cette recherche essentielle à la solution du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
3. ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que la création d'un nouvel échelon hiérarchique entre M. X... et M. Y... n'était pas de nature à modifier le contrat de travail de M. X... dans la mesure où sa rémunération, sa qualification et son périmètre restaient inchangés, quand celui-ci faisait valoir dans ses conclusions soutenues oralement que cette création avait en outre entraîné une diminution de son autonomie et de ses responsabilités, dans la mesure où auparavant il était le seul chef de secteur et fixait seul la politique commerciale et d'exploitation dans son secteur, ce dont il résultait une perte nécessaire d'autonomie et de responsabilités avec la nomination d'un nouveau chef de secteur intervenant dans le périmètre de M. X... et la rétrogradation de celui-ci au poste de conducteur de travaux ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était pourtant de nature à influer sur le litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4. ALORS, en tout état de cause et subsidiairement, QUE tout licenciement doit reposer sur une cause réelle et sérieuse ; que lorsque le salarié exprime à son employeur son refus d'une modification de son contrat de travail, à supposer même que la modification n'affecte que ses conditions de travail, le licenciement ne repose sur une cause réelle et sérieuse que si le refus a été effectif et s'est matérialisé objectivement en acte, ce que le juge doit constater ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes, la cour d'appel s'est bornée à affirmer face au « refus réitéré » du salarié « il en est résulté un désaccord profond qui n'a pas manqué d'avoir une incidence sur le bon fonctionnement de l'entreprise, eu égard au blocage instaure » sans constater que ce refus réitéré s'est concrétisé objectivement et matériellement par un refus effectif du salarié de travailler et d'exécuter ses fonctions contractuelles, quand au contraire le salarié ne peut se voir refuser le droit de contester auprès de son employeur une situation qu'il juge illégitime sans risquer que son licenciement soit prononcé pour ce motif ; qu'ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;
5. ALORS enfin, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans viser ni analyser la moindre pièce du dossier qui lui permettait d'affirmer que face au « refus réitéré » du salarié « il en est résulté un désaccord profond qui n'a pas manqué d'avoir une incidence sur le bon fonctionnement de l'entreprise, eu égard au blocage instaure » la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et elle a insuffisamment motivé sa décision en méconnaissance des exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la demande de Monsieur X... tendant à obtenir les sommes de 7.560,11 ¿ à titre de rappel de RTT non prises et 756 ¿ au titre des congés afférents et D'AVOIR dit que la société devra remettre au salarié les bulletins de salaire rectifiés et les documents de fin de contrat, certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiée conformément à cet arrêt dans un délai d'un mois après la notification de l'arrêt sous peine que courir une astreinte de 20 ¿ par jour de retard et par document postérieurement à ce délai, que la cour se réserve de liquider éventuellement ;
AUX MOTIFS QUE « B) sur la demande de rappel de RTT
Il sollicite une somme de 7560,11 Ce sont les congés payés afférents correspondant aux 32 jours de RTT qui n'ont pas été pris ces dernières années. Cependant l'article 4 paragraphe 2 de l'avenant du 17 septembre 2004 à l'accord d'entreprise EPF sur la réduction à l'aménagement du temps de travail du 18 juin 1999 fixe les conditions dans lesquelles les collaborateurs peuvent prendre leurs jours RTT. Il est précisé que l'ensemble des jours de réduction du temps de travail sont pris sur proposition des salariés concernés, compte tenu de l'autonomie et de l'organisation du temps de travail qui leur sont demandés, eu égard à leur niveau de responsabilité, sans toutefois désorganiser le bon fonctionnement de l'entreprise et après accord de la direction. Cependant, les jours de réduction du temps de travail non pris à la date de rupture du contrat de travail ou en fin d'annualisation ne donnent lieu à aucune indemnisation. Ce cadre ne démontre pas que les années passées, il ait sollicité la prise de ces jours de RTT et qu'on les lui ait refusés. En application de cette réglementation précitée, il y a lieu de débouter M. X... de sa demande infondée.
1. ALORS QU' il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ou conventionnellement ; qu'en retenant cependant, pour débouter M. X... de sa demande au titre des congés conventionnels, qu'il ne rapportait pas la preuve que son employeur l'aurait privé de la possibilité de prendre ses jours RTT, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en méconnaissance de l'article L. 3121-24 du Code du travail ;
2. ALORS QUE l'employeur, tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat, doit justifier de l'extinction de son obligation ; qu'en retenant cependant, pour débouter M. X... de sa demande au titre des jours RTT, qu'il ne rapportait pas la preuve que son employeur l'aurait privé de la possibilité de prendre ses congés, quand il incombait à l'employeur de justifier qu'il avait mis son salarié en mesure de prendre ses congés, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé ensemble les articles L. 4121-1 du Code du travail et 1315 du Code civil ;