LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 25 juillet 2014, RG n° 14/ 00728), que, sur des poursuites de saisie immobilière engagées par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion (la banque) à l'encontre de la société Nandhini (la société), un jugement d'orientation a ordonné la vente par adjudication de l'immeuble saisi à l'audience du 27 février 2014 ; que ce jugement, frappé d'appel, a été confirmé en toutes ses dispositions par arrêt du 24 février 2014 ; qu'entre-temps, la société avait saisi le premier président d'une demande de sursis à exécution, déclarée ultérieurement sans objet ; que par ordonnance sur requête du 6 février 2014, le juge de l'exécution avait ordonné le report de la vente à l'audience du 22 mai 2014 ; que par requête déposée le jour de l'audience d'adjudication, la banque a sollicité la rétractation de l'ordonnance reportant la vente ; que par jugement d'adjudication du 27 février 2014, le juge de l'exécution, après avoir retenu que la demande sur requête avait été débattue contradictoirement, a rétracté l'ordonnance et ordonné la vente forcée ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société Nandhini fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en annulation du jugement d'adjudication, alors, selon le moyen :
1°/ que la demande de rétractation d'une ordonnance sur requête ayant pour seul objet le rétablissement d'un débat contradictoire, le juge doit être saisi dans la forme ordinaire des référés, par une assignation ; que dès lors, le dépôt d'une requête non contradictoire ne pouvait avoir pour effet de saisir le juge, qui ne pouvait pas statuer, peu important la participation du défendeur à l'audience ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 16, 496 et 497 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en tout état de cause, l'acte introductif d'instance doit permettre au défendeur de disposer d'un délai suffisant pour préparer sa défense, la circonstance selon laquelle le défendeur a pu in extremis faire valoir des observations ne permettant pas de considérer qu'un débat contradictoire a été intégralement rétabli ; que dès lors, en considérant que le juge de l'exécution avait pu statuer, le 27 février 2014, sur une requête en rétractation non contradictoire déposée le même jour, sans préciser comment le défendeur avait été mis en mesure de préparer sa défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 16, 496 et 497 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'ordonnance sur requête est dépourvue de l'autorité de la chose jugée ;
Et attendu que l'arrêt retient, d'une part, qu'à la date du 27 février 2014, l'arrêt contradictoire de la cour d'appel en date du 24 février 2014 ayant confirmé en toutes ses dispositions le jugement d'orientation, et donc la fixation de l'audience d'adjudication au 27 février 2014, avait acquis autorité de la chose jugée et, d'autre part, que l'ordonnance sur requête qui avait reporté l'audience d'adjudication au 22 mai 2014 en considération de l'appel et de la demande de sursis à exécution en cours, qui n'avait qu'une autorité par essence relative et provisoire, ne pouvait donc pas être maintenue ; que par ces seuls motifs, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par ces deux branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Attendu, selon l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, que lorsque l'appel est formé contre un jugement ordonnant la vente par adjudication, la cour statue au plus tard un mois avant la date prévue pour l'adjudication ; qu'à défaut, le juge de l'exécution peut, à la demande du créancier poursuivant, reporter la date de l'audience de vente forcée ;
Attendu que la société Nandhini fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en annulation du jugement d'adjudication, alors, selon le moyen, que l'adjudication ne peut intervenir moins d'un mois après la date à laquelle la cour d'appel a statué sur le jugement ordonnant la vente ; que la cour d'appel avait statué sur ce recours le 24 février 2014 ; que dès lors, le juge de l'exécution ne pouvait, le 27 février, adjuger le bien après avoir rétracté sa précédente ordonnance ayant reporté l'adjudication au 22 mai ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 16 du code de procédure civile et le protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu, d'une part, que l'article R. 322-19 susvisé n'interdit pas de tenir l'audience d'adjudication moins d'un mois après le prononcé de l'arrêt d'appel confirmant le jugement d'orientation ayant ordonné la vente forcée ;
Et attendu, d'autre part, que l'arrêt ayant retenu que toutes les publicités avaient été faites pour l'audience d'adjudication fixée le 27 février 2014 et que les enchérisseurs éventuels n'avaient pas pu être prévenus du report de cette audience au 22 mai 2014 ni donc dissuadés de se présenter le 27 février par la mention faite en marge du commandement publié, puisque qu'il est démontré qu'elle n'a été reçue par la conservation des hypothèques que le 26 juillet 2014, c'est sans encourir les autres griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Nandhini, représentée par son liquidateur, M. X..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Nandhini, et de M. X..., ès qualités et le condamne à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Réunion la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Nandhini et M. X..., ès qualités.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé la rétractation d'une ordonnance du juge de l'exécution, qui avait reporté la date de l'audience d'adjudication, et procédé à cette adjudication ;
AUX MOTIFS QUE la SCI Nandhini a requis du juge de l'exécution le report de la date d'adjudication de l'immeuble lui appartenant au visa de l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution alors que le premier président n'avait pas ordonné le sursis à exécution dudit jugement par application des dispositions de l'article R. 122-21 ; QU'elle a requis ce report, alors qu'elle était autorisée à assigner le Crédit agricole à l'audience du 18 février 2014 permettant à la cour d'appel de statuer sur l'appel qu'elle avait interjeté à l'encontre du jugement d'orientation avant la date du 27 février 2014 fixée pour l'adjudication, ce à quoi la cour s'est d'ailleurs employée pour éviter tout recours dilatoire puisqu'elle a effectivement rendu son arrêt le 24 février 2014 ; QUE le rapport de transaction de télécopie qui est produit établit que la SCI Nandhini n'a porté l'ordonnance sur requête qu'elle a obtenue du juge de l'exécution le 6 février 2014 à la connaissance de Maître Garnault, avocat du Crédit agricole, qu'à la veille de la date d'audience d'adjudication initialement fixée, le 26 février 2014 ; QUE ce faisant, elle a placé le créancier poursuivant dans l'impossibilité absolue de saisir utilement le juge de l'exécution par voie d'assignation en référé-rétractation avant cette audience d'adjudication ; QUE dès lors, dans ces conditions qu'elle a elle-même imposées, le Crédit agricole n'a pu agir, sans délai, que par voie de requête en rétractation ; QUE cependant, le principe du contradictoire a été parfaitement respecté puisque le jour-même où elle donnait connaissance au Crédit agricole de sa demande de report de l'audience, avant même qu'il ait pu saisir le juge de l'exécution pour éviter ce report, le 26 février 2014, la SCI Nandhini formait un dire de renvoi et le lendemain, 27 février 2014, elle a répondu par voie de conclusions à la demande en rétractation de l'ordonnance du 6 février 2014 ; QUE le juge de l'exécution qui a expressément fait référence à ses moyens et prétentions de ce chef, y a tout à fait répondu ; QUE la débitrice saisie ne saurait donc se prévaloir de bonne foi d'une irrégularité de la procédure en rétractation du report de l'audience d'adjudication pour prétendre à la nullité du jugement d'adjudication ; QU'au demeurant, à la date du 27 février 2014, l'arrêt contradictoire de la cour d'appel en date du 24 février 2014 ayant confirmé en toutes ses dispositions le jugement d'orientation, et donc notamment la fixation de l'audience d'adjudication au 27 février 2014, avait acquis autorité de la chose jugée ; QUE l'ordonnance sur requête qui avait reporté l'audience d'adjudication au 22 mai 2014 en considération de l'appel et de la demande de sursis à exécution en cours, qui n'avait qu'une autorité par essence relative et provisoire, ne pouvait donc pas être maintenue ; QUE dès lors qu'il avait été dûment appelé au jugement d'orientation, et que l'arrêt d'appel confirmatif en date du 24 février 2014 a été rendu en sa présence, les droits du Trésorier du Port, autre créancier inscrit sur le bien de la SCI Nandhini, ont été respectés et aucune nullité du jugement d'adjudication n'est encourue du fait que pas plus qu'à l'audience d'orientation, il n'était pas comparant à l'audience d'adjudication ; QU'il n'a d'ailleurs fait valoir aucune contestation ; QUE s'agissant du défaut d'enchères, il est constant que toutes les publicités avaient été faites pour l'audience d'adjudication fixée le 27 février 2014 ; QUE les enchérisseurs éventuels n'ont pas pu être prévenus du report de cette audience au 22 mai 2014 ni donc dissuadés de se présenter le 27 février par la mention faite en marge du commandement publié puisque qu'il est démontré par le bordereau d'acte déposé que le Crédit agricole a versé aux débats qu'elle n'a été reçue par la Conservation des hypothèques que le 26 juillet 2014 ; QUE la SCI Nandhini ne peut donc pas prétendre de bonne foi que c'est parce que le report au 22 mai 2014 a été rétracté et qu'il a été ordonné qu'il soit procédé à la vente dès le 27 février 2014 qu'il y eu un défaut d'enchères et que le créancier poursuivant a été déclaré adjudicataire pour le montant de la mise à prix et des frais : QU'il résulte de tout ce qui précède que rien ne justifie d'annuler le jugement d'adjudication entrepris et la SCI Nandhini sera déboutée de toutes ses demandes ;
1- ALORS QUE la demande de rétractation d'une ordonnance sur requête ayant pour seul objet le rétablissement d'un débat contradictoire, le juge doit être saisi dans la forme ordinaire des référés, par une assignation ; que dès lors, le dépôt d'une requête non contradictoire ne pouvait avoir pour effet de saisir le juge, qui ne pouvait pas statuer, peu important la participation du défendeur à l'audience ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 16, 496 et 497 du code de procédure civile ;
2- ALORS QU'en tout état de cause, l'acte introductif d'instance doit permettre au défendeur de disposer d'un délai suffisant pour préparer sa défense, la circonstance selon laquelle le défendeur a pu in extremis faire valoir des observations ne permettant pas de considérer qu'un débat contradictoire a été intégralement rétabli ; que dès lors, en considérant que le juge de l'exécution avait pu statuer, le 27 février 2014, sur une requête en rétractation non contradictoire déposée le même jour, sans préciser comment le défendeur avait été mis en mesure de préparer sa défense, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 16, 496 et 497 du code de procédure civile ;
3- ALORS QUE l'adjudication ne peut intervenir moins d'un mois après la date à laquelle la cour d'appel a statué sur le jugement ordonnant la vente ; que la cour d'appel avait statué sur ce recours le 24 février 2014 ; que dès lors, le juge de l'exécution ne pouvait, le 27 février, adjuger le bien après avoir rétracté sa précédente ordonnance ayant reporté l'adjudication au 22 mai ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article R. 322-19 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 16 du code de procédure civile et le protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme.