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17/03/2016 | FRANCE | N°14-12203

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mars 2016, 14-12203


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;
Vu l'article 17 de la convention collective nationale du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a fait acte de candidature auprès de la CARSAT du Sud-Est à un poste d'agent administratif en octobre 2011 ; que l'employeur ayant formalisé une promesse d'embauche et l'ayant rompue avant tout commencement d'exécutio

n, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour déb...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;
Vu l'article 17 de la convention collective nationale du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a fait acte de candidature auprès de la CARSAT du Sud-Est à un poste d'agent administratif en octobre 2011 ; que l'employeur ayant formalisé une promesse d'embauche et l'ayant rompue avant tout commencement d'exécution, la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que celle-ci avait omis de déclarer un emploi de six mois à l'URSSAF en 2002 et que cette dissimulation, de nature à permettre sa titularisation, avait surpris le consentement de l'employeur qui ne souhaitait recruter que pour un contrat à durée déterminée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que seul peut revendiquer une titularisation l'agent qui a passé plus de six mois, en une ou plusieurs fois, dans les services du même organisme employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la CARSAT du Sud-Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la CARSAT du Sud-Est à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Spinosi et Sureau, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de ses demandes tendant à ce qu'il soit constaté qu'elle a été embauchée par la CARSAT à compter du 12 décembre 2011, à ce que ce contrat de travail soit requalifié en contrat à durée indéterminée, à ce que sa rupture soit déclarée abusive et à ce que la CARSAT soit en conséquence condamnée à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité de requalification, d'indemnité de préavis et congés payés y afférents et de dommages et intérêts ;
Aux motifs que « il convient de constater que postérieurement à la période travaillée à la Caisse d'Assurance Maladie d'Ajaccio en 2007-2008, Mme X... a occupé d'autres emplois dont notamment en dernier lieu 8 mois à la MSA ; ceci induisait qu'elle ne remplissait pas les conditions pour être titularisée à la Caisse d'Assurance Maladie d'Ajaccio, et n'avait donc pas effectué 6 mois et plus de travail dans cet organisme, ce qui est d'ailleurs confirmé par le certificat de travail délivré le 29 mai 2008 précisant un emploi occupé du 12 novembre 2007 au 9 mai 2008.
Dès lors, contrairement à ce qu'a indiqué le Conseil de prud'hommes, la CARSAT du Sud-Est, par l'effet de la neutralisation de la période visée ci-dessus, et au vu de l'expérience professionnelle telle qu'exposée par Mme X... dans son curriculum vitae, pouvait faire une proposition d'embauche à celle-ci.
En revanche, c'est bien la période travaillée à l'URSSAF en 2002 et non signalée par Mme X... qui avait pour effet de placer la CARSAT dans l'obligation de conclure un contrat à durée indéterminée et dès lors, il convient d'examiner les circonstances de la conclusion du contrat de travail.
(...)
Il convient de souligner que le curriculum vitae est destiné principalement à permettre au futur employeur d'appréhender l'étendue de l'expérience professionnelle du candidat à l'embauche et pour ce dernier de faire figurer l'ensemble de son cursus de nature à favoriser son embauche.
En l'espèce, Mme X... née le 20 juillet 1979, ayant fini son BTS action commerciale en 2001, n'avait aucune raison fondée à ne pas faire figurer sur son curriculum vitae, son emploi de 6 mois en 2002 à l'URSSAF de Corse, s'agissant de sa 1re expérience dans un des organismes de la sécurité sociale voire de son 1er emploi.
Il résulte de la relation des faits par Mme X... elle-même qu'elle a déclaré pour la 1re fois cet emploi le 12 décembre 2011 à Marseille lors de son entretien avec Mme Y... chargée de la constitution du dossier, par le biais de la déclaration écrite intitulée « activité dans l'institution » dans laquelle la salariée devait certifier les dates et périodes de travail déjà effectué dans un des organismes de sécurité sociale du régime général.
Il résulte tant de l'attestation de Mme Y... que de celle très circonstanciée de M. Z..., directeur des ressources humaines, que ce dernier saisi de la difficulté, a interrogé Mme X... sur l'omission de cette période d'emploi dans son curriculum vitae, laquelle « a indiqué qu'elle savait que ce contrat de travail antérieur serait un obstacle à son recrutement en contrat à durée déterminée ».
Dès lors qu'il s'agit d'une omission volontaire et non de renseignements inexacts, et compte tenu de la production d'un curriculum vitae paraissant exhaustif, l'employeur ne pouvait procéder à des recherches avant embauche.
Il convient de constater que cette dissimulation est un manquement certain à l'obligation de loyauté et en laissant la CARSAT du Sud-Est dans l'ignorance de cet élément déterminant, Mme X... a surpris son consentement.
En effet, si Mme X... avait mentionné la période travaillée auprès de l'URSSAF de Corse en 2002, au regard de l'article 17 de la convention collective déjà visée, aucune proposition d'embauche ne lui aurait été faite en contrat à durée déterminée, puisqu'elle cumulait alors avec le contrat auprès de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie d'Ajaccio, largement plus de six mois de présence effective dans l'institution et relevait donc du statut de titulaire avec un contrat à durée indéterminée.
Il ressort des attestations produites que Mme X... connaissait parfaitement les règles en la matière.
C'est donc en toute conscience et par un comportement de mauvaise foi que Mme X... a agi et trompé la CARSAT du Sud-Est, par la dissimulation d'un élément déterminant de son expérience professionnelle, afin de se voir consentir le contrat de travail.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité de ce contrat et de débouter Mme X... de ses demandes en indemnités diverses » ;
1/ Alors qu'il résulte de l'article 17 de la convention collective nationale du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale que toute personne embauchée pour une durée de six mois et plus, en une ou plusieurs fois, par un organisme de sécurité sociale devient automatiquement titulaire, engagée par contrat à durée indéterminée, à moins qu'elle n'ait été spécialement engagée à titre temporaire pour une durée maximale de six mois ; qu'en l'espèce, la salariée, justifiant avoir occupé un emploi auprès de la CPAM pendant près de six mois, pouvait ainsi prétendre à être titularisée et engagée par contrat à durée indéterminée par la CARSAT qui l'a embauchée par une lettre du 5 décembre 2011, dès lors qu'elle comptait une présence effective au sein de ces organismes de sécurité sociale d'au moins six mois ; que la Cour d'appel, en retenant néanmoins que, ne comptant pas six mois de présence effective au sein de la CPAM, elle ne remplissait pas les conditions pour être titularisée dans cet organisme, quand il lui appartenait de rechercher si cet emploi précédent ne justifiait pas sa titularisation au sein de la CARSAT, son nouvel employeur, dès lors qu'elle justifiait ainsi d'au moins six mois de présence effective dans des organismes de sécurité sociale en plusieurs fois, s'est prononcée par un motif inopérant au regard de l'article précité ;
2/ Alors encore qu'en retenant « la neutralisation » de la période d'emploi au sein de la CPAM, quand celle-ci devait nécessairement être prise en compte pour apprécier la durée d'emploi totale de la salariée auprès des organismes de sécurité sociale, la Cour d'appel a, à nouveau, méconnu ce texte ;
3/ Alors, en outre, que l'article 1er du protocole d'accord du 3 septembre 2010, annexé à la convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale, prévoit que ne peut prétendre à la qualité de titulaire « le salarié recruté pour une durée déterminée par un contrat institué dans le cadre de l'emploi, ou du développement de la formation professionnelle (article L.1242-3 du code du travail), ou pour remplacer un salarié temporairement absent » ; qu'à supposer que la Cour d'appel ait voulu faire application de ce texte en retenant « la neutralisation » de la période d'emploi de la salariée au sein de la CPAM entre 2008 et 2009 et en décidant que cette période ne devait pas être prise en compte, elle n'a cependant pas recherché si les conditions d'application de l'article 1er dudit protocole étaient réunies, privant ainsi sa décision de base légale au regard de ce texte, ensemble l'article 17 de la convention collective du 8 février 1957 ;
4/ Alors, en tout état de cause, qu'en jugeant que seule la période travaillée à l'URSSAF en 2002 obligeait la CARSAT à conclure un contrat à durée indéterminée avec la salariée, quand le précédent emploi occupé par celle-ci au sein de la CPAM de novembre 2007 à mai 2008 avait nécessairement le même effet, la Cour d'appel a violé de nouveau l'article 17 de la convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale ;
5/ Alors, par ailleurs, que l'employeur, tenu de s'assurer avant l'engagement de la salariée, que celle-ci satisfait aux conditions légales et conventionnelles correspondant à l'emploi et au contrat de travail qu'il lui propose, ne peut se prévaloir d'un vice du consentement, en raison de ce que celle-ci n'aurait pas indiqué, sur son curriculum vitae, une embauche précédente dont il pouvait avoir connaissance par lui-même ; qu'en décidant pourtant que la salariée a commis un dol justifiant la nullité du contrat de travail, après avoir relevé une prétendue omission volontaire de la salariée et la production d'un curriculum vitae paraissant exhaustif, dispensant l'employeur de procéder à des recherches avant embauche, la Cour d'appel a violé les articles 1109 et 1116 du code civil ;
6/ Alors, enfin, que le dol d'une partie au contrat ne justifie la nullité de l'acte que pour autant qu'il a été déterminant du consentement du cocontractant ; qu'en ayant retenu en l'espèce, pour juger que le consentement de la CARSAT a été vicié, que « si Mme X... avait mentionné la période travaillée auprès de l'URSSAF de Corse en 2002, au regard de l'article 17 de la convention collective déjà visée, aucune proposition d'embauche ne lui aurait été faite en contrat à durée déterminée, puisqu'elle cumulait alors avec le contrat auprès de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie d'Ajaccio, largement plus de six mois de présence effective dans l'institution et relevait donc du statut de titulaire avec un contrat à durée indéterminée », quand la CARSAT était en tout état de cause informée de la période d'emploi auprès de la CPAM qui avait le même effet, au regard de l'article 17 de la convention collective, que celle, tue, auprès de l'URSSAF, la Cour d'appel n'a pas fait ressortir en quoi l'erreur commise par l'employeur, du fait de ce silence, était déterminante de son consentement et n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 1109 et 1116 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-12203
Date de la décision : 17/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 12 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mar. 2016, pourvoi n°14-12203


Composition du Tribunal
Président : M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.12203
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