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16/03/2016 | FRANCE | N°14-19683

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mars 2016, 14-19683


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, le 30 mars 1987, par la société Gerland routes, aux droits et obligations de laquelle vient la société Eiffage travaux publics Rhône-Alpes Auvergne (la société) suivant un contrat de travail devenu à durée indéterminée ; qu'en arrêt de travail d'origine non professionnelle à compter du 15 juillet 2008, le salarié a été déclaré inapte à son poste ; qu'il a été, le 18 mars 2010, licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;


Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé, le 30 mars 1987, par la société Gerland routes, aux droits et obligations de laquelle vient la société Eiffage travaux publics Rhône-Alpes Auvergne (la société) suivant un contrat de travail devenu à durée indéterminée ; qu'en arrêt de travail d'origine non professionnelle à compter du 15 juillet 2008, le salarié a été déclaré inapte à son poste ; qu'il a été, le 18 mars 2010, licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :
Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de manque de base légale et de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel, au vu de l'ensemble des éléments de fait et de preuve produits devant elle, de l'absence d'origine professionnelle de l'inaptitude ;
Mais sur le moyen unique, pris en ses autres branches :
Vu l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Attendu que, pour dire que le licenciement se fonde sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le médecin du travail déclarait le 9 février 2010 le salarié inapte au poste d'agent routier en une seule visite, ne fournissait aucune précision sur les aptitudes du salarié dans le cadre d'un reclassement et ne répondait pas au courrier de la société l'interrogeant à ce sujet le 11 février 2010, que par lettre du 10 février 2010, la société interrogeait le salarié sur sa mobilité dans le cadre d'un reclassement, lequel lui répondait le 15 suivant qu'il se positionnerait en fonction des propositions, que l'employeur envoyait aux sociétés de son groupe des courriers précisant la situation du salarié et que toutes lui répondaient négativement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise alors par le salarié, de rechercher, notamment au sein de la société elle-même, les possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail au sein de l'entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il annule l'avertissement du 26 mars 2008 et condamne la société Eiffage travaux publics Rhône-Alpes Auvergne à payer à M. X... la somme de 150 euros à titre de dommages-intérêts pour l'avertissement annulé, l'arrêt rendu le 6 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Eiffage travaux publics Rhône-Alpes Auvergne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Eiffage travaux publics Rhône-Alpes Auvergne et condamne celle-ci à payer à la SCP Waquet, Farge et Hazan, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. X... est fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes de condamnation de la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne à lui payer des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE par une lettre recommandée avec avis de réception du 18 mars 2010, qui fixe les limites du litige, la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne licenciait M. X... pour inaptitude déclarée par le médecin du travail et impossibilité d'un reclassement ; que M. X... se trouvait constamment en arrêt de travail d'origine non professionnelle à compter du 15 juillet 2008 ; que le commencement de cet arrêt était postérieur à l'avertissement de près de quatre mois ; qu'aucune pièce des débats ne renseigne la cour sur les relations et l'ambiance du travail pendant ce laps de temps ; que Mme Y..., ex-épouse de M. X..., atteste que son mari était très préoccupé par l'ambiance de travail ; que toutefois cette attestation, qui n'est pas rédigée en la forme légale, est vague et date du 28 janvier 2011, soit près de trois ans après la période évoquée ; que la cour ne peut en tirer aucune conclusion en l'absence d'autres attestations allant dans le même sens; que selon des certificats médicaux, M. X... souffrait d'une dépression ; que son médecin traitant atteste que l'affection tenait à ses conditions de travail ; que cependant ce dernier, qui n'accompagnait pas son patient sur les chantiers, reprend seulement les propos et doléances de M. X... ; que ceux-ci ne sont étayés ni par des attestations précises de témoins ni par des éléments objectifs et contemporains de l'exécution du contrat de travail ; qu'il ressort au contraire d'une autre attestation de Mme Y..., ex-épouse de M. X..., datée aussi du 28 janvier 2011 que les époux X...-Y... se sont séparés au début de juillet 2008, soit à l'époque du début de l'arrêt de travail ; que dans ces conditions l'origine professionnelle de l'inaptitude cause du licenciement n'est pas établie ; que le médecin du travail déclarait le 9 février 2010 M. X... inapte au poste d'agent routier en une seule visite ; qu'il ne fournissait aucune précision sur les aptitudes de M. X... dans le cadre d'un reclassement ; que la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne l'interrogeait à ce sujet le 11 février 2010 ; qu'il ne répondait pas à ce courrier ; que par lettre du 10 février 2010, la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne interrogeait M. X... sur sa mobilité dans le cadre d'un reclassement, lequel lui répondait le 15 suivant qu'il se positionnerait en fonction des propositions ; que l'employeur envoyait aux sociétés de son groupe des courriers précisant la situation du salarié ; que toutes lui répondaient négativement ; qu'il appert de ces éléments que la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne a respecté son obligation de reclassement ; que le licenciement se fonde ainsi sur une cause réelle et sérieuse ; que sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, selon l'article L. 1222-1 du code du travail le contrat de travail est exécuté de bonne foi ; que la preuve de la mauvaise foi incombe à la partie qui l'invoque ; que celle-ci n'est pas rapportée au vu des éléments, qui précèdent ; que la décision des premiers juges doit être infirmée ;
1°- ALORS QU'en jugeant que l'origine professionnelle de l'inaptitude de M. X..., cause de son licenciement, n'est pas établie au motif que sa dépression serait imputable à la séparation du couple en juillet 2008 quand les certificats médicaux établissent qu'il souffrait d'une dépression liée à ses conditions de travail, qu'il n'avait jamais souffert de pathologie psychologique avant 2008 et que Mme Y..., son ex-épouse, a indiqué que leur séparation était due à la pression physique et morale qu'il subissait dans son travail, ce qui avait généré les querelles familiales, la cour d'appel, en se livrant à une analyse médicale de la dépression, a outrepassé ses pouvoirs et a violé l'article 12 du code de procédure civile ensemble l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°- ALORS QUE M. X... a fait valoir qu'il est tombé gravement en dépression à compter de l'année 2008 suite à un changement brutal de ses conditions de travail à l'origine de son inaptitude ; que ses supérieurs hiérarchiques avaient mis en place, à partir de 2008, des pratiques illégales de travail dissimulé en lui donnant l'ordre de réaliser des travaux chez des particuliers moyennant une rémunération en espèces, pratiques auxquelles il s'était opposé, ce qui lui avait valu des insultes et des menaces de la part de ses chefs qui avaient alors alourdi sa charge de travail et n'avaient cessé d'exercer des pressions sur lui, que ses chefs avaient d'ailleurs fait l'objet de sanctions; qu'en ne s'expliquant pas sur ces éléments de nature à établir l'origine professionnelle de l'inaptitude de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
3°- ALORS QUE le défaut de précisions apportées par le médecin du travail ne libère pas l'employeur de son obligation de rechercher un reclassement du salarié en envisageant les possibilités d'aménagement des postes de son entreprise ; qu'en se fondant sur le fait que le médecin du travail interrogé par la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne sur les aptitudes de M. X... n'avait pas répondu, pour en déduire que la société avait satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
4°- ALORS QU'il appartient à l'employeur de justifier de démarches précises pour parvenir au reclassement du salarié, notamment pour envisager des adaptations ou transformations de postes de travail ou un aménagement du temps de travail ; que la position prise par le salarié est totalement indifférente ; qu'en retenant que la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne avait interrogé M. X... sur sa mobilité dans le cadre d'un reclassement, lequel lui avait répondu qu'il se positionnerait en fonction des propositions, pour en déduire que la société avait rempli son obligation de reclassement , la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
5°- ALORS QUE les recherches des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte s'apprécie à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que M. X... a fait valoir que la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne faisait partie du groupe Eiffage du BTP qui dispose d'un très grand nombre de sociétés et d'établissements tant en Europe que dans les régions Rhône-Alpes-Auvergne ; qu'en se contentant de s'appuyer sur la démarche purement formelle de la société Eiffage Travaux Publics Rhône-Alpes-Auvergne en relevant qu'elle avait envoyé aux sociétés du groupe des courriers précisant la situation du salarié et que toutes lui avaient répondu négativement, sans autre précision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-19683
Date de la décision : 16/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 06 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mar. 2016, pourvoi n°14-19683


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.19683
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