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11/03/2016 | FRANCE | N°15-12316

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 mars 2016, 15-12316


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé à compter du 1er juin 2004 en qualité de serveur par M. Y..., a été licencié pour motif économique le 26 novembre 2008 ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième et troisième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1233-16 du code du travail

;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé à compter du 1er juin 2004 en qualité de serveur par M. Y..., a été licencié pour motif économique le 26 novembre 2008 ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deuxième et troisième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1233-16 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la lettre de licenciement énonçant une baisse importante d'activité ne permettant pas de garder le salarié au sein de l'entreprise, répond aux exigences légales de motivation, et que les difficultés économiques sont démontrées par des bilans déficitaires sur les années 2007 et 2008 ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'elle avait constaté que la lettre de licenciement se bornait à faire état d'une baisse importante de l'activité, en sorte qu'elle ne comportait pas l'énoncé d'un motif économique, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 1er avril 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Lyon-Caen et Thiriez, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et d'avoir ainsi débouté Monsieur X... de sa demande tendant à constater le caractère injustifié de son licenciement et à obtenir des dommages et intérêts sur ce chef ;

Aux motifs propres que la lettre de licenciement en date du 4 décembre 2008, qui fixe les termes du litige, précise que Monsieur Michel X... fait l'objet d'un licenciement économique au motif que la baisse importante de l'activité ne permet pas de le garder au sein de l'entreprise ; que l'employeur a ainsi énoncé les difficultés économiques subies par l'entreprise et ses conséquences sur l'emploi de Monsieur X... qui ne peut être maintenu ; qu'il a donc répondu aux exigences des textes susvisés ; que Monsieur Y... produit les bilans 2007 et 2008 dont il ressort que la société avait un résultat d'exploitation déficitaire de 35 437 ¿ en 2007 et de 19 287 ¿ en 2008 ; que les arguments soulevés par Monsieur X... quant à l'irrégularité des bilans sont inopérants puisque l'absence de mention des rémunérations qu'il invoque ne saurait diminuer les déficits, les salaires constituant au contraire des charges, grevant d'autant le résultat de l'exercice ; que s'il est établi que Monsieur Y... a engagé un nouveau cuisinier le 1er octobre 2008 (en remplacement de celui qui est était parti le 27 avril 2007), cela ne permet pas de remettre en cause les difficultés économiques révélées par les bilans précités, et s'explique par les nécessités de fonctionnement d'un café restaurant ; que la réalité du motif économique invoqué est donc établi, ainsi que son caractère sérieux ;

Et aux motifs réputés adoptés du jugement que la lettre de licenciement, en date du 4 décembre 2008, qui fixe les termes du litige, précise que Monsieur Michel X... fait l'objet d'un licenciement pour motif économique au motif que la baisse importante de l'activité ne permet pas de le garder au sein de l'entreprise ; que pour justifier de la réalité du motif, le défendeur produit les bilans 2007 et 2008 desquels il ressort que la société connaissait un résultat d'exploitation déficitaire de 6 145 ¿ en 2006, 35 437 ¿ en 2007 et 19 287 ¿ en 2008 ; que l'indication sur l'absence de poste de rémunération mentionné aux bilans 2007 et 2008 ne saurait diminuer les déficits constatés, les rémunérations constituant des charges grevant d'autant le résultat de l'exercice ; que le motif indiqué à la lettre de licenciement est en conséquence non seulement réel mais également sérieux ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit énoncer des faits précis et matériellement vérifiables ; qu'en affirmant que la lettre de licenciement de Monsieur X... répondait aux exigences de motivation posées par les articles L 1233-3 et L 1233-16 du Code du travail, quand cette lettre se bornait à faire état d'une « baisse importante de notre activité », sans aucune autre précision, pour justifier le licenciement pour motif économique du salarié, la Cour d'appel a violé les articles susvisés ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les juges ne doivent pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en affirmant, pour juger que « l'employeur a vait répondu aux exigences des textes susvisés ie articles L 1233-3 et L1233-16 du Code du travail », que « l'employeur a vait énoncé les difficultés économiques subies par l'entreprise et ses conséquences sur l'emploi de Monsieur X... qui ne peut être maintenu », quand cette lettre s'était bornée à énoncer que « suite à une baisse importante de notre activité, nous ne pouvons pas vous garder au sein de notre entreprise », la Cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement litigieuse, en violation du principe susvisé ;

ALORS, ENSUITE et subsidiairement, QUE le licenciement, dont la cause économique n'est justifiée que par des éléments de preuve irréguliers et dépourvus de sincérité, est nécessairement privé de cause réelle et sérieuse, peu important l'absence d'incidence de l'irrégularité constatée sur la réalité de la cause économique invoquée ; qu'en affirmant, pour juger que le licenciement de Monsieur X... reposait sur un motif économique réel et sérieux, que « les arguments soulevés par Monsieur X... quant à l'irrégularité des bilans sont inopérants puisque l'absence de mention des rémunérations qu'il invoque ne saurait diminuer les déficits, les salaires constituant au contraire des charges, grevant d'autant le résultat de l'exercice », la Cour d'appel a statué par motif inopérant, privant en conséquence sa décision de base légale au regard de l'article L 1233-3 du Code du travail ;

ALORS, ENFIN et à titre infiniment subsidiaire, QUE la seule baisse du résultat d'exploitation d'une entreprise ne suffit pas à caractériser les difficultés économiques justifiant le licenciement d'un salarié pour motif économique ; qu'en se bornant à relever, pour juger que le licenciement de Monsieur X... reposait sur un motif économique réel et sérieux, que « Monsieur Y... produit les bilans 2007 et 2008 dont il ressort que la société avait un résultat d'exploitation déficitaire de 35 437 ¿ en 2007 et de 19 287 ¿ en 2008 » et que « les difficultés économiques sont révélées par les bilans précités », sans toutefois constater une quelconque baisse des commandes de la société ou encore un accroissement de son déficit, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1233-3 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et d'avoir ainsi rejeté les demandes de Monsieur X... tendant, d'une part, à requalifier son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, d'autre part, à percevoir diverses sommes à titre de rappel de salaire sur temps plein et de congés payés y afférents, de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents, enfin, à condamner l'employeur à verser aux organismes sociaux les charges inhérentes à ces rappels de salaires ;

Aux motifs propres qu'il ressort de son contrat de travail que Monsieur X... a été engagé en qualité de serveur à compter du 1er juin 2004 selon une durée de travail de 20 heures par semaine du lundi au vendredi, de 11 heures à 15 heures ; qu'au soutien de ses prétentions, Monsieur X... produit neuf attestations de clients du Bar Botté, donc cinq indiquent qu'il travaillait de la fin de la matinée jusqu'en soirée, sans plus de précisions quant aux horaires exacts ; qu'il convient de relever que ces déclarations sont contredites par celles des auteurs des huit attestations versées aux débats par l'employeur et que Monsieur X... ne produit aucun élément quant aux horaires effectivement réalisés ; que les documents produits par Monsieur X... ne sont donc pas de nature à étayer ses prétentions ; qu'en conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur X... de l'intégralité de ses demandes au titre de la durée du temps de travail ainsi que de sa demande de régularisation des charges sociales auprès des organismes concernés, qui en découle ;

Et aux motifs réputés adoptés du jugement que selon contrat de travail indéterminée en date du 27 mai 2004, Monsieur Michel X... était embauché par Monsieur Stéphane Y..., exploitant sous l'enseigne Le Bar Botté, en qualité de serveur à compter du 1er juin 2004 et selon une durée de travail de 20 heures par semaine du lundi au vendredi de 11 heures à 15 heures ; que s'il résulte de l'article L 3171-4 du Code du travail que la preuve des heures supplémentaires effectuées n'incombe spécialement à aucune partie et que l'employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, Monsieur Michel X... produit plusieurs attestations d'habitués qui relatent qu'il assurait le service tant à midi que le soir mais qu'à compter du mois de juin 2008 ses horaires étaient réduits et qu'il était remplacé par un tiers avant d'être licencié en décembre 2008 ; que toutefois, ces allégations de réduction des horaires suite au recrutement d'un tiers sont en contradiction avec les mentions du registre unique du personnel ainsi que les attestations produites par la défenderesse ; que les horaires de Monsieur Michel X... sont fixés au contrat de travail de 11 heures à 15 heures ; qu'il n'a jamais revendiqué paiement d'heures complémentaires avant le licenciement ; que Madame Z... dans son attestation indique que l'établissement fermait à 23 heures mais n'affirme pas avoir vu travailler Monsieur Michel X... jusqu'à la fermeture ; que Monsieur A... indique avoir accueilli dans son établissement Monsieur Michel X... après son travail vers heures sans qu'il ait pu vérifier s'il sortait effectivement de son travail au Bar Botté ; que Monsieur B... indique partager l'apéritif tous les soirs vers 18h au Bar Botté avec Monsieur Michel X... mais ne justifie pas avoir personnellement constaté qu'il y travaillait jusqu'à 22 heures ; qu'il en résulte que la réalité d'heures complémentaires voire d'un temps plein par Monsieur Michel X... ne résulte pas des éléments produits aux débats ; qu'il sera en conséquence débouté de l'intégralité de ses demandes au titre de la durée du temps de travail ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve déterminants qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger que « les documents produits par Monsieur X... ne sont pas de nature à étayer ses prétentions », que « Monsieur X... produit neuf attestations de clients du Bar Botté dont cinq indiquent qu'il travaillait de la fin de matinée jusqu'en soirée, sans plus de précisions quant aux horaires exacts » et qu'il « ne produit aucun élément quant aux horaires effectivement réalisés », sans cependant examiner les attestations de Mesdames Z... et C... et de Messieurs D... et B..., lesquelles précisaient pourtant expressément que l'exposant travaillait de 10h à 22-23h, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART et en tout état de cause, QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en se bornant à affirmer, pour exclure l'existence d'heures supplémentaires effectuées par Monsieur X..., que « Monsieur X... produit neuf attestations de clients du Bar Botté dont cinq indiquent qu'il travaillait de la fin de matinée jusqu'en soirée, sans plus de précisions quant aux horaires exacts », sans cependant préciser en quoi les quatre autres attestations, également produites par l'exposant, n'étayaient pas sa demande en paiement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 3171-4 du Code du travail ;

ALORS, ENFIN, QUE Monsieur X... avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « le livre des entrées et sorties du personnel démontre qu'à l'exception de Monsieur X..., le Bar Botté n'avait aucun autre serveur et qu'entre le 27 avril 2007 et le 1er octobre 2008, soit pendant 17 mois, entre le licenciement de Monsieur E... et l'embauche de Monsieur F..., il n'y avait aucun cuisinier. Cependant, l'établissement le Bar Botté effectuait, en sus du bar, un service de restaurant pour le déjeuner et comptait pas moins de 45 places assises, ce qui, en deux services, pouvait faire monter le nombre de couverts servis en salle parfois jusqu'à 90 couverts. Ainsi, et nonobstant les contestations de Monsieur Y... quant au nombre de couverts servis chaque midi, il est manifestement impossible qu'un établissement ouvert 17 heures par jour 7j/7 tourne avec un unique serveur seulement 4 heures par jour et sans aucun cuisinier » (page 14) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que Monsieur X... avait effectué des heures supplémentaires, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions et d'avoir ainsi rejeté la demande de Monsieur X... en paiement d'une indemnité pour travail dissimulé ;

Aux motifs propres que la réalité des heures supplémentaires invoquées par Monsieur X... n'a pas été démontrée ; que l'absence de mention de telles heures sur ses bulletins de salaire ne saurait donc caractériser un travail dissimulé ; qu'il ressort du décompte récapitulatif de l'Urssaf en date du 27 octobre 2008, faisant suite à un contrôle inopiné effectué le 18 septembre 2008, que les deux salariés travaillant au Bar Botté étaient régulièrement déclarés, mais que le compte employeur était radié depuis le 15 novembre 2006 et que Monsieur Y... n'a déclaré aucun salaire depuis cette date ; qu'il apparait également que le comptable du Bar Botté a remis les documents sociaux nécessaires à la régularisation du dossier le 23 octobre 2008 ; que Monsieur Y... a pris le Bar Botté en location gérance à compter du 1er août 2006 ; que s'il a omis de créer un compte employeur et de déclarer les salaires, il justifie avoir pris les dispositions nécessaires pour régulariser la situation dès qu'il en a eu connaissance, et avoir toujours valablement déclaré ses salariés ; qu'il n'est donc pas établi qu'il s'est intentionnellement soustrait à ses obligations en terme de déclaration de salaires ;

Et aux motifs réputés adoptés du jugement que la réalité d'heures complémentaires voire d'un temps plein par Monsieur Michel X... ne résulte pas des éléments produits aux débats ; qu'il sera en conséquence débouté de l'intégralité de ses demandes au titre de la durée du temps de travail ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entrainera, par voie de conséquence, la cassation sur le troisième moyen, en application de l'article du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-12316
Date de la décision : 11/03/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 mar. 2016, pourvoi n°15-12316


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.12316
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