LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° G 14-22.649 et P 14-27.139 ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Sur le pourvoi n° G 14-22.649 :
Vu l'article 613 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret n° 2014-1338 du 6 novembre 2014 ;
Attendu que, par application de ce texte, le pourvoi n'est pas recevable ;
Sur le pourvoi n° P 14-27.139 :
Attendu que le moyen de cassation, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° G 14-22.649 ;
DECLARE non admis le pourvoi n° P 14-27.139 ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille seize.MOYEN ANNEXE
Moyen produit au pourvoi n° P 14-27.139 par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité la condamnation in solidum de Monsieur Kanga Y... et Madame Amélie Z... à verser à Monsieur Daniel X... la somme de 79 173,61 euros en réparation de son préjudice ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le préjudice :
Qu'il ressort du rapport d'examen amiable contradictoire des docteurs Philippe A... et Henri B... qu'à la suite de l'accident, Daniel X... a présenté un traumatisme crânien sans lésion cérébrale qui a évolué de façon favorable et surtout une fracture diaphysaire de l'humérus droit qui a fait l'objet d'une ostéosynthèse au cours d'un séjour hospitalier du 3 au 11 décembre 2006, qu'une immobilisation a ensuite été nécessaire suivie d'une rééducation jusqu'en septembre 2007, qu'il n'y a pas eu d'autres soins, que le déficit fonctionnel temporaire total s'est étendu du 3 décembre 2006 au 3 mars 2007 et le déficit fonctionnel temporaire partiel du 4 mars 2007 au 24 septembre 2007, date de la consolidation ; que les médecins précisent qu'il y a eu arrêt temporaire des activités professionnelles du 3 décembre 2006 au 4 juin 2007 ; qu'il persiste une raideur modérée de l'amplitude de ses mouvements de l'épaule droite chez un sujet droitier (p.5, §10) gaucher (p. 4, §1) ; que ces séquelles justifient un taux de déficit fonctionnel permanent de 6% ; que les souffrances sont de 3/7, le préjudice esthétique de 1,5/7 ;
Qu'après avoir noté que le patient signale que ses douleurs sont à l'origine d'une gêne dans la pratique de certains sports qu'il a dû abandonner, et dans la pratique sexuelle pour laquelle il est gêné ; il signale également que les douleurs du bras qui s'expriment principalement à la fatigue et aux efforts soutenus, le gênent pour son activité de joaillier, les docteurs Philippe A... et Henri B... ajoutent :
Répercussion des séquelles sur :
. les activités professionnelles : fatigabilité dans l'exercice professionnel que décrit le patient . les activités d'agrément : fatigabilité et à la pratique des sports cités par le patient . la vie sexuelle : gêne à la pratique de l'acte sexuel ;
Qu'au vu de ces éléments et de l'ensemble des pièces versées aux débats, le préjudice corporel de Daniel X..., qui était âgé de 52 ans lors de l'accident et de 53 ans à la consolidation, et était inscrit à la chambre des Métiers et de l'Artisanat de Paris en qualité d'artisan avec pour activité «fabrication bijoux objets métaux précieux taille diamants bijouterie joaillerie», sera indemnisé comme suit :
Préjudices patrimoniaux :
. permanents, après consolidation :
- perte de gains professionnels futurs :
Que Daniel X... demande l'indemnisation de sa perte de gains professionnels futurs qu'il chiffre en fonction d'une perte mensuelle nette de 2457 ¿ ;
Qu'il se prévaut à l'appui de sa demande de deux courriers émanant de la SARL EUROPE DIFFUSION « qui le connaissait bien¿ et qui l'appréciait », le premier du 15 novembre 2006 qui lui confirme son engagement à compter du 4 décembre 2006, soit le lendemain de l'accident, en qualité de consultant en haute joaillerie expert gemmologue moyennant rémunération annuelle brute de 60 000 ¿ (soit 3 957,17 ¿ nets mensuels), et le second du 10 juillet 2007 indiquant que compte tenu du certificat du Docteur C... du 4 juin 2007 qu'il a transmis, cette société ne peut maintenir son offre initiale et lui propose un emploi de designer, dessinateur, au salaire mensuel brut de 1 911,25 ¿ (1500 ¿ nets) ; qu'il calcule dons son préjudice en fonction d'une perte mensuelle nette de 2457 ¿ (3957 ¿ -1500 ¿) jusqu'à l'âge de 60 ans, soit 212 196,34 ¿ 2457 ¿ x 12 x 7,197 (euro de rente pour un homme de 53 ans arrêté à 60 ans tel qu'il ressort du barème de la Gazette du Palais 2011) ;
Que le FGAO soutient essentiellement que Daniel X... ne démontre pas que les séquelles de l'accident l'empêchent d'exercer sa profession et souligne que le changement d'orientation de ce dernier résulte d'un choix personnel et qu'il a continué, parallèlement à son activité salariée, à gérer sa micro-entreprise ce qui lui a procuré des revenus non négligeable ;
Que dans son certificat du 4 juin 2007, le docteur C... a indiqué que Daniel X... « aurait besoin d'un aménagement du poste de travail. Il ne peut pas travailler à son établi plus de 10 minutes ;
Que toutefois ce médecin, qui n'est pas un médecin du travail, n'a procédé à aucune étude de poste et s'est manifestement prononcé en fonction des seuls éléments fournis par Daniel X... ;
Que d'autre part, il est étonnant que Daniel X... n'ait pas été apte à occuper l'emploi de consultant en haute joaillerie expert gemmologue alors qu'il indique lui-même dans ses dernières conclusions (p. 6 et 9) qu'après avoir interrompu du fait de l'accident son activité de travailleur indépendant inscrit au Répertoire des Métiers, il a repris partiellement cette activité artisanale le 4 juin 2007 ¿ soit précisément le jour où le docteur C... certifiait qu'il ne pourrait travailler à son établi plus de 10 minutes ¿ et a maintenu cette activité jusqu'au 8 octobre 2010 après avoir perçu une indemnité d'éviction transactionnelle ;
Qu'en effet, s'il y a lieu de relever que Daniel X... ne produit aucune définition du poste de consultant en haute joaillerie expert gemmologue et notamment aucune pièce démontrant qu'il s'agit d'un travail à l'établi, il est en revanche certain que l¿activité de travailleur indépendant exercée par Daniel X..., laquelle consiste à créer et à fabriquer des bijoux dans le cadre de sa micro-entreprise, exige un travail sur établi ;
Qu'il convient également de constater que Daniel X... ne produit aucun avis de la médecine du travail le déclarant inapte au poste de consultant en haute joaillerie expert gemmologue antérieur au courrier de la société EUROPE DIFFUSION ;
Qu'en outre, les seuls documents émanant de la médecine du travail versés aux débats sont les fiches d'aptitude des 19 février 2009 (et non 2008 comme indiqué par la victime) et 27 mai 2009 lesquelles ne concernent manifestement pas l'emploi de consultant en haute joaillerie expert gemmologue à la fois car elles sont postérieures de plus de 18 mois au courrier du 10 juillet 2007 qui revenait sur la proposition concernant cet emploi et également car elles déclarent Daniel X... apte à l'emploi de dessinateur tout en précisant qu'il doit éviter le travail sur établi ;
Qu'il y a lieu enfin de rappeler que les docteurs A... et B..., dont les conclusions ne sont pas contestées et qui ont examiné la victime le 28 mai 2009, ont ¿ après avoir constaté que la mobilisation de l'épaule était limitée de 10° en élévation antérieure et latérale ainsi qu'en rotation interne, que la rotation externe était normale de même que la rétropulsion et l'adduction, que la flexion du coude était discrètement gênée en fin de course de même que la pronation qui était limité de 10°, que la supination et l'extension sont complètes et que l'étude des mensurations périmétriques comparatives des deux membres supérieurs ne mettait en évidence aucune amyotrophie significative ¿ évalué le taux de déficit fonctionnel permanent à 6% et ont uniquement retenu s'agissant des répercussions des séquelles sur les activités professionnelles, une fatigabilité dans l'exercice professionnel « que décrit le patient » et non une inaptitude totale ou partielle à poursuivre l'activité professionnelle antérieure ou à donner suite à l'emploi de consultant en haute joaillerie-expert gemmologue proposé antérieurement à l'accident par la SARL EUROPE DIFFUSION ;
Qu'il résulte de ces éléments, Daniel X... ne démontre pas que la perte de l'emploi de consultant en haute joaillerie-expert gemmologue est la conséquence de l'accident ;
Qu'il sera donc débouté de sa demande au titre de la perte de gains professionnels futurs résultant de la perte de cet emploi » ;
1/ ALORS QU'en déclarant que Monsieur « Daniel X... n 'avait pas démontré que la perte de l'emploi était la conséquence de l'accident » (arrêt, p. 6, §5), après avoir pourtant elle-même constaté que la société EUROPE DIFFUSION avait dit « ne pas pouvoir maintenir son offre initiale d'emploi »« compte tenu du certificat du Docteur C... » (arr., p. 5, §4), qui constatait que Monsieur Daniel X... « ne pouvait travailler à son établi plus de dix minutes» (arr., p. 5, §5), la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du Code civil ;
2/ ALORS QUE la preuve du préjudice et du lien de causalité peut être rapportée par tout moyen ; que pour dire qu' « il n'était pas démontré que la perte de l'emploi ¿ était la conséquence de l'accident », la Cour d'appel a reproché à Monsieur Daniel X... de « ne pas avoir produit d'avis de la médecine du travail le déclarant inapte au poste de consultant antérieur au courrier de la société EUROPE DIFFUSION du 10 juillet 2007 » (arr., p. 6, §2); qu'en déniant pour ce motif toute valeur aux autres éléments qu'elle avait par ailleurs constatés, à savoir que le Docteur C... l'avait déclaré inapte à « travailler à un établi plus de 10 minutes » (arr., p. 5, §5), la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ensemble le principe de la liberté de la preuve.
3/ ALORS ET EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la Cour d'appel a ellemême relevé qu'avaient été établies deux « fiches d'aptitude » émanant de médecins du travail « précisant que Monsieur Daniel X... devait éviter le travail sur établi » (arr., p. 6, §3) confirmant ainsi la teneur du certificat établi par le Docteur C... ; que dès lors, même à admettre la nécessité d'un certificat établi par un médecin du travail pour démontrer le lien de causalité entre la perte de l'emploi et l'accident, il résultait des constatations de l'arrêt que cette preuve était rapportée ; qu'en déniant cependant toute valeur probante à ces « fiches d'aptitude » pour dire que la preuve du lien de causalité n'était pas rapportée, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du Code civil.