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16/02/2016 | FRANCE | N°14-88052

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 février 2016, 14-88052


Statuant sur les pourvois formés par :
- M. René X...,- La société IPS,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 28 octobre 2014, qui, pour exercice illégal de la pharmacie, infraction à la réglementation sur la publicité des médicaments et tentative de tromperie, a condamné le premier, à 20 000 euros d'amende, la seconde, à 30 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 janvier 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1

du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller ...

Statuant sur les pourvois formés par :
- M. René X...,- La société IPS,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 28 octobre 2014, qui, pour exercice illégal de la pharmacie, infraction à la réglementation sur la publicité des médicaments et tentative de tromperie, a condamné le premier, à 20 000 euros d'amende, la seconde, à 30 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 janvier 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle CÉLICE, BLANCPAIN, SOLTNER et TEXIDOR, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBERGE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 388, 390, 551, 565, 591 et 593 du code de procédure pénale, excès de pouvoir, ensemble violation du principe du contradictoire et des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt partiellement confirmatif attaqué a rejeté l'exception de nullité des citations et a déclaré les prévenus coupables des faits qui leur étaient reprochés ;
" aux motifs que, dans sa plainte du 9 novembre 2009, le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a dénoncé la mise en vente par la société IPS de produits répondant à la définition de médicaments par fonction ou par présentation qu'elle a désignés nommément : artriplus, cystibiol, altallergie, royale premium, spray propolis, lecit'ail, ginseng gelée royale et guarana, complexe vision, gingko, sereine, complexe ginseng et gelée royale ; qu'en outre, est jointe à la procédure l'étude en date du 19 mai 2011 de Mme Z...
Y..., pharmacienne inspectrice de santé publique, intitulée : « rapport relatif à la vente de produits commercialisés par la société IPS », document établi à partir du catalogue de la société et qui retient la qualification de médicament pour les quatre produits supplémentaires suivants : les gélules à base de bourdaine et de racine de guimauve, le produit dénommé cybiol, les patchs sommeil à base de millepertuis et le produit dénommé rétinove ; qu'en conséquence, si la citation elle-même se borne à viser « des produits répondant à la définition de médicaments » sans les énumérer précisément, le prévenu ne pouvait cependant avoir aucun doute sur les produits incriminés et a pu préparer sa défense en l'état de la plainte détaillée et explicite du Conseil national de l'ordre des pharmaciens et du rapport de la pharmacienne inspectrice de santé publique, pièces ayant servi de fondement aux poursuites ;
" 1°) alors que seule la citation directe détermine l'étendue de la saisine de la juridiction correctionnelle et que la citation à comparaître doit, à peine de nullité, mettre le prévenu en mesure de connaître avec précision les faits qui lui sont reprochés ; que la circonstance que des précisions sur les faits poursuivis figureraient dans des pièces de la procédure non visées dans les citations et qui n'y sont pas jointes, est insusceptible de pallier l'imprécision des termes des citations et l'absence de désignation de toute autre pièce susceptible de les compléter ; que ces citations indéterminées, insusceptibles de définir les faits poursuivis et l'étendue de la saisine, ont porté atteinte aux droits de la défense des prévenus et sont, dès lors, de nature à en entraîner la nullité ; qu'en se refusant à annuler les citations à comparaître des prévenus devant la juridiction correctionnelle, la cour d'appel a violé les articles 551 et 565 du code de procédure pénale et l'article 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 2°) alors que la seule mention dans un rapport d'étude, joint à la procédure mais non visé dans les citations ni joint à ces dernières, de faits susceptibles de constituer une infraction, est insuffisante à saisir la juridiction correctionnelle desdits faits ; qu'en s'estimant saisie de faits qui n'étaient visés ni dans la plainte du conseil national de l'ordre des pharmaciens ni dans les citations à comparaître délivrées par le parquet, la cour d'appel a méconnu l'étendue de sa saisine et excédé ses pouvoirs ;
" 3°) alors qu'en toute hypothèse, ni la partie civile, ni le parquet, ni les juges de première instance, ne se sont référés à l'étude de 2011 et aux faits qui y sont exposés pour caractériser la responsabilité pénale des prévenus ; qu'en les déclarant coupables d'avoir commercialisé les quatre produits dont cette étude fait état sans les avoir mis en mesure de se défendre sur ces faits, la cour d'appel a violé le principe du contradictoire et les droits de la défense " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de la citation, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les prévenus, informés de la nature des infractions poursuivies et des textes applicables, ont été mis en mesure de préparer leur défense, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 388, 509, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation du principe du contradictoire et des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de tentative de tromperie ;
" aux motifs que la tromperie opérée avant la conclusion du contrat, dont le commencement d'exécution est la mise en vente des marchandises litigieuses auprès de la clientèle par le biais d'un catalogue de vente par correspondance ou d'un site internet, caractérise la tentative punissable prévue par l'article L. 213-1 du code de la consommation visé par les poursuites ;
" alors que, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que la personne poursuivie ait été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; qu'en première instance, les prévenus ont été déclarés coupables de tromperie, leur acte d'appel saisissant dès lors la cour d'appel de cette seule qualification ; qu'en requalifiant le délit de tromperie en tentative de tromperie sans mettre les prévenus en mesure de se défendre sur cette nouvelle qualification, la cour d'appel a méconnu le principe énoncé ci-dessus et les droits de la défense " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société IPS et M. X...sont poursuivis pour avoir trompé ou tenté de tromper des distributeurs ou des consommateurs sur la nature, l'origine, les qualités substantielles, les risques inhérents à l'utilisation, les contrôles effectués, les modes d'emploi ou précautions à rendre, la composition, la teneur en principes utiles de marchandises, en l'espèce en proposant à la vente ou en vendant des produits présentés comme étant des compléments alimentaires, alors que rien n'indiquait aux acheteurs, notamment, sur les étiquetages des produits cédés, qu'ils faisaient l'acquisition de médicaments pour un usage hors d'un cadre médical ou du circuit pharmaceutique, avec cette circonstance que les faits ont eu pour conséquence de rendre l'utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l'homme ;
Attendu que, pour les déclarer coupables de tentative de tromperie, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que les juges n'ont rien ajouté aux faits dont ils étaient saisis, la cour d'appel qui a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 122-3 du code pénal, 16 du décret n° 2006-352 du 20 mars 2006, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt partiellement confirmatif attaqué a déclaré les prévenus coupables d'exercice illégal de la pharmacie, de publicité pour un médicament sans visa de publicité et de tromperie ;
" aux motifs que les prévenus ne peuvent soutenir avoir été induits en erreur sur la qualification réelle des produits litigieux par l'effet combiné de l'autorisation de la DGCCRF de les commercialiser en France et du principe de libre circulation des marchandises dans le cadre de l'Union européenne ; que l'erreur de droit invoquée n'est en effet pas irrésistible puisque de simples vérifications auprès des autorités compétentes, notamment, auprès de AFSSAPS, auraient permis à M. X...de s'apercevoir que les produits litigieux étaient des médicaments dont la vente était réservée aux pharmaciens ; que les prévenus plaident, par ailleurs, à tort qu'en l'état de l'autorisation donnée par la DGCCRF en vue de vendre les produits incriminés, l'élément intentionnel des délits poursuivis ferait défaut ; que, professionnel de la vente depuis de nombreuses années, M. X...n'ignorait pas que la vente de médicaments était réservée aux pharmaciens ; qu'il a donc violé en connaissance de cause cette prescription légale en offrant à la vente sur le catalogue et le site internet de sa société des médicaments ;
" 1°) alors que l'article 16 du décret du 20 mars 2006 prévoit une procédure d'autorisation de commercialisation par la DGCCRF de certains compléments alimentaires fabriqués ou commercialisés dans un autre Etat membre de l'Union européenne ; qu'il est, notamment, prévu que la DGCCRF fasse savoir dans un délai de deux mois au déclarant si le produit peut être commercialisé et dans quelles conditions, l'absence de réponse dans ce délai valant autorisation de mise sur le marché ; qu'il appartient dans ce cadre à la DGCCRF de s'assurer auprès de l'AFSSAPS de l'absence de nocivité du produit ; qu'en considérant que l'erreur de droit n'était pas caractérisée dès lors que les prévenus, qui ont demandé l'autorisation de mise sur le marché des produits litigieux à la DGCCRF, auraient dû s'adresser à l'AFSSAPS, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 16 du décret du 20 mars 2006 ;
" 2°) alors que, constatant que les prévenus avaient obtenu l'autorisation de commercialiser en France les produits litigieux et que ces produits étaient, par ailleurs, commercialisés en Belgique en tant que compléments alimentaires, la cour d'appel ne pouvait sans se contredire conclure à la caractérisation de l'élément intentionnel des délits poursuivis au seul motif que le dirigeant de la société était un professionnel de la vente ; qu'ayant accompli l'ensemble des démarches prescrites par le code de la consommation concernant la commercialisation des compléments alimentaires, les prévenus ne peuvent se voir reprocher la mise sur le marché de produits qualifiables de médicaments ; qu'en considérant que l'élément intentionnel des infractions poursuivies était caractérisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, qui a écarté à bon droit l'erreur de droit invoquée par les prévenus, a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériel qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré ceux-ci coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme globale que la société IPS et M. X...devront payer au Conseil national de l'ordre des pharmaciens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le seize février deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-88052
Date de la décision : 16/02/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 octobre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 fév. 2016, pourvoi n°14-88052


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.88052
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