Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 137-2 du code de la consommation, ensemble les articles 2224 et 2233 du code civil ;
Attendu qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant acte authentique du 12 juin 2007, le Crédit foncier de France (la banque) a consenti à M. X... (l'emprunteur), un prêt immobilier dont certaines échéances sont demeurées impayées ; que, le 6 mars 2012, la banque s'est prévalue de la déchéance du terme et a délivré à l'emprunteur un commandement de payer valant saisie immobilière, puis l'a assigné, le 29 juillet 2013, devant le juge de l'exécution ;
Attendu que, pour déclarer prescrite l'action en recouvrement de la créance résultant de l'acte notarié du 12 juin 2007, l'arrêt énonce que le prononcé de la déchéance du terme, laissé à la seule appréciation du créancier, ne peut constituer le point de départ du délai de prescription, et qu'en revanche, par application des articles 2224 du code civil et L. 137-2 du code de la consommation, le point de départ de ce délai se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée, soit, dans le cas d'une action en paiement au titre d'un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé ; qu'il retient que le premier impayé non régularisé se situant au 6 juillet 2010, la prescription était acquise avant la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare prescrite l'action en recouvrement de la créance résultant de l'acte notarié du 12 juin 2007, l'arrêt rendu le 3 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour le Crédit foncier de France
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré prescrite l'action en recouvrement de la créance résultant de l'acte notarié du 12 juin 2007 ;
AUX MOTIFS QUE « suivant acte reçu par Maître Y..., notaire à ANTIBES le 12 juin 2007, Monsieur X... a fait l'acquisition dans un ensemble immobilier dénommé « Villa Raphaël » sis à ANTIBES (06600), 739 Chemin des Combes, cadastré section DN n° 171 pour 1 ha 15 a 22 ca de trois lots de copropriété. Pour financer cette acquisition et au terme du même acte, Monsieur X... a obtenu un prêt de la société CREDIT FONCIER, pour une somme de 194. 430 ¿, avec inscription d'un privilège de prêteur de deniers sur le bien objet du financement, remboursable en 360 mensualités, 314 de 1. 039, 33 euros et 46 de 1. 004, 30 euros. Le crédit présentant un arriéré de 9. 849, 71 euros au 26 janvier 2012, le CREDIT FONCIER a adressé à Monsieur X... une lettre de mise en demeure de régulariser le 25 janvier 2012 et s'est prévalu de la déchéance du terme au 6 mars 2012. A la date du 6 avril 2013, la créance s'élevait à la somme de 210. 578, 93 euros. Le CREDIT FONCIER a fait délivrer un commandement de payer valant saisie signifié le 12 avril 2013 et publié le 4 juin 2013, vol. 2013 S n° 55 sur le fondement du prêt notarié et de la grosse exécutoire d'un jugement de condamnation du 11 mai 2011 et a fait délivrer assignation à l'audience d'orientation le 29 juillet 2013, pour une audience d'orientation du 19 septembre suivant ; (...) Cédric X... critique le jugement en ce que, faisant application du principe de division de la prescription, le premier juge a déclaré prescrites certaines échéances mais non prescrite la créance en capital, alors que le point de départ de la prescription s'entend du premier impayé non régularisé. La banque s'oppose an jugement en ce qu'il a fait application de la prescription aux échéances impayées alors que le point de départ dit délai de prescription est la déchéance du terme, intervenue le 6 mars 2012 soit un mois après l'envoi le 25 janvier 2012 de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception valant mise en demeure de payer. Elle ajoute que le débiteur a reconnu le droit du créancier notamment par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 16 avril 2013 à de multiples reprises. Aux termes de l'article 2224 du code civil les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Ce délai est réduit à deux ans en matière de crédit immobilier par application de l'article L. 137-2 du code de la consommation en sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008. En l'espèce le décompte de la banque mentionne au 6 mars 2012 un solde débiteur d'échéances impayées de 10. 885, 17 ¿ dont le premier impayé non régularisé se situe au 6 juillet 2010, la banque ayant prononcé la déchéance du terme par une lettre de mise en demeure de régulariser le 25 janvier 2012, restée infructueuse, pour le 6 mars 2012. Le prononcé de la déchéance du terme laissé à la seule appréciation du créancier, alors que l'emprunteur est défaillant depuis de nombreux mois, cette défaillance caractérisant un élément objectif, conduit à rejeter la déchéance du terme comme point de départ du délai de prescription, en sorte que ce moyen est rejeté. En revanche, par application de l'article 2224 du code civil et L. 137-2 du code de la consommation le point de départ du délai de prescription biennale prévu par le premier de ces textes se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée, soit, dans le cas d'une action en paiement au titre d'un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé. La reconnaissance du droit du créancier par le débiteur opérée selon le créancier par un courrier du débiteur du 16 avril 2013, postérieur de quelques jours à la délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière est sans effet sur la prescription acquise antérieurement à cette date dans le délai de deux années du premier impayé non régularisé soit à la date 6 juillet 2012 ce dont il suit que le jugement dont appel est infirmé de ce chef » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le point de départ de la prescription applicable à l'action tendant au remboursement d'un crédit immobilier se situe au jour où les obligations issues de ce crédit deviennent exigibles ; que l'obligation de payer les mensualités est exigible à la date des échéances convenues selon le tableau d'amortissement tandis que l'obligation de rembourser le capital restant dû ne devient exigible qu'à compter du jour où l'établissement prêteur prononce la déchéance du terme ; qu'en conséquence, en posant en termes généraux que l'action du prêteur ayant consenti un crédit immobilier, qu'elle tende au paiement d'échéances impayées ou au remboursement du capital restant dû, se prescrit indifféremment à compter du premier incident de paiement non régularisé et en jugeant en conséquence que la date de la première échéance impayée non régularisée, fixée par l'arrêt au 6 juillet 2010, constituait le point de départ de la prescription non seulement pour les échéances impayées à cette date, mais également pour le paiement de la totalité du capital pourtant devenu exigible à la suite de la déchéance du terme intervenue le 6 mars 2012 seulement, la cour a violé, outre l'article L. 137-2 du Code de la consommation, les articles 2224 et 2233 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge qui entend sanctionner l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle ne peut porter atteinte à la substance des droits et obligations légalement convenus entre les parties ; qu'en conséquence, si, comme en l'espèce, les juges d'appel estiment que l'établissement prêteur a tardivement prononcé la déchéance du terme en l'état du nombre d'échéances impayées, ils ne sauraient pour autant priver l'établissement prêteur de sa créance en capital, prétexte pris d'une fixation du point de départ de la prescription au jour du premier incident de paiement non régularisé, sauf à violer, ensemble, les articles 1134 du Code civil, les articles 4 et 8 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 de la CESDH ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE les paiements s'imputent sur les échéances impayées plus anciennes ; qu'en l'espèce, les seconds juges constataient qu'au 6 mars 2012, le solde débiteur des échéances impayées s'élevait à la somme de 10. 885, 17 ¿, tout en relevant que le montant des mensualités s'élevait à la somme de 1. 039, 33 ¿ ; qu'en conséquence, en l'état des paiements intervenus, il n'y avait que 11 mensualités impayées à l'échéance du 6 mars 2012, celle-ci incluse, de sorte que la première échéance impayée non régularisée se situait nécessairement au 6 mai 2011, soit moins de deux ans avant la date de délivrance du commandement au 12 avril 2013 ; qu'en déclarant néanmoins prescrite la créance du CREDIT FONCIER DE FRANCE, la cour a violé les articles L. 137-2 du Code de la consommation outre les articles 1254 et 1256 du Code civil.