LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Yaroni Y...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 8 janvier 2016, qui a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires belges, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Y... a fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen délivré le 12 octobre 2015 par les autorités judiciaires belges pour l'exécution d'une condamnation à la peine de deux ans d'emprisonnement, prononcée le 27 janvier 2015 par la cour d'appel de GAND (Belgique), pour escroquerie ; qu'après un premier renvoi ordonné le 13 novembre 2015, la cour d'appel a statué, par un arrêt avant-dire droit du 4 décembre 2015, sur des exceptions de nullité soulevées par M. Y... et renvoyé l'examen de l'affaire au 8 janvier 2016, aux fins d'obtenir communication de la décision de condamnation belge, de la plainte de la victime belge et d'un arrêt rendu, le 30 juin 2014, par la cour d'appel de PARIS condamnant l'intéressé, notamment pour escroqueries, à quatre ans d'emprisonnement ; que par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction a ordonné la remise de M. Y... aux autorités judiciaires belges, mais différé celle-ci jusqu'à l'exécution de la peine prononcée en France ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme, et des articles préliminaires, 198, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable le mémoire déposé le jour de l'audience, le 8 janvier 2016, par l'avocat de M. Y... afin de solliciter un renvoi et a dit n'y avoir lieu à renvoi ;
" aux motifs que le mémoire déposé ce jour à l'audience, ne respecte pas les dispositions de l'article 198 du code de procédure pénale ; qu'il est, en conséquence, déclaré irrecevable ; que la cour jusqu'à ce jour, a fait droit aux différentes demandes de renvoi présentées ; que le 4 décembre 2015, il a été ordonné un supplément d'information tenant à l'obtention des copies de l'arrêt de la cour d'appel de Gand, du 27 janvier 2015, de la plainte de la victime belge et de l'arrêt de la cour d'appel de Paris, du 30 juin 2014, renvoyant l'examen au fond à l'audience du 8 janvier 2016 ; qu'en exécution de ce supplément d'information sont parvenus au greffe de la chambre de l'instruction, le 8 décembre 2015, la copie de l'arrêt de la cour d'appel de Paris et, le 22 décembre 2015, les pièces réclamées aux autorités belges ; qu'ayant constaté que l'avocat de M. Y... n'était pas venu consulté les pièces annexées au dossier, mises à sa libre disposition, malgré sa connaissance de la date de renvoi, tant par sa présence, le 4 décembre 2015, qu'à l'envoi régulier d'une convocation par fax, du 7 décembre 2015, le greffe a fait parvenir d'autorité à Me Z..., par fax les pièces belges, le 31 décembre 2015, et l'arrêt de la cour d'appel de Paris, le 5 janvier2016 ; qu'à l'examen de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 juin 2014, la cour a pu constater que M. Y... et Me Z..., avaient tous deux assistés à cette audience, Me Z... ayant d'ailleurs obtenu copie de l'arrêt, le 4 juillet 2014 ; qu'ils en avaient en conséquence une connaissance littérale depuis le 30 juin 2014 ; que le principe du contradictoire ayant été respecté, la cour dit n'y avoir lieu à renvoi, la demande présentée étant manifestement dilatoire ;
" alors que la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties ; que M. Y... a, par la voie de son conseil, sollicité un renvoi pour lui permettre de préparer sa défense, faisant valoir qu'il n'avait eu connaissance des éléments recueillis dans le cadre du supplément d'information ordonné par l'arrêt, du 4 décembre 2015, que le 31 décembre 2015 et le janvier 2016 et qu'il n'avait donc pu préparer sa défense en vue de l'audience qui s'est déroulée le 8 janvier ; qu'en rejetant cette demande de renvoi, par des motifs impropres à caractériser le caractère prétendument dilatoire de cette demande, et sans constater aucune impossibilité de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés " ;
Attendu que le 8 janvier 2016, à l'occasion de l'audience sur le fond, Me Z..., avocat de M. Y..., a sollicité un renvoi au motif que, les pièces de justice demandées le 4 décembre 2015 étant parvenues tardivement, il n'avait pas disposé du temps nécessaire afin de préparer la défense de son client ;
Attendu que pour rejeter cette demande, l'arrêt énonce, notamment, que la copie de l'arrêt de la cour d'appel de Paris est parvenue au greffe de la chambre de l'instruction le 8 décembre 2015, que les pièces demandées aux autorités judiciaires belges sont parvenues le 22 décembre 2015, qu'elles ont, dés leur arrivée, été mises à la disposition des parties, que le greffe a pris l'initiative de les adresser par deux télécopies, les 31 décembre 2015 et 5 janvier 2016, à Me Z..., qu'au surplus Me Z... assurait la défense de M. Y... devant la cour d'appel de Paris et était en possession de l'arrêt du 30 juin 2014 dés son prononcé ;
Qu'en cet état, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, ni les textes légaux visés au moyen ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 695-14, 695-22-1, 803-5, 695-31, 695-39, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que les conditions légales d'exécution du mandat d'arrêt européen émis le 12 octobre 2015 par l'avocat général de la cour d'appel de Gand (Belgique) à la suite de la condamnation prononcée, le 27 janvier 2015, par ladite cour d'appel pour des faits d'escroquerie à un peine de deux ans d'emprisonnement assortie d'un ordre d'arrestation immédiate sont remplis, ordonné la remise de M. Y... aux autorités judiciaires belges, et dit que cette remise sera différée jusqu'à la fin de l'exécution de la peine d'emprisonnement prononcée à son encontre par les juridictions françaises ;
" aux motifs que M. Y... a été condamné, le 27 janvier 2015, à la peine de deux ans d'emprisonnement, assortie d'un ordre d'arrestation immédiate, pour des faits d'escroquerie, en application de l'article 496 du code pénal belge qu'un mandat d'arrêt européen a été délivré le 12 octobre 2015 à son encontre ; que selon la loi belge, le délit d'escroquerie est punissable d'une mesure de sûreté privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à trois ans ; que la peine n'est pas prescrite au regard de cette même loi ; qu'ainsi aucune condition de refus à exécution du mandat d'arrêt européen résultant des articles 695-22, 695-22-1, 695-23, 695-24 du code de procédure pénale ne trouve à s'appliquer étant précisé que les faits d'escroquerie prévu à l'article 695-23 dudit code prévoit que ¿ ¿ le mandat d'arrêt est exécuté sans contrôle de la double incrimination des faits reprochés lorsque les agissement considérés sont punis d'une peine privative de liberté égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement....., et entrent dans l'une des catégories d'infractions suivantes l'escroquerie... " que si M. Y... n'était pas présent à l'audience au cours de laquelle a été rendue la décision de condamnation, et que celle-ci ne lui avait pas été signifiée, cette condamnation pourra faire l'objet d'une opposition " dans les quinze jours qui suivent sa remise " ; que bien que l'avocat de M. Y... affirme qu'une telle remise porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée, il ne rapporte aucun élément permettant de l'établir rappelant simplement que M. Y... est marié et père de deux enfants, avec une épouse prise en charge médicalement, et qu'il est incarcéré pour autre cause jusqu'à une fin de peine fixée à ce jour au 21 mai 2017 ; que les informations communiquées par l'Etat d'émission apparaissent aujourd'hui suffisantes, après exécution du supplément d'information précédemment ordonné, dans la mesure où les faits ayant donné lieu à condamnation de M. Y... en Belgique sont distincts de ceux pour lesquels la cour d'appel de Paris, le 30 juin 2014, l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement ; que M. Y..., ressortissant franco-israélien, n'ayant pas consenti à sa remise aux autorités belges, sans renoncer au principe de spécialité, il y a lieu de lui en donner acte mais d'accorder sa remise étant informé qu'un pouvoir en cassation est possible sous un délai de trois jours francs en application de l'article 568-1 du code de procédure pénale ; que cependant, M. Y..., purgeant actuellement une peine correctionnelle définitive de quatre ans, prononcée par la chambre des appels correctionnels de Paris, le 30 juin 2014, il y a lieu conformément à l'article 695-39 du code de procédure pénale, de différer la remise de l'intéressé pour le temps nécessaire à l'exécution de cette peine ;
" 1°) alors qu'il résulte de la combinaison des articles 695-14 et 695-22-1 du code de procédure pénale que, lorsque le mandat d'arrêt européen a pour objet la mise à exécution d'une condamnation prononcée en l'absence de l'intéressé et par une décision qui ne lui a pas été signifiée, celui-ci doit être informé, en langue française, de la possibilité d'exercer un recours contre cette décision et du délai qui lui est imparti ; qu'à défaut, l'exécution du mandat d'arrêt européen doit être refusée ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des éléments fournis par les autorités belges que les indications relatives au délai d'opposition applicable dans le cas où l'intéressé est, comme l'est M. Y..., détenu à l'étranger, n'avaient pas été fournies en langue française, de sorte que l'exécution du mandat d'arrêt européen devait être refusée, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
" 2°) alors qu'il résulte de la combinaison des articles 695-31 et 695-39 du code de procédure pénale que la chambre de l'instruction doit, avant d'inviter l'intéressé à préciser s'il consent ou ne consent pas à sa remise aux autorités judiciaires de l'Etat d'émission, lui préciser si la remise envisagée est, le cas échéant, différée ou temporaire ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que M. Y... n'a pas consenti à sa remise, sans être informé des modalités envisagées pour celle-ci ; qu'en ordonnant sa remise aux autorités judiciaires belges en différant cette mesure jusqu'à la fin de l'exécution de la peine d'emprisonnement prononcée à son encontre par les juridictions françaises, sans l'avoir, au préalable, invité à consentir ou non à cette remise différée, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisées " ;
Attendu que le moyen reprend deux exceptions de nullité de la procédure qui ont été écartées par la chambre de l'instruction dans l'arrêt avant-dire droit rendu le 4 décembre 2015 contre lequel aucun pourvoi n'a été formé ;
Que dés lors, ces moyens n'ayant pas été repris à l'occasion de l'audience sur le fond, ils sont irrecevables ;
Et attendu que l'arrêt a été rendu par une chambre de l'instruction compétente et composée conformément à la loi, et que la procédure est régulière ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Raybaud, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.