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09/02/2016 | FRANCE | N°14-21152

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 février 2016, 14-21152


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 3 avril 2014), que M. X... a émis le 2 juillet 2010 un chèque de 100 000 euros au profit de la société BL Construction qui l'a subrogé, pour ce montant, dans ses droits à l'égard de la SCI La Mordorée ; que la société BL Construction ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 19 novembre 2010 et 7 janvier 2011, M. X... a déclaré au passif sa créance, laquelle a été admise à titre chirographaire ; que M. Y..., agis

sant en qualité de liquidateur de la société BL Construction, a conclu, le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 3 avril 2014), que M. X... a émis le 2 juillet 2010 un chèque de 100 000 euros au profit de la société BL Construction qui l'a subrogé, pour ce montant, dans ses droits à l'égard de la SCI La Mordorée ; que la société BL Construction ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 19 novembre 2010 et 7 janvier 2011, M. X... a déclaré au passif sa créance, laquelle a été admise à titre chirographaire ; que M. Y..., agissant en qualité de liquidateur de la société BL Construction, a conclu, le 1er juillet 2011, une transaction avec la SCI La Mordorée en exécution de laquelle celle-ci lui a versé une somme de 110 000 euros pour solde de tout compte ; que le liquidateur ayant refusé de verser la somme de 100 000 euros que revendiquait M. X... en se prévalant de la subrogation conventionnelle, ce dernier l'a assigné en restitution ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que la subrogation, immédiatement opposable au débiteur, place le subrogé dans les droits du créancier ; que la créance est alors éteinte à l'égard de ce dernier, qui perd tout droit d'action contre le débiteur sur les droits transmis ; que M. X... a versé à la société BL Construction, le 2 juillet 2010, une somme de 100 000 euros due par la SCI La Mordorée ; que, conventionnellement subrogé dans les droits de la société BL Construction le même jour, M. X... est devenu le seul créancier de la SCI La Mordorée ; que cependant, après le jugement d'ouverture de la procédure collective de la société BL Construction, le liquidateur a encaissé à nouveau la même somme, cette fois de la SCI La Mordorée, sur le fondement d'un protocole du 1er juillet 2011 conclu avec elle ; que cette somme n'étant due qu'à M. X..., son encaissement a fait naître à son profit une créance sur la société BL Construction née postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de cette dernière ; qu'en jugeant le contraire, pour retenir que la seule voie offerte à M. X... pour recouvrer la somme litigieuse était celle de la déclaration de créance au regard des dispositions d'ordre public de la loi du 26 juillet 2005, la cour d'appel a violé les articles 1249 du code civil et R. 622-21 et suivants du code de commerce ;
2°/ que, selon un principe général du droit, nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui ; que M. X... ayant versé à la société BL Construction une somme de 100 000 euros qui lui était due par la SCI La Mordorée, la créance de la société BL Construction s'est éteinte ; que, s'étant appauvri de cette somme, M. X..., subrogé dans les droits de cette dernière société, est devenu seul créancier de la SCI La Mordorée à hauteur la somme qu'il a payée ; que, dès lors, la perception intervenue de cette même somme par le liquidateur auprès de la SCI La Mordorée, correspond à un enrichissement indu et à un double paiement de la société BL Construction, en fraude aux droits de M. X... ; que ce paiement étant intervenu après le jugement d'ouverture, a fait naître au profit de M. X... une créance contre la société BL Construction qui, ne pouvant être déclarée au passif, justifiait sa revendication ; qu'en rejetant dès lors cette demande, au motif erroné que la voie subsidiaire de la revendication sur le fondement de l'enrichissement sans cause était fermée à M. X... parce que la créance litigieuse, prétendument née avant l'ouverture de la procédure collective, pouvait uniquement être l'objet d'une déclaration de créance à cette procédure, la cour d'appel a violé les articles 1249 du code civil et R. 622-21 et suivants du code de commerce, ensemble le principe général du droit selon lequel nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui ;
Mais attendu, d'une part, que si, selon les constatations de l'arrêt, M. X... était créancier de la société BL Construction au titre du prêt de la somme de 100 000 euros qu'il lui avait remise avant l'ouverture de sa procédure collective et bénéficiait d'une subrogation dans ses droits contre la SCI La Mordorée, le versement par celle-ci d'une somme de 110 000 euros entre les mains du liquidateur de la société BL Construction n'a pas, contrairement à l'allégation de la première branche, fait naître au profit de M. X... une créance distincte de restitution de 100 000 euros sur cette société ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que M. X... avait été admis au passif de la société BL Construction au titre de sa créance de remboursement du prêt et n'avait pas cherché à en recouvrer le montant contre la SCI La Mordorée, malgré l'action subrogatoire dont il disposait à cette fin, c'est à bon droit que la cour d'appel a rejeté la demande de restitution de la somme de 100 000 euros présentée contre la société BL Construction sur le fondement de l'enrichissement sans cause, en raison du caractère subsidiaire de cette action ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y..., en sa qualité de liquidateur de la société BL Construction, et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour M. X...

II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement rendu le 12 avril 2013 par le tribunal de commerce de Blois qui avait débouté M. François X... de toutes ses demandes, fins et prétentions et, y ajoutant, de l'AVOIR débouté de sa demande en tant que subsidiairement fondée sur F enrichissement sans cause restitution ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la remise des 100. 000 euros litigieux s'est faite à titre de prêt, comme il ressort des explications des parties et des mentions portées par l'appelant sur son relevé de compte (pièce n° 2), et si BL Construction a subrogé M. X... à hauteur de 100. 000 euros dans sa créance envers la SCI La Mordorée, elle n'en est pas moins restée sa débitrice, M. X... ayant d'ailleurs déclaré sa créance à sa procédure collective ; qu'il ne justifie pas avoir cherché à se faire payer par la SCI La Mordorée, auprès de laquelle Me Y... était fondé, ès-qualités, à recouvrer cette créance, comme il l'a fait en exécution du protocole d'accord transactionnel ; que les fonds ont été encaissés à bon droit sur le compte de la procédure collective puisqu'ils entrent dans l'actif de l'entreprise ; que la demande de restitution dirigée par M X... contre le liquidateur s'analyse en une demande en paiement formée contre une société en procédure collective, relevant, comme telle, des dispositions d'ordre public de la loi du 26 juillet 2005 ; qu'une demande de restitution de fonds ne peut être formée par voie de revendication, la seule voie ouverte au créancier d'une somme d'argent étant de déclarer sa créance à la procédure collective de son débiteur, comme l'a fait l'appelant ; que la demande de restitution a donc été rejetée à bon droit par le tribunal ; qu'elle doit l'être aussi sur son fondement subsidiaire tiré de l'enrichissement sans cause, qui ne peut être admis qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur, ce qui n'est pas le cas en l'espèce où M. X... a procédé à la déclaration de sa créance à la liquidation, judiciaire, ce qui traduit l'exercice d'une action en justice, et où il bénéficie d'une décision d'admission de cette créance ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la somme perçue par Me Gérald Y... es qualités à l'issue du protocole transactionnel signé avec la SCI LA MORDORÉE, et la société PLUVIAUD l'a été au nom et pour le compte de la liquidation judiciaire de la SARL BL CONSTRUCTION, dans l'intérêt collectif des créanciers ; que conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, il y a lieu de considérer la créance de M. François X... suite au paiement qu'il a effectué de la somme de 100. 000, 00 ¿ à la SARL BL CONSTRUCTION comme une créance née avant le jugement d'ouverture de la procédure collective à rencontre de la SARL BL CONSTRUCTION ; qu'aucun texte ne permettant d'opposer à la procédure une subrogation conventionnelle qui ne fait l'objet d'aucune mesure de publicité, en l'espèce la demande formulée par M. François X... doit s'analyser comme une demande en paiement formée contre une société qui fait l'objet d'une procédure collective, en conséquence cette créance relève des dispositions des articles R. 622-21 et suivants du code de commerce relatifs aux déclarations de créance ;
1° ALORS QUE la subrogation, immédiatement opposable au débiteur, place le subrogé dans les droits du créancier ; que la créance est alors éteinte à l'égard de ce dernier, qui perd tout droit d'action contre le débiteur sur les droits transmis ; que M. X... a versé à la société BL CONSTRUCTION, le 2 juillet 2010, une somme de 100. 000 ¿ due par la SCI LA MORDORÉE ; que, conventionnellement subrogé dans les droits de la société BL CONSTRUCTION le même jour, M. X... est devenu le seul créancier de la société LA MORDORÉE ; que cependant, après le jugement d'ouverture de la procédure collective de la société BL CONSTRUCTION 19 novembre 2010, le liquidateur, es qualités, a encaissé à nouveau la même somme, cette fois de la SCI LA MORDORÉE, sur le fondement d'un protocole du 1er juillet 2011 conclu avec elle ; que cette somme n'étant due qu'à M. X..., son encaissement a fait naître à son profit une créance sur la société BL CONSTRUCTION née postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de cette dernière ; qu'en jugeant le contraire, pour retenir que la seule voie offerte à M. X... pour recouvrer la somme litigieuse était celle de la déclaration de créance au regard des dispositions d'ordre public de la loi du 26 juillet 2005, la cour a violé les articles 1249 du code civil et R. 622-21 et suivants du code de commerce ;
2° ALORS QUE, selon un principe général du droit, nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui ; que M. X... ayant versé à la société BL CONSTRUCTION une somme de 100. 000 euros qui lui était due par la SCI LA MORDORÉE, la créance de la société BL CONSTRUCTION s'est éteinte ; que, s'étant appauvri de cette somme, M. X..., subrogé dans les droits de cette dernière société, est devenu seul créancier de la SCI LA MORDOREE à hauteur la somme qu'il a payée ; que, dès lors, la perception intervenue de cette même somme par Me Y..., es qualités, auprès de la SCI LA MORDORÉE, correspond à un enrichissement indu et à un double paiement de la société BL CONSTRUCTION, en fraude aux droits de M. X... ; que ce paiement étant intervenu après le jugement d'ouverture, a fait naître au profit de M. X... une créance contre la société BL CONSTRUCTION qui, ne pouvant être déclarée au passif, justifiait sa revendication ; qu'en rejetant dès lors cette demande, au motif erroné que la voie subsidiaire de la revendication sur le fondement de l'enrichissement sans cause était fermée à M. X... parce que la créance litigieuse, prétendument née avant l'ouverture de la procédure collective, pouvait uniquement être l'objet d'une déclaration de créance à cette procédure, la cour a violé les articles 1249 du code civil et R. 622-21 et suivants du code de commerce, ensemble le principe général du droit selon lequel nul ne peut s'enrichir injustement aux dépens d'autrui.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-21152
Date de la décision : 09/02/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 03 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 fév. 2016, pourvoi n°14-21152


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.21152
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