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03/02/2016 | FRANCE | N°14-26671

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 février 2016, 14-26671


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Bombardier transport France en qualité d'ouvrier garnisseur le 5 janvier 2004 et affecté sur un poste aménagé après reconnaissance de son statut de travailleur handicapé, a été licencié pour faute grave le 23 août 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en nullité de son licenciement et demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral ; >Attendu que, pour rejeter les demandes du salarié au titre du harcèlement mora...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Bombardier transport France en qualité d'ouvrier garnisseur le 5 janvier 2004 et affecté sur un poste aménagé après reconnaissance de son statut de travailleur handicapé, a été licencié pour faute grave le 23 août 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en nullité de son licenciement et demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
Attendu que, pour rejeter les demandes du salarié au titre du harcèlement moral et du licenciement nul de ce chef, l'arrêt retient, par motifs adoptés des premiers juges, que les courriers entre médecins versés au débat par le salarié ne démontrent en rien que l'entreprise n'a pas proposé un poste adapté à son handicap ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié produisait une lettre du médecin du travail en date du 19 mai 2010 invitant l'employeur à reconsidérer l'affectation du salarié au poste en cause pour des raisons médicales liées à son handicap, élément laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, ce dont il résultait qu'il appartenait alors à l'employeur de démontrer qu'il avait déféré aux préconisations du médecin du travail, la cour d'appel, qui a fait peser sur le seul salarié la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Bombardier transport France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Bombardier transport France à payer la somme de 3 000 euros à la SCP Boutet et Hourdeaux ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, et M. Maron, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du trois février deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement de première instance rendu par le Conseil de Prud'hommes en ce qu'il avait débouté Monsieur Alain X... de ses demandes de réparation pour harcèlement moral formées contre son employeur, la société BOMBARDIER TRANSPORT France.
AUX MOTIFS PROPRES QUE la lettre de licenciement vise des faits d'ébriété et de désobéissance à l'ordre de ne pas utiliser un véhicule Bogie ; que Monsieur X... soutient qu'il a été victime d'un harcèlement moral l'ayant rendu dépressif, cette situation devant conduire à prononcer la nullité de son licenciement ; que pour étayer les faits laissant présumer qu'il a été victime d'un harcèlement moral, Monsieur X... verse aux débats une attestation de M. Y..., salarié de l'entreprise, indiquant qu'il avait dû intervenir trois fois en 2009 et 2010 « pour des faits de relations entre ladite personne et son encadrement », Monsieur X... ayant souhaité quitter le poste aménagé qu'il occupait ; que l'attestation des membres du syndicat CGT ni datée ni signée n'a aucune valeur ; que M. Z..., salarié de l'entreprise confirme qu'à plusieurs reprises, Monsieur X... « a été confronté avec les agents de maîtrise pour des raisons indéterminées » et indique par ailleurs qu'il faisait correctement son travail ; que ces attestations ne font état d'aucun fait précis, daté et circonstancié susceptible de laisser présumer des agissements répétés de harcèlement moral ; qu'en indiquant que Monsieur X... faisait correctement son travail, M. Z... ne confirme pas l'allégation selon laquelle le poste aménagé n'était pas adapté à ses difficultés physiques ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE pour démontrer l'existence de pressions « de plus en plus fortes », de sa hiérarchie, ajoutées à un non-respect des prescriptions médicales, quant à son poste de travail, Monsieur X... produit un courrier du Docteur A... de la polyclinique du Parc à SAINT SAULVE adressé au Docteur B..., avec copie au médecin du travail, en date du 25 octobre 2007, préconisant son affectation à un autre poste, ainsi qu'un courriel du médecin du travail, le docteur C..., en date du 19 mai 2010, invitant l'entreprise à reconsidérer son affectation, compte tenu des difficultés rencontrées ; que le harcèlement moral doit faire l'objet d'agissements répétés ; que cependant, les courriels et courriers entre médecins versés aux débats ne démontrent en rien que l'entreprise n'a pas proposé un poste adapté ni même que l'inaptitude ou les difficultés rencontrées trouvent leur origine dans des agissements répétés de la part de la hiérarchie ;
ALORS QU'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que pour rejeter le moyen tiré du harcèlement moral dont il était victime, caractérisé par le non-respect par la société BOMBARDIER TRANSPORT FRANCE de son obligation de lui proposer un poste de travail adapté à son handicap à l'origine de sa classification en invalidité, la cour d'appel, par voie d'adoption des motifs du jugement confirmé, a retenu que Monsieur X... ne rapportait pas la preuve de ce que la société BOMBARDIER TRANSPORT FRANCE ne lui avait pas proposé un tel poste ; qu'en mettant ainsi à la charge de Monsieur X... cette preuve négative tandis qu'il appartenait à la société BOMBARDIER TRANSPORT FRANCE, débitrice de l'obligation de faire, à savoir de mettre à disposition de son salarié, un poste adapté dans le respect des prescriptions des médecins traitants et du travail, de démontrer qu'elle l'avait satisfaite, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 du code civil et L. 1152 al 1 à 4 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement de première instance de Conseil de Prud'hommes en ce qu'il avait dit que le licenciement de Monsieur Alain X... était fondé sur une faute grave et de l'avoir en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes de réparation pour licenciement abusif formées contre son employeur, la société BOMBARDIER TRANSPORT France
AUX MOTIFS QUE les faits visés dans la lettre de licenciement sont confirmés par les attestations E..., F..., G... et H..., salariés de l'entreprise ; que l'attestation de M. D... qui indique ne pas avoir vu Monsieur X... consommer de l'alcool le 23 juillet 2010 et ne pas l'avoir vu en état d'ébriété est trop générale pour apporter une contestation utile ; que les premiers juges ont justement caractérisé que l'état d'ébriété sur le site, les menaces avec barre de fer, les menaces de mort et la conduite d'un engin de manutention sans habilitation ni autorisation caractérisaient la faute grave dénoncée par l'employeur et l'impossibilité de toute poursuite du contrat de travail ; que l'état de dépression dans lequel se trouvait le salarié ne saurait excuser son comportement ;
ALORS D'UNE PAR QUE la cassation qui interviendra sur le premier moyen reprochant à l'arrêt attaqué d'avoir écarté les faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral entraînera par voie de conséquence la cassation de la disposition de l'arrêt ayant déclaré fondé le licenciement pour faute grave non justifié par des faits de harcèlement moral à l'origine de son état dépressif en application de l'article 625 du code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QU'est nul, et à tout le moins abusif, le licenciement prononcé pour faute grave à l'encontre d'un salarié victime de harcèlement moral à l'origine de son état dépressif ayant causé les manquements reprochés ; qu'en affirmant péremptoirement sans en justifier que l'état de dépression de Monsieur X..., pourtant certifié par ses médecins traitants et du travail, antérieur aux faits reprochés, liés aux faits d'ébriété et de désobéissance, ne saurait excuser son comportement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-26671
Date de la décision : 03/02/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 29 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 fév. 2016, pourvoi n°14-26671


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26671
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