La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/01/2016 | FRANCE | N°14-26831

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 janvier 2016, 14-26831


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 683 et 684 du code civil ;

Attendu que le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique ; qu'il doit néanmoins être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé ; que, si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terra

ins qui ont fait l'objet de ces actes ; que, toutefois, dans le cas où un passage su...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles 683 et 684 du code civil ;

Attendu que le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique ; qu'il doit néanmoins être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé ; que, si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes ; que, toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l'article 682 du code civil serait applicable ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 septembre 2014), que M. X..., propriétaire d'une parcelle de terrain contiguë à celle appartenant à M. et Mme Y...-Z..., les deux propriétés étant issues de la division d'un fonds unique, a assigné ces derniers, ainsi que M. et Mme A..., propriétaires d'une parcelle limitrophe, en reconnaissance d'une servitude de passage pour cause d'enclave ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient, après avoir constaté que la parcelle de M. X...était enclavée, que la création d'une servitude de passage sur le fonds de M. et Mme Y...-Z... impliquerait l'arrachage de cinq arbres d'agrément et de vingt arbres fruitiers, ainsi que l'abandon du projet de construction d'un appentis, et occuperait une superficie de 160 m ² alors que la création d'un passage sur le fonds de M. et Mme A...se ferait par superposition sur une servitude existante qui ne nécessiterait qu'un agrandissement de 25 m ² ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, tous les propriétaires des fonds concernés étant dans la cause, il lui appartenait de fixer l'assiette du passage au profit du fonds enclavé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. et Mme Y...-Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme Y...-Z... à payer à M. X...la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. et Mme Y...-Z... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté M. Claude X...de sa demande tendant à la reconnaissance d'une servitude de passage au profit de son fonds enclavé cadastré section BK n° 263 s'exerçant sur la parcelle cadastrée BK n° 262 appartenant à M. et Mme Y...-Z..., conformément au tracé rouge figurant sur le plan figuratif annexé au rapport d'expertise judiciaire en date du 31 mai 2011 ;

AUX MOTIFS QU'il ressort des dispositions de l'article 682 du code civil que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ; qu'il ressort des constatations du rapport de l'expert M. Jean-Paul B..., qui seront retenues par la cour dans la mesure où elles procèdent d'une analyse minutieuse et cohérente et dans la mesure où elles ne sont remises en cause par aucune autre pièce contraire suffisamment probante, que la parcelle cadastrée section BK n° 263 appartenant à M. Claude X..., située en zone UH du plan local d'urbanisme, est constructible et que l'état d'enclave de cette propriété est incontestable dans la perspective d'une construction, puisque le seul accès existant est un accès piétonnier par le sentier des Caillettes, lequel ne permet pas l'accès à un appareil de monoculture adapté à l'exploitation du terrain ; qu'il importe peu, pour apprécier l'état d'enclave de la parcelle litigieuse, que celle-ci ait été utilisée jusqu'à ce jour comme un jardin ; qu'il se déduit de ces éléments, et des motifs pertinents des premiers juges que la cour adopte, que la parcelle litigieuse est enclavée au sens des dispositions susvisées ; qu'il ressort des dispositions de l'article 684 du code civil que si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes ; que, cependant, dans l'hypothèse où un passage sur les fonds divisés causerait un préjudice trop important à ces derniers, il convient de fixer le passage du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique et de l'endroit le moins dommageable ; qu'en l'espèce, l'état d'enclave de la parcelle litigieuse résulte de la division en 1959 d'un fonds appartenant à M. et Mme C..., lequel n'était pas enclavé ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que deux possibilités sont envisageables pour fixer le passage litigieux, la première consistant à prendre le passage sur la parcelle cadastrée BK n° 262 appartenant à M. et Mme Y...-Z..., soit sur les fonds divisés conformément au tracé rouge figurant sur le « plan figuratif » établi par M. Jean-Paul B..., expert judiciaire, le 9 novembre 2010 et annexé à son rapport en date du 31 mai 2011, la seconde en fixant l'assiette de la servitude de passage sur le tracé de la servitude préexistante sur le fonds de M. et Mme A...; qu'il ressort du rapport d'expertise de M. B..., et notamment du plan figuratif annexé à ce rapport, que la création d'une servitude de passage sur le fonds appartenant aux époux Y...-Z... ne pourrait se faire que sur le côté gauche de la propriété, avec la nécessité d'aménager un accès sur la rue Georges Le Dù en arrachant cinq arbres d'agrément et vingt arbres fruitiers, les époux Y...-Z... devant ainsi renoncer à tout projet de construction d'un appentis, une surface de 160 m ² sur 939 m ² devant être réservée à l'assiette de cette servitude ; qu'en ce qui concerne la création d'une servitude de passage au profit du fonds appartenant à M. Claude X...sur le fonds appartenant à M. et Mme A..., la création de cette servitude se ferait en superposition sur une servitude existant déjà sur ce fonds, l'assiette de la servitude existante étant de 160 m ² et la création de la nouvelle servitude nécessitant un agrandissement de 25 m ² ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que si le passage pour l'exercice de la servitude litigieuse était pris sur le fonds appartenant aux époux Y...-Z..., cela emporterait des dommages considérables pour ces derniers, alors que si ce passage était fixé sur le fonds appartenant à M. et Mme A..., cela emporterait des conséquences dommageables incontestablement moins importantes ; que, par conséquent, M. Claude X...est mal fondé à demander la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que le fonds cadastré section BK n° 263 bénéficiera d'une servitude de passage s'exerçant sur la parcelle cadastrée BK n° 262 appartenant à M. et Mme Y...-Z..., conformément au tracé rouge figurant sur le « plan figuratif » établi par M. Jean-Paul B..., expert judiciaire, le 9 novembre 2010 et annexé à son rapport en date du 31 mai 2011 et en ce qu'il a fit que M. Claude X...devra prendre à sa charge tous les aménagements nécessaires à la mise en oeuvre de cette servitude, à la viabilisation du passage ainsi qu'à son entretien ; que le jugement entrepris sera par conséquent infirmé sur ces points et M. Claude X...débouté des chefs susvisés ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'article 684, alinéa 2, du code civil ne permet le retour au droit commun des servitudes que dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds ayant fait l'objet d'une division par vente, échange, partage ou tout autre contrat ; que, dès lors, l'état d'enclave du fonds de M. X...résultant d'une division par vente ayant été constaté, la cour d'appel, en faisant application du droit commun des servitudes et en déboutant celui-ci de sa demande tendant à ce qu'une servitude soit reconnue sur le fonds enclavant des époux Y...-Z... en raison des dommages que causerait à ce fonds l'exercice de la servitude, et non pas de l'insuffisance du passage qui pourrait y être établi, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 684 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en tout état de cause, pour fixer l'assiette de la servitude, le juge doit tenir compte des intérêts de l'héritage soumis à celle-ci, de même encore que des nécessités d'exploitation du fonds enclavé ; que, dès lors, l'état d'enclave du fonds de M. X...ayant été constaté, la cour d'appel, en déboutant celui-ci de sa demande tendant à ce que l'exercice d'une servitude soit reconnu sur le fonds des époux Y...-Z... en raison des dommages que causerait à ce fonds l'exercice de la servitude, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel de l'exposant, p. 5 ¿ jugement entrepris, p. 7), si l'exercice de la servitude sur cette parcelle ne répondait pas, plus qu'un passage sur le fonds des époux A..., aux nécessités d'exploitation du fonds enclavé, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 683 et 684 du code civil ;

ET ALORS, ENFIN, QUE le juge est dans tous le cas tenu de déterminer l'assiette de la servitude de passage en faveur d'un fonds dont il reconnaît l'état d'enclavement ; que, dès lors, l'arrêt attaqué ayant reconnu l'état d'enclave du fonds appartenant à M. X..., la cour d'appel, en déboutant ce dernier de sa demande de désenclavement en raison des dommages que causerait au fonds des époux Y...-Z... l'exercice de la servitude, dommages jugés supérieurs à ceux que causerait l'exercice de la servitude sur le fonds appartenant aux époux A..., sans cependant déterminer l'assiette de la servitude de passage en faveur du fonds enclavé de M. X..., a violé les articles 683 et 684 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-26831
Date de la décision : 28/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 28 jan. 2016, pourvoi n°14-26831


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26831
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award