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14/01/2016 | FRANCE | N°14-22925

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 janvier 2016, 14-22925


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse (la banque) a, le 28 décembre 1995, consenti à Georges X..., depuis lors décédé, et à son épouse, un prêt de consolidation d'un montant de 180 919, 51 euros, dont la première échéance était fixée au 28 février 1996 et la seconde au 28 février 2003 ; que, le 13 décembre 2006, Mme X... a assigné la banque aux fins de voir constater l'extinction de sa créance en application de la prescription décenna

le ; que, par conclusions du 28 juin 2013, celle-ci a sollicité le paiement de...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse (la banque) a, le 28 décembre 1995, consenti à Georges X..., depuis lors décédé, et à son épouse, un prêt de consolidation d'un montant de 180 919, 51 euros, dont la première échéance était fixée au 28 février 1996 et la seconde au 28 février 2003 ; que, le 13 décembre 2006, Mme X... a assigné la banque aux fins de voir constater l'extinction de sa créance en application de la prescription décennale ; que, par conclusions du 28 juin 2013, celle-ci a sollicité le paiement de la seconde échéance ;

Sur la recevabilité du moyen unique, contestée par la défense :

Attendu que le moyen, qui ne se prévaut d'aucun fait qui n'ait été soumis à l'appréciation des juges du fond et constaté par la décision attaquée, est de pur droit et, comme tel, recevable ;

Sur ce moyen pris, en ses deux premières branches :

Vu l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ensemble l'article L. 110-4 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

Attendu que, pour dire que la prescription n'est pas acquise pour la seconde échéance du prêt remboursable à compter du 28 février 2003 et rejeter la demande de Mme X..., l'arrêt énonce que la prescription, qui courait à partir de cette date, a été interrompue, tant le 13 décembre 2006, lorsque Mme X... a introduit l'instance par laquelle elle entendait faire reconnaître la prescription de la créance de la banque, que le 28 juin 2013, lorsque celle-ci a présenté une demande reconventionnelle en paiement ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, qu'en vertu du premier des textes susvisés, une citation en justice n'interrompt la prescription que si elle a été signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire et qu'elle constatait que l'instance avait été introduite par Mme X... qui se prévalait de la prescription contre la caisse, à qui elle opposait cette fin de non-recevoir, d'autre part, qu'il résultait de ses constatations que la prescription était acquise lorsque la caisse avait formé sa demande reconventionnelle en paiement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevables les conclusions déposées par Mme X... le 7 janvier 2014 et les treize pièces communiquées simultanément et constate l'extinction par prescription de la créance de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse au titre de la première partie du prêt de consolidation consenti le 28 décembre 1995 à Georges X... et à son épouse, l'arrêt rendu le 21 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare prescrite la créance de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse au titre de la seconde partie du prêt de consolidation remboursable à compter du 28 février 2003 ;

Condamne la caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Corse aux dépens, incluant ceux exposés devant les juges du fond ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prescription de la créance de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse n'était pas acquise pour la seconde partie, remboursable à compter du 28 février 2003, du prêt de consolidation consenti le 28 décembre 1995, et d'avoir conséquence, débouté Mme X... de sa demande tendant à voir constater l'extinction en totalité de la dette par l'effet de la prescription, et condamné cette dernière à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de la Corse la somme de 148. 559, 13 euros, outre les intérêts légaux à compter du 28 juin 2013 ;

AUX MOTIFS QUE Mme X... est héritière de son mari M. Georges X... décédé le 25 janvier 2001 ; que de son vivant, ce dernier avait contracté auprès du Crédit Agricole divers prêts dont il ne réglait plus les échéances depuis 1993 ; que dans ces circonstances les époux X... ont souscrit le 28 décembre 1995 un prêt de consolidation d'un montant de 1. 186. 832 francs (180. 919, 51 euros) ; que par acte du 13 décembre 2006, Mme X..., agissant en qualité d'héritière de son défunt mari, assignait le Crédit Agricole devant le tribunal de grande instance de Bastia aux fins de voir constater l'extinction par l'effet de la prescription de la créance de la banque résultant des emprunts souscrits, dont les derniers remboursements remontaient à plus de 10 ans ; que par le jugement dont appel le tribunal déclarait sa demande irrecevable ; que dans ces circonstances, est intervenu l'arrêt mixte de la présente cour en date du 4 novembre 2009 qui, par des dispositions devenues définitives, a déclaré l'action recevable et dit que la prescription de l'article L 110-4 du code de commerce est applicable dans les relations entre les parties ; que le même arrêt a rouvert les débats en vue de déterminer le montant exact de la créance du Crédit Agricole atteint par cette prescription ; qu'il résulte des énonciations non contestées de cet arrêt que d'une part la présente instance ayant été introduite avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 réduisant la durée de la prescription, la prescription ici applicable est celle de 10 ans prévue par l'article L. 110-4 du code de commerce, régime ancien ; que d'autre part, le point de départ de cette prescription se situe au mois de février 1996, date du premier impayé du prêt de consolidation ; qu'il ressort des productions que par acte authentique du 28 décembre 1995, le Crédit Agricole a consenti aux époux X... un prêt dit de consolidation d'un montant total de 1. 186. 832 francs ; que selon les énonciations claires de cet acte, le prêt comportait un aménagement consistant en une décomposition de la dette en deux parties distinctes, la première d'un montant de 733. 430 francs au taux effectif globale de 6, 50 %, la seconde d'un montant de 453. 402 francs au taux effectif global de 7, 30 % ; que chaque partie faisait l'objet de modalités de remboursement différentes précisées dans l'acte de prêt et reprises dans deux tableaux d'amortissement distincts ; qu'ainsi, pour la première partie du prêt, il était prévu des échéances annuelles de 48. 059, 45 francs chacune, payables la première le 28 février 1996, la dernière le 28 février 2002 ; pour la seconde partie du prêt, les échéances annuelles étaient fixées à la somme de 50. 041, 47 francs, payables la première le 28 février 2003, la dernière le 28 février 2009 ; que lorsqu'une dette est payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court contre chacune de ses parties à compter de son échéance ; que comme déjà précisé, la prescription a couru à compter du 28 février 1996, date du premier impayé non régularisé de la première partie du prêt ; qu'en l'absence d'actes interruptifs entre cette date et celle de l'introduction de l'instance (13 décembre 2006), la prescription atteint incontestablement, comme l'admet le Crédit Agricole, la totalité des échéances de remboursement de cette première partie du prêt de sorte que la banque ne peut réclamer une quelconque somme à ce titre ; qu'en revanche, s'agissant de la seconde partie du prêt, qui n'était remboursable qu'à compter du 28 février 2003, la prescription n'a couru qu'à partir de cette date qui est également celle du premier incident de payer non régularisé ; qu'en conséquence, comme le soutient à bon droit le Crédit Agricole, la prescription décennale n'était pas acquise lorsqu'elle a été interrompue le 13 décembre 2006 par l'introduction de l'instance et elle ne l'était pas davantage le 28 juin 2013 date des conclusions par lesquelles la banque a formé, au titre de cette seconde partie du prêt, sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 148. 559, 13 euros dont la recevabilité n'est pas contestée ; que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que la prescription atteint la totalité de la dette devenue exigible du fait de la déchéance automatique du terme le 28 février 1996 et par suite entièrement éteinte en l'absence d'actes interruptifs entre cette date et le 28 février 2006 ; qu'en effet, il résulte des stipulations de l'article 8 du contrat de prêt, que la déchéance du terme notamment en cas de non-paiement des sommes exigibles n'a pas un caractère automatique et ne peut être prononcée que « si bon semble au prêteur » ; que le terme étant différent de la condition, en ce qu'il ne suspend point l'engagement dont il retarde seulement l'exécution, Mme X... n'est pas fondée à assimiler ladite clause à une condition potestative relevant des dispositions de l'article 1174 du code civil ; qu'il ressort de la procédure que le prêteur ne s'est prévalu de la déchéance du terme que pour la seconde partie du prêt, ce par les conclusions précitées du 28 juin 2013 formulant une demande en paiement des échéances impayées ; que de tout ce qui précède, il résulte que le Crédit Agricole est en droit d'obtenir le remboursement des sommes dues par Mme X..., co-empruntrice, au titre de la seconde partie du prêt consenti le 28 décembre 1995, d'un montant de 69. 116, 16 euros, dont les échéances exigibles à compter du 28 février 2003 n'ont pas été honorées sans que la prescription, interrompue le 13 décembre 2006, ne puisse être opposée au prêteur qui a prononcé la déchéance du terme et formé sa demande en paiement le 28 juin 2013 ; qu'il résulte des stipulations du contrat de prêt déjà analysées, du tableau d'amortissement, du décompte produit par le Crédit Agricole et non contesté par Mme X... que la créance du prêteur s'établit bien à la somme de totale de 148. 559, 13 euros dont 113. 189, 28 euros au titre du capital et 35. 369, 85 euros représentant les intérêts ; que Mme X... sera en conséquence condamnée au paiement de ladite somme qui, en application des dispositions de l'article 1153 du code civil, produira intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013, date de la notification des conclusions valant sommation de payer ;

1) ALORS QU'une citation en justice n'interrompt la prescription que si elle a été signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire ; qu'en retenant que l'assignation du 13 décembre 2006 délivrée par Mme X... avait interrompu la prescription de la créance de la CRCAM de la Corse en remboursement de la seconde partie du prêt dont la première échéance était remboursable le 28 février 2003, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;

2) ALORS QU'en retenant, qu'en tout état de cause, la prescription de dix ans qui avait commencé à courir le 28 février 2003 n'était pas acquise à la date du 28 juin 2013 à laquelle la CRCAM de la Corse avait formé sa demande reconventionnelle en remboursement de la seconde partie du prêt litigieux, quand cette prescription avait produit ses effets à la date du 28 février 2013, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, ensemble l'article L. 110-4 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ;

3) ALORS QU'en retenant que la recevabilité de la demande reconventionnelle de la banque en paiement de la seconde partie du prêt n'était pas contestée par Mme X..., quand celle-ci invoquait la prescription de l'action de la banque sur la totalité de sa créance, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de cette dernière, et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel la prescription ; qu'à supposer que la cour d'appel n'ait pas considéré la prescription comme une fin de non-recevoir, elle a violé l'article 126 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-22925
Date de la décision : 14/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 21 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 jan. 2016, pourvoi n°14-22925


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.22925
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