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13/01/2016 | FRANCE | N°14-21518

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2016, 14-21518


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article R. 1455-6 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en matière de référé, que M. X... a été engagé le 27 octobre 1997 par la société Sodexaub et occupait depuis le 6 mai 2002 les fonctions de manager au restaurant Mc Donald's situé à Aubagne, pris en location gérance par la société Sodexaub auprès de Mc Donald's France ; que la société Sodexaub était incluse dans une unité économique et sociale (UES) créée par un accord du 27 o

ctobre 1999 englobant des sociétés exploitant des restaurants à l'enseigne Mc Donald's et ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article R. 1455-6 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en matière de référé, que M. X... a été engagé le 27 octobre 1997 par la société Sodexaub et occupait depuis le 6 mai 2002 les fonctions de manager au restaurant Mc Donald's situé à Aubagne, pris en location gérance par la société Sodexaub auprès de Mc Donald's France ; que la société Sodexaub était incluse dans une unité économique et sociale (UES) créée par un accord du 27 octobre 1999 englobant des sociétés exploitant des restaurants à l'enseigne Mc Donald's et dirigée par une société holding la société Brescia Investissement ; que suivant un avenant du 8 mars 2002 à cet accord, il a été prévu qu'en cas de cession d'une société ou cessation d'activité d'un établissement faisant partie de l'UES, les mandats en cours se poursuivraient et qu'une proposition de transfert serait faite aux salariés titulaires des mandats désignés dans l'une des sociétés continuant à appartenir à l'UES ; que M. X... a été désigné délégué syndical au sein de l'unité économique et sociale ; qu'à la suite de la résiliation du contrat de location gérance, la société Sodexaub a été condamnée à restituer, à effet du 28 avril 2009, le fonds de commerce du restaurant d'Aubagne à la société Mc Donald's France service, devenue la société Marseille-Provence restaurants (Mpr) ne faisant pas partie de l'UES précitée ; qu'en mai 2009, M. X... a saisi la juridiction prud'homale en sa formation de référé pour obtenir sa réintégration dans une des sociétés de l'UES en application de l'avenant du 8 mars 2002 précité ; qu'à la suite de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 16 février 2011 faisant droit à cette demande, la société Sodexaub a proposé au salarié un reclassement au sein de la société Sodeplan le 5 novembre 2009 et la société Mpr a cessé le versement de tout salaire ; qu'après la cassation de cette décision par arrêt du 26 septembre 2012 de la Cour de cassation, la société Sodeplan a notifié, le 18 février 2013, au salarié la fin de ses fonctions au sein de cette entreprise, confirmée par lettre du 12 mars 2013 par la société Brescia Investissement ; qu'après avoir demandé le 12 juin 2013 à la société Mpr de prendre position sur son obligation de poursuivre son contrat de travail à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation, M. X... a de nouveau saisi la juridiction prud'homale en sa formation de référé pour obtenir à titre principal sa réintégration au sein de la société Mpr et à titre subsidiaire au sein de l'une des sociétés de l'UES précitée ;

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à référé, l'arrêt retient que le juge des référés saisi sur le fondement de l'article R. 1455-6 du code du travail n'est pas compétent pour trancher le point de savoir s'il y a lieu de faire application de l'article L. 1224-1 du code du travail, cette prérogative étant uniquement celle du juge du fond déjà saisi par le salarié ; qu'au surplus, avant l'arrêt de la Cour de cassation, le salarié n'a jamais demandé sa réintégration au sein de la société Mpr, qu'il s'est contenté après cette décision, par lettre en date du 12 juin 2013, de demander à la société Mpr sa position quant à son obligation de reprendre son contrat, sans solliciter expressément sa réintégration, qu'il ne s'est donc pas heurté à un refus caractérisé de la société Mpr, que le salarié a saisi le juge du fond pour demander l'application de l'accord de mars 2002 et sa réintégration au sein de l'une des sociétés de l'unité économique Brescia Investissement et non au sein de la société Mpr, qu'il existe une discussion de fond sur le point de savoir si le transfert du contrat du salarié protégé a été total ou partiel, supposant dans ce dernier cas l'accord de l'inspection du travail, qu'il en résulte que la situation de l'intéressé ne peut être considérée comme caractérisant un trouble manifestement illicite ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié se trouve dans une situation où, alors que son contrat de travail n'est pas rompu, aucune des sociétés en cause ne se reconnaît la qualité d'employeur pour lui fournir du travail et lui verser ses salaires, caractérisant l'existence d'un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne la société Marseille-Provence restauration aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Marseille-Provence restauration à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de monsieur X... tendant à voir ordonner sa réintégration au sein de la société MPR sous astreinte ou subsidiairement au sein de l'une des sociétés Brescia Investissement, Sodeplan ou Sodexaub, et d'avoir dit n'y avoir lieu à référé ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article R. 1455-6 du code du travail, même en présence d'une contestation sérieuse, le juge des référés peut prescrire des mesures conservatoires pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'aucune décision définitive au fond n'ayant été encore rendue, la nouvelle demande du salarié en référé ne se heurte pas à la règle de l'unicité de l'instance, qui ne concerne que l'instance principale au fond et non les décisions rendues en référé, qui n'ont qu'un caractère provisoire et aucune autorité de la chose jugée au principal ; que de même, la règle de l'unicité de l'instance ne fait pas obstacle à ce que, alors qu'une instance au fond est pendante devant le conseil des prud'hommes, le juge des référés soit saisi aux fins de faire cesser immédiatement un trouble manifestement illicite ; qu'il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail, que la cession d'une entité économique autonome entraîne le transfert automatique des contrats de travail en cours au cessionnaire et, constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; que le juge des référés n'est pas compétent, lorsqu'il est saisi sur le fondement de l'article R. 1455-6 du code du travail, pour appliquer un accord d'entreprise dérogeant aux dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 précité du code du travail, il ne l'est pas davantage, étant juge de l'évidence, pour trancher le point de savoir s'il y a, lieu, nonobstant l'existence de l'accord du 8 mars 2002 précité, dont le salarié s'est toujours prévalu pour solliciter sa réintégration au sein du groupe Brescia et dont il continue encore de demander la mise en oeuvre devant le juge du fond, de faire application de l'article L. 1224-1 du code du travail, cette prérogative étant uniquement celle du juge du fond déjà saisi par le salarié ; qu'au surplus, il convient de relever qu'avant l'arrêt de la cour de cassation, le salarié n'a jamais demandé sa réintégration au sein de la société MPR, qu'il s'est contenté après cette décision, par lettre en date du 12 juin 2013, de demander à la société MPR sa position quant à son obligation de reprendre son contrat, sans solliciter expressément sa réintégration, qu'il ne s'est donc pas heurté à un refus caractérisé de la société MPR ; que le salarié a saisi le juge du fond pour demander l'application de l'accord de mars 2002 et sa réintégration au sein de l'une des sociétés de l'unité économique Brescia Investissement et non au sein de la société MPR ; qu'il existe une discussion de fond sur le point de savoir si le transfert du contrat du salarié protégé a été total ou partiel, supposant dans ce dernier cas l'accord de l'inspection du travail ; qu'il en résulte, que la situation de l'appelant ne peut être considérée comme caractérisant un trouble manifestement illicite et que celui-ci sera débouté de ses demandes tant principales que subsidiaires de réintégrat ion ; que la réintégration de l'intimé n'étant pas ordonnée, la décision du premier juge est infirmée en ce qu'elle a ordonné, au surplus sans aucune motivation, le remboursement des sommes versées au salarié à compter de septembre 2012 par les sociétés Sodeplan et Brescia ;

1°) ALORS QUE la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remises en état qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'un tel trouble est caractérisé en cas de violation manifeste d'une règle impérative ; qu'en affirmant qu'elle n'était, par principe, pas compétente pour apprécier l'application ou non des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, la cour d ¿ appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en violation de l'article R. 1455-6 du code du travail ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE constitue un trouble manifestement illicite justifiant le prononcé de la réintégration du salarié dans son emploi, le refus par le cessionnaire de reprendre un salarié dont le contrat est transféré en application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'en relevant que la Cour de cassation, dans son arrêt du 26 septembre 2012, avait jugé qu'« excède la compétence du juge des référés, saisi en application de l'article R. 1455-6 du code du travail, la demande d'injonction adressée à l'employeur de l'entreprise d'origine de proposer au salarié en application d'un accord d'entreprise, alors que son contrat de travail est transféré en application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail, une reprise de son contrat dans une des entreprises de l'UES à laquelle il appartient », ce dont il résultait que la Cour de cassation avait admis que le contrat de travail de monsieur X... avait été transféré de plein droit à la société Marseille Provence Restauration en application de l'article L. 1224-1, et en décidant néanmoins qu'elle n'était pas compétente pour faire application en l'espèce de cet article, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1224-1 et R. 1455-6 du code du travail ;

3°) ALORS QUE constitue un trouble manifestement illicite justifiant le prononcé de la réintégration du salarié dans son emploi, le refus par le cessionnaire de reprendre un salarié dont le contrat est transféré en application des dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'en rejetant la demande de réintégration de monsieur X..., motifs pris de ce qu'avant l'arrêt de la Cour de cassation, il n'avait jamais demandé sa réintégration au sein de la société MPR et qu'il se serait contenté, par lettre du 12 juin 2013, de demander à cette société de prendre position quant à son obligation de reprendre son contrat, la cour d ¿ appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE constitue un trouble manifestement illicite le fait qu'un salarié dont le contrat n'est pas suspendu ni rompu, soit privé de toute rémunération et de tout travail ; qu'en jugeant que la situation de monsieur X... ne pouvait être considérée comme caractérisant un trouble manifestement illicite quand il était constant que le salarié ne percevait plus de rémunération, ni d'une entreprise composant l'UES ni du repreneur du restaurant à l'enseigne Mc Donald's, la société MPR, sans avoir été licencié, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-6 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-21518
Date de la décision : 13/01/2016
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 mai 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jan. 2016, pourvoi n°14-21518


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.21518
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