La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/01/2016 | FRANCE | N°14-24445

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 janvier 2016, 14-24445


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 5 juin 2014), que, M. et Mme X..., propriétaires dans le lotissement « Les Jardins du Prieuré », constitué par acte notarié du 10 juillet 1986, estimant que les travaux de construction d'un immeuble de douze logements entrepris après l'obtention d'un permis de construire par la société V2 sur le lot n° 8 étaient contraires aux dispositions contractuelles de ce lotissement, ont assigné cette société en interruption des travaux et démolition des constructions

réalisées ;
Sur le premier et le second moyens réunis, ci-après annex...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 5 juin 2014), que, M. et Mme X..., propriétaires dans le lotissement « Les Jardins du Prieuré », constitué par acte notarié du 10 juillet 1986, estimant que les travaux de construction d'un immeuble de douze logements entrepris après l'obtention d'un permis de construire par la société V2 sur le lot n° 8 étaient contraires aux dispositions contractuelles de ce lotissement, ont assigné cette société en interruption des travaux et démolition des constructions réalisées ;
Sur le premier et le second moyens réunis, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que l'article premier du document intitulé « règlement du lotissement » avait pour objet de fixer les règles et les servitudes d'intérêt général imposées à toute personne détenant ou occupant tout ou partie du lotissement et d'imposer leur reproduction intégrale dans tout acte translatif ou locatif des parcelles, comme le prévoyait l'article 7 du décret du 21 septembre 1951, que la disposition contestée figurant à l'article 16 de ce document, ne constituait pas une règle d'urbanisme, mais une disposition destinée à régir les rapports entre les colotis et les modalités de vie en commun et que cette obligation était mentionnée dans l'acte d'acquisition du lot n° 8 par la société V2, dressé le 16 février 2009 par la SCP notariale Lilliaz-Burtet, sous un intitulé non équivoque « V-Cahier des charges du lotissement, obligation de se conformer aux dispositions du cahier des charges/ règlement de lotissement », la cour d'appel a souverainement retenu, sans dénaturation, que les colotis avaient entendu contractualiser les dispositions susvisées du « règlement du lotissement » et que l'immeuble édifié par la société V2 sur le lot n° 8 était en contravention avec ces dispositions ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société V2 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société V2
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir ordonné l'interruption des travaux autorisés par permis de construire n° 2010/ 878 accordé le 16 septembre 2010 sur le lot n° 8 du lotissement du Jardin du Prieuré, ainsi que la démolition des constructions édifiées sur ce lot, après avoir dit que l'article 16 du document intitulé « règlement de lotissement à usage d'habitation » établi le 10 avril 1986 constituait une stipulation contractuelle et non une disposition de nature règlementaire ;
Aux motifs que le « règlement de lotissement à usage d'habitation » objet de la contestation voit son objet défini (en son article 1er) en ces termes : « Le présent règlement a pour objet de fixer les règles et servitudes d'intérêt général imposées par le lotissement. Il est opposable à quiconque détient ou occupe à quelque titre que ce soit tout ou partie dudit lotissement. Il doit être rappelé dans tout acte translatif ou locatif des parcelles par reproduction in extenso à l'occasion de chaque location, qu'il s'agisse d'une première vente ou location, de revente ou locations successives » ; qu'il en résulte d'ores et déjà clairement que ses auteurs ont entendu contractualiser ses dispositions à supposer que le document en cause ne soit pas d'ores et déjà de nature contractuelle ; qu'ensuite, le libellé de l'article 1er ne fait que reproduire les dispositions du décret n° 51/ 1135 du 21 septembre 1951 réglementant les groupes d'immeubles et les lotissements en Nouvelle-Calédonie (Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie, 22/ 29 octobre 1951 p. 453 et s), modifié successivement en 1990 (Délibération n° 109-90 du 31 août 1990, JONC, 25 septembre 1990, p. 2450) puis en 1999 ; qu'en vertu du principe de spécialité législative, qui régit le droit applicable en Nouvelle-Calédonie, ce décret du 21 septembre 1951 constitue le droit applicable en l'espèce ; que le décret du 21 septembre 1951 sous l'empire duquel a été constitué (par acte notarié du 10 juillet 1986) la SCI Hespérides en vue de l'acquisition d'un terrain nu et la réalisation d'un lotissement dénommé « Les jardins du prieuré », dispose :- en son article 2-5° que le projet de groupes d'habitation ou de lotissement doit comporter un « cahier des charges »,- en son article 7 que : « les conditions du cahier des charges du groupe d'habitations ou du lotissement doivent figurer... dans tous les actes et promesses de vente... le maire ou le président de la commission municipale peut faire afficher lesdites conditions du cahier des charges... » ; que force est de constater, qu'à s'en tenir à une dénomination purement formelle, il n'existe pas sous l'empire du décret de 1951 de « règlement de lotissement », mais un « cahier des charges » dont les stipulations (contractuelles) doivent figurer dans les actes de vente ; qu'ainsi, le fait que les notaires aient pu omettre de se conformer à l'article 7 est sans incidence sur la nature nécessairement contractuelle de ce « cahier des charges » prévu par le décret de 1951, ainsi que le confirme le fait qu'il résulte des pièces produites que certains actes notariés de vente mentionnent le contenu de ce cahier des charges (improprement dénommé « règlement de lotissement ») en précisant bien que ce « règlement de lotissement » contient les conditions du « cahier des charges » ; que cela résulte notamment de l'acte notarié du 16 août 2006 (pièce n° 12) établi entre les époux Y...et A..., par la SCP Bourdeau Bernigaud, lequel précise en page 5 « qu'un exemplaire du règlement de lotissement contenant tant les conditions du cahier des charges que la reproduction de l'arrêté d'approbation précité, est demeuré ci-annexé aux présentes après mention » ; qu'ainsi, le décret du 21 septembre 1951, modifié pour la première fois par la délibération du 31 août 1990, ne comporte aucune mention relative à un document pouvant être dénommé « règlement de lotissement », le décret ne faisant référence qu'au « cahier des charges » ; qu'il pourrait tout au plus s'en déduire le caractère « mixte » des dispositions contenue dans ledit document, s'il n'en résultait l'obligation (rappelée à l'article 7 du décret de 1951) de contractualiser ces dispositions en les reproduisant dans les actes de vente et de location, ce qui lève tout doute possible sur la volonté des auteurs du décret de 1951 d'en faire des dispositions de nature contractuelle ; qu'au demeurant, même le document dénommé « règlement de lotissement », établi par le lotisseur du lotissement « Les Jardins du Prieuré », le 10 avril 1986, rappelle (en son article 1er) que son contenu « doit être rappelé dans tout acte translatif ou locatif des parcelles par reproduction in extenso... », conformément à ce que prévoit l'article 7 du décret de 1951, sur l'obligation de contractualiser les termes de ce que le décret de 1951 désigne sous l'appellation « cahier des charges » du lotissement ; que, surabondamment, aux termes de l'article 12 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie « le juge... doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties auraient proposé » ; qu'en l'espèce, et sans qu'il soit même nécessaire de requalifier la totalité du « règlement de lotissement », il suffit de se borner à examiner la disposition contestée de ce document (l'article 16) ; que la clause objet du litige dont la nature (et dont le sens par voie de conséquence) est discutée par les parties, constitue à l'évidence une disposition destinée à régir les rapports entre co-lotis ; que cet article 16 ne constitue pas une règle urbanistique ayant trait au coefficient d'occupation des sols comme le laissent entendre les conclusions du notaire (sur la base de textes inapplicables au cas d'espèce), mais d'une obligation ayant trait aux modalités de vie en commun au sein du lotissement, telles que voulues par les co-lotis lors de la création dudit lotissement, ceux-ci ayant voulu créer un environnement dépourvu de villas jumelées et d'immeubles comportant un ensemble de logements, et ayant souhaité donner à leur lotissement, par la voie du contrat, une configuration bien définie dans l'intérêt de tous ; qu'il s'en déduit le caractère clairement contractuel de cette stipulation ; que confirme cette volonté de contractualisation le fait que dans l'acte d'acquisition du lot n° 8 par la société V2, établi le 16 février 2009 par la SCP notariale Lilliaz-Burtet (pièce n° 22), entre les époux Z...et la société V2 il est rappelé les servitudes et charges sur le lot résultant notamment du « cahier des charges » (acte notarié page 5) ; que cette mention confirme l'existence, à l'époque, dans l'esprit du notaire, d'un cahier des charges dont l'existence est aujourd'hui déniée ; qu'il s'en déduit encore que l'acquéreur a été informé, par l'acte notarié, de l'existence d'un « cahier des charges » appelant nécessairement des dispositions contractuelles ; qu'au demeurant la référence à ce « cahier des charges » résulte encore de l'acte de liquidation partage des 28, 30 et 31 juillet et 6 août 1992 portant clôture de la liquidation de la SCI Hespérides (pièce n° 23) ; qu'en effet, cet acte évoque, en page 31, sous un intitulé non équivoque « V-Cahier des charges du lotissement » l'obligation de se conformer « aux dispositions du cahier des charges/ règlement de lotissement », expression dont la formulation, même hybride, confirme la nature contractuelle des stipulations dudit document, l'article 16 dont le sens et la portée sont discutées par les parties et dont l'interprétation par le juge du fond est nécessaire et exclusive de tout grief de dénaturation, relevant à l'évidence d'une disposition contractuelle pour les motifs ci-dessus exposés ; qu'il est établi et non contesté sérieusement que l'immeuble que la société V2 édifie sur le lot n° 8 du lotissement « Les Jardins du Prieuré » l'est en contravention des dispositions de l'article 16 du « règlement de lotissement » qui prohibe ce type de construction ; qu'il convient donc d'infirmer en totalité le jugement déféré et, statuant à nouveau, de faire droit à la demande de suspension des travaux (sous astreinte) et de démolition (arrêt, pages 4 à 6) ;

Alors, de première part, que lorsqu'un plan d'urbanisme directeur a été approuvé, les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement cessent de s'appliquer au terme de dix années à compter de l'autorisation de lotir ; que pour admettre la nature contractuelle de l'article 16 du règlement de lotissement, la cour d'appel a retenu que cette disposition ne constituait pas une règle urbanistique et que le cahier des charges prévu par le décret n° 51/ 35 du 21 septembre 1951 aurait un caractère exclusivement contractuel en raison de l'obligation, imposée par ce texte, de le reproduire dans les actes de vente ou de location ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant que cette disposition était contenue dans le règlement du lotissement, la cour d'appel a violé l'article 22 de la délibération n° 28-2006/ APS du 27 juillet 2006 ;
Alors, en outre, que la seule reproduction ou mention, fût-elle imposée, d'un règlement de lotissement dans un acte de vente ou de location, ne confère pas à ce règlement un caractère contractuel ; qu'en retenant la nature contractuelle du règlement de lotissement litigieux au constat inopérant que le règlement du lotissement prévoyait lui-même sa reproduction dans tous les actes translatifs ou locatifs des parcelles et était effectivement reproduit dans certains d'entre eux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 22 de la délibération n° 28-2006/ APS du 27 juillet 2006 ;
Alors enfin que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause, notamment par omission ; qu'il ne peut omettre ou refuser de prendre en compte certaines des stipulations, claires et précises, d'un écrit ; que pour en déduire que le document approuvé du lotissement, dénommé « règlement de lotissement à usage d'habitation », était en réalité un cahier des charges dont l'existence avait été portée à la connaissance de l'acquéreur, la cour d'appel a relevé que l'acte d'acquisition du lot n° 8 par la société V2 du 16 février 2009 rappelait que les servitudes et charges sur le lot résultaient notamment du cahier des charges (acte notarié page 5) ; qu'en isolant ainsi, dans le titre d'acquisition de la SARL V2, une clause de style relative aux déclarations des comparants à un acte antérieur quant à l'inexistence d'autres servitudes que celles pouvant résulter de l'urbanisme, de la loi, de la situation naturelle du lieu, du cahier des charges du lotissement et que celles énoncées après la désignation de certains lots, et en ignorant les mentions de ce même acte d'acquisition figurant au paragraphe « LOTISSEMENT » rappelant expressément l'existence, sous la dénomination de règlement de lotissement, du document litigieux (page 6, premier paragraphe), la cour d'appel en a dénaturé par omission les termes, clairs et précis, en violation des articles 1134 du code civil et 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme.
Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SARL V2 de sa demande tendant à la condamnation des époux X...à lui payer la somme de 20. 000. 000 F. CFP en réparation du préjudice à elle causée par leur appel abusif, après avoir dit que l'article 16 du document intitulé « règlement de lotissement à usage d'habitation » établi le 10 avril 1986 constituait une stipulation contractuelle et non une disposition de nature règlementaire ;
Aux motifs que le « règlement de lotissement à usage d'habitation » objet de la contestation voit son objet défini (en son article 1er) en ces termes : « Le présent règlement a pour objet de fixer les règles et servitudes d'intérêt général imposées par le lotissement. Il est opposable à quiconque détient ou occupe à quelque titre que ce soit tout ou partie dudit lotissement. Il doit être rappelé dans tout acte translatif ou locatif des parcelles par reproduction in extenso à l'occasion de chaque location, qu'il s'agisse d'une première vente ou location, de revente ou locations successives » ; qu'il en résulte d'ores et déjà clairement que ses auteurs ont entendu contractualiser ses dispositions à supposer que le document en cause ne soit pas d'ores et déjà de nature contractuelle ; qu'ensuite, le libellé de l'article 1er ne fait que reproduire les dispositions du décret n° 51/ 1135 du 21 septembre 1951 réglementant les groupes d'immeubles et les lotissements en Nouvelle-Calédonie (Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie, 22/ 29 octobre 1951 p. 453 et s), modifié successivement en 1990 (Délibération n° 109-90 du 31 août 1990, JONC, 25 septembre 1990, p. 2450) puis en 1999 ; qu'en vertu du principe de spécialité législative, qui régit le droit applicable en Nouvelle-Calédonie, ce décret du 21 septembre 1951 constitue le droit applicable en l'espèce ; que le décret du 21 septembre 1951 sous l'empire duquel a été constitué (par acte notarié du 10 juillet 1986) la SCI Hespérides en vue de l'acquisition d'un terrain nu et la réalisation d'un lotissement dénommé « Les jardins du prieuré », dispose :- en son article 2-5° que le projet de groupes d'habitation ou de lotissement doit comporter un « cahier des charges »,- en son article 7 que : « les conditions du cahier des charges du groupe d'habitations ou du lotissement doivent figurer... dans tous les actes et promesses de vente... le maire ou le président de la commission municipale peut faire afficher lesdites conditions du cahier des charges... » ; que force est de constater, qu'à s'en tenir à une dénomination purement formelle, il n'existe pas sous l'empire du décret de 1951 de « règlement de lotissement », mais un « cahier des charges » dont les stipulations (contractuelles) doivent figurer dans les actes de vente ; qu'ainsi, le fait que les notaires aient pu omettre de se conformer à l'article 7 est sans incidence sur la nature nécessairement contractuelle de ce « cahier des charges » prévu par le décret de 1951, ainsi que le confirme le fait qu'il résulte des pièces produites que certains actes notariés de vente mentionnent le contenu de ce cahier des charges (improprement dénommé « règlement de lotissement ») en précisant bien que ce « règlement de lotissement » contient les conditions du « cahier des charges » ; que cela résulte notamment de l'acte notarié du 16 août 2006 (pièce n° 12) établi entre les époux Y...et A..., par la SCP Bourdeau Bernigaud, lequel précise en page 5 « qu'un exemplaire du règlement de lotissement contenant tant les conditions du cahier des charges que la reproduction de l'arrêté d'approbation précité, est demeuré ci-annexé aux présentes après mention » ; qu'ainsi, le décret du 21 septembre 1951, modifié pour la première fois par la délibération du 31 août 1990, ne comporte aucune mention relative à un document pouvant être dénommé « règlement de lotissement », le décret ne faisant référence qu'au « cahier des charges » ; qu'il pourrait tout au plus s'en déduire le caractère « mixte » des dispositions contenue dans ledit document, s'il n'en résultait l'obligation (rappelée à l'article 7 du décret de 1951) de contractualiser ces dispositions en les reproduisant dans les actes de vente et de location, ce qui lève tout doute possible sur la volonté des auteurs du décret de 1951 d'en faire des dispositions de nature contractuelle ; qu'au demeurant, même le document dénommé « règlement de lotissement », établi par le lotisseur du lotissement « Les Jardins du Prieuré », le 10 avril 1986, rappelle (en son article 1er) que son contenu « doit être rappelé dans tout acte translatif ou locatif des parcelles par reproduction in extenso... », conformément à ce que prévoit l'article 7 du décret de 1951, sur l'obligation de contractualiser les termes de ce que le décret de 1951 désigne sous l'appellation « cahier des charges » du lotissement ; que, surabondamment, aux termes de l'article 12 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie « le juge... doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties auraient proposé » ; qu'en l'espèce, et sans qu'il soit même nécessaire de requalifier la totalité du « règlement de lotissement », il suffit de se borner à examiner la disposition contestée de ce document (l'article 16) ; que la clause objet du litige dont la nature (et dont le sens par voie de conséquence) est discutée par les parties, constitue à l'évidence une disposition destinée à régir les rapports entre co-lotis ; que cet article 16 ne constitue pas une règle urbanistique ayant trait au coefficient d'occupation des sols comme le laissent entendre les conclusions du notaire (sur la base de textes inapplicables au cas d'espèce), mais d'une obligation ayant trait aux modalités de vie en commun au sein du lotissement, telles que voulues par les co-lotis lors de la création dudit lotissement, ceux-ci ayant voulu créer un environnement dépourvu de villas jumelées et d'immeubles comportant un ensemble de logements, et ayant souhaité donner à leur lotissement, par la voie du contrat, une configuration bien définie dans l'intérêt de tous ; qu'il s'en déduit le caractère clairement contractuel de cette stipulation ; que confirme cette volonté de contractualisation le fait que dans l'acte d'acquisition du lot n° 8 par la société V2, établi le 16 février 2009 par la SCP notariale Lilliaz-Burtet (pièce n° 22), entre les époux Z...et la société V2 il est rappelé les servitudes et charges sur le lot résultant notamment du « cahier des charges » (acte notarié page 5) ; que cette mention confirme l'existence, à l'époque, dans l'esprit du notaire, d'un cahier des charges dont l'existence est aujourd'hui déniée ; qu'il s'en déduit encore que l'acquéreur a été informé, par l'acte notarié, de l'existence d'un « cahier des charges » appelant nécessairement des dispositions contractuelles ; qu'au demeurant la référence à ce « cahier des charges » résulte encore de l'acte de liquidation partage des 28, 30 et 31 juillet et 6 août 1992 portant clôture de la liquidation de la SCI Hespérides (pièce n° 23) ; qu'en effet, cet acte évoque, en page 31, sous un intitulé non équivoque « V-Cahier des charges du lotissement » l'obligation de se conformer « aux dispositions du cahier des charges/ règlement de lotissement », expression dont la formulation, même hybride, confirme la nature contractuelle des stipulations dudit document, l'article 16 dont le sens et la portée sont discutées par les parties et dont l'interprétation par le juge du fond est nécessaire et exclusive de tout grief de dénaturation, relevant à l'évidence d'une disposition contractuelle pour les motifs ci-dessus exposés ; qu'il est établi et non contesté sérieusement que l'immeuble que la société V2 édifie sur le lot n° 8 du lotissement « Les Jardins du Prieuré » l'est en contravention des dispositions de l'article 16 du « règlement de lotissement » qui prohibe ce type de construction ; qu'il convient donc d'infirmer en totalité le jugement déféré et, statuant à nouveau, de faire droit à la demande de suspension des travaux (sous astreinte) et de démolition (arrêt, pages 4 à 6) ;

Alors, de première part, que lorsqu'un plan d'urbanisme directeur a été approuvé, les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement cessent de s'appliquer au terme de dix années à compter de l'autorisation de lotir ; que pour admettre la nature contractuelle de l'article 16 du règlement de lotissement, la cour d'appel a retenu que cette disposition ne constituait pas une règle urbanistique et que le cahier des charges prévu par le décret n° 51/ 35 du 21 septembre 1951 aurait un caractère exclusivement contractuel en raison de l'obligation, imposée par ce texte, de le reproduire dans les actes de vente ou de location ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant que cette disposition était contenue dans le règlement du lotissement, la cour d'appel a violé l'article 22 de la délibération n° 28-2006/ APS du 27 juillet 2006 ;
Alors, en outre, que la seule reproduction ou mention, fût-elle imposée, d'un règlement de lotissement dans un acte de vente ou de location, ne confère pas à ce règlement un caractère contractuel ; qu'en retenant la nature contractuelle de l'article 16 du règlement de lotissement litigieux au constat inopérant que le règlement du lotissement prévoyait lui-même sa reproduction dans tous les actes translatifs ou locatifs des parcelles et était effectivement reproduit dans certains d'entre eux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 22 de la délibération n° 28-2006/ APS du 27 juillet 2006 ;
Alors enfin que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause, notamment par omission ; qu'il ne peut omettre ou refuser de prendre en compte certaines des stipulations, claires et précises, d'un écrit ; que pour en déduire que le document approuvé du lotissement, dénommé « règlement de lotissement à usage d'habitation », était en réalité un cahier des charges dont l'existence avait été portée à la connaissance de l'acquéreur, la cour d'appel a relevé que l'acte d'acquisition du lot n° 8 par la société V2 du 16 février 2009 rappelait que les servitudes et charges sur le lot résultaient notamment du cahier des charges (acte notarié page 5) ; qu'en isolant ainsi, dans le titre d'acquisition de la SARL V2, une clause de style relative aux déclarations des comparants à un acte antérieur quant à l'inexistence d'autres servitudes que celles pouvant résulter de l'urbanisme, de la loi, de la situation naturelle du lieu, du cahier des charges du lotissement et que celles énoncées après la désignation de certains lots, et en ignorant les mentions de ce même acte d'acquisition figurant au paragraphe « LOTISSEMENT » rappelant expressément l'existence, sous la dénomination de règlement de lotissement, du document litigieux (page 6, premier paragraphe), la cour d'appel en a dénaturé par omission les termes, clairs et précis, en violation des articles 1134 du code civil et 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-24445
Date de la décision : 07/01/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 05 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 jan. 2016, pourvoi n°14-24445


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Odent et Poulet, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.24445
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award