LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir mis fin au mandat de M. X... (l'agent général), en raison des résultats insuffisants de l'agence dont elle lui avait confié la gestion par un traité de nomination du 31 août 2005, la société Aréas dommages (l'entreprise d'assurance) a refusé de lui payer le solde de l'indemnité compensatrice due au titre du « secteur dommages », en se prévalant de son extinction par compensation avec la pénalité prévue par l'article 11 des accords d'entreprise conclus le 17 mars 2005 entre sa direction et les syndicats professionnels des agents généraux de son réseau, aux termes duquel la violation des obligations de non-réinstallation et de non-concurrence « par l'agent général ayant cessé ses fonctions est sanctionnée par une pénalité équivalente à la valeur de l'indemnité de cessation de fonctions » ; que l'agent général, contestant s'être réinstallé ou livré à une quelconque activité concurrentielle, a assigné l'entreprise d'assurance en paiement du solde de son indemnité compensatrice, et, subsidiairement, en modération de la pénalité réclamée, par application de l'article 1152 du code civil ; que le tribunal, retenant la nature conventionnelle des accords d'entreprise, a qualifié cette pénalité de clause pénale pour la réduire à une somme égale au solde de l'indemnité compensatrice, puis ordonné la compensation des créances réciproques ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :
Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches :
Vu les articles 1134 et 1152 du code civil ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et condamner l'agent général à payer à l'entreprise d'assurance une certaine somme incluant une pénalité égale à son indemnité de cessation de fonctions, l'arrêt retient qu'en vertu de l'article 20 du statut de 1949, l'agent général, en cas de violation de l'interdiction de rétablissement, perd automatiquement son droit à l'indemnité compensatrice, sanction qui, constituant la contrepartie de l'obligation de non-concurrence, ne peut être analysée en une clause pénale et ne peut donc être réduite ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'est une clause pénale la clause de l'accord d'entreprise conclu entre l'entreprise d'assurance et les syndicats professionnels de ses agents généraux qui, en sanction des obligations statutaires de non-réinstallation et de non-concurrence qu'édicte l'article II, D, 5°, c, de la convention fédérale du 16 avril 1996 homologuée par le décret n° 96-902 du 15 octobre 1996 portant approbation du statut des agents généraux d'assurance, stipule à la charge de l'agent général sortant une pénalité équivalente à la valeur de son indemnité de cessation de fonctions, la cour d'appel, qui, de surcroît, s'est référée à des dispositions réglementaires inapplicables au traité de nomination en cause, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il refuse de faire application de l'article 1152 du code civil à la clause pénale prévue par l'article 11 des accords conclus le 17 mars 2005 entre l'entreprise d'assurance et les syndicats professionnels des agents généraux de son réseau, et en ce qu'il condamne, en conséquence, M. X... à payer à la société Aréas dommages la somme de 17 752, 62 euros, l'arrêt rendu le 18 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société Aréas dommages aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. X....
M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à la société Areas la somme de 17. 752, 62 euros ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE Jean-François X... a, en date du 31 août 2005, indiqué " avoir pris connaissance et avoir reçu un exemplaire de chacun des documents suivants :- Conditions Particulières du Traité d'Agent Général comportant barème de commissionnement,- Conditions générales du Traité d'Agent Général (référence ACCANX2),- Accords contractuels entre le Direction de la Société et de Syndicat des Agents Généraux, datés 17 mars 2005,- Rôle et Délégations de Pouvoirs aux Agents Généraux, version 8- Mars 2005 ", et donné " son accord total et sans réserve pour représenter AREAS Dommages suivant les dispositions prévues par ces documents " ; qu'aux termes des " accords contractuels " en date du 17 mars 2005 conclus en exécution du décret n° 96-902 du 15 octobre 1996 portant approbation du statut des agents généraux d'assurances, précisant le statut des agents généraux d'AREAS et ayant valeur contractuelle : " Sauf accord particulier intervenu par écrit entre lui, son successeur et la société, l'Agent Général d'assurances qui cesse d'exercer ses fonctions ne doit ni directement, ni indirectement, pendant un délai de trois ans, présenter au public, dans la circonscription de son ancienne agence générale, des opérations d'assurances dommages, assurances de personnes et vie appartenant aux mêmes catégories que celles du portefeuille de l'agence générale. La violation de cette interdiction par l'Agent Général ayant cessé ses fonctions est sanctionnée par une pénalité équivalent à l'indemnité de cessation de fonctions, sans préjudice d'éventuels dommages et intérêts complémentaires au regard des préjudices subis. Si un Agent Général renonce à percevoir cette indemnité, la clause de non concurrence ci-dessus rappelée ne s'applique pas " ; que Jean-François X... ayant fait choix de percevoir l'indemnité de cessation de fonctions, la clause de non concurrence rappelée précédemment trouve application ; que la société AREAS DOMMAGES a produit aux débats un extrait en date du 4 mars 2009 du registre du commerce et des sociétés tenu au greffe du tribunal de commerce de POITIERS, relatif à la société " ABELA DIFFUSION " ; que l'objet social en est le suivant : " Assurance de biens et de personnes, formation aux métiers d'assurances " ; qu'elle a pour co-gérants Gabriel Y... et Jean-François X... ; que par ordonnance en date du 12 mars 2009 rendue sur la requête de la société AREAS DOMMAGES, le Président de ce Tribunal a commis la SCP B..., A..., C..., D..., Huissiers de justice à POITIERS, aux fins de constat de l'activité poursuivie par Jean-François X... ; que Maître Bruno A... a par procès-verbal en date du 26 mars 2009 constaté, au 19 avenue du 8 mai 1945 à POITIERS, une boîte aux lettres sur laquelle figurait le nom " ABELA DIFF " et un bureau sans enseigne desservi par une porte fenêtre, aménagé, décrit par une personne rencontrée par l'huissier de justice instrumentant et sur sa demande, être celui de la société ABELA DIFFUSION et de Jean-François X... ; que la société AREAS DOMMAGES a produit aux débats une attestation en date du 17 mars 2009 de Thomas Z... ; que ni sa régularité ni sa véracité n'ont été contestées ; qu'il a indiqué avoir participé le 8 décembre 2008 à une réunion d'information organisée dans les locaux de l'ANPE du Grand Large à POITIERS, par Gabriel Y... et Jean-François X..., en vue de recruter des agents commerciaux pour ABELA DIFFUSION, selon lui courtier en assurances, puis avoir suivi une formation de 6 semaines pendant lesquelles Jean-François X... l'a accompagné à l'occasion de déplacements ; que ces circonstances caractérisent un manquement de Jean-François X... à l'obligation de non concurrence stipulée au profit d'AREAS DOMMAGES ; que M. X... reprend les moyens déjà développés devant le premier juge qui y a pertinemment répondu par des motifs très complets, exacts en fait et pertinents en droit que la cour adopte ; qu'il sera observé en outre que l'article 26 du statut des agents IARD applicable en la matière prévoit « Sauf accord particulier intervenu entre lui, son successeur et la société, l'agent général d'assurances qui cesse d'exercer ses fonctions ne doit, ni directement ni indirectement, pendant un délai de trois ans, présenter au public dans la circonscription de son ancienne agence générale, des opérations d'assurances appartenant aux mêmes catégories que celles du portefeuille de l'agence générale » ; qu'il n'y a donc pas lieu pour la compagnie d'assurances de démontrer l'existence d'un préjudice contrairement à ce que soutient M. X... ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que le manquement de M. X... à son obligation de non concurrence était caractérisé ; que l'article 20 du statut de 1949 prévoit que « L'agent général d'assurances qui cesse de représenter la société d'assurances dans la circonscription a le droit, à son choix, soit de présenter à la société un successeur dans un délai maximal de deux mois, soit d'obtenir une indemnité compensatrice » ; qu'en cas dz violation de l'interdiction de rétablissement, l'ancien agent perd automatiquement son droit à l'indemnité compensatrice, que cette sanction qui constitue la contrepartie de l'obligation de non concurrence ne peut pas être analysée en une clause pénale et ne peut donc être réduite, le jugement étant infirmé de ce chef ; qu'il est constant que le compte de fin de gestion du mandat de M. X... laisse apparaître un solde débiteur de 17, 752, 62 ¿, somme que M. X... sera condamné à payer à la société Areas avec intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 2007, date de l'arrêté du compte et capitalisation des intérêts ;
1°) ALORS QU'aux termes de l'article 11 des accords contractuels du 17 mars 2005 conclus entre la compagnie Areas et le syndicat des agents généraux la violation de la clause de non-réinstallation et de non-concurrence « par l'Agent Général ayant cessé ses fonctions est sanctionnée par une pénalité équivalant à l'indemnité de cessation de fonctions, sans préjudice d'éventuels dommages et intérêts complémentaires au regard des préjudices subis » ; qu'en retenant néanmoins que cette clause ne pouvait être analysée en une clause pénale et ne pouvait donc être réduite, la cour d'appel a dénaturé les termes de cette clause et a ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'indemnité prévue en cas de violation de la clause de non-concurrence est une clause pénale réductible ; que la cour d'appel qui, après avoir relevé que la privation de l'indemnité compensatrice était la sanction du non respect par l'agent de son obligation de non-concurrence, ce dont il résultait que cette clause devait s'analyser en une clause pénale, a néanmoins jugé le contraire, a violé l'article 1152 du code civil ;
3°) ALORS QUE M. X... faisait valoir que la clause de non-concurrence qu'il lui était reproché d'avoir violée n'était pas valable dans le mesure où la compagnie Areas n'avait aucun intérêt à celle-ci, ce qui résultait du fait que depuis le départ de l'agent, la circonscription qui lui avait été confiée était restée vacante ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, de nature à établir que M. X... n'encourait aucune sanction à raison de la violation de la clause litigieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.