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15/12/2015 | FRANCE | N°12-27617

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 décembre 2015, 12-27617


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve produits devant elle, dont elle a pu déduire que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement du salarié déclaré inapte ;
Sur le second moyen :
Attendu que la conclusion d'une convention de forfait requérant l'accord du salarié, la cour d'appel a,

sans encourir les griefs du moyen, retenu qu'une telle convention, non prévu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de manque de base légale, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments de fait et de preuve produits devant elle, dont elle a pu déduire que l'employeur n'avait pas respecté son obligation de reclassement du salarié déclaré inapte ;
Sur le second moyen :
Attendu que la conclusion d'une convention de forfait requérant l'accord du salarié, la cour d'appel a, sans encourir les griefs du moyen, retenu qu'une telle convention, non prévue en l'espèce par le contrat de travail ou des avenants, ne résultait pas de la seule mention sur les bulletins de paie d'une rémunération mensuelle sur la base de 171,17 heures ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société DMA Qualifer aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société DMA Qualifer, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Me Remy-Corlay, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société DMA Qualifer.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que le licenciement de Monsieur X... pour inaptitude physique d'origine professionnelle était sans cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, condamné la société DMA QUALIFER à verser au salarié la somme de 40000 ¿ à titre de dommages et intérêts sur ce chef ;
AUX MOTIFS QUE bien que reposant sur une inaptitude physique régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement ne sera légitime que pour autant que l'employeur aura préalablement satisfait à l'obligation de reclassement mise à sa charge par les articles L 1226-2 et L 1226-10 du code du travail ; que selon le second de ces textes, applicable en matière d'inaptitude physique d'origine professionnelle : « lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre, à l'issue des périodes de suspension, l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et après avis des délégués du personnel, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail... » ; qu'ainsi définie, l'obligation de reclassement des salariés physiquement inaptes mise à la charge de l'employeur s'analyse en une obligation de moyen renforcée, dont le périmètre s'étend à l'ensemble des sociétés du même secteur d'activité avec lesquelles l'entreprise entretient des liens ou compose un groupe, dont la localisation et l'organisation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, et il appartient à l'employeur, débiteur de cette obligation, de démontrer par des éléments objectifs qu'il y a satisfait et que le reclassement du salarié par le biais de l'une des mesures prévues par la loi s'est avéré impossible, soit en raison du refus d'acceptation par le salarié d'un poste de reclassement adapté à ses capacités et conforme aux prescriptions du médecin du travail, soit en considération de l'impossibilité de reclassement à laquelle il se serait trouvé confronté ; que deux postes d'assembleur ont effectivement été proposés au salarié au sein de deux sociétés du groupe (DMA QUALIFER à Villers Saint Paul et DMA ASC à Janville) par lettre du 15 janvier 2009 postérieurement à la seconde visite du médecin du travail du 6 janvier 2009 mais cependant avant d'avoir recueilli l'avis de ce même médecin sollicité le 14 janvier précédent, avis en définitive défavorable à la proposition de reclassement jugée incompatible avec les capacités résiduelles du salarié ; qu'ensuite l'employeur qui avait formellement interrogé le 7 janvier 2009 les directeurs de sites de sept autres sociétés du groupe DMA au titre du reclassement interne et non un unique service RH du groupe, en faisant part uniquement des restrictions du médecin du travail, ne produit aucune réponse des sociétés consultées au titre du reclassement interne avant l'engagement de la procédure de licenciement le 2 février 2009, peu important l'unique réponse reçue au titre du reclassement externe ; qu'il ne justifie pas davantage d'une nouvelle consultation du médecin du travail qui se tenait pourtant à disposition dans son courrier du 19 janvier, pour lui permettre d'étudier la compatibilité de postes éventuellement disponibles avec les capacités résiduelles du salarié, en fonction de la structure des effectifs des autres sociétés du groupe, dont il n'est pas pleinement justifié (à l'exception des registres du personnel de la seule société DMA QUALIFER prise en ses deux sites), le document « d'évolution mensuelle de l'effectif » versé aux débats ne pouvant suppléer les registres du personnel ; que la chronologie des démarches, des réponses et les modalités de consultation du médecin du travail ne permettent pas de considérer que l'employeur a pleinement et loyalement satisfait à son obligation de reclassement, en sorte que l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement doit être écartée et la décision des premiers juges infirmée de ce chef, avec toutes conséquences de droit ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en se bornant à affirmer, pour juger que la société DMA QUALIFER avait manqué à son obligation de reclassement et qu'ainsi le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, que « la chronologie des démarches, des réponses et les modalités de consultation du médecin du travail ne permettent pas de considérer que l'employeur a pleinement et loyalement satisfait à son obligation de reclassement », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence, au sein de la société DMA QUALIFER et des autres sociétés du Groupe, de tout poste disponible compatible avec l'état de santé du salarié, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-10 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la Cour d'appel qui, pour juger que la société n'avait pas « pleinement et loyalement satisfait à son obligation de reclassement », s'est bornée à se fonder, d'une part, sur « la chronologie des démarches » de la société qui avait proposé au salarié deux postes de reclassement avant de recueillir l'avis du médecin du travail, d'autre part, sur l'absence de production aux débats des réponses négatives des autres sociétés du Groupe sur le reclassement du salarié, enfin, sur l'absence d'une nouvelle consultation du médecin du travail postérieurement à l'avis défavorable émis le 19 janvier 2009, quand ces constatations n'étaient pas de nature à caractériser en l'espèce un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, a statué par des motifs inopérants, privant en conséquence sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-10 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE l'exposante avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « la société DMA QUALIFER a constaté que le poste d'assembleur ne pouvait être transformé ou aménagé, afin de le rendre compatible avec les recommandations du médecin du travail. En effet, il n'existe aucune machine susceptible de soulager les contraintes physiques liées au métier d'assembleur. De plus, il n'est pas envisageable de confier les tâches impliquant le port de charges et des mouvements du dos à un autre assembleur de l'entreprise, lequel bénéficie d'une prime de production calculée en fonction de la quantité d'armatures soudées et aurait pu subir une perte de salaire liée à la baisse de sa production » (page 11) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que le reclassement de Monsieur X... était impossible dans l'entreprise et le Groupe, de sorte que l'employeur avait satisfait à l'obligation mise à sa charge par l'article L 1226-10 du Code du travail, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société DMA QUALIFER à verser à Monsieur X... les sommes de 306,48 ¿ et de 30,64 ¿ à titre de rappel de salaires et de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE s'il résulte de l'article L 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'au cas d'espèce l'employeur allègue l'existence d'une convention de forfait mensuelle de 171,17 heures incluant les majorations de salaires dues au titre des heures supplémentaires accomplies dans le forfait ; que la rémunération forfaitaire s'entend d'une rémunération convenue entre les parties au contrat de travail pour un nombre déterminé d'heures supplémentaires, soit pour une durée de travail supérieure à la durée légale, et que même si le principe en est posé par la convention collective, le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d'un accord particulier entre l'employeur et le salarié, cet accord ne pouvant résulter de la simple mention du forfait mensuel porté par l'employeur sur les bulletins de salaire au cours de l'exécution du contrat de travail, non plus que de l'acceptation par l'intéressé du salaire versé pendant l'exécution du contrat de travail ; qu'au cas d'espèce, à défaut de convention de forfait régulièrement conclue dans le contrat de travail initial ou dans un avenant postérieur, la simple mention sur les bulletins de salaire d'une rémunération mensuelle sur la base de 171,17 heures ne permet pas de caractériser la convention de forfait alléguée par l'employeur, en sorte que Monsieur X... apparaît en principe fondé à revendiquer le paiement des heures supplémentaires susceptibles d'avoir été effectuées au-delà de l'horaire légal de 151,67 heures mensuelles, sur la base du salaire conventionnel en vigueur avec application d'une majoration de 25% de la 36ème à la 43ème heure et de 50 % au-delà de la 43ème heure, outre un repos compensateur dont la durée est égale à 50% du temps accompli en heures supplémentaires au-delà de la 41ème heure dans les entreprises de plus de 20 salariés, en application de l'article L 212-5-1 (ancien) du code du travail alors applicable ; que la prime d'ancienneté prévue par les dispositions combinées des articles 2, 4 et 5 de l'avenant « mensuels » de la convention collective de la métallurgie de l'Oise se calcule sur la rémunération minimale hiérarchique (RMH) fixée annuellement pour chaque catégorie de salarié en fonction de la valeur du point et de l'horaire de travail effectué incluant les heures supplémentaires ; qu'en application de ces principes et en comparant, sur la période non prescrite d'octobre 2004 à juin 2007, le salaire qu'aurait du percevoir Monsieur X... (salaire minimum mensuel conventionnel, augmenté des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures, incluant les majorations légales de 125% et 150 % ainsi que les repos compensateurs au-delà de la 41ème heure, la prime d'ancienneté calculée sur la RMH pour 151,67 heures ainsi que sur les heures supplémentaires effectuées) au salaire brut mensuel effectivement perçu (salaire brut mensuel pour 171,17 heures, augmenté des heures supplémentaires accomplies au-delà de cet horaire avec les majorations légales et la prime d'ancienneté figurant sur les bulletins de salaire), la Cour infirmant la décision entreprise sur le montant du rappel de salaire dispose des éléments nécessaires pour fixer la créance du salarié à ce titre à la somme qui sera indiquée au dispositif de la décision ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la preuve d'un forfait de salaire pour un salarié non cadre peut être établie par tout moyen ; qu'en affirmant, pour accueillir la demande de Monsieur X... en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents, que « le paiement des heures supplémentaires selon un forfait ne peut résulter que d'un accord particulier entre l'employeur et le salarié » et « qu'à défaut de convention de forfait régulièrement conclue dans le contrat de travail initial ou dans un avenant postérieur, la simple mention sur les bulletins de salaire d'une rémunération mensuelle sur la base de 171,17 heures ne permet pas de caractériser la convention de forfait alléguée par l'employeur », la Cour d'appel, qui a appliqué au forfait de salaire les principes régissant les conventions individuelles de forfait portant sur la durée du travail, a violé les articles 1134 du Code civil et L 3121-22 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le forfait de salaire exige, d'une part, la fixation d'un nombre déterminé d'heures supplémentaire inclus dans la rémunération forfaitaire, d'autre part, l'accord du salarié sur le paiement forfaitisé de ses heures supplémentaires ; qu'en rejetant l'existence d'un forfait de salaire incluant le paiement de 171,17 heures de travail par mois, quand elle avait constaté, d'une part, « la mention sur les bulletins de salaire d'une rémunération mensuelle sur la base de 171,17 heures », d'autre part, « l'acceptation par l'intéressé du salaire versé pendant l'exécution du contrat de travail », la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles 1134 du Code civil et L 3121-22 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-27617
Date de la décision : 15/12/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 11 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 déc. 2015, pourvoi n°12-27617


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Rémy-Corlay, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:12.27617
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