La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2015 | FRANCE | N°14-15080

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 décembre 2015, 14-15080


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par l'association du restaurant inter-administratif de l'Aube le 8 février 1982 en qualité d'employée de restauration, a été licenciée pour faute grave par lettre du 17 octobre 2008 ; qu'alléguant de faits de harcèlement moral, la salariée a saisi le 22 janvier 2009 la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement et en demandes indemnitaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter d

e ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par l'association du restaurant inter-administratif de l'Aube le 8 février 1982 en qualité d'employée de restauration, a été licenciée pour faute grave par lettre du 17 octobre 2008 ; qu'alléguant de faits de harcèlement moral, la salariée a saisi le 22 janvier 2009 la juridiction prud'homale en contestation de son licenciement et en demandes indemnitaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il n'appartient au salarié, qui prétend avoir subi des faits de harcèlement moral, que d'établir des faits qui, pris en leur ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme X... produisait outre divers certificats médicaux et arrêts de travail faisant expressément état d'un état dépressif suite à un harcèlement moral en milieu professionnel, l'attestation d'un ancien collègue, M. Y..., lequel attestait sur l'honneur avoir été le témoin direct de faits de harcèlement moral dont était victime Mme X... ; qu'elle produisait également l'attestation de Mme Z..., ancien directeur départemental des actions médico-social ; que pour rejeter les demandes de Mme X..., la cour d'appel s'est contentée de relever qu'elle ne produisait « que l'attestation d'un autre salarié qui a démissionné en octobre 2001 » et que les médecins n'avaient pas été témoins directs de faits de harcèlement ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'attestation, fût elle émanée d'un ancien collègue démissionnaire en 2001, n'établissait pas des faits laissant présumer un harcèlement moral, par ailleurs corroborés par des certificats médicaux et l'attestation de Mme Z..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ qu'il appartient au juge d'examiner tous les éléments invoqués par le salarié à l'appui du harcèlement moral ; qu'en l'espèce, Mme X... soutenait que l'animosité de ses collègues à son encontre, encouragée par son supérieur hiérarchique, était révélée par leurs témoignages desquels il résultait que ceux-ci se plaignaient et ne s'expliquaient pas de devoir terminer le travail de Mme X... (notamment de plonge) et de devoir travailler comme son « larbin » ; qu'en s'abstenant derechef de rechercher si cette animosité dont Mme X... a été victime, ne permettait pas de laisser présumer un harcèlement moral, par ailleurs corroborés par des certificats médicaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1154-1 du code du travail ;
3°/ que les motifs inintelligibles équivalent à un défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour retenir l'absence de faits laissant présumer le harcèlement moral, que « pour prétendre à l'animosité des collègues à son encontre, Marie-Jeanne A... épouse X... précise que cette collègue a alors ajouté : « nous obligeant à faire son travail (comme larbin) » ; qu'au vu de cet élément, alors qu'elle ne conteste pas les termes de la description de son poste par l'employeur au médecin du travail, consistant dans la préparation des hors-d'oeuvre ou desserts dans des coupelles individuelles, la préparation des légumes et leur mise en place, Marie-Jeanne A... épouse X... n'établit pas que son employeur n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail dans les missions qui lui étaient confiées », la cour d'appel a entaché son arrêt de motifs inintelligibles et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que les juges ne peuvent dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, il résultait expressément de l'attestation et de l'audition de M. Y..., que Mme X... avait subi un harcèlement de la part de M. B... qui la traitait différemment des autres salariés, et interdisait aux autres de lui parler ; qu'en affirmant néanmoins que « tous les témoins s'accordent à déclarer que Monsieur C... et Monsieur B... se sont toujours comportés avec réserve à son égard ; qu'il résulte que l'ensemble des pièces versées aux débats et de l'audition de témoins que Madame X... n'a jamais subi de harcèlement moral », quand le contraire résultait de l'attestation et de l'audition de M. Y..., la cour d'appel a violé le principe d'interdiction de dénaturer les éléments de la cause ;
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de faits et de preuve qui lui étaient soumis sans les dénaturer, a constaté, par décision motivée, que la salariée n'établissait pas la matérialité des faits allégués permettant de laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Attendu que pour déclarer fondé le licenciement pour faute grave de la salariée et la débouter de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel a retenu que celle-ci n'établissait pas, pour justifier son refus de se conformer à l'ordre de son employeur, que la manipulation des chaises après le nettoyage était contre indiquée par les prescriptions médicales ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à l'employeur de démontrer que la manipulation demandée n'était pas contraire aux préconisations du médecin du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en qu'il déclare fondé le licenciement pour faute grave de Mme X... et la déboute de ses demandes indemnitaires, l'arrêt rendu le 12 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne l'association du Restaurant inter-administratif de l'Aube aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association du restaurant inter-administratif de l'Aube à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Mme X... de ses demandes de dommages intérêts pour harcèlement moral et de l'avoir condamnée à payer à l'ARIA la somme de 300 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de l'application des dispositions de l'article L. 1152-l du code du travail qu'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'il résulte de l'application des dispositions de l'article L. 1154 -1 du même code, qu'il appartient au salarié, qui prétend avoir subi des faits de harcèlement moral, d'établir des faits qui, pris en leur ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que si les faits invoqués sont établis, il appartient alors à l'employeur de rapporter la preuve que les agissements qui lui sont reprochés ne sont pas constitutifs de faits de harcèlement et s'expliquent par des éléments objectifs ; qu'en l'espèce, Marie-Jeanne A... épouse X... prétend que sa situation dans l'entreprise s'est dégradée, après l'arrivée du nouveau gérant du restaurant, lorsque celui-ci a été informé qu'elle était, avec un autre salarié, à l'origine des dénonciations des malversations auxquelles s'était livré le précédent gérant ; qu'elle ne produit toutefois aux débats aucun élément permettant d'étayer ces allégations, sauf à produire l'attestation d'un autre salarié qui a démissionné en octobre 2001 ; que Marie-Jeanne A... épouse X... prétend également qu'à compter de cette date, ses attributions ont été modifiées, ses responsabilités revues à la baisse, sans que soient prises en compte, en dépit de son statut de travailleur handicapé, à compter de l'année 2003, les contre-indications du médecin du travail quant aux tâches qui lui étaient confiées ; qu'il est constant, au vu des certificats médicaux versés aux débats, que le médecin du travail, après avoir émis comme restriction une limitation des charges lourdes et une limitation à des travaux de « plonge » pendant une heure, a ultérieurement proscrit les ports de charges lourdes ; que Marie-Jeanne A... épouse X... prétend que la plonge constituait une charge difficile ; que pourtant elle n'en était pas dispensée au titre des contre-indications émises par le médecin du travail, et elle ne conteste pas y avoir été affectée de façon limitée dans le temps ce que confirme la déclaration établie de Madame D... lors de l'enquête réalisée par les conseillers prud'hommes qui précise : « du fait de son aménagement, elle ne faisait pas plus d'une heure de plonge » ; que pour prétendre à l'animosité des collègues à son encontre, Marie-Jeanne A... épouse X... précise que cette collègue a alors ajouté : « nous obligeant à faire son travail (comme larbin) » ; qu'au vu de cet élément, alors qu'elle ne conteste pas les termes de la description de son poste par l'employeur au médecin du travail, consistant dans la préparation des hors-d'oeuvre ou desserts dans des coupelles individuelles, la préparation des légumes et leur mise en place, Marie-Jeanne A... épouse X... n'établit pas que son employeur n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail dans les missions qui lui étaient confiées ; qu'elle soutient également qu'alors que par le passé, elle s'était vue confier la caisse enregistreuse du restaurant, cette mission ne lui a plus été confiée ; qu'elle ne produit toutefois aucun élément à l'appui de cette allégation, n'établissant pas, comme elle le soutient, que les salariés devaient tourner chaque semaine, y compris sur ce poste ; qu'elle fait également état des multiples lettres, sanctions subies notamment à compter de 2001, particulièrement des mises à pied disciplinaire dont elle a fait l'objet ; que pourtant, si Marie-Jeanne A... épouse X... conteste les sanctions ainsi prononcées à son encontre, l'audition des témoins réalisée par les conseillers prud'hommes révèle que celle-ci tenait à l'encontre de ses collègues, de façon régulière, des propos peu amènes, voire insultants ; que cette virulence rapportée par les témoins de cette salariée à l'endroit de ses collègues est exclusive de toute notion de harcèlement moral à son encontre ; qu'enfin, Marie-Jeanne A... épouse X... fait état des multiples arrêts maladie qu'elle a subis, produisant pour justifier de la dégradation de son état de santé mentale et physique les arrêts de travail ou l'attestation de la psychologue qui l'a suivie faisant état de harcèlement, de difficultés professionnelles ; que pourtant, il ne ressort pas des éléments du dossier que ces professionnels ont eux-mêmes constaté des faits dont aurait été victime Marie-Jeanne A... épouse X..., de nature à altérer sa santé physique ou mentale, rapportant les propos tenus par cette salariée, alors que la psychologue qui la suit, énonce dans l'attestation qu'elle établit le 4 février 2009 : « l'environnement professionnel est le lieu de tous les ancrages négatifs, victimisés et dépréciés pour Madame X... qui s'épuise dans une lutte vaine » ; qu'à défaut pour Marie-Jeanne A... épouse X... d'établir des faits, qui pris dans leur ensemble font présumer l'existence d'un harcèlement moral, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée en sa demande en paiement de dommages-intérêts en indemnisation de ce harcèlement moral qu'elle invoque ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Madame X... conteste son licenciement prétendant être harcelée moralement, alors que tous les témoins s'accordent à déclarer que Monsieur C... et Monsieur B... se sont toujours comportés avec réserve à son égard ; qu'il résulte que l'ensemble des pièces versées aux débats et de l'audition de témoins que Madame X... n'a jamais subi de harcèlement moral ;
Alors que, 1°) il n'appartient au salarié, qui prétend avoir subi des faits de harcèlement moral, que d'établir des faits qui, pris en leur ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, il est constant que Mme X... produisait outre divers certificats médicaux et arrêts de travail faisant expressément état d'un état dépressif suite à un harcèlement moral en milieu professionnel (prod. n° 8), l'attestation d'un ancien collègue, M. Y... (prod. n° 3) lequel attestait sur l'honneur avoir été le témoin direct de faits de harcèlement moral dont était victime Mme X... ; qu'elle produisait également l'attestation de Mme Z... ancien Directeur départemental des actions médico-social (prod. n° 4) ; que pour rejeter les demandes de Mme X..., la cour d'appel s'est contentée de relever qu'elle ne produisait « que l'attestation d'un autre salarié qui a démissionné en octobre 2001 » et que les médecins n'avaient pas été témoins directs de faits de harcèlement ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'attestation, fût elle émanée d'un ancien collègue démissionnaire en 2001, n'établissait pas des faits laissant présumer un harcèlement moral, par ailleurs corroborés par des certificats médicaux et l'attestation de Mme Z..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1154-1 du code du travail ;
Alors que, 2°) il appartient au juge d'examiner tous les éléments invoqués par le salarié à l'appui du harcèlement moral ; qu'en l'espèce, Mme X... soutenait que l'animosité de ses collègues à son encontre, encouragée par son supérieur hiérarchique, était révélée par leurs témoignages desquels il résultait que ceux-ci se plaignaient et ne s'expliquaient pas de devoir terminer le travail de Mme X... (notamment de plonge) et de devoir travailler comme son « larbin » ; qu'en s'abstenant derechef de rechercher si cette animosité dont Mme X... a été victime, ne permettait pas de laisser présumer un harcèlement moral, par ailleurs corroborés par des certificats médicaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1154-1 du code du travail ;
Alors que, 3°) les motifs inintelligibles équivalent à un défaut de motifs ; qu'en affirmant, pour retenir l'absence de faits laissant présumer le harcèlement moral, que « pour prétendre à l'animosité des collègues à son encontre, Marie-Jeanne A... épouse X... précise que cette collègue a alors ajouté : « nous obligeant à faire son travail (comme larbin) » ; qu'au vu de cet élément, alors qu'elle ne conteste pas les termes de la description de son poste par l'employeur au médecin du travail, consistant dans la préparation des hors-d'oeuvre ou desserts dans des coupelles individuelles, la préparation des légumes et leur mise en place, Marie-Jeanne A... épouse X... n'établit pas que son employeur n'a pas respecté les préconisations du médecin du travail dans les missions qui lui étaient confiées », la cour d'appel a entaché son arrêt de motifs inintelligibles et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que, 4°) les juges ne peuvent dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, il résultait expressément de l'attestation et de l'audition de M. Y..., que Mme X... avait subi un harcèlement de la part de Monsieur B... qui la traitait différemment des autres salariés, et interdisait aux autres de lui parler ; qu'en affirmant néanmoins que « tous les témoins s'accordent à déclarer que Monsieur C... et Monsieur B... se sont toujours comportés avec réserve à son égard ; qu'il résulte que l'ensemble des pièces versées aux débats et de l'audition de témoins que Madame X... n'a jamais subi de harcèlement moral », quand le contraire résultait de l'attestation et de l'audition de M. Y..., la cour d'appel a violé le principe d'interdiction de dénaturer les éléments de la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré fondé son licenciement pour faute grave, de l'avoir débouté Mme X... de ses demandes indemnitaires et de l'avoir condamnée à payer à l'ARIA la somme de 300 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la faute grave, dont la charge de la preuve incombe à l'employeur, telle qu'énoncée dans la lettre de licenciement dont les termes fixent le cadre du litige soumis à l'appréciation des juges du fond, se définit comme étant un fait ou un ensemble de faits, imputables au salarié, caractérisant de sa part un manquement tel aux obligations découlant de la relation de travail, que son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis s'avère impossible ; qu'en l'espèce la lettre de licenciement adressée à Marie-Jeanne A... épouse X... le 17 octobre 2008, fait grief à cette salariée d'avoir le 23 septembre, insulté le directeur du restaurant administratif de l'association, après avoir refusé catégoriquement de descendre les chaises des tables après le nettoyage, en dépit de l'instruction qui lui avait été donnée par le chef de cuisine ; qu'en dépit des dénégations de Marie-Jeanne A... épouse X..., il ressort de l'audition des témoins effectuée par les conseillers prud'hommes, que des collègues de Marie-Jeanne A... épouse X... ont constaté que celle-ci a, le jour dit, refusé de descendre les chaises des tables après le nettoyage, et qu'après un entretien avec le directeur du restaurant, la salariée a clairement qualifié celui-ci de « petit chef qui se la pète » ; que sur la remise des chaises en place après nettoyage, Marie-Jeanne A... épouse X... prétend qu'elle n'avait pas l'intention d'y procéder seule, ayant sollicité l'assistance de l'apprenti ; qu'elle n'établit toutefois pas que cette manipulation, même répétée, était contre-indiquée par les prescriptions médicales et justifierait son refus ; que dès lors, l'employeur établit que sa salariée a désobéi à la consigne qui lui avait été donnée par le chef de cuisine auquel elle était subordonnée ; que compte tenu des sanctions précédemment prononcées à l'encontre de Marie-Jeanne A... épouse X..., notamment sur le fondement de son refus des instructions qui lui étaient données, l'employeur a pu, en dépit de l'ancienneté de la salariée dans l'entreprise et de son état de travailleur handicapé, prononcer, sur le fondement d'une faute grave, le licenciement de cette salariée ; qu'en considération de ces motifs qui compléteront ceux des premiers juges, la décision déférée sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté Marie-Jeanne A... épouse X... en l'ensemble de ses demandes découlant d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, y compris en sa demande en paiement de salaire pendant la mise à pied conservatoire qui avait été prononcée à son encontre, la faute grave légitimant cette mesure ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'audition des témoins du 23 mai 2012 a permis au Conseil d'avoir la confirmation des insultes de Madame X... envers son supérieur, Monsieur C..., de son refus d'exécuter les taches demandées et du coup d'écumoire qu'elle a porté sur son supérieur ; que malgré la patience de l'ARIA. envers les agissements de Madame X... insultant et agressif ; que, malgré les différentes sanctions disciplinaires dont elle a fait l'objet (refus d'exécuter les ordres, insultes diffamatoires envers ses supérieurs et coup porté à l'un d'entre eux), Madame X... n'a jamais eu un comportement positif créant ainsi au sein du Restaurant un mauvais climat de travail ; que le comportement de Madame X... constitutif d'une faute grave, rendant impossible la poursuite de son contrat de travail malgré ses 26 ans d'ancienneté qui ne peuvent en aucun cas justifier un tel comportement ; que dès lors, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; que la faute grave est privative du remboursement de la mise à pied conservatoire, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents ;
Alors que 1°) il appartient à l'employeur d'établir la faute grave qu'il invoque ; qu'en l'espèce, l'employeur reprochait à Mme X..., salariée handicapée dotée de 26 ans d'ancienneté pour lequel les préconisations du médecin du travail stipulaient l'absence de port de charges lourdes d'avoir refusé de descendre des chaises après le nettoyage ; que pour retenir la gravité de la faute, la cour d'appel a retenu que Mme X... « n'établit pas que cette manipulation, même répétée, était contre indiquée par les prescriptions médicales et justifierait son refus » ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait à l'employeur d'établir que l'ordre donné au salarié handicapé n'était pas contraire aux prescriptions médicales et ne pouvait pas justifier son refus, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve de la faute grave et violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Alors que 2°) ne commet pas de faute grave, le salarié handicapé, ayant 26 ans d'ancienneté, qui après s'être fait reprocher par son employeur d'avoir refusé d'accomplir un acte qu'il estimait contraire aux préconisations du médecin du travail, affirme dans l'escalier, une fois sorti du bureau de son supérieur « j'en ai rien à foutre de ce p'tit gérant qui se la pète » ; qu'en l'espèce, il résulte du procès verbal d'audition par le conseil de prud'hommes de Mme D... (production 6), témoin cité par l'employeur, que Mme X... n'a tenu les propos reprochés en sortant du bureau « quand elle est descendu, dans l'escalier » ; qu'en retenant néanmoins la faute grave dans de telles conditions la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Alors que 3°) la lettre de licenciement fixant les termes du litige , c'est au regard des seuls griefs énoncés que le juge doit apprécier le bien-fondé du licenciement ; qu'en l'espèce il est constant que la lettre de licenciement n'invoque aucun « coup d'écumoire » ni aucune violence physique portée par Mme X... ; que dès lors, en relevant, pour retenir le caractère prétendument fondé du licenciement, que l'audition des témoins avait révélé que Mme X... avait porté un coup d'écumoire sur son supérieur hiérarchique, quand ce grief n'était pas visé par la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-15080
Date de la décision : 01/12/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 12 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 déc. 2015, pourvoi n°14-15080


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.15080
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award