LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article R. 314-167 du code de l'action sociale et des familles ;
Attendu, selon ce texte, que tant le tarif journalier global que le tarif journalier partiel pour lequel un établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes peut opter pour la prise en charge des soins par l'assurance maladie, comprend, notamment, les rémunérations versées aux infirmières et infirmiers libéraux ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., infirmier exerçant à titre libéral, intervenait auprès de personnes hébergées par l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Cantazur (l'EHPAD) ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002, l'EHPAD a conclu une convention tripartite avec l'Etat et le département des Alpes-Maritimes en application de laquelle il a engagé des infirmiers salariés ; qu'ayant poursuivi son activité auprès d'une résidente, M. X... a assigné l'EHPAD en paiement de ses honoraires pour la période du 25 août 2007 au 24 février 2009 devant un tribunal de grande instance ;
Attendu que pour le débouter de sa demande, l'arrêt énonce que l'établissement du forfait de soins exclut que les caisses primaires d'assurance maladie puissent prendre en charge en sus de ce forfait les soins prodigués par les praticiens libéraux intervenant à la demande des personnes hébergées ; que bien qu'informé qu'il devait cesser toute activité au sein de l'établissement au 31 août 2005, M. X... a continué à prodiguer des soins ; qu'il retient que ce dernier ne peut dès lors voir prospérer une demande tendant au remboursement par l'EHPAD de sommes que cet établissement n'a pas pu recevoir de la caisse au titre d'actes prodigués par un infirmier libéral ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix en Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne l'Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Cantazur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Cantazur et le condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur David X... de sa demande tendant à voir condamner l'EHPAD CANTAZUR à lui payer la somme de 16.240,50 euros, représentant les honoraires qui lui sont dus au titre des soins qu'il a prodigués à Madame Isoline Y... du 25 août 2007 au 24 février 2009 ;
AUX MOTIFS QU'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale, l'EHPAD CANTAZUR a signé le 1er juin 2005 une convention tripartite avec le Conseil général et l'État, en application de laquelle elle a engagé des infirmiers salariés ; que l'établissement du forfait de soins exclut que les caisses primaires d'assurance maladie puissent prendre en charge en sus de ce forfait les soins prodigués par les praticiens libéraux intervenant à la demande des personnes hébergées ; que, bien qu'informé par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 août 2005 qu'il devait cesser toute activité au sein de l'établissement au 31 août 2005 sous peine de voir la caisse primaire d'assurance-maladie réclamer le remboursement des indus, Monsieur X... a continué à prodiguer des soins ; que Monsieur X... ne peut dès lors voir prospérer une demande tendant au remboursement par l'EHPAD CANTAZUR de sommes que cet établissement n'a pas pu recevoir de la caisse primaire d'assurance maladie au titre d'actes prodigués par un infirmier libéral ;
1°) ALORS QUE le droit du malade au libre choix de son praticien est un principe fondamental de la législation sanitaire ; qu'il en résulte qu'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ne peut prendre en charge les soins dispensés à ses pensionnaires, lorsque ceux-ci sont prodigués par un infirmier qu'elle emploie en vertu d'un contrat de travail et refuser de prendre en charge les mêmes soins prodigués par un infirmier libéral, choisi par le patient, une telle discrimination constituant un obstacle au droit du malade au libre choix de son praticien ; qu'en décidant néanmoins que l'EHPAD CANTAZUR était uniquement tenu de prendre en charge les soins dispensés à ses patients par ses infirmiers salariés, ce qui excluait la prise en charge des soins prodigués par Monsieur X..., infirmier libéral, à la demande d'une personne hébergée, la Cour d'appel a violé l'article L 1110-8 du Code de la santé publique ;
2°) ALORS QUE le tarif journalier, global ou partiel, perçu par un établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD), comprend les rémunérations versées aux infirmiers libéraux au titre des prestations effectuées au profit des personnes hébergées ; qu'il en résulte que, lorsqu'une personne hébergée fait le choix d'un infirmier libéral pour lui prodiguer des soins, l'EHPAD est tenu de s'acquitter des honoraires de cet infirmier ; qu'en décidant néanmoins que Monsieur X... ne pouvait prétendre au paiement, par l'EHPAD CANTAZUR, de sommes que cet établissement n'avait pu recevoir de la Caisse primaire d'assurance maladie au titre d'actes prodigués par un infirmier libéral, la Cour d'appel a violé l'article R 314-167 du Code de l'action sociale et des familles.