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26/11/2015 | FRANCE | N°14-11100

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 novembre 2015, 14-11100


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé le 1er août 2008 par Mme Y... en qualité d'employé, a pris acte le 10 novembre 2010 de la rupture de son contrat à durée indéterminée et saisi la juridiction prudhomale le 17 février 2011 ; que son employeur avait été mis en redressement judiciaire le 2 juillet 2009, obtenu un plan de continuation le 3 novembre 2011 et mis en redressement judiciaire le 6 mars 2014 avec cessation des paiements au 27 novembre 2013, date de l'arrêt de la chambre sociale de la c

our d'appel, Mme Z... étant successivement représentant des créancie...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé le 1er août 2008 par Mme Y... en qualité d'employé, a pris acte le 10 novembre 2010 de la rupture de son contrat à durée indéterminée et saisi la juridiction prudhomale le 17 février 2011 ; que son employeur avait été mis en redressement judiciaire le 2 juillet 2009, obtenu un plan de continuation le 3 novembre 2011 et mis en redressement judiciaire le 6 mars 2014 avec cessation des paiements au 27 novembre 2013, date de l'arrêt de la chambre sociale de la cour d'appel, Mme Z... étant successivement représentant des créanciers, commissaire à l'exécution du plan et représentant des créanciers ;

Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte du salarié produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de fixer en conséquence la créance salariale à son passif, alors, selon le moyen, que la procédure prud'homale est orale ; que les écritures déposées par une partie qui ne comparaît pas et n'est pas représentée ne sont pas recevables ; que lors d'une instance ultérieure, le juge ne saurait retenir à titre d'élément de preuve ou de présomption les énonciations d'écritures qui n'ont pas été oralement soutenues ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que Mme Y... « n'a pas comparu devant les premiers juges et n'a pas plus été représentée à l'audience de jugement » « de sorte que c'est » une décision réputée contradictoire « qui a été rendue par le Conseil de prud'hommes ; qu'en retenant, pour conclure sans en vérifier l'écriture à la fausseté de l'avenant du 1er octobre 2008 produit devant elle, que » « Mme Y... a déposé le 25 août 2011 des conclusions devant le conseil de prud'hommes de Saintes aux termes desquelles elle n'invoquait pas la signature d'un avenant au contrat de travail mais se prévalait uniquement d'une parfaite information du salarié sur la nouvelle amplitude de travail indiquée sur le bulletin de paie de novembre 2008 celui-ci mentionnant : » nouveaux horaires à compter du 1er novembre 2008, 20 heures hebdomadaires « la cour d'appel, qui a pris en considération les énonciations de conclusions que leur auteur n'avaient pas oralement soutenues, a violé les articles R. 1453-14 et R. 1453-3 du code du travail, ensemble l'article 6 §. 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Mais attendu qu'en retenant que, pour la période non couverte par l'avenant, l'employeur a modifié unilatéralement le contrat de travail du salarié en le ramenant de trente cinq heures à vingt heures sans respecter les prescriptions de l'article L. 1222-6 du code du travail, qu'en conséquence, la prise d'acte du salarié était fondée, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 3253-8 du code du travail ;
Attendu que pour mettre hors de cause l'AGS-CGEA l'arrêt retient que l'employeur bénéficie d'un plan de continuation ;
Qu'en statuant ainsi par un motif inopérant alors qu'elle fixait au passif de l'employeur une créance de salaires impayés et d'indemnités de rupture antérieures à l'ouverture de la procédure collective et à l'obtention du plan de redressement judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile,
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il met hors de cause l'AGS-CGEA, l'arrêt rendu le 27 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi et statuant de ce chef :
Dit que L'AGS-CGEA doit sa garantie ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture produirait les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, fixé la créance de Monsieur X... dans la procédure ouverte contre Madame Y... à hauteur de 628, 05 € à titre d'indemnité de licenciement, 2 651, 76 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, 1 349, 22 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 6 225, 30 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 21 325, 30 € bruts à titre de rappel de salaires pour la période du 1er novembre 2008 au 10 novembre 2010, 3 113, 88 € à titre de rappel de primes de gratification de fin d'année, 2 176, 52 € à titre de rappel de primes de vacances, 2 000 € pour défaut de remise de l'attestation Pôle Emploi, 1 250 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE " par lettre recommandée avec avis de réception du 10 novembre 2010, Monsieur X... a reproché à son employeur d'avoir modifié unilatéralement son contrat de travail en réduisant le 1er novembre 2008 un temps plein en temps partiel de 20 heures par semaine, d'avoir ainsi omis de lui verser la contrepartie du travail effectivement fourni, la durée réelle du travail n'ayant pas été, de fait, modifiée ; qu'il reprend cette argumentation devant la cour ; que les bulletins de salaire produits aux débats confirment qu'à compter du 1er novembre 2008, Monsieur X... a été rémunéré pour 20 heures de travail hebdomadaires, situation non contestée par Madame Y... ;
QUE pour contester toute modification unilatérale du temps de travail, Madame Y... argue pour la première fois devant la Cour de l'existence d'un avenant au contrat de travail, signé le 1er octobre 2008 par Monsieur X... et prévoyant la réduction du temps de travail à 20 heures hebdomadaires ; qu'elle produit un document en copie, d'ailleurs de mauvaise qualité ; que Monsieur X... soutient qu'il s'agit d'un faux et qu'il n'a jamais signé d'avenant à son contrat de travail ;
QUE la cour relève que Madame Y... a déposé le 25 août 2011 des conclusions devant le Conseil de prud'hommes de Saintes aux termes desquelles elle n'invoquait pas la signature d'un avenant au contrat de travail mais se prévalait uniquement d'une parfaite information de Monsieur X... sur la nouvelle amplitude de travail indiquée sur le bulletin de paie de novembre 2008 celui-ci mentionnant : " nouveaux horaires à compter du 1er novembre 2008, 20 heures hebdomadaires " ; que Madame Y... n'a pas comparu devant les premiers juges et n'a pas non plus été représentée à l'audience de jugement ; que la décision déférée est ainsi qualifiée de réputée contradictoire ;
QUE l'avenant précité n'est pas produit en original, que la signature attribuée à Monsieur X... est très imprécise, et n'est pas précédée de la mention " lu et approuvé ", manifestement annoncée dans le renvoi (1) accolé à la mention " l'employé ", la copie produite aux débats étant également tronquée sur ce point ; qu'il s'en déduit que l'authenticité de ce document est douteuse ; qu'en outre Monsieur X..., qui conteste fermement avoir signé un tel avenant, relève avec pertinence que, d'une part, il y est mentionné que son poste de travail est identique alors que les tâches dévolues, à savoir jardinage, bricolage et entretiens divers, mais surtout gardiennage avec logement de fonction, impliquaient qu'il fût à la disposition permanente de l'employeur, et que d'autre part, cet avenant vise une période limitée de la réduction du temps de travail à savoir du 1er novembre 2008 au 28 février 2009 alors que Madame Y... a de manière pérenne réduit son temps de travail ainsi qu'établi par ses bulletins de salaire ; qu'en outre, comme le souligne exactement Monsieur X... Madame Y..., ayant fait l'objet d'un redressement judiciaire prononcé le 2 juillet 2009, aurait dû alors respecter les dispositions de l'article L. 1222-6 du Code du travail pour modifier un des éléments essentiels du contrat de travail pour motif économique, ce qu'elle s'est dispensée de mettre en oeuvre ;
QU'il s'évince suffisamment de ces motifs, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure de vérification d'écritures (en l'espèce de signature de Monsieur X...), dilatoire au détriment du salarié, que l'avenant produit aux débats ne permet pas d'écarter la réalité de la modification unilatérale du contrat de travail ; qu'en conséquence de ce manquement grave de l'employeur, qui a réduit la rémunération du salarié, de manière brutale et injustifiée, de 1 321, 04 ¿ brut par mois à 767, 89 ¿ brut par mois, la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur est fondée et produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que Madame Y... soutient de manière inopérante que Monsieur X... voulait démissionner pour s'occuper de sa mère malade, ainsi qu'exposé dans une lettre du novembre 2010, dès lors que cette lettre est postérieure à la rupture de la relation contractuelle, acquise dès la lettre de prise d'acte en date du 10 novembre 2010 ; que de même, les reproches de Madame Y... concernant le comportement de Monsieur X..., à les supposer fondés, ne suffisent pas à écarter les manquements graves de l'employeur déjà discutés, d'autant plus que Madame Y... n'a pas notifié d'avertissement ou de rappel à l'ordre de son salarié et n'a pas plus envisagé de le licencier ; que la cour confirmera la décision déférée sur l'appréciation de la prise d'acte " ;

ALORS QUE la procédure prud'homale est orale ; que les écritures déposées par une partie qui ne comparaît pas et n'est pas représentée ne sont pas recevables ; que lors d'une instance ultérieure, le juge ne saurait retenir à titre d'élément de preuve ou de présomption les énonciations d'écritures qui n'ont pas été oralement soutenues ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que Madame Y... " n'a pas comparu devant les premiers juges et n'a pas plus été représentée à l'audience de jugement " de sorte que c'est " une décision réputée contradictoire " qui a été rendue par le Conseil de prud'hommes ; qu'en retenant, pour conclure sans en vérifier l'écriture à la fausseté de l'avenant du 1er octobre 2008 produit devant elle, que " Madame Y... a déposé le 25 août 2011 des conclusions devant le Conseil de prud'hommes de Saintes aux termes desquelles elle n'invoquait pas la signature d'un avenant au contrat de travail mais se prévalait uniquement d'une parfaite information de Monsieur X... sur la nouvelle amplitude de travail indiquée sur le bulletin de paie de novembre 2008 celui-ci mentionnant : " nouveaux horaires à compter du 1er novembre 2008, 20 heures hebdomadaires " la Cour d'appel, qui a pris en considération les énonciations de conclusions que leur auteur n'avaient pas oralement soutenues, a violé les articles R. 1453-14 et R. 1453-3 du Code du travail, ensemble l'article 6 §. 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR mis le CGEA de Bordeaux hors de cause ;
AUX MOTIFS QUE " la cour confirmera la décision déférée sur l'appréciation de la prise d'acte de la rupture ¿ l'intégralité des condamnations prononcées ¿ et les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, sauf à mettre le CGEA de Bordeaux hors de cause en l'état du plan de continuation en cours " ;
ALORS QUE les sommes dues par l'employeur en exécution du contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire restent soumises, même après l'adoption d'un plan de redressement par continuation, au régime de la procédure collective ; que les créances en résultant doivent être garanties par l'assurance des salariés contre le risque de non paiement ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué (p. 2 in fine) que Madame Y... a été placée en redressement judiciaire le 2 juillet 2009, que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Monsieur X... est intervenue le 10 novembre 2010, soit pendant la période d'observation, que les rappels de salaire et primes ont été alloués au salarié pour la période du 1er novembre 2008 à la rupture du contrat de travail et qu'enfin le plan de continuation de Madame Y... a été homologué par jugement du 3 novembre 2011 ; qu'en mettant hors de cause le CGEA de Bordeaux, alors que les créances de salaires et primes étaient pour parties dues au salarié en exécution de son contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire, que les créances d'indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de préavis et dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse étaient dues en conséquence d'une rupture du contrat de travail intervenue pendant la période d'observation, de sorte que les unes et les autres restaient soumises, même après l'adoption d'un plan de redressement par continuation, au régime de la procédure collective, la Cour d'appel a violé l'article L. 3253-8 du Code du travail


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-11100
Date de la décision : 26/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 27 novembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 nov. 2015, pourvoi n°14-11100


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11100
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