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12/11/2015 | FRANCE | N°14-25889

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 novembre 2015, 14-25889


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 septembre 2014), que Sylvaine X..., ayant présenté une hépatite C consécutive à l'administration en 1985 de produits sanguins fournis par le centre de transfusion sanguine de Quimper, alors qu'elle se trouvait hospitalisée dans l'établissement exploité par la société Clinique Saint-Michel et Sainte-Anne (la clinique), a été indemnisée par l'Etablissement français du sang (l'EFS) de préjudices résultant de cette contamination

; qu'à la suite de son décès, survenu le 14 février 2010, M. X..., son époux...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 septembre 2014), que Sylvaine X..., ayant présenté une hépatite C consécutive à l'administration en 1985 de produits sanguins fournis par le centre de transfusion sanguine de Quimper, alors qu'elle se trouvait hospitalisée dans l'établissement exploité par la société Clinique Saint-Michel et Sainte-Anne (la clinique), a été indemnisée par l'Etablissement français du sang (l'EFS) de préjudices résultant de cette contamination ; qu'à la suite de son décès, survenu le 14 février 2010, M. X..., son époux, a assigné la clinique et la caisse primaire d'assurance maladie du Sud Finistère (la caisse) en réparation d'autres préjudices subis par lui-même et son épouse ; que la clinique a appelé en garantie l'EFS et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) et soulevé l'incompétence des juridictions judiciaires pour connaître de l'action de M. X... à son encontre ;
Attendu que la clinique fait grief à l'arrêt de retenir la compétence du tribunal de grande instance et de renvoyer M. X... et la caisse devant cette juridiction, alors, selon le moyen, que toute action tendant à l'indemnisation des dommages résultant de la fourniture de produits sanguins labiles ou de médicaments dérivés du sang élaborés par des centres de transfusion sanguine, introduite postérieurement au 3 septembre 2005, relève de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par acte du 14 décembre 2012, M. X... a fait assigner la clinique devant le tribunal de grande instance de Quimper afin d'obtenir réparation de l'aggravation du préjudice résultant de la contamination posttransfusionnelle de Mme X... par le virus de l'hépatite C ; que seule la qualité du sang fourni étant à l'origine de la contamination dont Mme X... avait été victime, aucune faute spécifique n'était invoquée à l'encontre de la clinique ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Quimper compétent pour connaître de l'action de M. X..., la cour d'appel a commis un excès de pouvoir et violé la loi des 16-24 août 1790 et l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 ;
Mais attendu que l'article 15 de cette ordonnance, unifiant au profit des juridictions administratives les contentieux transfusionnels dans lesquels l'EFS vient aux droits et obligations des centres de transfusions sanguines, concerne les demandes tendant à sa condamnation à indemniser les dommages résultant de la fourniture des produits sanguins élaborés par ces centres et qu'en application de l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, l'ONIAM est chargé, depuis le 1er juin 2010, de l'indemnisation des victimes de ces dommages ; que les demandes tendant à la condamnation des établissements de santé privés, au titre de l'administration de produits sanguins contaminés, demeure de la compétence des juridictions judiciaires, appréciant seules la responsabilité de ces établissements qui ne peut, cependant, être engagée qu'en cas de faute ; qu'il s'ensuit qu'en écartant l'application de l'article 15 précité, après avoir retenu que M. X... ne recherchait pas une indemnisation par l'ONIAM, mais la responsabilité de la clinique sur le fondement des règles contractuelles de droit privé, la cour d'appel n'a commis aucun excès de pouvoir ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Clinique Saint-Michel et Sainte-Anne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Clinique Saint-Michel et Sainte-Anne.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit le tribunal de grande instance de Quimper compétent pour statuer sur l'action de M. X... à l'encontre de la société clinique Saint-Michel et Sainte-Anne et renvoyé M. X..., la caisse primaire d'assurance maladie devant cette juridiction ;
AUX MOTIFS QUE l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 dispose que : « Les demandes tendant à l'indemnisation des dommages résultant de la fourniture de produits sanguins labiles ou de médicaments dérivés du sang élaborés par les personnes morales de droit public mentionnées à l'article 14 de la présente ordonnance ou par des organismes dont les droits et obligations ont été transférés à l'Etablissement français du sang en vertu d'une convention conclue en application de l'article 18 de la loi du 1er juillet 1998 visée ci-dessus ou dans les conditions fixées au I de l'article 60 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000 visée ci-dessus relèvent de la compétence des juridictions administratives quelle que soit la date à laquelle est intervenu le fait générateur des dommages dont il est demandé réparation. Les juridictions judiciaires saisies antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance de demandes pour lesquelles elles étaient compétentes le demeurent après cette entrée en vigueur » ; (...) que cet article est inséré dans le chapitre VI intitulé « Dispositions relatives à certains contentieux concernant les transfusions sanguines » ; que l'article 14 qui le précède énonce que : « Les droits et obligations nés de l'élaboration ou de la fourniture de produits sanguins par des personnes morales de droit public ayant été agréées sur le fondement de la loi n° 52-854 du 21 juillet 1952 et qui n'ont pas déjà été transférés par l'article 18 de la loi du 1er juillet 1998 sont transférés à l'Etablissement français du sang à la date de sa création, sous réserve que ces droits et obligations n'aient pas été fixés par une décision juridictionnelle irrévocable à la date de la publication de la présente ordonnance. » ; qu'il en résulte que ce chapitre ne s'applique pas à l'ensemble des contentieux concernant les transfusions sanguines mais à certains contentieux et est relatif aux procédures diligentées contre les personnes morales de droit public pour leurs droits et obligations nés de l'élaboration ou de la fourniture de produits sanguins dont les droits ont été transférés à l'Etablissement français du sang auquel est substitué l'ONIAM depuis le 1er juin 2010 : qu'en l'espèce, M. X... ne recherche pas l'indemnisation de l'ONIAM substitué à l'établissement français du sang mais la responsabilité et l'indemnisation de la clinique en vertu des règles contractuelles de droit privé ; que l'article 15 rappelé ci-dessus ne trouve donc pas à s'appliquer au présent procès en ce qui concerne l'action intentée par M. X... à l'encontre de la clinique Saint-Michel et Sainte-Anne ;
ALORS QUE toute action tendant à l'indemnisation des dommages résultant de la fourniture de produits sanguins labiles ou de médicaments dérivés du sang élaborés par des centres de transfusion sanguine, introduite postérieurement au 3 septembre 2005, relève de la compétence des juridictions de l'ordre administratif ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que par acte du 14 décembre 2012, M. X... a fait assigner la société clinique Saint-Michel et Sainte-Anne devant le tribunal de grande instance de Quimper afin d'obtenir réparation de l'aggravation du préjudice résultant de la contamination posttransfusionnelle de Mme X... par le virus de l'hépatite C ; que seule la qualité du sang fourni étant à l'origine de la contamination dont Mme X... avait été victime, aucune faute spécifique n'était invoquée à l'encontre de la société clinique Saint-Michel ; qu'en déclarant le tribunal de grande instance de Quimper compétent pour connaître de l'action de M. X..., la cour d'appel a commis un excès de pouvoir et violé la loi des 16-24 août 1790 et l'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-25889
Date de la décision : 12/11/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Litige relatif à la responsabilité de l'Etablissement français du sang

SEPARATION DES POUVOIRS - Compétence judiciaire - Exclusion - Cas - Contentieux en matière de transfusion sanguine - Conditions - Demande tendant à la condamnation de l'Etablissement français du sang, auquel est substitué l'ONIAM - Portée SANTE PUBLIQUE - Transfusion sanguine - Virus de l'hépatite C - Contamination - Demande tendant à la condamnation des établissements de santé privés - Juridiction compétente - Détermination

L'article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 unifiant au profit des juridictions administratives les contentieux transfusionnels dans lesquels l'Etablissement français du sang (EFS) vient aux droits et obligations des centres de transfusions sanguines, ne concerne que les demandes tendant à la condamnation de l'EFS, auquel est substitué l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), en application de l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008. Les demandes tendant à la condamnation des établissements de santé privés, au titre de l'administration de produits sanguins contaminés, demeure de la compétence des juridictions judiciaires, appréciant seules la responsabilité de ces établissements qui ne peut être engagée qu'en cas de faute


Références :

loi des 16-24 août 1790

article 15 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 03 septembre 2014

Sur la compétence du juge administratif pour apprécier la responsabilité de l'Etablissement français du sang, à rapprocher :2e Civ., 16 décembre 2010, pourvoi n° 09-71797, Bull. 2010, II, n° 218 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 nov. 2015, pourvoi n°14-25889, Bull. civ. 2016, n° 839, 1re Civ., n° 470
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 839, 1re Civ., n° 470

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Ingall-Montagnier (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Duval-Arnould
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.25889
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