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14/10/2015 | FRANCE | N°14-22695

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 octobre 2015, 14-22695


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y... et la société Garage Dizier ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 juin 2014), que Mme X... a vendu, en 2007, à M. Rafik Z... un véhicule de type Porsche 996 Carrera 4, datant de 2005, qu'elle avait acheté d'occasion en 2006 ; qu'ayant appris, à l'occasion d'une opération d'entretien, que le véhicule avait été accidenté en 2005 et les réparations mal réalisées, M

. Rafik Z... a assigné Mme X... en résolution de la vente pour vice caché puis a invoq...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y... et la société Garage Dizier ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 10 juin 2014), que Mme X... a vendu, en 2007, à M. Rafik Z... un véhicule de type Porsche 996 Carrera 4, datant de 2005, qu'elle avait acheté d'occasion en 2006 ; qu'ayant appris, à l'occasion d'une opération d'entretien, que le véhicule avait été accidenté en 2005 et les réparations mal réalisées, M. Rafik Z... a assigné Mme X... en résolution de la vente pour vice caché puis a invoqué le dol commis par la venderesse qui lui avait caché l'existence de l'accident ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'annuler la vente pour vice du consentement et de la condamner à verser diverses sommes à M. Rafik Z..., alors, selon le moyen, que l'élément intentionnel de la réticence dolosive suppose que soit établie la connaissance, par le vendeur, du caractère déterminant, pour l'acquéreur, de l'information retenue ; qu'en qualifiant de réticence dolosive le simple silence gardé sur l'existence d'un accident, suivi d'une réparation, ayant affecté le véhicule Porsche Carrera, tout en relevant que la venderesse ignorait les insuffisances de la réparation, et sans établir la volonté de Mme X... d'induire sciemment en erreur l'acquéreur sur un élément qu'elle pouvait tenir pour indifférent en l'état de son ignorance du caractère insuffisant de la réparation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que, certes, Mme X... ignorait que la remise en état du véhicule après l'accident survenu en 2005 avait été insuffisante, mais n'avait, cependant, jamais signalé à M. Rafik Z... que la voiture avait été accidentée alors qu'elle n'ignorait rien de cet état puisque, lorsqu'elle avait acquis le véhicule à peine plus d'un an auparavant, le vendeur le lui avait signalé et lui avait remis les factures de réparation, et que, selon l'expert judiciaire, un sinistre, même parfaitement réparé, était de nature à entraîner une décote notable sur le marché des automobiles de sport haut de gamme, la cour d'appel a retenu qu'en vendant la voiture litigieuse pour un prix correspondant à la cote Argus d'un véhicule en parfait état, sans signaler l'existence d'un accident antérieur ni communiquer les documents y afférents qui se trouvaient en sa possession, Mme X... avait commis une réticence dolosive qui avait eu pour conséquence de surprendre le consentement de M. Rafik Z... dans l'un de ses éléments déterminants ; qu'ayant ainsi fait ressortir le caractère intentionnel de cette réticence, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et la condamne à payer à M. Rafik Z... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé pour vice du consentement la vente intervenue le 12 novembre 2007 entre Mme Catherine X... et M. Abel Rafik Z..., portant sur le véhicule Porsche 996 Carrera 4 n° de série ...immatriculée ..., condamné Mme X... à restituer à M. Abel Rafik Z... la somme de 34. 000 ¿ correspondant au prix de vente, donné acte à M. Abel Rafik Z... de ce qu'il restituera le véhicule Porsche 996 Carrera 4 n° de série ...immatriculée ... dès remboursement du prix de vente et condamné Mme X... à payer à M. Abel Rafik Z... la somme de 6. 623, 98 ¿,

AUX MOTIFS QUE « Sur l'annulation de la vente pour dol

A titre liminaire, il sera observé que M. Rafik Z... sollicite que la cour prononce la résolution de la vente pour vice du consentement ; or, la résolution constitue la sanction du non-respect, par l'une des parties, des obligations mises à sa charge par le contrat, alors que le vice du consentement atteint l'existence même de la convention ; par application de l'article 12 du code de procédure civile, qui dispose que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, et qu'il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, la cour requalifiera donc la demande de résolution de la vente en demande d'annulation de la vente ;

1°) Sur la nullité de la vente

L'article 1109 du code civil dispose qu'il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol ;

L'article 1116 du même code énonce que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté, qu'il ne se présume pas et doit être prouvé ;

Le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter ;

En l'espèce, il est certes constant que Mme Catherine X... ignorait que la remise en état du véhicule suite à l'accident qu'il avait subi le 22 juillet 2005 avait été insuffisante et qu'il subsistait une déformation du longeron ;

Il est cependant tout aussi incontesté qu'à l'occasion de la vente à M. Rafik Z..., elle ne lui a à aucun moment signalé que la voiture avait antérieurement subi un accident de la circulation et qu'il avait consécutivement fait l'objet d'opérations de remise en état conséquentes, s'élevant à près de 10. 500 ¿ ; pourtant, elle-même n'ignorait rien de cet état de fait, puisqu'il est acquis aux débats que lorsqu'elle a acquis la voiture de M. Jean-François Y..., à peine plus d'un an auparavant, celui-ci lui avait dûment signalé l'accident, et lui avait remis l'intégralité des factures de réparation établies par la société garage Dizier ;

Or, il incombe à tout vendeur d'un véhicule automobile, même non professionnel, de signaler à l'acheteur tout élément particulier survenu dans la vie du véhicule dont il a lui-même connaissance, et qui est susceptible d'influer sur la décision de l'acheteur ; la circonstance qu'une automobile ait ou non subi un accident constitue un élément substantiel que doit connaître tout acquéreur de véhicule d'occasion, dès lors que le bon fonctionnement de celui-ci et la durée de vie de ses organes sont directement fonction de l'importance des dommages subis ainsi que de la qualité des réparations effectuées ; cela est particulièrement le cas dans le domaine du marché de niche spécifique que constitue le marché des automobiles de sport haut de gamme, pour lequel l'expert judiciaire rappelle qu'un sinistre, même parfaitement réparé, est de nature à entraîner une décote de prix notable ;

En vendant à M. Rafik Z... la voiture litigieuse pour un prix de 34. 000 ¿ correspondant à la cote Argus d'un véhicule en parfait état sans lui signaler l'existence d'un accident antérieur, ni lui communiquer les documents y afférents qui étaient pourtant en sa possession, Mme Catherine X... a commis une réticence dolosive qui a eu pour conséquence de surprendre le consentement de l'appelant dans l'un de ses éléments déterminants ;

Il y a donc lieu d'annuler la vente ;

2°) Sur les conséquences de l'annulation de la vente

Les parties devant être remises dans la situation qui était la leur antérieurement à la convention annulée, Mme Catherine X... sera condamnée à restituer le prix, soit 34. 000 ¿, et il sera donné acte à M. Rafik Z... qu'il lui remettra le véhicule dès parfait remboursement du prix.

Le jugement déféré sera infirmé en ce sens

3°) Sur les frais générés par la vente et le trouble de jouissance

Mme Catherine X... devra indemniser M. Rafik Z... de l'ensemble des frais engagés pour l'entretien du véhicule et pour les interventions destinées à permettre la réalisation des opérations d'expertise ; l'appelant, qui réclame à ce titre un montant global de 6. 713, 68 ¿, produit les pièces suivantes :

- facture Garage des Robarts du 21 février 2008 d'un montant de 970, 26 ¿, relative à l'entretien du système de freinage ;

- facture FM Motors Reims du 14 avril 2008, d'un montant de 3. 952, 70 ¿, relative au grand entretien ;

- facture Riester du 11 juin 2008, d'un montant de 162, 66 ¿, relative au passage au marbre ;

- note d'honoraires cabinet Beaumont-Trouvain du 9 septembre 2008, d'un montant de 450 ¿, relative à l'expertise amiable ;

- facture garage JM et C. Hartert du 25 novembre 2008, d'un montant de 452, 09 ¿, relative au passage au marbre ;

- facture garage JM et C. Hartert du 9 mars 2011, d'un montant de 636, 27 ¿, relative au démontage partiel du véhicule et au passage au marbre dans le cadre de l'expertise judiciaire ;

Il est ainsi justifié d'un montant de 6. 623, 98 ¿, la différence entre ce montant et celui sollicité par l'appelant, soit 89, 70 ¿, correspondant à une facture d'entretien que la cour ne trouve pas au dossier ;

Mme X... sera donc condamnée à verser à M. Rafik Z... la somme de 6. 623, 98 ¿.

Il est encore sollicité une somme de 10. 000 ¿ en réparation du préjudice lié à la privation de jouissance du véhicule. Toutefois, l'expert a indiqué sans ambiguïté que le véhicule litigieux fonctionne normalement et en toute sécurité, de telle sorte que M. Rafik Z... pouvait en jouir sans aucune restriction », (arrêt p. 6 et 7)

ALORS QUE l'élément intentionnel de la réticence dolosive suppose que soit établie la connaissance, par le vendeur, du caractère déterminant, pour l'acquéreur, de l'information retenue ; qu'en qualifiant de réticence dolosive le simple silence gardé sur l'existence d'un accident, suivi d'une réparation, ayant affecté le véhicule Porsche Carrera, tout en relevant que la venderesse ignorait les insuffisances de la réparation, et sans établir la volonté de Mme X... d'induire sciemment en erreur l'acquéreur sur un élément qu'elle pouvait tenir pour indifférent en l'état de son ignorance du caractère insuffisant de la réparation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-22695
Date de la décision : 14/10/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 10 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 oct. 2015, pourvoi n°14-22695


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.22695
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