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23/09/2015 | FRANCE | N°14-24602

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 septembre 2015, 14-24602


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 mars 2013), qu'engagé le 5 février 2001 par la société Ambulances aides Cavaillon en qualité d'ambulancier, M. X..., après s'être vu notifier plusieurs avertissements et une mise à pied disciplinaire, a été licencié pour faute grave par lettre du 20 décembre 2010, pour avoir manqué gravement aux responsabilités d'un ambulancier pouvant avoir des conséquences importantes sur la santé des patients, abandonné un jeune enfant et une personne

âgée handicapée sans se soucier de la présence d'une personne responsable ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 26 mars 2013), qu'engagé le 5 février 2001 par la société Ambulances aides Cavaillon en qualité d'ambulancier, M. X..., après s'être vu notifier plusieurs avertissements et une mise à pied disciplinaire, a été licencié pour faute grave par lettre du 20 décembre 2010, pour avoir manqué gravement aux responsabilités d'un ambulancier pouvant avoir des conséquences importantes sur la santé des patients, abandonné un jeune enfant et une personne âgée handicapée sans se soucier de la présence d'une personne responsable pour les prendre en charge et fourni une fausse déclaration d'accident du travail ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire justifié son licenciement pour faute grave et de le débouter de ses demandes indemnitaires, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement doit énoncer un motif précis, objectif et vérifiable ; que la lettre de licenciement reprochait au salarié, sans plus de précision, « des manquements graves aux responsabilités d'un ambulancier et pouvant avoir des conséquences importantes sur l'intégrité physique des patients », ce qui ne caractérisait pas un motif de licenciement précis, objectif et vérifiable ; qu'en énonçant que la lettre de rupture du 24 décembre 2010 était « parfaitement motivée » et faisait « référence à des faits précis, matériellement vérifiables », la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que pour déclarer le licenciement justifié par une faute grave, la cour d'appel a notamment relevé que, le 17 septembre 2010, M. X...aurait laissé un enfant devant le portail de son domicile sans s'assurer de la présence d'un adulte pour le « réceptionner » ; que l'employeur n'ayant engagé la procédure de licenciement que par une lettre de convocation à un entretien préalable du 13 décembre 2010, la cour d'appel, qui n'a relevé aucune circonstance propre à démontrer que l'employeur n'aurait eu connaissance de ces faits que moins de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire, ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans priver sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;
3°/ que la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit, sans préjudice de la prescription de l'article L. 1332-4 du code du travail, intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs allégués et dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que M. X...a été convoqué à un entretien préalable au licenciement par lettre du 13 décembre 2010 et que les faits qui ont été retenus à sa charge auraient été commis les 17 septembre et 17 novembre de la même année, soit plusieurs semaines avant l'engagement de la procédure disciplinaire ; que le laps de temps écoulé entre les faits incriminés et la convocation à l'entretien préalable étant de nature à ôter à la faute son caractère de gravité, la cour d'appel ne pouvait déclarer le licenciement justifié par une faute grave sans violer l'article L. 1234-1 du code du travail ;
4°/ que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à énoncer que « le licenciement pour faute grave est fondé, la présence du salarié dans l'entreprise s'avérant désormais impossible », sans préciser en quoi les faits ainsi retenus à la charge de l'exposant rendaient impossible son maintien dans l'entreprise, même pour la durée du préavis, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a jugé à bon droit que la lettre de licenciement comportait l'énoncé de motifs précis et matériellement vérifiables ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, devant laquelle n'étaient invoqués ni le moyen tiré de la prescription des faits fautifs ni celui du non respect du délai restreint dans lequel doit être mise en oeuvre la procédure de licenciement disciplinaire, qui a retenu qu'étaient établis les faits d'abandon de deux patients fragilisés sans s'assurer de leur prise en charge et de fausse déclaration d'accident du travail, a pu en déduire, sans encourir le grief de la deuxième branche, que le comportement du salarié, déjà sanctionné à de nombreuses reprises, constituait une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable comme nouveau, mélangé de fait et de droit en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président, et signé par Mme Reygner, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions de l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt-trois septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIRdécidé que le licenciement de Monsieur X...était justifié par une faute grave et, en conséquence, débouté M. X...de ses demandes indemnitaires contre la société AMBULANCES AIDES CAVAILLON ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de convocation à l'entretien préalable porte expressément mention que « la sanction disciplinaire que nous envisageons à votre égard est un licenciement pour faute grave » ; elle répond ainsi aux exigences de l'article L 1332-2 du Code du travail en ce qu'elle précise son objet ; cette lettre portait mise à pied à titre conservatoire ; elle était présentée le 14 décembre et distribuée à Monsieur X...le 15 décembre 2010 comme l'établit l'accusé réception ; Monsieur X...pour s'y soustraire allait se présenter le 16 décembre 2010 dans les locaux de l'entreprise et déclarait avoir été victime à 10 heures d'un accident du travail, souffrant de violences douleurs dorsales et lombaires et douleurs plantaires ; il se présentait ensuite le 20 décembre 2010, remettant en mains propres à l'employeur un courrier daté du 18 décembre précisant que son état de santé ne lui permettait pas de se déplacer pour répondre à la convocation du 21 décembre ainsi que pour les semaines à venir durant son arrêt de travail ; Monsieur X...ne peut en cet état faire grief à l'employeur de ne pas avoir reporté l'entretien préalable, qu'il ne demandait d'ailleurs pas expressément, alors qu'au moment où se serait déroulé l'accident du travail, qualification contestée par l'employeur qui émet des réserves motivées auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse, il était sous le coup d'une mise à pied conservatoire notifiée la veille qui, sous réserve de l'appréciation souveraine de la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale éventuellement saisie de la décision de la Caisse refusant la prise en charge à la date du 1er mars 2011, excluait que l'accident soit survenu au temps du travail ; contrairement à ce que soutient l'appelant, la lettre de licenciement est parfaitement motivée et fait référence à des faits précis, matériellement vérifiables ; un seul d'entre eux suffit à caractériser la gravité de la faute commise par un salarié déjà précédemment sanctionné à de nombreuses reprises ; le vendredi 17 septembre 2010, Monsieur X...assurait le transport de l'enfant Dorian Y...du cabinet de Madame B..., orthophoniste, pour le reconduire à son domicile à ORGON ; Monsieur Y...et Madame Z..., parents de l'enfant, écrivaient le 1er décembre 2010 à l'employeur pour se plaindre du comportement de l'ambulancier qui avait laissé l'enfant devant le portail sans se soucier de la présence d'un adulte pour le réceptionner ; également, Monsieur X...assurait le transport de Monsieur Marcel A...le 17 novembre 2010 du CH de l'ISLE SURE LA SORGUE jusqu'à son domicile de CAVAILLON ; postérieurement, Madame A...se plaignait par courrier auprès de l'employeur en signalant que son mari ayant de plus en plus de difficultés à se déplacer, elle ouvre le portail de la propriété pour permettre à l'ambulancier de le laisser à la porte mais que ce jour là, l'ambulancier l'avait laissé en bas du terrain, son mari mettant un quart d'heure pour rejoindre la maison ; il est ainsi établi que Monsieur X...a manqué à ces deux reprises aux devoirs de sa charge en abandonnant deux patients fragilisés sans s'assurer de leur prise en charge et de ce que son comportement n'était pas susceptible de porter atteinte à leur santé ; dans son courrier de contestation du 28 décembre 2010, Monsieur X...sous entendait que ces faits concernaient certainement un autre membre du personnel ; or, les feuilles de planning établissent sans aucun doute qu'il était l'ambulancier dont le comportement fautif était signalé par Monsieur Y...et Madame A...; ce courrier porte encore la manifestation de la présentation fallacieuse que Monsieur X...entend faire de la déclaration d'accident du travail du 16 novembre ; il y affirme contre toute évidence que la mise à pied conservatoire ne lui a été signifiée que le 16 décembre en réponse à sa déclaration d'accident du travail, alors que la lettre du 13 lui a été distribuée le 15 ; c'est encore une fois à juste titre que l'employeur a pu retenir comme grief caractérisé l'existence d'une fausse déclaration d'accident du travail ; le licenciement pour faute grave est fondé, la présence du salarié dans l'entreprise s'avérant désormais impossible et Monsieur X...sera débouté de l'ensemble de ses demandes (arrêt, pages 10 à 12) ;
ALORS, d'une part, QUE la lettre de licenciement doit énoncer un motif précis, objectif et vérifiable ; que la lettre de licenciement reprochait au salarié, sans plus de précision, " des manquements graves aux responsabilités d'un ambulancier et pouvant avoir des conséquences importantes sur l'intégrité physique des patients ", ce qui ne caractérisait pas un motif de licenciement précis, objectif et vérifiable ; qu'en énonçant que la lettre de rupture du 24 décembre 2010 était " parfaitement motivée " et faisait " référence à des faits précis, matériellement vérifiables ", la cour d'appel a violé l'article L 1232-6 du Code du Travail ;
ALORS, d'autre part, QU'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; que pour déclarer le licenciement justifié par une faute grave, la cour d'appel a notamment relevé que, le 17 septembre 2010, M. X...aurait laissé un enfant devant le portail de son domicile sans s'assurer de la présence d'un adulte pour le « réceptionner » ; que l'employeur n'ayant engagé la procédure de licenciement que par une lettre de convocation à un entretien préalable du 13 décembre 2010, la cour d'appel, qui n'a relevé aucune circonstance propre à démontrer que l'employeur n'aurait eu connaissance de ces faits que moins de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire, ne pouvait statuer comme elle l'a fait sans priver sa décision de toute base légale au regard de l'article L 1332-4 du Code du travail ;
ALORS, de troisième part, QUE la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit, sans préjudice de la prescription de l'article L 1332-4 du Code du travail, intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs allégués et dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que M. X...a été convoqué à un entretien préalable au licenciement par lettre du 13 décembre 2010 et que les faits qui ont été retenus à sa charge auraient été commis les 17 septembre et 17 novembre de la même année, soit plusieurs semaines avant l'engagement de la procédure disciplinaire ; que le laps de temps écoulé entre les faits incriminés et la convocation à l'entretien préalable étant de nature à ôter à la faute son caractère de gravité, la cour d'appel ne pouvait déclarer le licenciement justifié par une faute grave sans violer l'article L 1234-1 du Code du travail ;
ALORS, enfin, QUE la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; qu'en se bornant à énoncer que « le licenciement pour faute grave est fondé, la présence du salarié dans l'entreprise s'avérant désormais impossible », sans préciser en quoi les faits ainsi retenus à la charge de l'exposant rendaient impossible son maintien dans l'entreprise, même pour la durée du préavis, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 1234-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-24602
Date de la décision : 23/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 26 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 sep. 2015, pourvoi n°14-24602


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.24602
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