LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première et quatrième branches :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'afin de financer l'acquisition d'un bien immobilier, Mme X... a, le 12 août 1999, souscrit auprès de la société Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes (la caisse) un prêt remboursable in fine et adhéré à un contrat d'assurance-vie auprès de la société Predica, en y investissant la même somme, dont elle disposait déjà ; que les 23 février 2000 et 17 mai 2006, elle a procédé à des arbitrages en transférant les fonds placés sur des supports en actions ; qu'ayant subi une perte lors de la revente, elle a assigné la caisse en responsabilité ;
Attendu que pour condamner la caisse à payer à Mme X... la somme de 14 000 euros, l'arrêt retient qu'elle l'a détournée de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés, la signature de Mme X... sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante ;
Qu'en statuant ainsi, par une affirmation péremptoire et sans préciser les éléments de preuve établissant une telle intervention de la banque dans la souscription des arbitrages litigieux, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel Sud Rhône-Alpes à payer à Mme X... la somme de 14 000 euros à titre de dommages-intérêts et 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 20 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Met hors de cause la société Predica, dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR infirmant le jugement, condamné la Caisse exposante à payer à Gilberte X... les sommes de 14,000 euros à titre de dommages-intérêts, et de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE l'article 1147 du code civil met à la charge des établissements bancaires une obligation générale de renseignement et un devoir de conseil à l'égard de ses clients ; que l'article L533-4 du code monétaire et financier et l'article 326-46 du règlement de l'Autorité des Marchés Financiers disposent que la banque doit s'enquérir de la situation financière de son client de son expérience en matière d'investissement, de ses objectifs en ce qui concerne les services demandés ; que la banque a l'obligation de communiquer .de manière appropriée les informations utiles dans le cadre des négociations avec son client et doit attirer son attention sur les risques :que comportent les opérations envisagées ; que par application de l'article 1134 du code civil, la banque est tenue à l'exécution de son contrat avec loyauté ; que l''article L533-4 du code monétaire et financier précise encore que la banque doit s'efforcer d'éviter les conflits d'intérêts, et lorsque ceux-ci ne peuvent être évités, veiller à ce que les clients soient équitablement traités ; que l'investisseur qualifié est défini à l'article L411-2 du code monétaire et financier comme "une personne disposant des compétences et des moyens pour appréhender les risques inhérents aux opérations sur Instruments financiers" ; que l'article D411-1 du même code précise que l'investisseur qualifié est une personne physique remplissant au moins 2 des 3 critères suivants : - la détention d'un portefeuille d'instruments financiers d'une valeur supérieure à 300.000,00 ¿, - la réalisation d'opérations d'un montant supérieur à 600 par opération sur les instruments financiers, à raison d'au moins 10 par trimestre en moyenne sur les 4 trimestres précédents, - l'occupation pendant au moins un an, dans le secteur financier d'une position professionnelle exigeant une connaissance de l'investissement en instruments financiers ; que la seule qualité d'agent de recouvrement des impôts de catégorie. C ne fait manifestement pas entrer Gilberte X... dans cette catégorie des investisseurs qualifiés ; qu'au regard de l'objectif poursuivi, à savoir l'acquisition d'un bien immobilier en 1999 au prix de 114.337 ¿, investissement locatif destiné à compléter sa retraite, à l'aide d'un apport de 38.112 ¿, pour lequel elle s'est vu proposer deux emprunts au lieu d'un seul sollicité, à savoir : un prêt amortissable de la somme de 76.225 ¿, un prêt correspondant au montant disponible de Gilberte X... soit 38,112 ¿, investi sur des supports boursiers et garanti par une assurance vie intitulée PREDISSIME 9, souscrite auprès de la S.A PREDICA, compagnie d'assurances de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes à échéance au 5 août 2009, prêt in fine qu'elle a souscrit le 12 août 1999, qu'il est tout aussi manifeste que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006 ; que la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription est, à cet égard, insuffisante ; que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes qui a manqué à ses obligations d'information, de conseil et de loyauté, engage sa responsabilité à l'égard de Gilberte X... ; que Gilberte X... a, du fait du défaut d'information et de mise en garde de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes, perdu une chance de ne pas contracter un investissement risqué ; que la perte de chance présente un caractère certain et direct chaque fois qu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable ; qu'en l'espèce, Gilberte X... a perdu la chance d'éviter de contracter un investissement hasardeux sur lequel elle risquait très fortement de perdre son Investissement même si corrélativement cet investissement pouvait se révéler lucratif ; qu'elle a acheté le 23 février 2000 pour 37.178,85 ¿ des supports en actions «ATOUT FUTUR», «EUROS DYN», «UNIVERS ACTION», puis le 17 mai 2006, des actions «ATOUT FRANCE» et «ATOUT EUROPE» par la vente des actions « ATOUT FUTUR» ; qu'elle a donc investi la somme globale de 38.112, 25 ¿ pour une revente finale à 23.750 ¿ ; que la réparation d'une perte d'une chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; qu'exactement informée, Gilberte X... aurait simplement apporté personnellement cette somme à l'acquisition de l'appartement, qu'ainsi, elle a perdu 100% de chance de ne pas contracter ; que la somme de 14.000 ¿ lui sera allouée à titre de dommages-intérêts ;
ALORS D'UNE PART QU'en affirmant que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006, la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante, sans relever les éléments de preuve établissant que la Caisse aurait détourné sa cliente de son objectif immobilier premier en lui présentant comme sure une opération risquée, la cour d'appel qui se contente de l'affirmer a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
ALORS D'AUTRE PART QU'il résulte du bulletin d'adhésion la mention suivante «Je reconnais avoir reçu un double de la présente demande, avec les conditions générales valant notice d'information et comportant un modèle de lettre de renonciation » ; qu'en affirmant que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006, la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante, sans préciser en quoi la signature apposée par Madame X... ne permettait pas de retenir que la Caisse exposante rapportait la preuve d'avoir satisfait à ses obligations envers sa cliente laquelle était parfaitement informée de la nature du contrat conclu et des risques encourus selon l'option qu'elle aurait personnellement choisie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS DE TROISIEME PART QU'il résulte du bulletin d'adhésion la mention suivante «Je reconnais avoir reçu un double de la présente demande, avec les conditions générales valant notice d'information et comportant un modèle de lettre de renonciation », la Caisse exposante faisant valoir que Madame X... qui avait initialement opté pour un support sécurisé offert par le contrat d'assurance-vie avait ultérieurement recherché des gains plus importants en optant pour des supports plus risqués et qu'elle n'était pas intervenue dans ses choix ; qu'en affirmant que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006, la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante, sans préciser en quoi l'opération lors de sa conclusion et en fonction du choix sécurisé alors effectué par Madame X..., permettait de retenir que l'opération était alors risquée la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE, en affirmant que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006, la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante sans relever les éléments de preuve établissant que les arbitrages effectués en 2000 et 2006 avaient été proposés par la Caisse exposante, qui le contestait et soutenait qu'ils étaient le fait de Madame X..., la cour d'appel qui retient que la Caisse exposante a engagé de ce fait sa responsabilité envers sa cliente, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS DE CINQUIEME PART QUE la conclusion d'un contrat d'assurance-vie adossé à un contrat de prêt in fine n'est pas par nature une opération spéculative ; qu'il résulte des documents contractuels que Madame X... avait parfaite connaissance des risques inhérents à chacune des options de support offertes, le contrat précisant qu'il est à capital variable, que les risques de gains ou de perte sont supportés par l'assuré en l'absence de garantie minimum de rémunération, que l'assuré peut à tout moment modifier la répartition de son épargne sur les supports financiers proposés en fonction du risque clairement identifié ; qu'en retenant que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a détourné Gilberte X... de son objectif immobilier premier et a ainsi échoué dans son devoir de conseil en présentant comme sûre une opération en réalité risquée, sans attirer l'attention de sa cliente sur les risques que comportaient les opérations effectuées à l'occasion des arbitrages qu'elle lui a proposés en 2000 et 2006 sans autre information que les bordereaux pré-remplis sur lesquels Gilberte X... a seulement apposé sa signature les 23 février 2000 et 17 mai 2006, la signature du souscripteur sous la mention pré-imprimée du bulletin de souscription étant, à cet égard, insuffisante sans procéder à aucune analyse serait-elle succinte des documents contractuels, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
ALORS DE SIXIEME PART QU'en affirmant que Gilberte X... a, du fait du défaut d'information et de mise en garde de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes, perdu une chance de ne pas contracter un investissement risqué, que la perte de chance présente un caractère certain et direct chaque fois qu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable, qu'en l'espèce, Gilberte X... a perdu la chance d'éviter de contracter un investissement hasardeux sur lequel elle risquait très fortement de perdre son investissement même si corrélativement cet investissement pouvait se révéler lucratif , qu'elle a acheté le 23 février 2000 pour 37.178,85 ¿ des supports en actions «ATOUT FUTUR», «EUROS DYN», « UNIVERS ACTION», puis le 17 mai 2006, des actions «ATOUT FRANCE» et «ATOUT EUROPE» par la vente des actions « ATOUT FUTUR», qu'elle a donc investi la somme globale de 38.112, 25 ¿ pour une revente finale à 23.750 ¿, que la réparation d'une perte d'une chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, puis décidé qu'exactement informée, Gilberte X... aurait simplement apporté personnellement cette somme à l'acquisition de l'appartement, qu'ainsi, elle a perdu 100% de chance de ne pas contracter, sans constater qu'à la date à laquelle le contrat a été conclu et du choix de support qui a été fait, l'investissement était hasardeux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS DE SEPTIEME PART QU'en affirmant que Gilberte X... a, du fait du défaut d'information et de mise en garde de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes, perdu une chance de ne pas contracter un investissement risqué, que la perte de chance présente un caractère certain et direct chaque fois qu'est constatée la disparition d'une éventualité favorable, qu'en l'espèce, Gilberte X... a perdu la chance d'éviter de contracter un investissement hasardeux sur lequel elle risquait très fortement de perdre son investissement même si corrélativement cet investissement pouvait se révéler lucratif , qu'elle a acheté le 23 février 2000 pour 37.178,85 ¿ des supports en actions «ATOUT FUTUR», «EUROS DYN», « UNIVERS ACTION», puis le 17 mai 2006, des actions «ATOUT FRANCE» et «ATOUT EUROPE» par la vente des actions «ATOUT FUTUR», qu'elle a donc investi la somme globale de 38.112, 25 ¿ pour une revente finale à 23.750 ¿, que la réparation d'une perte d'une chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, puis décidé qu'exactement informée, Gilberte X... aurait simplement apporté personnellement cette somme à l'acquisition de l'appartement, qu'ainsi, elle a perdu 100% de chance de ne pas contracter, quand le préjudice né de la perte d'une chance doit être mesuré à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;