LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société PBSN finances a été mise en redressement judiciaire par jugement du 6 octobre 2009 ; qu'à l'issue d'une période d'observation d'une durée de dix-huit mois, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire ;
Attendu que l'arrêt se réfère, dans ses visas, à l'avis du ministère public du 10 septembre 2012 concluant à la confirmation du jugement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résulte ni de ce visa, ni du dossier de procédure que l'avis du ministère public ait été communiqué aux parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 décembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la Selarl FHB, en qualité d'administrateur judiciaire, et Mme X..., en qualité de mandataire judiciaire de la société PBSN finances, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société PBSN finances.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception de nullité de l'acte introductif d'instance soulevée par la société P.B.S.N. Finances, ensemble prononcé sa liquidation judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE l'affaire a été régulièrement communiquée au ministère public ; que les débats se sont déroulés à l'audience publique du 25 octobre 2012 ; que le ministère public a requis le 10 septembre 2012 la confirmation de la décision entreprise suivant rapport de l'administrateur judiciaire du 31 mars 2011 ;
ALORS QUE lorsque le ministère public fait connaître son avis à la juridiction par des conclusions ou réquisitions écrites, celles-ci doivent être communiquées aux parties de façon qu'elles puissent avoir la possibilité d'y répondre ; qu'en l'espèce, il appert des commémoratifs de l'arrêt que le ministère public a requis le 12 septembre 2012 la confirmation de la décision entreprise, ce dont il résulte qu'il a fait connaître son avis par écrit, et non point oralement à l'audience des plaidoiries qui s'est déroulée le 25 octobre 2012 ; qu'en statuant comme elle le fait, sans constater que la société P.B.S.N. Finances avait eu communication des écritures du ministère public, ni qu'elle avait eu la possibilité d'y répondre, la Cour viole les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception de nullité de l'acte introductif d'instance soulevée par la société P.B.S.N. Finances, ensemble prononcé sa liquidation judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE la société P.B.S.N. Finances soutient qu'elle a reçu le 4 janvier 2011 une convocation pour se présenter à l'audience du tribunal de commerce, en chambre du conseil du 5 avril 2011, dont l'objet était « renouvellement exceptionnel de la période d'observation à la demande du procureur de la République » ; qu'elle prétend que le tribunal a violé le principe du contradictoire, qu'aucun élément ne lui avait permis de préparer sa défense en vue d'une liquidation judiciaire sur saisine d'office du tribunal, les articles R. 631-3, R. 631-7, R. 631-8 et R. 631-24 du code de commerce faisant obligation au président du tribunal de commerce de joindre à la convocation les faits de nature à motiver la saisine d'office du tribunal ; qu'elle n'était donc pas à même de penser que le tribunal pouvait envisager la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; qu'elle n'a pas été en mesure de pouvoir préparer sa défense ; que cependant, la procédure ouverte à l'encontre de la SAS P.B.S.N. Finances était une procédure de redressement judiciaire résultant de la déclaration de cessation des paiements de son président, Monsieur Denis Y..., déposée le 2 octobre 2009 ; que le tribunal de commerce avait ouvert, par jugement du 6 octobre 2009, une période d'observation de deux mois aux termes desquels le tribunal se réservait la possibilité de poursuite de l'activité de l'entreprise, s'il lui apparaissait que l'entreprise disposait de capacités financières suffisantes dans les termes de l'article L. 631-15 du code de commerce afin de maintenir les emplois et apurer le passif et renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du 8 décembre 2009 ; qu'à cette date, le tribunal avait prolongé cette période d'observation de 4 mois renvoyant l'examen de la situation de l'entreprise au 30 mars 2010 ; qu'avec l'accord du procureur de la République, le tribunal de commerce avait autorisé une nouvelle période d'observation de 6 mois, renvoyant l'examen de la situation de la SAS P.B.S.N. Finances au 5 octobre 2010 ; qu'au regard des éléments invoqués, le tribunal de commerce avait accepté une prolongation de la période d'observation de 3 mois conduisant au 4 janvier 2011, toutes ces prorogations ayant été prononcées en la présence du président de la SAS P.B.S.N. Finances ; que le 4 janvier 2011, toujours en présence de Monsieur Y..., le procureur de la République de Rouen, au vu des documents produits et des explications fournies et, retenant que différents projets de cession de parcelles de terrain devaient se concrétiser dans les prochaines semaines, avait encore réclamé que la période d'observation soit prolongée de 3 mois, dans le but de présenter un plan de continuation et d'apurement du passif ; que le tribunal avait fait droit à cette demande et autorisé le renouvellement de la période d'observation pour une nouvelle période de 3 mois et avait renvoyé l'affaire à l'audience en chambre du conseil du 5 avril 2011 ; que le jour même, Monsieur Y... avait reçu une convocation à se présenter à cette audience ; qu'à cette audience, la prolongation exceptionnelle prévue par les articles L. 621-4 et R. 621-9 du code de commerce ayant été utilisés, l'administrateur judiciaire constatait que si un plan de redressement lui avait été adressé le 2 avril 2011 par la SAS P.B.S.N. Finances, celui-ci n'avait pu être soumis aux créanciers qui devaient bénéficier d'un délai de 30 jours pour présenter leur avis, demandait dès lors la liquidation judiciaire de l'entreprise ; que le tribunal de commerce constatait lui aussi que la période d'observation était expirée et que la SAS P.B.S.N. Finances n'avait pas présenté utilement un plan de redressement, de sorte que la liquidation judiciaire s'imposait ; qu'il résulte de cette chronologique que contrairement à ce que soutient la SAS P.B.S.N. Finances, le tribunal de commerce ne s'est aucunement saisi d'office d'une procédure de liquidation judiciaire mais a statué à l'extrême limite de la période d'observation, la société en redressement judiciaire ayant bénéficié de tous les délais possibles de prolongation ; que c'est en l'absence de présentation d'un plan de redressement de sa part que le tribunal de commerce a dû prononcer la liquidation judiciaire ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de prononcer la nullité demandée et au contraire, il convient de constater la régularité de la procédure et le bien-fondé du prononcé de la liquidation judiciaire de la SAS P.B.S.N. Finances au 5 avril 2001 ;
ALORS QUE lorsque le tribunal se saisit d'office en vue de convertir le redressement judiciaire en liquidation judiciaire, le président du tribunal fait convoquer le débiteur à la diligence du greffier, par acte d'huissier de justice ; qu'à cette convocation doit être jointe une note par laquelle le président expose les faits de nature à motiver cette saisine d'office, ce à peine de nullité de l'acte introductif d'instance ; que cette règle et cette sanction s'appliquent aussi bien au cours de la période d'observation qu'à l'expiration de celle-ci, y compris lorsque la saisine d'office aux fins de liquidation judiciaire est motivée par l'épuisement des possibilités légales de prolongation de ladite période ; qu'en l'espèce, en l'absence de toute requête émanant de l'une ou l'autre des parties et tendant au prononcé de la liquidation judiciaire à l'expiration de la période d'observation, le prononcé de liquidation judiciaire n'a pu résulter que d'une saisine d'office ; qu'aussi bien, dès lors qu'il était constant et non contesté qu'à la convocation à l'audience du 5 avril 2011 n'avait pas été jointe de note du président exposant les faits de nature à motiver cette saisine d'office, l'acte introductif d'instance devait être annulé comme cela était demandé ; qu'en décidant le contraire, la cour viole les articles R. 631-3 et R. 631-24 du code de commerce, ensemble derechef les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la liquidation judiciaire de la société P.B.S.N. Finances ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le tribunal de commerce a statué à l'extrême limite de la période d'observation, la société en redressement judiciaire ayant bénéficié de tous les délais possibles de prolongation ; que c'est en l'absence de présentation d'un plan de redressement de sa part que le tribunal de commerce a dû prononcer la liquidation judiciaire ; qu'en conséquence, il convient de constater le bien-fondé du prononcé de la liquidation judiciaire de la SAS P.B.S.N. Finances au 5 avril 2001 ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article L. 621-3 du code de commerce, le jugement ouvre une période d'observation d'une durée maximale de 6 mois qui peut être renouvelée une fois par décision motivée à la demande de l'administrateur, du débiteur ou du ministère public ; qu'elle peut en outre être exceptionnellement prolongée à la demande du procureur de la République par décision motivée du tribunal pour une durée fixée par décret en Conseil d'Etat ; que selon l'article R. 621-9 du code de commerce, la période d'observation ouverte par le jugement peut être exceptionnellement prolongée, en application de l'article L. 621-3, pour une durée maximale de 6 mois ; que selon l'article L. 631-9 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30 ; que la procédure de la SAS P.B.S.N. Finances a été ouverte le 6 octobre 2009 ; que la période d'observation a duré 18 mois ; que la SAS P.B.S.N. Finances a transmis à l'administrateur, par fax du 2 avril 2011, un projet de plan de redressement ; que les créanciers n'ont pas pu être informés de ce projet de plan et donné leur accord dans le délai d'un mois qui leur est imparti ; qu'ainsi la SAS P.B.S.N. Finances n'est pas en mesure de présenter un plan de redressement à l'issue des 18 mois de la période d'observation, de sorte que la liquidation judiciaire s'impose ;
ALORS QUE, D'UNE PART, aucune sanction ne s'attache à l'expiration des délais dans lesquels la loi inscrit la période d'observation ; qu'aussi bien, en considérant que la liquidation judiciaire s'imposait du seul fait que le plan de redressement qui avait été élaboré par le débiteur n'avait pu être déposé en temps utile pour être soumis aux créanciers et permettre à ces derniers de se prononcer dans le délai d'un mois avant la date ultime d'expiration de la période d'observation, la cour viole les articles L. 621-3 et R. 621-9 du code de commerce, auxquels renvoient les articles L. 631-7 et R. 631-7, ensemble l'article L. 631-15 (II) du même Code, ensemble l'article 12 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, à quelque stade de la procédure collective qu'elle intervienne, la décision ouvrant ou prononçant la liquidation judiciaire est toujours subordonnée à la condition que le redressement soit manifestement impossible, condition qui ne saurait se confondre avec l'impossibilité d'homologuer le plan de redressement avant l'expiration de la période d'observation et l'épuisement des possibilités légales de prolongation de celle-ci ; que la cour ne constate, ni par motifs propres, ni par motifs adoptés du jugement, que le redressement judiciaire de la société PBSN Finances était manifestement impossible, ce en quoi elle prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 631-15 (II) et L. 641-1 du code de commerce.