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06/12/2012 | FRANCE | N°11/06238

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre de la proximite, 06 décembre 2012, 11/06238


R. G : 11/ 06238

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2012

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL D'INSTANCE DE DIEPPE du 22 Juillet 2011

APPELANTE : DÉFENDERESSE AU DÉFÉRE

S. A. BRED BANQUE POPULAIRE 18 Quai de la Rapée 75604 PARIS CEDEX 12

Représentée par la SCP A...-B..., avoué près la Cour d'Appel de ROUEN Représentée et assistée de Me Benoît B..., avocat au barreau de ROUEN de la SCP DE BEZENAC ET ASSOCIES,

INTIMÉS : DEMANDEURS AU DEFERE

Monsieur Daniel Y... ......76440 SOMMERY



Représenté et assisté de Me Eliette VERARD, avocat au barreau de DIEPPE substituant la SCP MORIN et BARBIER

Madame Fr...

R. G : 11/ 06238

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE DE LA PROXIMITE
ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2012

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL D'INSTANCE DE DIEPPE du 22 Juillet 2011

APPELANTE : DÉFENDERESSE AU DÉFÉRE

S. A. BRED BANQUE POPULAIRE 18 Quai de la Rapée 75604 PARIS CEDEX 12

Représentée par la SCP A...-B..., avoué près la Cour d'Appel de ROUEN Représentée et assistée de Me Benoît B..., avocat au barreau de ROUEN de la SCP DE BEZENAC ET ASSOCIES,

INTIMÉS : DEMANDEURS AU DEFERE

Monsieur Daniel Y... ......76440 SOMMERY

Représenté et assisté de Me Eliette VERARD, avocat au barreau de DIEPPE substituant la SCP MORIN et BARBIER

Madame Françoise Y... ......76440 SOMMERY

Représentée et assistée de Me Eliette VERARD, avocat au barreau de DIEPPE substituant la SCP MORIN et BARBIER
COMPOSITION DE LA COUR :
Lors des débats et du délibéré :
Madame APELLE, Présidente, a été entendue en son rapport oral de la procédure avant plaidoiries Madame AUBLIN-MICHEL, conseiller Madame LABAYE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :
Mme LOUE-NAZE, Greffier
DÉBATS :
A l'audience publique du 29 Octobre 2012, où l'affaire a été mise en délibéré au 06 Décembre 2012

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement le 06 Décembre 2012, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Signé par Madame APELLE, Présidente et par Mme NOEL-DAZY, Greffier présent à cette audience.

*

* *

La société anonyme Bred Banque populaire est appelante du jugement rendu le 22 juillet 2011 par le tribunal d'instance de Dieppe, qui a : prononcé la déchéance du droit aux intérêts du contrat conclu entre M. Daniel Y... et Mme Françoise Z...épouse Y..., d'une part, la Bred Banque populaire, d'autre part le 26 février 2008 ; en conséquence, condamné M. Daniel Y... et Mme Françoise Y..., solidairement, à payer à la Bred Banque populaire, au titre du solde du prêt personnel du 26 février 2008, la somme de 12. 786, 80 € avec les intérêts au taux légal à compter du 11 janvier 2011 ; prononcé la déchéance du droit aux intérêts depuis l'origine du contrat conclu entre M. et Mme Y..., d'une part, la Bred Banque populaire, d'autre part le 21 février 2007 ; constaté que la Bred Banque populaire ne justifie pas du montant de sa créance ; en conséquence, débouté la Bred Banque populaire de sa demande en paiement du solde correspondant au contrat conclu le 21 février 2007 ; prononcé la déchéance du droit aux intérêts s'agissant du compte courant de M. et Mme Y... ouvert à la Bred Banque populaire ; constaté que la Bred Banque populaire ne justifie pas du montant de sa créance ; en conséquence, débouté la Bred Banque populaire de sa demande en paiement du compte courant, condamné M. et Mme Y..., solidairement, à payer à la Caisse d'épargne de Normandie la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; ordonné l'exécution provisoire de la décision ; condamné M. et Mme Y..., solidairement, aux dépens.

• • •
En outre, M. Daniel Y... et Mme Françoise Z...épouse Y... ont déféré à la Cour l'ordonnance rendue le 5 juillet 2012 par le magistrat de la mise en état, qui a les a déclarés irrecevables en leurs exceptions de caducité de la déclaration d'appel de la société Bred Banque populaire et de nullité de l'assignation devant la cour d'appel, a déclaré irrecevables leurs conclusions d'appel et les a condamnés aux dépens de l'incident.
• • •
Les faits, données contractuelles et éléments procéduraux suivants sont constants : M. Daniel Y... et Mme Françoise Z...épouse Y... étaient titulaires d'un compte courant no 0290006929 ouvert dans les livres de la société anonyme Bred Banque populaire (ci-après, la Bred). Le 21 février 2007, la Bred leur a consenti une réserve « Champ libre » d'un montant de 1. 500 €. Suivant offre préalable sous seings privés du 23 février 2008, acceptée le 26 suivant, la Bred leur a consenti un prêt personnel de trésorerie no 9150217 de 21. 000 € en principal, au taux effectif global de 6, 8835 % l'an, remboursable en 60 mensualités. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 3 décembre 2010, la Bred, invoquant divers impayés, a mis en demeure M. et Mme Y... de lui rembourser les sommes dues au titre de la réserve, du prêt et du solde débiteur du compte courant.

Suivant acte d'huissier de justice du 9 juin 2011, la Bred a fait assigner en paiement M. et Mme Y... devant le tribunal d'instance de Dieppe. Cette procédure a abouti au jugement entrepris.

Par acte remis au greffe de la Cour le 23 décembre 2011, la S. C. P. Véronique A...et Benoît B..., titulaire d'un office d'avoué près la cour d'appel de Rouen, a interjeté appel du jugement pour le compte de la Bred. En application de l'article 902, alinéa 1er, du Code de procédure civile, le greffe de la cour d'appel a, le 26 décembre 2011, envoyé à chacun des intimés, à l'adresse figurant dans la déclaration d'appel (..., Hameau ..., 76890 Saint-Malou-de-Folleville), une lettre les informant de l'appel interjeté avec indication de l'obligation de constituer avocat. Ces lettres ayant été retournées par la poste avec la mention « destinataire non identifiable », le greffe a, le 30 décembre 2011, en application du deuxième alinéa de l'article 902 susvisé, avisé l'avoué de l'appelant du retour au greffe de la lettre adressée à chacun des intimés et l'a invité a procéder par voie de signification, en visant l'article 902 du Code de procédure civile. Le 31 décembre 2011, la S. C. P. A...et B... a, en raison de sa dissolution en conséquence de la loi du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel, cessé de représenter la Bred devant la cour d'appel.

Par acte reçu au greffe le 11 janvier 2012, la S. C. P. de Bèzenac, Lamy, Mahiu et Alexandre, avocats au barreau de Rouen, a déclaré se constituer pour la Bred.
Par acte d'huissier de justice du 22 mars 2012, la Bred a fait remettre à M. et Mme Y... copies de la déclaration d'appel (l'acte de remise portant la mention erronée de 26 décembre 2011 alors que la déclaration est du 23), de la constitution d'avocat du 11 janvier 2012, de l'avis du greffe du 30 décembre 2011 et des conclusions d'appelant du 15 janvier 2012. Cet acte reproduit les dispositions de l'article 909 du Code de procédure civile. M. et Mme Y... ont constitué avocat par acte reçu au greffe le 23 avril 2012. Ils ont déposé leurs conclusions d'intimés et communiqué leurs pièces le 25 mai 2012.

Saisi par conclusions de la Bred, le magistrat de la mise en état a, par ordonnance du 5 juillet 2012, déclaré M. et Mme Y... irrecevables en leurs exceptions de caducité de la déclaration d'appel de la Bred et de nullité de l'assignation devant la cour d'appel, et irrecevables leurs conclusions d'appel.
Par requête enregistrée au greffe le 18 juillet 2012, M. et Mme Y... ont déféré à la Cour cette ordonnance.
• • •

Aux termes de ses écritures récapitulatives du 26 octobre 2012, la Bred demande à la Cour : de débouter M. et Mme Y... de leur déféré ; de les débouter de leur demande en caducité de l'acte d'appel ; de déclarer irrecevables leurs écritures signifiées le 25 mai 2012 ; de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 5 juillet 2012 par le magistrat de la mise en état ; de déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté à l'encontre du jugement rendu le 22 juillet 2011 par le tribunal d'instance de Dieppe ; statuant dans les limites de l'appel, d'infirmer la décision en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts depuis l'origine du contrat ; statuant de nouveau, de constater que les articles L. 311-12 et suivants du Code de la consommation ont été respectés ; pour le surplus, de confirmer le jugement entrepris ; y ajoutant, de condamner M. et Mme Y..., solidairement, à lui payer la somme de 5. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ; de les condamner aux dépens.

Au soutien de ses demandes, le Bred fait valoir les arguments suivants : L'entrée en vigueur de la loi no 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel et la dissolution de la S. C. P. A...-B..., titulaire d'une office d'avoué près la cour d'appel de Rouen, qui s'était constituée pour son compte, ont déterminé la suspension de l'instance au 31 décembre 2011. La décision de jurisprudence invoquée par M. et Mme Y... (Rouen, 19 février 2012) est étrangère à la question présentement posée, puisqu'elle concernait un avoué exerçant en nom individuel, ayant donc la qualité de représentant de son client, devenu avocat, alors qu'il s'agit en l'espèce d'un société civile professionnelle titulaire d'un office et que la Bred n'a jamais eu pour avoué Me B..., devenu ultérieurement avocat, mais uniquement la S. C. P. A...et B.... L'instance interrompue le 31 décembre 2011 a été reprise le 22 mars 2012 au moyen de l'acte délivré à la requête de la Bred à M. et Mme Y.... Les conclusions de la Bred ayant été remises par le même acte, les conclusions signifiées par M. et Mme Y... le 25 mai 2012 sont irrecevables pour avoir été notifiées hors du délai de deux mois de l'article 909 du Code de procédure civile. Le fait que ces conclusions ne comportaient pas en annexe les pièces invoquées est sans incidence, les dispositions de l'article 906 du Code de procédure civile ne concernant que les notifications entre avocats constitués. S'agissant de la demande de nullité de l'assignation du 22 mars 2012, elle est irrecevable, dès lors que M. et Mme Y... ne l'ont soulevée qu'après avoir conclu au fond. À titre très subsidiaire, la Bred fait observer que l'assignation délivrée à M. et Mme Y... est totalement régulière en la forme. La Bred rappelle que le magistrat de la mise en état ne dispose d'aucun pouvoir d'appréciation quant à l'irrecevabilité de l'article 909 du Code de procédure civile. Au fond, la Bred rappelle préliminairement que son appel est limité aux dispositions du jugement relatives au prêt no 9150217.

Elle souligne ensuite que le tribunal l'a déboutée de sa demande relative aux intérêts au motif que la notice d'assurance n'était pas jointe à l'offre de prêt, alors pourtant que ce document faisait état d'une proposition d'assurance. L'article L. 311-2 du Code de la consommation dispose que la notice d'assurance doit être remise au candidat emprunteur lors de l'établissement de l'offre. La Bred verse aux débats la demande d'admission signée de M. Y..., qui reconnaît avoir reçu la notice.
• • •
Par conclusions récapitulatives du 29 octobre 2012, M. et Mme Y... demandent à la Cour : sur le déféré, à titre principal, d'infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 5 juillet 2012, de constater l'absence d'interruption de l'instance et, en conséquence, la caducité de l'appel de la Bred, qui n'a pas été signifié aux intimés dans le mois de l'avis du greffe ; à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le Cour retiendrait que l'instance a été interrompue au 31 décembre 2011, de dire que l'instance n'a pas été régulièrement reprise et qu'en conséquence, aucun délai n'a commencé à courir ; de constater l'absence de conclusions de reprise d'instance et, en conséquence, d'infirmer l'ordonnance du magistrat de la mise en état qui a prononcé l'irrecevabilité de leurs conclusions et de déclarer ces conclusions recevables ; en tout état, de dire qu'en l'absence de signification des pièces énoncées dans les conclusions de l'appelant simultanément au dépôt desdites conclusions, le délai de l'article 909 du Code de procédure civile n'a pas commencé à courir et que leurs conclusions sont recevables ; de constater que le délai de deux mois n'est pas un délai de forclusion ; de constater la nullité de l'acte de signification et, en tout état, son inopposabilité à leur égard ; de constater que l'acte de signification de la déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la Bred n'ont pas date certaine, de sorte qu'aucun délai n'a commencé à courir à leur égard pour signifier leurs conclusions ; en tout état, de constater qu'ils ont conclu dans les deux mois de la date où ils ont eu connaissance de la procédure d'appel, de la déclaration d'appel et des conclusions de la Bred, soit le 26 mars 2012 ; en tout état, de constater que le dépôt de leurs écritures ne fait pas grief à la Bred et, en conséquence, de les déclarer recevables ; de constater que l'irrecevabilité de leurs écritures entraînerait pour eux des conséquences disproportionnées, portant atteinte à leur droit effectif au juge et violant les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; au fond, sur la demande en paiement de la Bred, à titre principal, de débouter la Bred de toutes ses demandes ; d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer à la Bred la somme de 12. 786, 80 €, outre celle de 500 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ; à titre subsidiaire, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts de la Bred ; de leur accorder les plus larges délais de paiement pour s'acquitter de leur dette ; en tout état, de condamner la Bred à leur payer la somme de 2. 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ; de la condamner aux dépens.

S'agissant de la procédure, M. et Mme Y... font d'abord valoir que l'instance n'a jamais été interrompue, l'un des avoués qui représentaient la Bred au 31 décembre 2011 étant devenu associé de la société civile professionnelle d'avocats qui s'est constituée pour cette banque à la suite de la disparition de la fonction d'avoué, de sorte que l'appelant n'a jamais cessé d'être représenté. Ils invoquent à l'appui de cet argument un arrêt rendu par cette Cour le 19 février 2012 concernant la poursuite de la représentation par un avoué devenu avocat. Ils ajoutent qu'aucune ordonnance constatant l'interruption de l'instance n'est intervenue. L'instance n'ayant pas été interrompue, l'appel est caduc, puisque la déclaration d'appel, souscrite le 23 décembre 2011, n'a été notifiée que le 22 mars 2012, donc après expiration du délai d'un mois de la notification du greffe, ainsi que prévu à l'article 902, alinéa 1er, du Code de procédure civile. À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour retiendrait que l'instance a été interrompue au 31 décembre 2011, il n'en demeurerait pas moins qu'elle n'a pas été régulièrement reprise, faute pour la Bred d'avoir sollicité expressément cette reprise conformément à l'article 372 du Code de procédure civile. Il s'ensuit que tous les actes accomplis par la Bred sont non nuls et non avenus et qu'ils n'ont pu faire courir à l'encontre des intimés un délai pour conclure. Il y a donc lieu de constater l'interruption de l'instance et, en conséquence, la caducité de la déclaration d'appel de la Bred, qui n'a pas été signifiée aux intimés dans le mois de l'avis du greffe. À titre plus subsidiaire, M. et Mme Y... soulèvent que les conclusions signifiées par la Bred le 22 mars 2012, ne comportant pas en annexe les pièces invoquées, en méconnaissance des dispositions de l'article 906 du Code de procédure civile, n'ont pu faire courir le délai de l'article 909 du même code, de sorte que leurs écritures sont recevables. Non seulement la Bred n'a pas communiqué ses pièces simultanément à la signification, mais encore ne les a pas communiquées avant l'expiration du délai de deux mois imparti à l'intimé pour conclure par l'article 909 du Code de procédure civile : contraindre l'intimé à conclure sans connaître les pièces de l'appelant à peine d'irrecevabilité de ses écritures reviendrait à violer non seulement le principe du contradictoire, mais encore le droit au procès équitable garanti par le § 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. À titre plus subsidiaire encore, M. et Mme Y... exposent que l'acte de signification de la déclaration d'appel et les conclusions d'appel de la Bred n'ont pas date certaine, de sorte qu'aucun délai n'a commencé à courir envers eux pour signifier leurs conclusions. En tout état, M. et Mme Y... ont conclu dans les deux mois de la date, soit le 26 mars 2012, où ils ont eu connaissance de la déclaration d'appel et des conclusions de la Bred. De toute manière, il y a lieu de constater que le dépôt de leurs écritures ne fait pas grief à la Bred, de sorte qu'elles doivent être déclarées recevables. Enfin, l'irrecevabilité de leurs écritures entraînerait pour eux des conséquences disproportionnées, portant atteinte au droit effectif au juge et violant les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Au fond, sur la demande en payement de la Bred, M. et Mme Y... font valoir que l'offre de crédit de la Bred n'est pas conforme aux dispositions de l'article L. 311-10 du Code de la consommation, en ce qu'elle ne rappelle pas les dispositions des articles L. 311-15 à L. 311-17 et L. 311-32 et, s'il y a lieu, L. 311-20 à L. 311-31 et L. 311-13 du même code. La Bred a donc manqué à son obligation de conseil et d'information, ce qui doit déterminer l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. et Mme Y... à payer à la Bred la somme de 12. 786, 80 €. À titre subsidiaire, l'absence de remise aux emprunteur de la notice d'assurance prévue à l'article L. 311-12 du Code de la consommation doit déterminer la déchéance du droit aux intérêts par application de l'article L. 311-33 du même code, ainsi que l'a retenu le premier juge.

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La Cour se réfère aux écritures récapitulatives des parties pour le détail plus ample de leurs arguments.

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L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 octobre 2012.

SUR CE,

Considérant que la Cour a ordonné la jonction de la procédure de déféré et du fond, le sort du déféré à l'encontre de l'ordonnance du magistrat de la mise en état conditionnant celui de l'instance au fond ;

1.- Sur la demande de M. et Mme Y... tendant à voir déclarer nulle la déclaration d'appel

Considérant qu'en application de l'article 112 du Code de procédure civile, la nullité d'un acte de procédure ne peut être soulevée par celui qui, avant de l'invoquer, a fait valoir des défenses au fond ;
Or considérant que, en date du 25 mai 2012, soit avant d'exciper de la nullité de l'assignation devant la cour d'appel délivrée le 22 mars 2012, M. et Mme Y... ont déposé des écritures contenant exclusivement des demandes au fond ; Qu'il s'ensuit que la demande de la nullité de la déclaration d'appel est irrecevable et que l'ordonnance déférée doit être confirmée sur ce point ;

2.- Sur la demande de M. et Mme Y... tendant à voir déclarer caduque la déclaration d'appel de la Bred :
Considérant que l'article 902 du Code de procédure civile dispose que, en cas de retour au greffe de la lettre de notification de la déclaration d'appel à l'intimé, l'appelant doit lui signifier cette déclaration dans le mois de l'avis adressé par le greffe, à peine de caducité de l'appel ;

Considérant que, s'agissant de la caducité d'un recours et non de la nullité d'un acte, les dispositions de l'article 112 susvisé ne sont pas applicables, de sorte que M. et Mme Y... sont recevables à soulever la caducité de la déclaration d'appel après avoir formulé des défenses au fond ;

Considérant qu'il est démontré que l'adresse des intimés figurant dans la déclaration d'appel souscrite par l'avoué de la Bred le 23 décembre 2011 étant erronée, la lettre de notification adressée par le greffe à chacun des intimés a été retournée par la poste avec la mention « anomalie d'adresse » ; Que, par avis en date du 30 décembre 2011, le greffe de la Cour a notifié à la S. C. P. Véronique A...et Benoît B..., titulaire de l'office d'avoué qui, à cette date, représentait légalement la Bred-pour n'avoir cessé sa fonction de mandataire que le 31 décembre 2011, conformément à la loi no 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d'appel et ainsi qu'il résulte de l'extrait K bis au 23 janvier 2012 de la société civile professionnelle-le retour de la lettre adressée à chacun des intimés et l'a invitée à procéder par voie de signification conformément à l'article 902 du Code de procédure civile, donc dans le mois de l'avis ;

Considérant que la Bred était représentée devant la cour d'appel par la seule société civile professionnelle titulaire de l'office d'avoué, ainsi qu'il résulte des mentions de la déclaration d'appel (« La SCP... déclare se constituer ») ; Qu'en outre, il est constant en droit que, lorsque la représentation en justice est assurée par une société professionnelle titulaire d'un office (jusqu'au 31 décembre 2011, les avoués près les cours d'appel et, aujourd'hui, les avocats aux conseils), seule la société peut représenter une partie, à l'exclusion d'un associé, qui n'a pas individuellement pouvoir de représentation ; que la dissolution de la S. C. P. A...et B..., titulaire de l'office d'avoué représentant l'appelant, dans un litige où la représentation par avoué était obligatoire, a déterminé l'interruption de l'instance conformément à l'article 369 du Code de procédure civile, la circonstance que Me B... soit ensuite devenu associé de la S. C. P. de Bezenac, Lamy, Mahiu et Alexandre qui s'est constituée le 11 janvier 2012 pour la Bred étant inopérante, puisque Me B... n'a jamais eu, en tant qu'associé de la société civile titulaire de l'office d'avoué, qualité de représentant de la Bred devant la cour d'appel ; Qu'il y a donc eu interruption de l'instance d'appel le 31 décembre 2011 ;

Considérant que l'instance est reprise dès lors qu'une partie accomplit un acte régulier manifestant sa volonté non équivoque en ce sens, aucun texte légal n'exigeant que cet acte soit immédiatement notifié à la partie adverse ; que l'article 373 du Code de procédure civile n'impose nullement que la reprise d'instance s'effectue exclusivement par voie de conclusions ou d'assignation, mais précise seulement que la reprise d'instance peut, et non doit, être effectuée par conclusions (pour éviter au conseil la formalité et le coût d'une constitution) ou, comme il est nécessaire faute de constitution de la partie adverse, par la constitution d'un nouveau représentant sous une autre forme régulière valant également reprise d'instance ;
Considérant que l'acte de constitution d'avocat de la S. C. P. de Bèzenac, Lamy, Mahiu et Alexandre, déposé au greffe de cette Cour le 11 janvier 2012, manifestant la volonté non équivoque de représenter la Bred devant la cour d'appel, a déterminé la reprise de l'instance à cette date ; que, bien plus, cette constitution a été suivie du dépôt, le 15 janvier 2012, de « conclusions déposées à l'appui dudit appel », qui sont visées en page 2 de la signification du 22 mars 2012 ; que des conclusions d'appelant, qui tendent nécessairement à l'infirmation ou à la réformation de la décision entreprise, manifestent nécessairement une volonté non équivoque de reprendre l'instance d'appel ;
Considérant que le délai d'un mois de l'article 902 susvisé était donc dépassé au 22 mars 2012, date de la notification à M. et Mme Y... des conclusions de la Bred ;
Considérant que, dès lors que l'appel est caduc, les conclusions notifiées ultérieurement par l'appelant sont irrecevables ; que des conclusions irrecevables ne peuvent faire courir un délai, d'où il suit que les conclusions de la Bred notifiées le 22 mars 2012 n'ont pu faire courir le délai de deux mois de l'article 909 du Code de procédure civile à l'encontre des intimés et que les conclusions de ceux-ci du 25 mai 2012, qui ont soulevé la caducité de l'appel, sont recevables ;
Considérant qu'en l'état de ces énonciations, tous autres arguments des parties étant surabondants ou inopérants, il échet, infirmant l'ordonnance entreprise, de déclarer caduc l'appel interjeté par la Bred ;

3.- Sur l'appel incident de M. et Mme Y... :

Considérant qu'en application de l'article 548 du Code de procédure civile, l'appel incident formé contre une décision attaquée par un appel principal irrégulier vaut appel principal s'il a été formé dans le délai d'appel courant de la date où la partie intéressée a reçu notification du jugement ou si cette décision ne lui pas été notifié ;
Considérant que la signification faite le 22 mars 2012 à la requête de la Bred à M. et Mme Y... ne comportait pas copie du jugement et qu'au demeurant, elle ne se présentait pas comme sa notification ; qu'ainsi, le 25 mai 2012, M. et Mme Y... ont formé un appel régulier qui, en raison de la caducité de l'appel de la Bred, vaut appel principal ;
Considérant que, par conclusions récapitulatives M. et Mme Y... ont sollicité l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer à la Bred le solde du principal restant dû, soit 12. 796, 80 €, au titre du prêt du prêt personnel du 26 février 2008 avec les intérêts légaux à compter du 11 janvier 2011, au motif du défaut de respect des dispositions de l'article L. 311-10 ancien du Code de la consommation, applicable au prêt litigieux ;
Considérant qu'aux termes de l'article L 311-10 ancien du Code de la consommation, " l'offre préalable : 1o mentionne l'identité des parties et le cas échéant des cautions, 2o précise le montant du crédit et éventuellement ses fractions disponibles, la nature, l'objet et les modalités du contrat, y compris, le cas échéant, les conditions d'une assurance ainsi que le coût total ventilé du crédit et, s'il y a lieu, son taux effectif global ainsi que le total des perceptions forfaitaires demandées en sus des intérêts en ventilant celle correspondant aux frais de dossiers et celles correspondant aux frais par échéance, 3o rappelle les dispositions des articles L 311-15 à L 311-17 et L 311-32 et, s'il y a lieu des articles L 311-20 à L 311-31, L 313-13 et reproduit celles de l'article L 311-37, 4o indique le cas échéant le bien ou la prestation de services financé " ;

Or, considérant que l'offre faite aux époux Y... ne reprend nullement les mentions des articles L 311-17 et L 311-32 ; que l'article L 311-17 précisant que, tant que l'opération n'est pas définitivement conclue, aucun paiement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, ne peut être fait par le prêteur à l'emprunteur ou pour le compte de celui-ci, ni par l'emprunteur au prêteur et que, si une autorisation du prélèvement sur son compte bancaire est signée par l'emprunteur, sa validité et sa prise d'effet sont subordonnés à celles du contrat de crédit ; que l'article L 311-32 rappelle qu'aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L 311-29 à L 311-31 ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévus par ces articles ; Considérant qu'aux termes de l'ancien article L. 311-33 du Code de la Consommation : " Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 311-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû " ; Que la seule sanction applicable est donc la déchéance du droit aux intérêts contractuels, l'arrêt produit par les époux Y... ne concernant pas un contentieux soumis au Code de la consommation ; Que par voie de conséquence, le jugement entrepris qui a condamné les époux Y... au capital de la somme dû avec intérêts au taux légal au titre de ce prêt ne peut qu'être confirmé par substitution de motifs ;

Considérant que les époux Y... sollicitent des délais de paiement ; Qu'ils ne produisent toutefois aucune pièce financière à l'appui de leurs demandes ;

Qu'ils ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être déboutés de ce chef de demande, la Cour ne pouvant, de par leur carence, étudier leurs possibilités de règlement de la dette dans le délai légal de deux ans ;
4.- Sur les demandes des parties sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile
Considérant qu'en raison de la nature et des circonstances de l'affaire, il est conforme à l'équité de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel ; que M. et Mme Y... et la Bred seront déboutés de leurs demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; 5.- Sur les dépens

Considérant qu'eu égard à la décision prise, il convient de laisser à la charge de chacune des parties en ce qui concerne les dépens exposés en cause d'appel et ce conformément aux dispositions de l'article 696 du Code civil, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé sur la condamnation des époux Y... aux dépens de première instance.
PAR CES MOTIFS, La Cour,

Par arrêt public et contradictoire,
Confirme l'ordonnance rendue par le magistrat de la mise en état le 5 juillet 2012 en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de M. Daniel Y... et de Mme Françoise Z...épouse Y... en nullité de la déclaration d'appel.
Infirmant pour le surplus l'ordonnance déférée,
Déclare caduc l'appel interjeté par la société Bred Banque populaire à l'encontre du jugement rendu le 22 juillet 2011 par le tribunal d'instance de Dieppe, et ses conclusions postérieures irrecevables ;
Sur le fond,
Déclare recevable l'appel incident interjeté par M. Daniel Y... et Mme Françoise Z...épouse Y....
Confirme sur le fond, par substitution de motif, le jugement entrepris sur les dispositions concernant le prêt personnel du 26 février 2008 et en ce qu'il a condamné M. Daniel Y... et Mme Françoise Z...épouse Y.... aux dépens de première instance.
Y ajoutant,
Déboute M. Daniel Y... et de Mme Françoise Z...épouse Y... de leur demande tendant à se voir reconnaître des délais de paiement.
Déboute les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Laisse à la charge de chacune des parties les dépens qu'elles ont engagés (en ce compris, ceux engagés dans le cadre de l'incident devant la Cour), en cause d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre de la proximite
Numéro d'arrêt : 11/06238
Date de la décision : 06/12/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2012-12-06;11.06238 ?
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