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17/09/2015 | FRANCE | N°13-28430

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 septembre 2015, 13-28430


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé à compter du 3 janvier 2005 par la société Directique (la société) en qualité d'enquêteur, promu au poste d'opérateur de mesures à compter du 9 octobre 2006 ; que le 20 juillet 2007, il a été licencié pour faute grave pour abandon de poste ; que contestant son licenciement et réclamant notamment un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen

:
Vu l'article L. 212-5 II du code du travail alors applicable ;
Attendu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X... a été engagé à compter du 3 janvier 2005 par la société Directique (la société) en qualité d'enquêteur, promu au poste d'opérateur de mesures à compter du 9 octobre 2006 ; que le 20 juillet 2007, il a été licencié pour faute grave pour abandon de poste ; que contestant son licenciement et réclamant notamment un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 212-5 II du code du travail alors applicable ;
Attendu que dans les entreprises non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires ainsi que de leur majoration par un repos compensateur de remplacement est subordonné, en l'absence de convention ou d'accord collectif étendu à l'absence d'opposition, lorsqu'ils existent, du comité d'entreprise ou des délégués du personnels ;
Attendu que pour condamner la société au paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt énonce qu'en I'absence de justification d'une convention ou d'un accord collectif étendu ou d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement licite au regard de l'article L. 2I2-5 II du code du travail dans sa rédaction en vigueur au cours de la période d'emploi du salarié, I'octroi de jours de repos compensateurs aux dates mentionnées sur les bulletins de paie de juillet 2005 à juillet 2007 et le versement en avril 2005 d'une « indemnité heures supplémentaires » manifestement illicite en toute hypothèse, n'a pu permettre à la société de s'acquitter valablement du paiement de I'intégralité des heures supplémentaires de travail accomplies par le salarié ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'employeur faisait valoir que le recours au repos compensateur de remplacement était licite au regard de l'article L. 212-5 II du code du travail, faute d'opposition des instances représentatives du personnel, la cour d'appel, qui n'a pas vérifié si l'entreprise était assujettie à l'obligation annuelle de négocier, a privé sa décision de base légale ;
Et attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence, en vertu de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif critiqué par le second moyen relatif à l'indemnité de travail dissimulé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Directique à payer à M. X... les sommes de 3 123,71 euros à titre de rappel pour heures supplémentaires, celle de 312,37 euros à titre de congés payés afférents et celle de 9 300 euros au titre de l'indemnité de travail dissimulé, l'arrêt rendu le 31 octobre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils, pour la société Directique.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Directique à payer à Monsieur Hakim X... les sommes de 3.123,71 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de 312, 37 euros au titre des payés congés afférents et dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation en conciliation valant mise en demeure ;
AUX MOTIFS QUE, sur le paiement des heures supplémentaires, l'article L.3171-4 du code du travail dispose : « En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utile. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable » ; de ces dispositions, il résulte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que dès lors que le salarié présente des éléments de nature à étayer sa demande, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires qu'il a effectivement réalisés ; soutenant avoir accompli de nombreuses heures supplémentaires qui ne sont pas mentionnées sur ses bulletins de paie, Monsieur Hakim X... en sollicite le règlement pour la somme de 3.123,71 euros, outre la somme de 312,37 euros au titre des congés payés afférents ; à l'appui de sa demande, le salarié produit ses bulletins de paie et présente un tableau récapitulatif de ses heures de travail semaine par semaine, établi à partir de relevés d'heures hebdomadaires qu'il verse aux débats ; ces documents de l'entreprise qu'il devait remplir et signer à la demande de l'employeur précisent les horaires de travail observés chaque jour de la semaine ; pour s'opposer à la demande de paiement d'heures supplémentaires présentées par son salarié, la société Directique qui n'en conteste pas la réalité déclare que celles-ci lui ont été payées sous forme de repos compensateur de remplacement effectivement pris (63 jours en 2 ans et demi) qui représentent une contre-valeur bien supérieur à sa demande par ailleurs prescrite ; elle explique qu'à partir du mois de juillet 2005, elle a tenu mensuellement un compteur des jours de repos compensateurs sur les bulletins de salaire (qui mentionnent en rubrique « commentaire » les dates de « récupération ») et que les heures supplémentaires précédemment accomplies par Monsieur Hakim X... au cours du premier trimestre 2005 ont « vraisemblablement été régularisées » sur le bulletin de paie du mois d'avril 2005 qui mentionne une « indemnité heures supplémentaires » de 1.246,52 euros ; cependant Monsieur X... a contesté son solde de tout compte par lettre en date du 16 août 2007 et réitéré sa réclamation portant notamment sur le paiement d'heures supplémentaires par lettre en date du 3 octobre 2007, puis saisi la juridiction prud'homale le 13 novembre 2008, de sorte que sa demande de rappel de salaire sur la période d'emploi du 3 janvier 2005 au 20 juillet 2007 n'est pas prescrite ; or en l'absence de justification d'une convention ou d'un accord collectif étendu ou d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement licite au regard de l'article L.212-5 § II du code du travail dans sa rédaction (issue des lois n° 2000-37 du 19 janvier 2000 et n° 2003-47 du 17 janvier 2003) en vigueur au cours de la période d'emploi du salarié, l'octroi de jours de repos compensateurs aux dates mentionnées sur les bulletins de paie de juillet 2005 à juillet 2007 et le versement en avril 2005 d'une « indemnité heures supplémentaires » manifestement illicite en toute hypothèse, n'a pu permettre à la société Directique de s'acquitter valablement du paiement de l'intégralité des heures supplémentaires de travail accomplies par Monsieur Hakim X... ; dans ces conditions, il y a lieu de retenir le décompte d'heures supplémentaires présenté par le salarié et de faire droit à sa demande de règlement de ces heures pour la somme de 3.123, 71 euros à laquelle s'ajoute la somme de 312,27 euros au titre des congés payés afférents ;
ALORS D'UNE PART QU'une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que de leurs majorations par un repos compensateur équivalent ; que, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, ce remplacement est subordonné, en l'absence de convention ou d'accord collectif de travail étendu, à l'absence d'opposition, lorsqu'ils existent, du comité d'entreprise ou des délégués du personnel; qu'en affirmant qu'en l'absence de justification d'une convention ou d'un accord collectif étendu ou d'une convention ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement licite au regard de l'article L.212-5 II du code du travail dans sa rédaction en vigueur au cours de la période d'emploi du salarié, l'octroi de jours de repos compensateurs n'avaient pu permettre à la société Directique de s'acquitter valablement du paiement de l'intégralité des heures de travail accomplies par Monsieur X... cependant qu'en l'absence de convention ou d'accord collectif étendu, le repos compensateur de remplacement peut être mis en place unilatéralement par l'employeur sous réserve de l'absence d'opposition du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, la cour d'appel a violé l'article L.212-5 II du code de travail, dans sa rédaction alors applicable ;
ALORS D'AUTRE PART QU'une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que de leurs majorations par un repos compensateur équivalent ; que, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, ce remplacement est subordonné, en l'absence de convention ou d'accord collectif de travail étendu, à l'absence d'opposition, lorsqu'ils existent, du comité d'entreprise ou des délégués du personnel ; que la société Directique faisait valoir que le repos compensateur mis en place au sein de la société était licite au regard de l'article L.212-5 II du code du travail applicable à l'époque, à défaut de la moindre contestation des instances représentatives du personnel et rapportait la preuve par les mentions figurant sur les bulletins de salaire de Monsieur X... du paiement de la contrepartie de nombreuses heures supplémentaires qu'il avait effectivement effectuées depuis son embauche au moyen de 57 jours de repos compensateurs en 2005 et 2006, soit 11 semaines et 2 jours et encore 4 jours en avril 2007 ; qu'en se bornant dès lors à retenir que la société Directique n'avait pas valablement pu remplacer le paiement de tout ou partie des heures supplémentaires accomplies par Monsieur X... par l'octroi d'un repos compensateur équivalent, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Directique n'était pas fondée, en application de l'article L.212-5 II du code du travail, à remplacer le paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur, à défaut de la moindre contestation des instances représentatives du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.212-5 II du code du travail, dans sa rédaction alors applicable.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Directique à payer à Monsieur Hakim X... la somme de 9.300 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et dit que cette somme porterait intérêts à compter de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QUE, sur le travail dissimulé, selon les dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur: 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche; 2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie; 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales » ; or, en l'espèce, il est établi que la société Directique qui était parfaitement renseignée sur le nombre d'heures de travail réellement accompli par son salarié astreint à remplir des relevés d'heures hebdomadaires, s'est intentionnellement soustrait à son obligation de les mentionner sur les bulletins de paie délivrés à Monsieur X..., les heures supplémentaires travaillées ayant donné lieu à indemnité ou repos compensateurs dans des conditions indéterminées en dehors des possibilités ouvertes par la loi en vigueur au cours de la période d'emploi du salarié ; Monsieur X... est donc fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L.8223-1 du code du travail qui prévoit qu' « en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire » ; en conséquence, il y a lieu de condamner la société Directique à payer à Monsieur X... la somme de 9.300 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé suivi d'une rupture de la relation de travail ;
ALORS, D'UNE PART, QU'une convention ou un accord collectif de travail étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que de leurs majorations par un repos compensateur équivalent ; que, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, ce remplacement est subordonné, en l'absence de convention ou d'accord collectif de travail étendu, à l'absence d'opposition, lorsqu'ils existent, du comité d'entreprise ou des délégués du personnel; que la société Directique faisait valoir que le repos compensateur mis en place au sein de la société était licite au regard de l'article L.212-5 II du code du travail applicable à l'époque, à défaut de la moindre contestation des instances représentatives du personnel et rapportait la preuve par les mentions figurant sur les bulletins de salaire de Monsieur X... du paiement de la contrepartie de nombreuses heures supplémentaires qu'il avait effectivement effectuées depuis son embauche au moyen de 57 jours de repos compensateurs en 2005 et 2006, soit 11 semaines et 2 jours et encore 4 jours en avril 2007 ; qu'en se bornant dès lors à retenir que la société Directique qui était parfaitement renseignée sur le nombre d'heures de travail réellement accompli par son salarié astreint à remplir des relevés d'heures hebdomadaires, s'était intentionnellement soustrait à son obligation de les mentionner sur les bulletins de paie délivrés à Monsieur X..., les heures supplémentaires travaillées ayant donné lieu à indemnité ou repos compensateurs dans des conditions indéterminées en dehors des possibilités ouvertes par la loi en vigueur au cours de la période d'emploi du salarié, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Directique, en l'absence d'opposition des représentants du personnel, ne pouvait pas mettre en place un repos compensateur de remplacement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.212-5 II du code du travail, dans sa rédaction alors applicable ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisé que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la société Directique faisait valoir que l'intention de l'employeur de se soustraire aux obligations posées par l'article L.8221-5 du code du travail, qui n'était pas même alléguée par le salarié, faisait manifestement défaut (conclusions d'appel de la société Directique p.9) ; qu'en affirmant que la société Directique s'était intentionnellement soustrait à son obligation de mentionner toutes les heures de travail réellement accomplies par Monsieur X... sur ses bulletins de paie, sans caractériser cette intention de dissimulation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.8221-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-28430
Date de la décision : 17/09/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 31 octobre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 sep. 2015, pourvoi n°13-28430


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.28430
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