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09/09/2015 | FRANCE | N°14-19196

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 septembre 2015, 14-19196


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 8 avril 2014), que M. X..., qui avait été remis à l'Aide sociale à l'enfance par une décision d'un juge des enfants du 20 avril 1998, a souscrit le 28 février 2000 une déclaration de nationalité française sur le fondement de l'article 21-12 du code civil qui a été enregistrée le 28 mars suivant; que le ministère public l'a assigné en annulation d'enregistrement de sa déclaration de nationalité française ;
Attendu que M. X...

fait grief à l'arrêt d'annuler l'enregistrement de la déclaration de la nationa...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 8 avril 2014), que M. X..., qui avait été remis à l'Aide sociale à l'enfance par une décision d'un juge des enfants du 20 avril 1998, a souscrit le 28 février 2000 une déclaration de nationalité française sur le fondement de l'article 21-12 du code civil qui a été enregistrée le 28 mars suivant; que le ministère public l'a assigné en annulation d'enregistrement de sa déclaration de nationalité française ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'annuler l'enregistrement de la déclaration de la nationalité française, de constater son extranéité et d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil, alors, selon le moyen :
1°/ que le seul fait d'avoir été confié au service de l'aide sociale française depuis au moins trois années suffit à justifier l'octroi de la nationalité française en application de l'article 21-12 du code civil ; qu'une demande de nationalité fondée sur un jugement ordonnant qu'un mineur soit confié aux services de l'aide sociale à l'enfance qui a été enregistrée ne peut être ultérieurement remise en cause au motif que l'acte de l'état civil remis au juge ayant confié l'intéressé aux dits services serait un faux dès lors que le jugement n'a pas été contesté et est devenu irrévocable ; qu'en se fondant sur la fausseté de l'acte d'état civil de M. X... pour admettre la contestation de l'enregistrement de sa déclaration de nationalité, tandis que celui-ci a été remis au service de l'aide sociale par un jugement du tribunal pour enfants de Paris du 20 avril 1998 devenu irrévocable, de sorte que l'enregistrement de déclaration de nationalité ne pouvait plus être contesté en raison de la fausseté de l'acte de l'état civil de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 21-12 du code civil, dans sa version applicable au litige, antérieure à la loi du 27 novembre 2003, ensemble l'article 26-4 du même code ;
1°/ que la contestation de l'enregistrement d'une déclaration de nationalité n'est possible qu'en cas de fraude ou de mensonge, ce qui suppose un acte volontaire de la part de son auteur ; qu'en jugeant que la fraude était caractérisée sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si monsieur X... avait connaissance du fait que l'acte présenté était faux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4 du code civil ;
3°/ que M. X... faisait valoir qu'un passeport lui avait été délivré le 14 juin 1999 par les autorités chinoises, qui mentionnait le 18 août 1982 comme date de naissance ; qu'il ajoutait qu'un tel passeport n'avait pu être délivré qu'après contrôle par les autorités chinoises de son identité ; qu'en jugeant que l'état civil de M. X... était inconnu et qu'il ne démontrait pas être encore mineur au moment de sa déclaration de nationalité, pour en déduire que l'enregistrement de cette déclaration devait être annulé et constater son extranéité, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que toute personne a droit au respect de sa vie privée ; qu'il appartient à l'Etat de s'assurer que l'ingérence constituée par la perte de nationalité est prévue par la loi et proportionnée au but recherché ; qu'en retenant que l'acte d'état civil de M. X... était un faux, d'où il résulte qu'il n'a plus alors de nationalité ni d'identité, tout en estimant que l'atteinte à sa vie privée n'était pas disproportionnée, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 25 du code civil et la convention de New York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans être tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter ni d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, la cour d'appel a, par une décision motivée, estimé que M. X... ne prouvait ni son état civil ni l'existence de conséquences disproportionnées consécutives à la perte de la nationalité qu'il revendiquait ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir annulé l'enregistrement de la déclaration de la nationalité française souscrite par monsieur X... le 28 février 2000 devant le juge du tribunal d'instance du 15ème arrondissement de Paris, d'avoir constaté l'extranéité de monsieur X... et d'avoir ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la cour constate que le ministère public ne pouvait agir avant d'être informé des éléments permettant de penser à une fraude, soit avant sa saisine du 17 novembre 2009 ; que cette date constitue le point de départ de la prescription, et non pas le 2 février 2009 ainsi que retenu par le premier juge, date correspondant à la réponse du Bureau des affaires étrangères de Chine ayant constaté le faux ; qu'en toute hypothèse, l'action ayant été engagée par le ministère public selon assignation du 17 mars 2010, aucune prescription n'est encourue ; que l'appelant fait référence aux dispositions de l'article 47 du code civil français et s'en prévaut ; que cependant, si cet article donne foi aux actes de l'état civil des étrangers faits en pays étranger dans les formes usitées dans ce pays, c'est à la restriction que des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même n'établissent pas que cet acte est irrégulier, falsifié, ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ; qu'en l'espèce, l'acte d'état civil fondant les prétentions de monsieur X... a été vérifié auprès des autorités chinoises qui ont affirmé sa fausseté ; qu'il ne prouve donc pas son état civil ; qu'il ne prouve pas davantage que le retrait de son usage de la nationalité française aurait des conséquences disproportionnées pour lui et sa famille, notamment parce qu'il ne prouve ni n'allègue que la nationalité chinoise lui fût refusée pour une autre cause que son identité réelle non déclarée aux autorités françaises ; que par ailleurs, il ne prouve pas ni n'allègue non plus, que la législation française sur la situation en France des étrangers aurait pour lui et sa famille des conséquences disproportionnées ;que pour chacune de ces raisons, son objection ne peut être reçue ; qu'une nationalité ne peut être fondée sur un état civil inconnu ; qu'il n'y a aucune contravention aux dispositions européennes ;
Et AUX MOTIFS ADOPTES QUE force est de constater que les autorités chinoises compétentes en la matière ont indiqué sans la moindre ambiguïté que l'acte de naissance produit par monsieur X... était faux ; que cette réponse officielle justifiait parfaitement l'action en contestation de nationalité ; que dans le cadre de cette procédure, l'intéressé n'a pas expliqué les conditions dans lesquelles il s'était procuré l'acte de naissance litigieux ; qu'il n'a pas davantage justifié d'un acte d'état civil en bonne et due forme permettant de remettre en cause la position du Bureau des Affaires étrangères de la province du Zhejiang et surtout de démontrer qu'il était effectivement encore mineur au moment de sa déclaration de nationalité ; que la fraude étant manifeste, l'enregistrement de la déclaration souscrite par monsieur X... doit être annulée quels que soient les efforts d'intégration de l'intéressé ;
1°) ALORS QUE le seul fait d'avoir été confié au service de l'aide sociale française depuis au moins trois années suffit à justifier l'octroi de la nationalité française en application de l'article 21-12 du code civil ; qu'une demande de nationalité fondée sur un jugement ordonnant qu'un mineur soit confié aux services de l'aide sociale à l'enfance qui a été enregistrée ne peut être ultérieurement remise en cause au motif que l'acte de l'état civil remis au juge ayant confié l'intéressé auxdits services serait un faux dès lors que le jugement n'a pas été contesté et est devenu irrévocable ; qu'en se fondant sur la fausseté de l'acte d'état civil de monsieur X... pour admettre la contestation de l'enregistrement de sa déclaration de nationalité, tandis que celui-ci a été remis au service de l'aide sociale par un jugement du tribunal pour enfants de Paris du 20 avril 1998 devenu irrévocable, de sorte que l'enregistrement de déclaration de nationalité ne pouvait plus être contesté en raison de la fausseté de l'acte de l'état civil de monsieur X..., la cour d'appel a violé l'article 21-12 du code civil, dans sa version applicable au litige, antérieure à la loi du 27 novembre 2003, ensemble l'article 26-4 du même code ;
2°) ALORS QUE la contestation de l'enregistrement d'une déclaration de nationalité n'est possible qu'en cas de fraude ou de mensonge, ce qui suppose un acte volontaire de la part de son auteur ; qu'en jugeant que la fraude était caractérisée sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si monsieur X... avait connaissance du fait que l'acte présenté était faux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26-4 du code civil ;
3°) ALORS QUE monsieur X... faisait valoir qu'un passeport lui avait été délivré le 14 juin 1999 par les autorités chinoises, qui mentionnait le 18 août 1982 comme date de naissance ; qu'il ajoutait qu'un tel passeport n'avait pu être délivré qu'après contrôle par les autorités chinoises de son identité (conclusions signifiées le 20 février 2013, p. 11 § 3 et p. 12 § 1 à 3) ; qu'en jugeant que l'état civil de monsieur X... était inconnu et qu'il ne démontrait pas être encore mineur au moment de sa déclaration de nationalité, pour en déduire que l'enregistrement de cette déclaration devait être annulé et constater son extranéité, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE toute personne a droit au respect de sa vie privée ; qu'il appartient à l'Etat de s'assurer que l'ingérence constituée par la perte de nationalité est prévue par la loi et proportionnée au but recherché ; qu'en retenant que l'acte d'état civil de monsieur X... était un faux, d'où il résulte qu'il n'a plus alors de nationalité ni d'identité, tout en estimant que l'atteinte à sa vie privée n'était pas disproportionnée, la cour d'appel a violé l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 25 du code civil et la convention de New York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-19196
Date de la décision : 09/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 08 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 sep. 2015, pourvoi n°14-19196


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.19196
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