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09/07/2015 | FRANCE | N°14-22258

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 09 juillet 2015, 14-22258


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 5 juin 2014), que Mme X... et M. Y..., ostéopathes, ont signé, le 31 janvier 2007, un contrat de collaboration, une convention instituant une société civile de moyens (la SCM) et un avenant au bail des locaux servant à l'exercice de leur activité professionnelle ; qu'estimant que Mme X... n'avait pas respecté les engagements pris au titre du contrat de collaboration, en contrepartie desquels il lui avait payé la somme de 34 500 euros, M. Y... l'a assignée en rest

itution de cette somme et indemnisation de divers préjudices ; qu'...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 5 juin 2014), que Mme X... et M. Y..., ostéopathes, ont signé, le 31 janvier 2007, un contrat de collaboration, une convention instituant une société civile de moyens (la SCM) et un avenant au bail des locaux servant à l'exercice de leur activité professionnelle ; qu'estimant que Mme X... n'avait pas respecté les engagements pris au titre du contrat de collaboration, en contrepartie desquels il lui avait payé la somme de 34 500 euros, M. Y... l'a assignée en restitution de cette somme et indemnisation de divers préjudices ; qu'à titre reconventionnel, alléguant que M. Y... s'était soustrait aux tâches lui incombant au titre du fonctionnement de la SCM, Mme X... a sollicité l'allocation de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'application de la clause compromissoire insérée dans le contrat instituant la SCM, s'agissant des demandes de M. Y... au titre de la convention de collaboration, alors, selon le moyen, que lorsque chaque contrat est la condition de l'existence de l'autre, il en résulte une indivisibilité ayant comme conséquence nécessaire que la clause compromissoire insérée dans l'un des contrats s'étend aux litiges nés à l'occasion de l'exécution de l'autre ; qu'en refusant de faire application de la clause compromissoire insérée dans le contrat portant création de la société civile de moyens aux demandes de M. Y... fondées sur le contrat de collaboration, bien qu'il fût constant que ces deux contrats avaient été passés le même jour devant le même notaire et que les demandes de M. Y... étaient fondées sur l'organisation d'un secrétariat et la gestion des demandes de rendez-vous qui, par définition, rentraient dans le fonctionnement de la société civile de moyens, la cour d'appel a violé les articles 1218 et 2061 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la convention portant création de la SCM stipule que la clause compromissoire qu'elle contient n'est applicable qu'à ce seul contrat et que ni la convention de collaboration ni l'avenant au contrat de bail professionnel ne contiennent aucune clause de ce type ; qu'il en résulte que la cour d'appel, ayant constaté l'absence d'indivisibilité entre les trois conventions, a écarté à bon droit l'application de la clause compromissoire au litige relatif à l'exécution du contrat de collaboration ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire que le contrat de collaboration a été rompu avant terme par sa faute et de la condamner à payer à M. Y... la somme de 34 500 euros en restitution de la somme versée en vertu de ce contrat de collaboration, alors, selon le moyen :
1°/ que la société civile de moyens constituée entre Mme X... et M. Y... avait, comme la convention de collaboration conclue le même jour, pour objectif de faciliter l'exercice de l'activité professionnelle de M. Y... et l'article 2 des statuts stipulait que la société avait la faculté de conclure, modifier ou résilier les contrats se rapportant tant au personnel qu'au matériel nécessaire à la réalisation de l'objet social, en déterminer les conditions financières et contractuelles ; qu'en ayant considéré que l'acceptation par M. Y..., lors d'une assemblée générale de la société civile de moyens, de la résolution adoptant l'ouverture de deux lignes téléphoniques différentes ne pouvait constituer une acceptation sans réserves de la modification de la convention de collaboration sur la tenue d'un secrétariat commun, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire des contrats et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que la charge de la preuve d'un manquement contractuel incombe à celui qui s'en prévaut ; que la cour d'appel, qui a constaté que Mme X... avait démontré avoir donné des instructions pour que l'opérateur téléphonique Call@service suive la répartition des rendez-vous prévue, mais lui a reproché de ne pas avoir démontré que cette société disposait du planning de M. Y..., a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
3°/ que la cour d'appel, qui n'a pas expliqué en quoi le remplacement de l'unique assistant par trois assistants avait modifié « l'équilibre de la subsidiarité prévue entre les deux ostéopathes, celle-ci pouvant nécessairement se faire remplacer de manière plus rapide et plus étendue dans le temps », ni en quoi consistait cet « équilibre de la subsidiarité » a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil ;
4°/ que lorsque les conventions sont unies par un lien d'indivisibilité, un cas de force majeure ayant empêché l'exécution de l'une d'elles exonère aussi la partie défaillante de sa responsabilité dans la mauvaise exécution de l'autre ; qu'en ayant considéré par principe que les difficultés rencontrées entre les associés de la société civile de moyens ne pouvaient permettre à Mme X... de s'exonérer des engagements qu'elle avait pris dans la convention de collaboration, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces conventions n'étaient pas indivisibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, qu'aucun secrétariat commun n'a été mis en place, comme le prévoyait le contrat de collaboration, que Mme X... a pris l'initiative, en mars 2009, de séparer les lignes téléphoniques des deux ostéopathes et que l'acceptation de cette initiative par M. Y..., lors d'une assemblée générale de la SCM, ne suffit pas à démontrer qu'il ait consenti à la modification des obligations résultant du contrat de collaboration, dans un contexte, marqué par des tensions apparues entre les deux praticiens, où celui-ci était essentiellement préoccupé de pouvoir être joint par sa clientèle; qu'ensuite, l'arrêt énonce que Mme X... a mis en place un secrétariat téléphonique à distance, que même si elle avait donné des instructions pour que l'opérateur suive la répartition prévue des rendez-vous, cet opérateur n'avait accès qu'à l'ordinateur serveur de celle-ci et il n'est pas justifié qu'il disposait de l'emploi du temps de M. Y..., qui n'avait aucune possibilité de vérifier la bonne exécution du contrat de collaboration et qui n'avait plus accès au logiciel de gestion de clientèle et de rendez-vous, ni à internet, son accès au réseau informatique ayant été supprimé; qu'enfin, l'arrêt retient que Mme X... a remplacé l'assistant commun par trois assistants personnels, davantage présents au sein du cabinet, rendant ses remplacements plus faciles et plus fréquents, ce qui modifiait l'équilibre prévu entre les deux ostéopathes pour assurer à titre subsidiaire la continuité de leur activité; qu'analysant ainsi souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel en a déduit que Mme X... avait, par son seul fait, rompu le contrat de collaboration conclu avec M. Y... et qu'elle devait lui restituer la somme payée par lui en contrepartie des avantages attendus de cette convention ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir écarté la fin de non-recevoir tirée de l'application de la clause compromissoire insérée dans le contrat instituant la société civile de moyens, s'agissant des demandes de M. Y... au titre de la convention de collaboration ;
Aux motifs que la convention portant création de la société civile de moyens contenait une clause compromissoire dont il était explicitement précisé qu'elle n'était applicable qu'à ce seul contrat, l'acte authentique précisant que « les parties, du fait de leur soumission à la présente clause, renonçaient à toute action devant les tribunaux de droit commun relativement au présent contrat, ainsi qu'à former appel de la sentence arbitrale » ; que parallèlement, il ressortait de la convention de collaboration et de l'avenant au contrat de bail professionnel, signés le même jour, par les mêmes parties et devant le même notaire, qu'ils ne contenaient aucune clause de ce type, ni aucune clause renvoyant à la convention soumise à la clause compromissoire ; que Mme X... ne pouvait en conséquence étendre l'application de la clause compromissoire à la convention de collaboration, sur laquelle la demande principale de M. Y... était exclusivement fondée, pour prétendre que la cour ne pourrait pas connaître de l'ensemble du litige ;
Alors que lorsque chaque contrat est la condition de l'existence de l'autre, il en résulte une indivisibilité ayant comme conséquence nécessaire que la clause compromissoire insérée dans l'un des contrats s'étend aux litiges nés à l'occasion de l'exécution de l'autre ; qu'en refusant de faire application de la clause compromissoire insérée dans le contrat portant création de la société civile de moyens aux demandes de M. Y... fondées sur le contrat de collaboration, bien qu'il fût constant que ces deux contrats avaient été passés le même jour devant le même notaire et que les demandes de M. Y... étaient fondées sur l'organisation d'un secrétariat et la gestion des demandes de rendez-vous qui, par définition, rentraient dans le fonctionnement de la société civile de moyens, la cour d'appel a violé les articles 1218 et 2061 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de collaboration avait été rompu avant terme du fait fautif de Mme X... et de l'avoir condamnée à payer à M. Y... la somme de 34 500 euros en restitution de la somme versée en vertu de ce contrat de collaboration ;
Aux motifs que Mme X... devait, aux termes du contrat, favoriser l'exercice professionnel de M. Y... et la constitution de sa propre clientèle par le biais d'avantages déterminés en contrepartie d'une somme de 34 500 euros ; que M. Y... avait exécuté son obligation de paiement ; que M. Y... contestait le fait que certains avantages que devait offrir Mme X... sur la période de trois ans prévue au contrat aient été respectés ; qu'il était expressément prévu qu'une secrétaire devait opérer la réception des appels et ainsi procéder à la répartition des rendez-vous telle que prévue à la convention ; qu'aucun secrétariat n'avait été mis en place entre le 31 janvier 2007 et le mois de mars 2009, date à laquelle Mme X... avait pris l'initiative, à la suite de tensions entre les parties, de séparer les lignes téléphoniques des deux ostéopathes et de souscrire sur sa seule ligne un contrat de secrétariat téléphonique ; que le seul fait qu'il n'existât pas de secrétariat avant la conclusion de la convention et que ce fait fût connu de M. Y... était sans emport sur une stipulation claire du contrat rédigé par un notaire à laquelle Mme X... était tenue ; que si elle avait maintenu le fonctionnement antérieur du cabinet entre le 31 janvier 2007 et le mois de mars 2009, sans contestation de la part de M. Y..., elle avait cependant modifié à cette date les termes de la convention prévoyant un secrétariat commun en proposant la suppression du numéro commun et l'ouverture de deux lignes distinctes et en mettant en place un secrétariat à distance sur sa seule ligne ; que le fait que M. Y... ait accepté en assemblée générale de la société civile de moyens la résolution adoptant l'ouverture de deux lignes différentes ne saurait constituer une acceptation sans réserve de la modification de la convention de collaboration sur la tenue d'un secrétariat commun ; qu'en effet, si Mme X... apportait la démonstration qu'elle avait donné des instructions pour que l'opérateur téléphonique suive la répartition des rendez-vous prévus, le service téléphonique n'était pas commun dès lors qu'il n'était pas justifié que l'opérateur avait le planning de M. Y... à sa disposition et que ce dernier n'avait pas la possibilité de vérifier par lui-même la bonne exécution de la convention ; qu'il résultait en outre de l'attestation de la société Amplitude Informatique, intervenue en urgence fin 2009, que c'était à partir de l'ordinateur serveur de Mme X... que l'accès au réseau informatique avait été supprimé pour le poste de M. Y..., laissant ce dernier sans possibilité d'accès à ses données ; que si Mme X... indiquait que son poste informatique était vétuste et qu'elle avait demandé à M. Y... de s'entretenir de son changement, elle situait le remplacement de son ordinateur au début de l'année 2010, alors que la rupture d'accès était plus ancienne et qu'elle n'expliquait pas en quoi elle était indépendante de son fait ; qu'enfin, Mme X... ne contestait pas avoir changé d'assistant en cours de contrat de collaboration en se séparant de leur assistante commune et en prenant trois assistants pour la remplacer les mercredi, jeudi, vendredi et samedi matin ; que par ce changement de fonctionnement, Mme X... avait contrevenu au contrat de collaboration au niveau du nombre d'assistants et des plages horaires de leurs interventions ; que cette modification apportée avait nécessairement modifié l'équilibre de la subsidiarité prévue entre les deux ostéopathes, celle-ci pouvant nécessairement se faire remplacer plus rapidement et de manière plus étendue dans le temps ; que les difficultés pour trouver un assistant unique avancées par Mme X... apparaissaient sans emport dès lors qu'elle avait unilatéralement étendu les jours d'intervention ; que les développements de Mme X... sur les difficultés rencontrées entre les associés de la société civile de moyens ne pouvaient lui permettre de s'exonérer des engagements qu'elle avait pris dans le cadre de la convention de collaboration ; qu'en prenant la décision de séparer les lignes téléphoniques en mars 2009 pour installer un service de secrétariat sur sa seule ligne, réduisant ainsi l'accès de M. Y... à un secrétariat commun, en privant ce dernier d'accès au logiciel et aux données de rendez-vous fin 2009 et en modifiant, sans avenant, la clause relative au nombre de ses assistants et aux plages horaires de leur intervention, Mme X... avait rompu la collaboration prévue avec M. Y... et dénaturé les avantages qu'elle était contractuellement tenus de lui apporter pendant trois ans ;
Alors 1°) que la société civile de moyens constituée entre Mme X... et M. Y... avait, comme la convention de collaboration conclue le même jour, pour objectif de faciliter l'exercice de l'activité professionnelle de M. Y... et l'article 2 des statuts stipulait que la société avait la faculté de conclure, modifier ou résilier les contrats se rapportant tant au personnel qu'au matériel nécessaire à la réalisation de l'objet social, en déterminer les conditions financières et contractuelles ; qu'en ayant considéré que l'acceptation par M. Y..., lors d'une assemblée générale de la société civile de moyens, de la résolution adoptant l'ouverture de deux lignes téléphoniques différentes ne pouvait constituer une acceptation sans réserves de la modification de la convention de collaboration sur la tenue d'un secrétariat commun, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire des contrats et violé l'article 1134 du code civil ;
Alors 2°) que la charge de la preuve d'un manquement contractuel incombe à celui qui s'en prévaut ; que la cour d'appel, qui a constaté que Mme X... avait démontré avoir donné des instructions pour que l'opérateur téléphonique Call@service suive la répartition des rendez-vous prévue, mais lui a reproché de ne pas avoir démontré que cette société disposait du planning de M. Y..., a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
Alors 3°) que la cour d'appel, qui n'a pas expliqué en quoi le remplacement de l'unique assistant par trois assistants avait modifié « l'équilibre de la subsidiarité prévue entre les deux ostéopathes, celle-ci pouvant nécessairement se faire remplacer de manière plus rapide et plus étendue dans le temps », ni en quoi consistait cet « équilibre de la subsidiarité » a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil ;
Alors 4°) que lorsque les conventions sont unies par un lien d'indivisibilité, un cas de force majeure ayant empêché l'exécution de l'une d'elles exonère aussi la partie défaillante de sa responsabilité dans la mauvaise exécution de l'autre ; qu'en ayant considéré par principe que les difficultés rencontrées entre les associés de la société civile de moyens ne pouvaient permettre à Mme X... de s'exonérer des engagements qu'elle avait pris dans la convention de collaboration, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces conventions n'étaient pas indivisibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1218 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-22258
Date de la décision : 09/07/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 05 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 09 jui. 2015, pourvoi n°14-22258


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.22258
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