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08/07/2015 | FRANCE | N°14-10356

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2015, 14-10356


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 décembre 2013), que M. X... a été engagé à compter du 21 septembre 1992 par la société Monoprix exploitation en qualité d'employé libre-service ; qu'à compter du 1er juin 2010, il a été nommé chef de projet au sein de la direction des ressources humaines ; que, par lettre du 5 décembre 2011, la société lui a proposé un poste de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services qu'il a refusé ; qu'une nouvelle pro

position lui a été faite par lettre du 10 janvier 2012 sur un poste de manager ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 décembre 2013), que M. X... a été engagé à compter du 21 septembre 1992 par la société Monoprix exploitation en qualité d'employé libre-service ; qu'à compter du 1er juin 2010, il a été nommé chef de projet au sein de la direction des ressources humaines ; que, par lettre du 5 décembre 2011, la société lui a proposé un poste de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services qu'il a refusé ; qu'une nouvelle proposition lui a été faite par lettre du 10 janvier 2012 sur un poste de manager de région alimentaire que le salarié a également refusée ; qu'il a été licencié par lettre du 6 mars 2012 ; que contestant son licenciement, l'intéressé a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié et la circonstance que la tâche donnée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise aucune modification du contrat de travail ; qu'en s'étant bornée à constater qu'il ne pouvait être sérieusement contesté que les « missions » proposées en qualité de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et de manager de région alimentaire étaient nécessairement « différentes » de celles occupées sur le poste de chef de projet Monop Street, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les missions et responsabilités étaient d'un niveau inférieur et impliquaient une rétrogradation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
2°/ que le simple changement de supérieur hiérarchique, sans qu'il soit porté atteinte à la rémunération et à la qualification du salarié, ne constitue par une modification du contrat de travail ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance que M. X... se voyait soumis à une « nouvelle organisation des équipes Monop » et à un « autre rattachement hiérarchique », inopérante pour caractériser une modification du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en ayant énoncé que l'employeur reconnaissait dans la lettre de licenciement que les propositions faites au salarié s'inscrivaient dans le cadre des « parcours d'évolution proposés aux cadres de Monoprix », qu'il se trouvait confronté au constat que son salarié refusait toute évolution normale de ses responsabilités et de ses fonctions, et admettait implicitement que ces propositions de postes induisaient une « modification unilatérale des fonctions réellement exercées qui ne pouvait dès lors être imposée au salarié », la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement indiquant par ailleurs au salarié que « vous occupez au sein de la société un poste de chef de projet, poste par nature évolutif puisque lié au déploiement et à la mise en oeuvre des projets dans l'entreprise. Il découle donc de l'essence même de votre poste le fait qu'il vous soit proposé une évolution du portefeuille des projets gérés » et invoquant son « refus réitéré d'une évolution qui découle pourtant de l'essence même de votre poste de travail » ; qu'elle a ainsi méconnu le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
4°/ qu'en n'ayant pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée par la société Monoprix tant dans ses conclusions d'appel que dans la lettre de licenciement, si le poste de chef de projet de M. X..., par nature évolutif puisque lié au déploiement et à la mise en oeuvre des projets dans l'entreprise, n'impliquait pas, par essence, une évolution du portefeuille des projets gérés, le salarié étant amené à gérer différents projets, ce dont il résultait que lui confier un nouveau projet ne caractérisait en tant que tel aucune modification du contrat de travail mais sa simple exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a relevé, hors toute dénaturation et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, que les missions proposées au salarié en qualité de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et de manager de région alimentaire étaient nécessairement différentes de celles occupées sur le poste de chef de projet dès lors qu'il était soumis à une nouvelle organisation et à un autre rattachement hiérarchique caractérisant ainsi une modification du contrat de travail, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Monoprix exploitation aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Monoprix exploitation

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que M. X... soutient que les propositions qui lui ont été faites emportaient modification de son contrat de travail qu'il était en droit de refuser, que ces propositions de mutation ne correspondaient nullement à une évolution normale de son poste mais à un véritable changement de ses fonctions et de sa rémunération variable impliquant une modification contractuelle soumise à l'accord préalable du salarié ; que la société Monoprix réplique que la proposition faite au salarié ne constituait pas une quelconque rétrogradation de ses fonctions, la nature et le contenu des responsabilités n'étant pas affectées ; que si la rémunération et l'intitulé des fonctions de M. X... n'étaient pas affectées par les propositions de son employeur, il ne peut être sérieusement contesté que les missions proposées en qualité de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et de manager de région alimentaire étaient nécessairement différentes de celles qu'il occupait sur le poste de chef de projet Monop Street, dès lors qu'il se voyait soumis à une nouvelle organisation des équipes Monop, à un autre rattachement hiérarchique ; que l'employeur reconnaissait notamment dans sa lettre de licenciement que ces propositions s'inscrivaient dans le cadre de « parcours d'évolution proposé aux cadres de Monoprix » qu'il se trouvait confronté au constat que son salarié continuait de refuser toute évolution normale de ses responsabilités et de ses fonctions, admettant implicitement que ces propositions de postes induisaient une modification unilatérale des fonctions réellement exercées qui ne pouvait dès lors être imposée au salarié ;
Alors que 1°) l'employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction, peut changer les conditions de travail d'un salarié et la circonstance que la tâche donnée soit différente de celle qu'il effectuait antérieurement, dès l'instant où elle correspond à sa qualification, ne caractérise aucune modification du contrat de travail ; qu'en s'étant bornée à constater qu'il ne pouvait être sérieusement contesté que les « missions » proposées en qualité de chef de projet livraison à domicile et développement nouveaux services et de manager de région alimentaire étaient nécessairement « différentes » de celles occupées sur le poste de chef de projet Monop Street, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les missions et responsabilités étaient d'un niveau inférieur et impliquaient une rétrogradation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Alors que 2°) le simple changement de supérieur hiérarchique, sans qu'il soit porté atteinte à la rémunération et à la qualification du salarié, ne constitue par une modification du contrat de travail ; qu'en s'étant fondée sur la circonstance que M. X... se voyait soumis à une « nouvelle organisation des équipes Monop » et à un « autre rattachement hiérarchique », inopérante pour caractériser une modification du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Alors que 3°) le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en ayant énoncé que l'employeur reconnaissait dans la lettre de licenciement que les propositions faites au salarié s'inscrivaient dans le cadre des « parcours d'évolution proposés aux cadres de Monoprix », qu'il se trouvait confronté au constat que son salarié refusait toute évolution normale de ses responsabilités et de ses fonctions, et admettait implicitement que ces propositions de postes induisaient une « modification unilatérale des fonctions réellement exercées qui ne pouvait dès lors être imposée au salarié », la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement indiquant par ailleurs au salarié que « vous occupez au sein de la société un poste de chef de projet, poste par nature évolutif puisque lié au déploiement et à la mise en oeuvre des projets dans l'entreprise. Il découle donc de l'essence même de votre poste le fait qu'il vous soit proposé une évolution du portefeuille des projets gérés » et invoquant son « refus réitéré d'une évolution qui découle pourtant de l'essence même de votre poste de travail » ; qu'elle a ainsi méconnu le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;
Alors que 4°) en n'ayant pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée par la société Monoprix tant dans ses conclusions d'appel (p. 7) que dans la lettre de licenciement, si le poste de chef de projet de M. X..., par nature évolutif puisque lié au déploiement et à la mise en oeuvre des projets dans l'entreprise, n'impliquait pas, par essence, une évolution du portefeuille des projets gérés, le salarié étant amené à gérer différents projets, ce dont il résultait que lui confier un nouveau projet ne caractérisait en tant que tel aucune modification du contrat de travail mais sa simple exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-10356
Date de la décision : 08/07/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 10 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2015, pourvoi n°14-10356


Composition du Tribunal
Président : M. Mallard (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.10356
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